Ce fut une journée en tous points hors du commun. Les députés insoumis de l’Assemblée nationale et du Parlement européen se retrouvaient ensemble à Bruxelles.
Il s’agissait de fonder un inter groupe. C’est un exercice radicalement nouveau. Il n’en existe aucune équivalence dans le passé ni dans le présent.
Il ne s’agit pas seulement d’une réunion épisodique mais d’une construction politique permanente. Nous avons donc discuté des conditions de travail commun au quotidien. Ce n’est pas simple. La concordance des calendriers, la connexion des équipes, rien n’est simple, à vrai dire. Mais l’idée est de vivre concrètement l’internationalisme qui est au fondement de notre approche politique. Car la délégation française de « La France insoumise » intègre à Strasbourg et Bruxelles un groupe politique large présent dans 14 pays de l’Union européenne, la GUE. Il s’agira donc autant d’intégrer le travail des députés français mais aussi le travail du large groupe européen, dans la mesure du possible. J’en profite pour dire que selon une habitude dorénavant bien ancrée je m’attends à voir d’autres formations politiques faire de même et faire comme si elles ne nous empruntaient pas l’idée.
Dans l’immédiat notre réunion n’a pas été très longue. On a défini des pistes de travail et c’est déjà beaucoup car les équipes doivent à présent organiser les moyens techniques concrets pour faire vivre ce qui a été convenu dans les grandes lignes. Mais ça reste une première. Dans ma vie politique c’est évidemment un évènement. Je n’ai jamais renoncé à la formation d’un cadre de travail international stable. J’y ai travaillé de toutes les façons possibles depuis plus de dix ans. Je pense approcher du but. Les nouvelles conditions résultant de l’existence de la France insoumise, de mon score à l’élection présidentielle et de nos outils parlementaires, accélèrent les rythmes d’accomplissement.
Je ne peux m’empêcher de comparer aux conditions dans lesquelles j’étais revenu au parlement européen à l’issue de la précédente élection en 2014. Le Front de gauche était à l’agonie, asphyxié dans les stratégies d’alliance à géométrie variable que le PCF avait imposé à toute notre coalition. L’accord sur la composition des listes avait été trahi sur le terrain. Et nous venions de subir un sévère recul électoral qui nous avait vu passer de plus de 11 % à l’élection présidentielle de 2012 à tout juste 6%. Déjà à l’époque certaines voix inspirées proposaient la nécessité d’un « bing bang de la gauche » et diverses officine gauchistes prévoyaient la tenue d’improbables assises de refondation ou je ne sais quel de ces refrains répétitifs des mauvais jours.
Aujourd’hui nous sommes de nouveau en difficulté et placés sous le coulis de cette bouche d’égout qu’est la rubrique du « Monde » vouée aux provocations contre notre mouvement. Depuis des mois, sans originalité, elle charrie, sans tris ni vérifications, tous les écoulements que la scène égotique fait ruisseler. Il faut le supporter. L’importance de tout cela reste ce qu’était celle des précédents épisodes. Des « maroniers » de saison. L’occasion pour un rubricard de signer quelque chose pour justifier sa paye sans être obligé de travailler vraiment.
Dans ce contexte, la réunion de Bruxelles, apaisée et amusée, conquérante et travailleuse fonctionna pour moi comme une respiration. Un moment de tranquillité constructive comme aux jours heureux des lendemains de 2017 quand chacun faisait attention aux autres et au bien commun. Après la réunion et le pot pris ensemble sur la place du Luxembourg, on courut chacun à son agenda. Le mien prévoyait de rester sur place pour rencontrer Rafael Correa, l’ancien Président de l’Equateur, faire une interview pour un média latino en ligne puis avoir une séance de travail avec Younous Omarjee à propos des résultats dans toute l’Europe. Deux conversations grand angle dont je parlerai dans mon prochain post. Ce vendredi matin je suis de retour dans le train privé Thalis qui n’a eu que vingt minutes de retard au départ et seulement deux arrêts machine en route. Mieux qu’avant-hier avec ses cinquante minutes de retard, sa fusion de deux départs et ses centaines de places réservées annulées. Ce qui prouve la supériorité du privé qui sait s’améliorer.