La précarité alimentaire mise sous le tapis

Le « fact-checking » de BFM a contesté mon chiffre sur le nombre des personnes astreintes à l’aide alimentaire. Heureusement, sur le champ, les insoumis mobilisés sur les réseaux ont très vite contre-vérifié les vérificateurs.

Ceux qui luttent en première ligne ont tiré la sonnette d’alarme ces derniers mois. Ainsi, je me réfère aux propos du délégué général du Secours catholique en novembre dernier. C’est même le titre de l’interview qu’il a donnée au journal Libération à ce sujet. Ainsi, selon ses propres termes « c’est comme cela que l’on se retrouve avec 8 millions de personnes, soit environ 10 % de la population française, qui a besoin de l’aide alimentaire pour vivre. »

Une journaliste du Monde l’affirme dans un article paru à la même période : « le nombre de bénéficiaires de l’aide alimentaire, en France, est estimé en cette rentrée à plus de 8 millions de personnes, alors qu’il se situe autour de 5,5 millions en temps normal ». Il y avait donc deux sources facilement accessibles en ligne pour confirmer mes dires.

Je le redis : huit millions de Français ont besoin de l’aide alimentaire pour vivre. Je ne me réjouis pas pour autant d’avoir raison. Mais il ne faut laisser personne sous-estimer la crise alimentaire qui sévit dans le pays. Mes lecteurs réguliers ont sans doute lu mon précédent post de blog sur le sujet. J’y invite les autres. Il donne à voir l’étendue de l’insécurité alimentaire. Surtout, il détaille notre plan de sécurité alimentaire pour traiter les causes de ce désastre.

Les observateurs avisés s’étonneront aussi du fossé entre ces 8 millions et les chiffres avancés par les vérificateurs en chef. Selon eux, en janvier, 2,1 millions de personnes étaient aidées par le réseau des banques alimentaires. C’est exact. Ce réseau fonctionne depuis 1984, en lien avec les travailleurs sociaux des centres communaux d’action sociale. Mais l’accès à ces banques alimentaires est conditionné. Il faut pour cela constituer un dossier de demande d’aide examiné à la loupe.

Demander de l’aide n’est jamais simple. Cela l’est encore moins quand il faut le justifier. Tout le monde comprend donc que ce réseau n’aide qu’une partie des gens dans le besoin. D’autres structures sont, elles, accessibles sans condition, ou sinon moyennant une contribution symbolique. On pense évidemment aux Restos du Cœur créés par Coluche en 1985. Mais aussi au Secours populaire et à la Croix-Rouge dont les bénévoles distribuent des colis, tiennent des épiceries à petit prix ou encore effectuent des maraudes.

Au total, 17 associations caritatives sont habilitées par l’État pour venir en aide aux 8 millions de personnes dans le besoin. Il ne faut pas les oublier. En effet, sans eux, l’État devrait multiplier par cinq ses financements pour faire fonctionner le dispositif d’aide alimentaire dans le pays. Surtout, la situation serait bien pire encore sans leur sens de l’entraide. Je regrette beaucoup que cette erreur des fact-checkers se soit faite sur un sujet aussi sensible où la misère est si poignante. 50 % des personnes qui y ont recours sont des femmes. Et 30 % sont des enfants. Misère et famine ne doivent pas être minorées ! C’est par ce biais que les souffrances d’aujourd’hui mettront en option celles de demain. Mettre le quotidien sur la table est la première étape de notre combat pour la dignité.

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