L’infâme coalition

Jour de deuil. Cette grande coalition en Allemagne me reste en travers de la gorge. Droite et gauche en légumes du même potage ! Mes amis proches s’arrachent les cheveux : « quelle confusion ! ». Moi ça me glace. Ce n’est pas la confusion. Seuls les naïfs tombent de l’arbre. C’est la clarté. La sociale démocratie allemande est passée de l’autre côté du cheval. Ce n’est pas une surprise.

C’est l’aboutissement normal de la politique du « socialisme d’accompagnement ». Le SPD de Schröder est à sa place avec la droite. D’ailleurs aucune résistance ne s’exprime en son sein sinon sur des broutilles concernant le comportement de Schröder lui- même. Cette ligne est l’axe politique qui domine actuellement le Parti Socialiste Européen. Son président, le danois Poul Rasmussen a même eu l’audace, sans être démenti par personne, de proclamer que Schröder était le mieux placé pour faire « les réformes indispensables » alors qu’Angela Merkel n’aurait « rien dans le ventre » à ce sujet. Il se rengorge même : Schröder aurait eu « le courage des réformes » au risque de « détruire son propre parti ! » Il faut le lire pour croire qu’un tel langage devant les libéraux soit possible. On voit alors l’incroyable aveuglement dont ont fait preuve certains de mes camarades. Jean-Marc Ayrault quand il a salué « les réformes courageuses » de Schröder, que dorénavant celui-ci va continuer avec la droite. Dominique Strauss Kahn en lui faisant parrainer son club et en concluant la campagne référendaire du Oui avec lui. Enfin tous les dirigeants cyniques ou convaincus qui, au lendemain du vote, ont accusé le Linkspartei d’avoir « volé la victoire du SPD », « fait gagner la droite », « refuser l’union avec le SPD » même quand celui-ci la rejetait par avance. A présent c’est clair : alors que la gauche est majoritaire en sièges, si la droite gouverne c’est à cause du SPD de Schröder. Infâme coalition ! Une autre majorité était possible en rassemblant toute la gauche sans exclusive. Le SPD a préféré la coalition avec la droite. Et pourquoi faire ? Une politique de droite évidemment. Dorénavant les dès sont jetés. Heureusement il y a le Linkspartei. Il y a donc une chance pour que, contrairement à ce qui s’était passé en Autriche où la grande coalition a fini avec le raz de marée d’extrême droite, les ouvriers, employés et chômeurs allemands pourront exprimer leur colère inévitable en votant à gauche.

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