Avant Stains

Les heures filent et aucune ne dure assez pour me donner le temps de me consacrer à une note pour ce blog. Et comme demain matin je serai sur un marché aux côtés de Marie-George Buffet à Stains en Seine Saint Denis pour sa campagne, et le soir dans l’Eure aux côtés de Catherine Picard, je vois bien que ma disponibilité pour écrire ne va pas s’améliorer. Je ne sais pas combien de mes lecteurs ont pu depuis dimanche soir suivre mes propos sur France 3 puis sur LCI ( cliquez sur ce lien pour en visionner des extraits). Ceux qui ont eu l’occasion de le faire savent donc où j’en suis, à l’instar de très nombreuses personnes à gauche. Après ce rude revers il faut de la constance pour tenir la tranchée. Non seulement il faut affronter la déferlante bleue sur nos lignes et dans nos rangs mais il faut aussi résister aux tireurs dans le dos.

La scène de théâtre de boulevard au PS nous crucifie. Lui et elle rentrent et sortent en faisant claquer les portes pour dire des choses contradictoires. Mais c’est lui qui a raison. Elle reste dans son registre : le matin à RTL une chose à propos de Bayrou, le soir une autre sur France 2 à propos du même. A la fin, tout le monde se ridiculise selon l’heure de la journée où l’on s’est exprimé, que l’on soutienne ou que l’on critique. Ce n’est pas une affaire de couple. Ou seulement secondairement. C’est une affaire de ligne. Ségolène Royal pense que sa popularité repose sur le tripode victimisation – transgression – maternage. Ceux qui ont aimé avant doivent adorer depuis. Mais au delà des intentions, des mots et des postures, la logique de situation est plus forte que les bouchons qui flottent à sa surface. Ségolène Royal est l’instrument d’une pression en faveur de la liquidation du parti socialiste issu du Congrès d’Epinay, parti de gauche, d’union des gauches pour un programme de gauche. Le noeud de la situation est le système d’alliance. Elle tape à cet endroit sans relache depuis la fin du premier tour. Rien n’est plus aberrant sitôt qu’on regarde les chiffres : sans centrisme pro UMP, Bayrou a plus que diminué de moitié. Il ne veut pas d’alliance avec les socialistes. Il ne veut pas de Ségolène Royal. Quand elle lui parle, c’est à Strauss Kahn qu’il répond. Et elle, toute honte bue, continue à pétiller d’un média à l’autre sur ce sujet d’une façon de plus en plus confuse et incompréhensible.

Pour dire ce que je pense du contexte dans lequel ce numéro prend place, je reproduis les lignes que vient d’y consacrer François Delapierre dans l’hebdomadaire de PRS, « A Gauche ».

« C’est un cas d’école. Nos lecteurs savent que l’analyse des résultats d’un vote est un enjeu politique tout comme le vote lui-même. La lecture de l’édition du Monde publiée le lendemain des législatives en fournit l’éclatante confirmation. Tout entier voué à un combat militant pour que le PS change son système d’alliance, ce journal fait du Modem l’arbitre du deuxième tour et présente le PCF comme un acteur désormais négligeable. Alors même que les résultats disent rigoureusement le contraire.

Les manipulations auxquelles se livre le Monde en renfort de sa thèse sont extrêmement grossières. Ainsi il annonce un score centriste à 9,73% au niveau national. Pour arriver à ce chiffre que personne n’avait encore vu nulle part, le journal totalise sans vergogne les scores du Modem de Bayrou et ceux du « Nouveau centre ». Quitte à démentir le journaliste en charge du suivi du Modem, qui semble être le seul à décrire la réalité en constatant avec rigueur que la stratégie « centriste » de Bayrou a été battue par celle, clairement à droite, du Nouveau Centre. En effet, les candidats de ce mouvement créé en quelques jours ont arboré dans tout le pays sur leurs affiches leur soutien à Sarkozy (photos à l’appui). Leurs candidatures ont été directement pilotées et soutenues par l’UMP qui n’a pas présenté de candidat face à ces nouveaux sarkozystes. Ce qui signifie que l’essentiel de leurs voix sont en fait des voix de droite en phase avec Sarkozy. Mais pour le Monde, ce sont avant tout des voix « centristes ». Bien sûr l’événement que constitue la division par trois du score de Bayrou en quelques jours est totalement occulté. Cette mise en scène artificielle d’un centre qui n’existe pas, placé à un niveau électoral imaginaire, sert à poursuivre le harcèlement de la gauche et du PS initiés pendant la présidentielle. Et à valider la stratégie d’alliance au centre prônée par Ségolène Royal. Ainsi, l’éditorialiste du Monde explique en Une que le PS « n’a offert qu’une faible résistance à la droite », parce qu’il n’a « pas réussi à attirer vers lui les électeurs du centre ».

Le traitement du PCF par ce même journal apparaît en miroir. Les faits sont à nouveau piétinés. Ici on explique que Marie-George Buffet, devancée par l’UMP, « voit ses positions s’affaiblir ». Mensonge pur et simple : elle passe de 29% en 2002 à 32% en 2007. Là le journal écrit que dans le Cher, « la surprise concerne la deuxième circonscription où le député PCF sortant, Jean-Claude Sandrier (31,20%) est en difficulté face à l’UMP Franck Thomas-Richard (34,46%) ». Quelle surprise ? En 2002, le PS soutenait Sandrier au premier tour. Cette fois il présente un candidat qui obtient 13,26%. En ne reculant que de 7,44 points, Sandrier encaisse remarquablement le choc et fait progresser le score de la gauche de 6 points.

« Mais peu importe leur résistance électorale, car de toutes façons les communistes risquent de perdre leur groupe parlementaire », peut-on lire entre les lignes du Monde. Admettons cette hypothèse. Quoi qu’il en soit, les communistes compteront beaucoup plus d’élus que le Modem de François Bayrou, qui n’aura même pas assez de collègues à l’Assemblée pour organiser une belote. Et risque même d’être condamné par son cuisant échec à faire des réussites et jouer au solitaire. Les communistes peuvent se maintenir dans 29 circonscriptions. Le Modem dans 5 seulement. D’un côté, les communistes ne comptent que 4 sortants sur 22 éliminés au premier tour. Trois d’entre eux ne se représentaient pas. Deux d’entre eux affrontaient un candidat socialiste alors que le PS les soutenait en 2002 (Aubervilliers dans le 93 et Echirolles dans l’Isère). Un troisième avait bénéficié du soutien de tout l’appareil du PS départemental, régional et national contre le candidat socialiste investi (Dutoit à Marseille face à Menucci). Dans un des cas (Echirolles), deux candidats communistes se sont affrontés au premier tour : sans cela le PCF était qualifié pour le second. De l’autre côté, François Bayrou a été fui par ses 29 sortants à l’exception de trois rescapés. Deux d’entre eux sont éliminés dès le premier tour. Il ne reste en tout et pour tout que? Bayrou et Lassale dans la circonscription voisine.

Ceux qui prônent donc une campagne de deuxième tour tourné vers le Modem, au premier rang desquels Ségolène Royal, ne le font donc pas en fonction des résultats du premier. Le changement d’alliance n’est qu’un moyen de rompre l’ancrage à gauche du PS. Or l’issue du deuxième tour dépend avant tout du bon report des voix à gauche. Plus de 11% des voix du côté de la gauche non socialiste, seulement 7,86% du côté du Modem, pour l’essentiel issus de la droite. Ce score national est renforcé dans le détail des circonscriptions. Le Modem fait ses voix dans des circonscriptions de droite. Dans la plupart des circonscriptions gagnables par la gauche il ne touche pas terre. Au deuxième tour, l’intérêt électoral rejoint la fidélité politique. La seule stratégie efficace pour résister à la droite, c’est l’union des gauches. »

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