Cette tribune a été publiée sur lemonde.fr par Boris Bilia, Pierre-Yves Cadalen, Lucie Kirchner et Mathilde Panot sont membres de l’équipe d’animation du Mouvement pour la VIe République
Rarement des élections n’ont été aussi symptomatiques d’un régime en perdition. Et cette fois-ci, ce fut sous le régime si contestable de l’état d’urgence ! Le peuple français est ainsi appelé à voter pour des collectivités redécoupées à la va-vite et aux compétences encore floues. Et il a répondu présent. Doublement. Par le refus de cette mascarade en s’abstenant massivement au premier tour. Et en se remobilisant en partie pour empêcher l’extrême droite de diriger des exécutifs locaux. Face à cela, la classe politique est à la dérive.
Les sempiternels refrains ont vite été ressortis, dès dimanche soir : toujours répétés, toujours introuvables dans les faits. Il faudrait « revoir les manières de faire de la politique », « plus rien ne peut continuer comme avant », on aurait entendu « la colère des Français ».
L’un des aspects les plus tragiquement comiques de ce second tour a été la mention répétée d’un supposé « sursaut populaire », alors que l’abstention est supérieure à 41 % des voix, soit la seconde plus mauvaise participation au second tour d’une élection régionale depuis 1986. Doit-on vraiment en conclure que la démocratie a été sauvée ?
Rien n’est moins sûr. L’extrême droite est au centre du débat politique, ombre de plus en plus palpable à mesure que les médias ne cessent de l’agiter. Mais, surtout, la réaction des ténors du fumeux tripartisme en dit long sur l’état de notre système, chacun se battant pour revendiquer une victoire ou tancer l’autre de la défaite.
Nous ne pouvons qu’être d’accord avec ce que dit Jacques Rancière : le FN est un pur produit de la Ve République. Certains dirigeants, dont François Hollande, profitent justement de sa forte présence, et ne cherchent qu’à se retrouver face à lui au second tour de la prochaine élection présidentielle. Ces calculs sont minables et dangereux.
Ces jeux électoraux de bas étage minent notre pays. Plus que jamais, il est primordial de refonder la vie politique de notre pays par le peuple et pour lui : nous porterons avec détermination l’idée centrale de la convocation d’une Constituante pour que la démocratie ne soit plus un mot qui sonne creux en France.
Il n’est possible de combattre le FN qu’en luttant contre le système qui l’a produit. En toute urgence et, dès 2017, nous cherchons à construire un mouvement du peuple, en rupture avec le jeu lancinant des appareils politiques. Ce n’est qu’à cette condition que nous pourrons renouer avec l’espoir de lendemains meilleurs. Nous voulons contribuer à construire un horizon, pas nous placer sous le diktat d’une crainte entretenue et de votes obtenus sous la menace.
Rappelons que le chaos actuel vient de la réforme institutionnelle de Lionel Jospin, qui de proportionnelle à un tour avant 2004 a rendu cette élection majoritaire à deux tours. Dès lors, la représentation n’est plus garantie pour tous les citoyens, l’abstention ne cesse d’augmenter et la présidentialisation à tous les échelons de se renforcer. La multiplication des petits monarques est une plaie pour notre démocratie. Cette pratique conforte des ego surdimensionnés dans des pratiques d’un autre temps. Nous appelons les nouveaux conseillers élus à refuser le cadre de ces baronnies dignes de l’âge féodal.
Seule une République refondée permettra de répondre aux défis de notre temps, à l’offensive vers le progrès humain et l’émancipation sociale. Nous ne pouvons laisser le vote devenir uniquement un vote contre le FN, quel qu’en soit le contenu. Retrouvons-nous dès maintenant pour pouvoir voter demain en faveur de la démocratie sociale, en finir avec le chômage et la précarité et relever le défi climatique.
Aux citoyennes et citoyens, nous disons : rejoignez le mouvement sur le site m6r.fr ! Nous engageons également toutes les associations citoyennes, les hommes et les femmes qui se battent dans le quotidien pour changer pour le mieux notre vie collective, à participer avec nous à la mise en œuvre de ce beau chantier, la Constituante. Qu’alors, dans la perspective d’une insurrection aux couleurs chaleureuses de notre République, nous nous préparions ensemble à être les bâtisseurs de la France de demain.