Cet édito de François Cocq a été publié sur le site de la France insoumise
Partout autour de nous, de l’Allemagne à l’Espagne, dans les urnes ou dans la rue, les évènements politiques de ces huit derniers jours ont mis en lumière l’étouffement démocratique qui accompagne le libéralisme économique transnational imposé comme seule politique possible.
C’est pourtant la semaine qu’a choisie M. Macron pour expliciter et assumer non seulement l’obédience droitière et eurobéiste (lire européiste béate) de sa politique, mais aussi la conception de mise à distance démocratique qui l’accompagne immanquablement.
Qu’on se comprenne : depuis le mois de mai, M. Macron a largement eu l’occasion de nous démontrer son orientation néolibérale, comme en atteste l’anéantissement de la forme républicaine du droit du travail. Mais c’est une autre affaire que de rendre celle-ci visible et sensible aux yeux du plus grand nombre. La présentation du budget 2018 a joué ce rôle de révélateur. La dimension symbolique de la suppression de l’ISF sur la part mobilière en fait partie. Jets, voitures de sport et chevaux de course aidant, M. Macron est désormais et durablement estampillé comme le président des riches.
La même semaine, l’État laissant filer STX sous pavillon italien et Alstom étant livré aux Allemands, M. Macron révélait aussi sa politique industrielle : privilégier l’avènement de grands acteurs européens laissés aux soins des forces du marché au prix de l’abandon de toute régulation et de toute pensée stratégique nationale.
Ne manquait que la théorisation de tout cela : droit dans ses bottes, le Président Macron s’y est essayé mardi dernier à la Sorbonne. Droit dans ses bottes, il a assumé ce jour-là la prévalence de la souveraineté européenne sur la souveraineté française, allant jusqu’à mettre sous le boisseau les représentations nationales au sein de la Commission européenne. En fidèle, fût-il énamouré comme Castaner ou simple collaborateur comme Fillon en son temps, le Premier ministre ne disait pas autre chose deux jours plus tard sur le plateau de France 2 lorsqu’il considérait le CETA comme ratifié puisque le Parlement européen s’en est chargé.
Alors que s’accélère la désagrégation des structures en France (dans le champ syndical avec la mise en minorité du secrétaire général de FO, dans le champ politique avec la scission au sein du FN, au sein du PS avec la résurgence d’une frange vallsiste, chez LREM avec la menace d’autonomisation de parlementaires…), c’est donc dans le modèle politique européen qui le surplombe et qui lui-même vole en éclat que M. Macron a été chercher l’inspiration à ses basses-œuvres.
Dépourvu de base sociale pour mener une telle politique, M. Macron en est réduit à agir comme le fait dans chaque pays la Caste : tenter d’imposer une politique maximaliste tandis qu’il voudrait retirer au peuple jusqu’à sa souveraineté pour la confier aux gardiens bruxellois du temple libéral. Mais le coup de force ne fait pas le droit. À n’en pas douter, celles et ceux qui l’expriment déjà avec tant de force à l’occasion des mobilisations contre les ordonnances de la loi travail se verront demain renforcés par toutes celles et tous ceux pour qui le projet présidentiel est enfin révélé dans sa nudité la plus crue.