Élections générales en Italie. Le fiasco est assuré pour l’ordre établi européen. La liste des pays en crise politique s’allonge. L’Europe toute entière plonge dans un chaos politique mou qui place toutes les situations sous la pression de la poussée d’extrême droite qui se généralise. Après l’Espagne, cinq mois sans gouvernement, puis un nouveau naufrage dans les mains de Rajoy et de son équipée catalane sans horizon. Après la France et son président élu « par effraction » avec 23% selon ses propres termes. Après l’Allemagne sans gouvernement pendant sept mois et sa grande coalition poussive formée sur le suicide politique du PS. Au total, les quatre premières économies de la zone euro sont touchées. Touchées en profondeur. Touchées sans trajectoires alternative ouverte. Au contraire : elles sont embourbées jusqu’aux essieux dans leur trajectoire morbide. Les « élites » politico-médiatiques de tous ces pays rament énergiquement pour rester dans le même cap, les mêmes objectifs, avec le même vocabulaire, les mêmes méthodes.
L’impasse ne se présente pas seulement sous la forme de l’opposition massive des peuples qui s’exprime par des votes d’opposition frontale de toutes sortes. L’impasse vient d’un second plan du réel. En détruisant partout l’État, en abrogeant les services publics, en acculant des populations entières au chômage de plusieurs générations, l’ordre libéral dissout la société elle-même. Et il est incapable d’en assumer les conséquences. Jacques Généreux a parfaitement décrit cette situation dans son livre La Dissociété. Nous sommes aujourd’hui plus de dix ans après sa publication. Le pronostic s’est totalement vérifié. Un spectacle hideux s’est installé. Des zones entières de non droit, d’économie parallèles, de tribalisation décomposée existent partout. La violence des gangs organise de vastes territoires. La drogue est un commerce de masse. Au point d’ailleurs que son trafic est dorénavant comptabilisé dans l’évaluation de la richesse de notre pays. La suite de cette situation est connue. La société s’effondre dans la violence, elle se segmente dans des ghettos de riches et de pauvres strictement cloisonnés. Dans certaines circonstances, l’effondrement est total.
C’est ce qui arrive en ce moment à Mayotte où l’incurie de l’État, l’abandon des populations, la gestion exécrable de l’immigration comorienne et l’absence de toute visée stratégique locale et régionale a plongé tout le pays dans un chaos. Les femmes de Mayotte, les filles de celles qui luttèrent pour maintenir Mayotte dans la France, se sont mises en mouvement. Le pouvoir macroniste envoie aussitôt les escadrons de CRS et de gardes mobiles pour mater l’insurrection populaire ! Incroyable déraison. La métropole a tort de croire que ce sont là des questions exotiques. L’un après l’autre, les DOM et les TOM entrent en ébullition et en insurrection.
Les causes qui les y conduisent sont très exactement à l’œuvre dans tout le pays. Les différences se présentent comme des étapes à l’intérieur d’un même processus. Dans cette façon de voir, on peut dire que la révolution citoyenne est commencée en France depuis la mobilisation de la Guadeloupe contre « la profitation » en 2008. Le processus lent et multiforme passe d’un territoire à l’autre. En Guyane, il a atteint en 2017 une forme quasi chimiquement pure. En effet, dans ce cas, le mouvement social, largement insurrectionnel, s’est conclu sur un processus où le peuple s’est fédéré autour de ses revendications regroupées dans un document unique signé par tous et avec l’État. C’est « l’accord Guyane », programme commun du peuple dans toutes ses composantes sociales et ethniques en Guyane. À mes yeux c’est un modèle. Une méthode généralisable. Une réponse politique ordonnée au chaos qui s’avance.