et maintenant le peuple

Europe : «Et maintenant, le peuple»

« La France insoumise » a signé un bref manifeste avec Podemos et Bloco de Esquerda au Portugal dont le titre « Et maintenant le peuple », « ahora el pueblo », « agora o povo », sera sans doute le nom commun de nos listes dans tous les pays possibles. L’idée est de fonder une mouvance politique nouvelle en phase avec les grands changements qui ont modifié enfin le visage de ce qu’on appelait la gauche avant la chute du mur et ensuite la dissolution de la social-démocratie dans le social libéralisme. Il le faut pour faire face aux défis que soulève l’actuelle agonie violente de l’« Union européenne ». Le manifeste propose de tourner la page du néolibéralisme et de sortir des traités actuels. Bref, une ligne claire d’action pour la décennie qui vient.

Aussitôt, le journal Le Monde, sans avoir le texte définitif en main, a fait le type de papier bien pourri qui tourne ensuite en boucle dans les autres médias. Ainsi va cette corporation peuplée du même type de fainéants qui ne travaillent pas sur texte mais en recopiant ce qui convient à leurs préjugés. Plutôt que de s’intéresser à la nouveauté et à ce qu’elle signifie, Abel Mestre du Monde, pressé de partir en vacances, a préféré gloser sur des divergences entre signataires ! Et bien sûr la divergence aurait porté sur un « détail »… la sortie des traités, dont le « journaliste » ignorait qu’elle figurait pourtant en toutes lettres dans le texte final qu’il n’avait pas lu.

Aussitôt, la pauvre équipe Hamon tweeta sur le thème. Jusqu’à ce que la vie se charge de faire apparaître une divergence autrement importante avec son allié Varoufakis et son « parti » européen DIEM 25 qui forme avec Génération (Hamon) et un parti polonais sans élu cette coalition. Varoufakis a en effet condamné l’intervention américaine et française en Syrie que Benoît Hamon approuve. Un détail quand il s’agit du rôle de l’OTAN dans la politique européenne… On en était là quant, avec la délicatesse habituelle de cette équipe, nous fûmes sommés au nom de la nécessaire « unité » de répondre à leur invitation pour une confrontation des idées. Car depuis qu’il avait brocardé notre plan B, Varoufakis a inventé une ligne d’action pour « un plan A un plan B et même un plan C ». Une convocation à… Lisbonne. Podemos et Bloco ont décliné séance tenante, choqués par ce genre de procédé « unitaire » qui n’est pas encore répandu dans leur pays comme en France. Le plus drôle est quand même que Hamon va devoir à présent défendre en France ces plans A, B, C, imaginés par Yannis Varoufakis. Bien sûr, Le Monde ne s’intéresse pas aux vraies divergences mais seulement à celles qu’il invente.

Depuis la publication du manifeste « Et Maintenant le peuple », les discussions vont bon train à travers toute l’Europe dans les rangs des partis et mouvement rassemblés dans l’actuel groupe GUE. Ce groupe est placé sous l’influence directe des divers Partis communistes favorables à l’Union Européenne. C’est le cas du PCF ou des anciens communistes de l’Allemagne de l’est aujourd’hui associés dans le parti Die Linke en Allemagne. C’est ce secteur de Die Linke qui préside à la fois le groupe parlementaire et le Parti de la gauche européenne (PGE). Groupe et parti où siège Syriza et l’équipe de Tsípras, le Grec. Il ne saurait être question pour « La France insoumise » de siéger avec une telle composante. Notre élu achève donc son mandat dans le groupe mais il ne peut être question d’aller au-delà. D’ailleurs, le Parti de Gauche français a demandé l’exclusion de Syriza. La réponse est venue du PCF : non ! Lue et approuvée par Grégor Gysi président du PGE et membre de Die Linke. C’est donc dans Die Linke que le débat doit avoir lieu.

La recommandation de la fondation intellectuelle de Die Linke, la « Rosa Luxemburg shiftung », considère que « la France insoumise » est la force dont l’émergence est la plus spectaculaire par son pourcentage de votes mais surtout parce qu’elle se produit dans l’un des pays centre du monde capitaliste. Elle recommande une coopération active et surtout de ne pas se mêler des problèmes qui existent entre le PCF et les Insoumis. Clairement, les dirigeants de Die Linke au Parlement européen et au PGE ont fait le choix inverse, celui d’une attitude d’hostilité à l’égard de « la France insoumise ». Mais elle ne fait pas l’unanimité dans Die Linke, loin de là. On va bientôt le voir. D’autant que la contagion des adhésions à « Et maintenant le peuple » continue. Une dizaine de partis et groupes de toutes tailles ont fait leur demande de rencontres avec le comité organisateur des trois fondateurs. Nous avons décidé d’une nouvelle rencontre le 29 mai, jour anniversaire du « non » des français au traité constitutionnel de l’Union Européenne. Sans doute pourra-t-on constater alors un élargissement du mouvement.

Dans tous les cas, la nouvelle attitude politique que nous incarnons avec des forces comme Bloco de Esquerda et Podemos avance en Europe. Et c’est une bonne chose plutôt que d’être condamné à devoir suivre soit des partis communistes de plus en plus repliés sur eux-mêmes soit des partis sociaux-démocrates quasi absorbés par la droite et clairement libéraux. Pour nous, la tâche de construction de cette alternative au niveau européen se confond avec la tâche de reconstruction de force alternative dans les pays comme l’Italie où le PC et le PS alliés ont tout détruit et fondé un parti désormais ouvertement libéral comme celui de Mattéo Renzi. C’est évidemment un travail complexe et prenant qui s’ajoute à tous les autres. Mais c’est le prix pour organiser la résistance face à la percée de l’extrême droite et au verrou de l’ancienne gauche.

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