melenchon coronavirus revolution

22.03.2020

Coronavirus : la révolution qu’il faut accomplir

Discours prononcé à l’Assemblée nationale le dimanche 22 mars 2020

On vous l’a dit, nous ne voterons pas ce texte. En conscience, nous pensons que c’est notre devoir après en avoir délibéré entre nous 17 députés insoumis. Car nous ne croyons pas que les mesures qu’il contient soient à la hauteur de la situation telle que nous l’analysons.

Avant de résumer nos raisons, je voudrais dire une fois de plus quel est notre principe d’action dans ce moment.

Nous sommes une opposition et une force de proposition et nous le resterons en toutes circonstances.  

Dans une démocratie, l’opposition contribue à l’intérêt général par ses solidarités, mais aussi par ses critiques. Celle-ci permette de ne jamais oublier le postulat fondamental de la démocratie et de la raison : en toutes situations un autre chemin possible.

C’est pourquoi le droit et le devoir de la majorité est évidemment de prendre les décisions qui lui paraissent nécessaires et d’exiger que celles-ci soient appliquées.

Mais le droit et le devoir d’une opposition est de proposer une alternative à celles-ci, bref de se présenter comme un recours à la disposition des citoyens. C’est ce rôle que nous assumons à cet instant sur la base de notre plan d’urgence, de nos amendements, de nos interventions dans cet hémicycle.

La pandémie est certes un fait biologique. Mais elle est avant tout un phénomène social qui résulte des conditions dans lesquelles l’humanité a produit, échangé et défini ses priorités jusqu’à cette heure. Nous en sommes là aujourd’hui parce que l’égoïsme social, la liberté du marché et la concurrence libre et non faussée ont tout dominé sans frein, affaibli et détruit presque, sans contrepartie, tous nos moyens de défense collective.

C’est avec tout cela qu’il faut rompre pour de bon. Non pas seulement pour créer un monde nouveau demain mais pour pouvoir nous tirer d’affaire dès aujourd’hui.

Autrement dit, « le monde d’après », sur lequel à présent nombre projettent leurs espérances, doit commencer maintenant avec d’autres moyens de produire et d’échanger, une autre hiérarchie des normes. 

L’intérêt général, le salut commun, l’entraide, la planification ecologique, voilà ce qui doit dominer dorénavant et sans délai. 

Dans la situation de péril commun, ces principes selon nous ne doivent rencontrer aucune limite.

À nos yeux, leurs meilleurs artisans en sont ce qui font vivre le pays à chaque instant, à chaque moment par leur travail.

Le confinement forcé est nécessaire et indispensable à présent. Et j’y appelle chacun en solidarité avec les autorités sanitaires et le gouvernement. Ce confinement, il n’est pas sans coûts psychologiques graves.

Mais il n’est pas l’horizon indépassable de l’action collective pour le futur.

La France dispose de tous les moyens matériels, moraux et même spirituels qui lui permettent de maîtriser la situation et d’atteindre ses objectifs sanitaires.

Pour cela, le front sanitaire doit être pourvu sans délai d’autant de masques qu’il lui en faut, d’autant de respirateurs que nécessaire, d’autant de tests qui permettent de savoir qui est malade et doit être confiné et soigné et qui ne l’est pas et doit pouvoir se rendre utile.

Pour cela, les 1 000 entreprises de textile et les 100 000 salariés qu’elles comptent doivent être réquisitionnés pour produire par priorité les centaines de millions de masques dont nous avons besoin. 

Les milliers de postes de travail des entreprises de mécanique doivent être réquisitionnés pour produire les milliers de respirateurs dont nous avons besoin.

Les entreprises fermées ou en liquidation dont les productions touchent directement aux moyens dont nous avons besoin doivent être nationalisées et réouvertes sans délai.

Tout cet appareil de production peut et doit être mobilisé jour et nuit pour stopper le désastre avant le pic de l’épidémie.

Dans toutes les entreprises concernées, les salariés eux-mêmes doivent décider des meilleures conditions sanitaires de la production, être équipés pour leur protection et organiser par le contact avec les entreprises qui les fournissent la continuité des chaînes d’approvisionnements qui leur sont nécessaires. 

La garantie doit être donnée à chaque personne que son revenu, son logement et ses fournitures de base seront assurées et que par conséquent il peut et doit consentir sans condition au confinement.

Un impôt sur les grandes fortunes et les revenus du capital doit immédiatement contribuer au financement des mesures de salut commun.

La France doit se mobiliser non seulement pour elle mais pour participer à la solidarité avec les peuples qui appelleraient à l’aide et en particulier et par priorité à ceux de l’espace francophone.

Votre plan ne prévoit pas la mise à contribution de toutes les composantes du pays ni la planification des moyens de production nécessaires.

Il ne tire aucune leçon de la façon avec laquelle l’égoïsme des nations qui composent l’Union européenne s’est imposé contre tout bon sens et au mépris des valeurs qu’elles proclament.

Vos décisions seront appliquées. Nous vous souhaitons de tout cœur qu’elles réussissent même si nous n’y croyons pas.

Mais si elles échouent, le pays doit savoir qu’il dispose sur ces bancs d’une alternative, d’une autre cohérence à sa disposition. 

Le gouvernement et les autorités sanitaires savent qu’ils peuvent disposer de nous pour toute l’aide dont ils pourraient avoir besoin.

Et le pays de même.

Ni maintenant, ni jamais, nous n’oublions que nos vies sont nos œuvres ainsi que l’a permis Prométhée.

Nous ne combattons pas d’autre ennemi que les erreurs et les abus d’une façon de vivre.

Le moment est venu d’en changer radicalement. Telle est la révolution que doit accomplir la civilisation humaine de notre époque.

English

We have already told you, we won’t vote for this legal text. After having deliberated over it with the seventeen Insoumis deputies, we feel it’s only fair to think that it is our duty. Indeed, we do not believe that the means included in this text measure up to the situation as we analyse it.

Before summing up our reasons, I would like to tell again what our policy principle is, at the moment.
We are an opposition force and a source of proposals and we’ll always be under any circumstances.

In a democracy, the opposition contributes to general interest by its solidarities but also by its criticisms. These ones allow never forgetting the essential postulate of democracy and reason: in all circumstances an alternative path is possible.

It is, actually, the right and duty of the majority of course to take the decisions that seem necessary and to require these ones to be enforced.

But the right and duty of an opposition is to offer an alternative to these decisions, in short to be a resort at the service of the citizens. This is the role we endorse at this instant, on the base of our emergency plan, our amendments and our contributions in this hemicycle.

This pandemic is admittedly a biological fact but it is above all a social phenomenon that is the result of the conditions in which humanity has produced, exchanged and defined its priorities up until now. Today’s situation is caused by the fact that social selfishness, free market and free and undistorted competition have dominated everything without limit. They have weakened and almost destroyed without compensation all of our public defence means.

We need to break with all these, for good. Not only to create a new world tomorrow, but also to get us out of this tricky situation, today.

In other words, ‘The future world’ on which by now, many project themselves with hope, must start now with different means of production and exchange; another hierarchy of norms.

General interest, common safety, mutual support, environmental planning, all these must rule from now on and without any delay.

In this collective deadly situation, these principles in our opinion, mustn’t meet any bound.

To us, their best craft persons are those who support this country anytime with their work.

The required quarantine is necessary and indispensable from now on. And I call everyone to observe it out of solidarity with health authority and the government. This quarantine cannot be without serious psychological harm.

But it is not the overwhelming horizon of collective action for the future.

France has all the material, the moral and even the spiritual means in its hands that allow it to handle the situation and achieve its healthcare goals.

To achieve its goal, the health front must quickly get as many masks as it needs, as many respirators as necessary, as many tests as needed to be able to know who is sick, needs to be put in quarantine and treated and who is not, in order to make oneself helpful.

To do this, the thousand textile factories and the hundred thousand workers they hire, must be requisitioned to produce in priority the hundred millions masks we need.

The closed companies or the firms in legal liquidation of which manufacturing directly concerns the resources we need must be nationalized and re-opened forthwith.

This production apparatus can and must be mobilised night and day to stop the disaster before the outbreak peaks.

In all these interested firms, employees must decide by themselves what the best health conditions are to produce, be equipped with the adequate materials for their protection and implement with the coordination of their suppliers, the supplier chains that are necessary to them.

Guarantee must be given to anyone that his or her income, his or her accommodation, and vital supplies will be assured and that consequently, him or her can and must agree unconditionally to quarantine.
A tax on great wealth holders and on capital incomes must immediately contribute to pay for common safety measures.

France must go into action, not only for itself but also to take part in the solidarity with other nations that would ask for help and in priority with the inhabitants of the francophone space.

Your strategy neither provides for the involvement of all the components of the country nor the planning of the necessary means of production.

It doesn’t learn any lessons from the way European nations’ selfishness imposed itself against all common sense, despising the very values that they proclaim.

Your decisions will be applied. For you, we heartily wish them to be successful even though we do not believe in them.

But if they fail, the country must know that it has an alternative in this parliament, and a different coherence available for the people, which are represented by us.

The government and the health authority must know that they have at their disposal all the help they could need from us.

And so must the country.

Neither now, nor never, do we forget that our lives are our works as Prometheus enabled it.

We do not fight other enemies than mistakes and the excesses of a lifestyle.

Time has come to radically change this way of life. This is the Revolution that must be accomplished by the human civilisation of our time.

Español

Ya lo hemos dicho, nosotros no votaremos este texto. En conciencia, y después de haber deliberado entre nosotros, los 17 diputados de nuestro grupo de la Francia Insumisa, pensamos que éste es nuestro deber, pues no creemos que las medidas que contiene estén a la altura de la situación tal y como la analizamos.

Antes de resumir nuestras razones, me gustaría decir una vez más, cual es nuestro principio de acción en este momento.

Nosotros somos una oposición y una fuerza de proposición y lo seremos en toda circunstancia.

En una democracia, la oposición contribuye al interés general por intermedio de su solidaridad, pero también por sus críticas. Esta permite que nunca se olvide el postulado fundamental de la democracia y de la razón: que en todas las situaciones otra vía es siempre posible.

Es por eso que el derecho y el deber de la mayoría parlamentaria, es evidentemente, el de tomar las decisiones que considere necesarias y exigir que se apliquen.

Pero también, el derecho y el deber de una oposición es el de proponer una alternativa a éstas, y, ciertamente, el de presentarse como un recurso alternativo que se ofrece a la disposición de los ciudadanos. Este es el papel el que estamos asumiendo en este momento, basándonos en nuestro plan de urgencia, en nuestras enmiendas y en nuestras intervenciones en esta Cámara.

La pandemia es ciertamente un hecho biológico. Pero es antes que nada un fenómeno social resultante de las condiciones en que la humanidad ha producido, intercambiado y definido sus prioridades hasta hoy. Hemos llegado a esta situación porque el egoísmo social, la libertad de mercado y la competencia libre y no distorsionada han dominado sin freno alguno, han debilitado y destruido casi todos nuestros medios de defensa colectiva.

Es con todo esto que debemos romper definitivamente. No sólo para crear un nuevo mundo mañana, sino para poder librarnos de este desastre a partir de hoy mismo.

En otras palabras, « el mundo de después », sobre el cual muchos proyectan ya sus esperanzas, debe comenzar ahora, con otros medios de producción e intercambio, con una jerarquía diferente de
normas y prioridades.

El interés general, la salvación común, la ayuda mutua, la planificación ecológica, eso es lo que debe prevalecer de ahora en adelante y sin demora.

En nuestra opinión, en la actual situación de peligro común estos principios no deben tener límites.

Desde nuestro punto de vista, los mejores artesanos del cambio en esta situación son quienes hacen que el país viva, en cada momento, por obra y gracia de su trabajo.

El confinamiento forzoso es necesario e indispensable en este momento. Y yo hago un llamado a todos a ser solidarios con las autoridades sanitarias y el gobierno. Esta situación de confinamiento conlleva, evidentemente, problemas psicológicos graves.

Pero no es un horizonte infranqueable de la acción colectiva para el futuro.

Francia dispone de todo los medios materiales, morales e incluso espirituales para poder hacer frente a esta situación y así poder alcanzar sus objetivos sanitarios.

Para ello, el sector de la salud debe contar sin demora con todas las mascarillas que sean necesarias, tantos respiradores como sean necesarios, tantas pruebas para saber quién está enfermo y necesita estar confinado y bajo cuidado, y quién no lo está y debe ser capaz de hacerse útil.

Para ello, las 1000 empresas textiles y los 100.000 empleados que cuenta nuestro país deben ser requisados para producir y así priorizar los cientos de millones de mascarillas que necesitamos.

Los miles de puestos de trabajo en las empresas especializadas en mecánicas deben ser requisadas para poder producir los miles de respiradores que necesitamos de manera urgente y necesaria.

Las empresas cerradas o en situación de quiebra cuyas producciones afectan directamente a los medios sanitarios que necesitamos deben se nacionalizadas, reabrir y producir sin demora.

Todo este aparato de producción puede y debe ser movilizado día y noche para detener el desastre antes de que la epidemia alcance su punto máximo.

En todas las empresas afectadas, los propios empleados deben decidir sobre cuáles son las mejores condiciones sanitarias para la producción; éstos deben estar equipados adecuadamente para su propia protección; organizar la continuidad de la cadena de suministros necesarios a través del contacto con las empresas proveedoras.

Se debe garantizar a cada persona sus ingresos económicos, su alojamiento y sus suministros básicos estarán asegurados, de modo que ésta pueda y deba aceptar incondicionalmente el confinamiento.

Un impuesto sobre las grandes fortunas y los ingresos del capital deben contribuir inmediatamente a la financiación de las medidas de la urgencia común por la cual atravesamos.

Francia debe movilizarse no sólo para sí misma sino también para participar solidariamente con los pueblos que pidan nuestra ayuda, en particular y según prioridades a los de la zona francófona.

El actual plan del Gobierno no prevé la participación ni la contribución de todas las fuerzas vivas y
los actores del país, ni la planificación de los medios de producción necesarios.

No extraen ninguna enseñanza sobre la manera en que el egoísmo de las naciones que componen la Unión Europea se ha impuesto contra todo sentido común y en total desprecio a los valores que ellos proclaman.

Seguramente sus decisiones serán implementadas. Les deseamos de todo corazón que tengan éxito, y lo decimos sinceramente, aunque no creemos en ellas.

Pero si fallan, el país necesita saber que tiene a su disposición, al interior de la Asamblea Nacional una alternativa con otra coherencia.

El gobierno y las autoridades sanitarias saben que estamos disponibles para cualquier ayuda que puedan necesitar.

Y el país también.

Ni ahora, ni nunca, olvidamos que nuestras vidas son nuestras son nuestras obras según lo permitido por Prometeo.
No luchamos contra otro enemigo que los errores y abusos de una manera de vivir.

Es hora ya de un cambio radical. Tal es la revolución que la civilización humana de nuestro tiempo debe lograr.

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