culture respirer

«On nous enjoint de nous adapter. Nous avons besoin de respirer.»

Cette tribune d’artistes et acteurs du monde de la culture a été publiée le 16 décembre 2020 sur Mediapart.

« Au moment où l’on voit les injustices et les inégalités sortir par tous ses pores, où la colère gronde, nous voulons, partout, créer des foyers pour l’imagination ». Des artistes et acteurs du monde de la culture apportent leur soutien au programme l’Avenir en commun porté par Jean-Luc Melenchon, « seul à rompre avec l’étouffement que provoque la politique libérale et liberticide de ce gouvernement ».

Beaucoup d’entre nous avaient pensé, pendant le premier confinement, que le jour d’après ne serait pas comme le jour d’avant. Aujourd’hui, nous voyons des images que nous avions cru révolues : l’hôpital qui ne tient que par la volonté des soignants, la faim qui tenaille des familles, la chasse aux immigrés par la police nationale dans les rues de Paris, des milliards pour faire repartir la destruction de notre écosystème, la concurrence entre humains érigée en valeur…

Chaque matin, nous découvrons nos mots infusés de libéralisme, la valeur ne serait plus que monétaire, les idées au service de l’ordre. En tordant la langue et les idées, ce sont nos outils de travail que les tenants de l’ordre établi abîment.

On nous enjoint de nous adapter. Nous avons besoin de respirer.

Nous nous engageons dans le mouvement revendicatif, la solidarité, la lutte contre les inégalités d’origine, de sexe, sociales… la construction intellectuelle, sensible ou matérielle d’un autre avenir ou d’autres choses encore.

Tout ne dépend pas que des élections. Mais toutes et tous nous savons que l’élection présidentielle sera décisive et nous refusons de nous résigner au choix mortifère entre Marine Le Pen et Emmanuel Macron.

Ou à leurs avatars.

Nous n’avons pas tous la même image et le même rapport avec Jean-Luc Mélenchon. Certains d’entre nous n’ont même jamais voté pour lui.

Aucun des signataires ne croit au sauveur suprême. Et de toutes les façons, nous sommes libres et indépendants. Par culture. Mais le programme qu’il porte rompt avec l’étouffement que provoque la politique libérale et liberticide de ce gouvernement. Et, à ce jour, nous croyons que Jean-Luc Mélenchon est le seul à même d’accéder au second tour.

Il dit que son programme, l’Avenir en commun, est ouvert aux enrichissements. Nous, artistes et acteurs du monde de la culture, voulons, avec nos expériences, nos idées,  affirmer des principes, formuler nos propositions, ouvrir de nouvelles pages.

Nous ne signons pas un chèque en blanc.

D’autant que le ravage de l’art et la culture vient de loin : l’asphyxie de la création par la marchandisation et la soumission à la « demande » sur la base de préjugés et du diktat des jauges, la volonté de restreindre le nombre et le champs de nos professions pour nous réduire à ce qui serait économiquement rentable ou prestigieux, l’instrumentalisation des artistes, des intellectuels, à qui on demande de prouver leur utilité et qu’on transforme en faire-valoir, l’idée d’excellence pour vendre le rayonnement national, le primat des indicateurs sur la définition d’un intérêt général…

Cela fait maintenant des années que les pouvoirs effacent le principe du service public de la culture comme fondement d’une politique publique d’intérêt général et en détruisent les conditions.

La gestion désastreuse de l’épidémie a aggravé tout cela : aucune anticipation, des aides mal pensées et mal ciblées qui profitent essentiellement aux institutions privées, une année blanche pour les intermittents qui n’empêchera pas le ravage de la profession et de ses équipements, sans aborder le fait que les autres précaires, de l’art et d’ailleurs, en sont exclus.

Et surtout, une occasion ratée de repenser les choses en profondeur, de prendre des mesures radicales en faveur d’une politique publique en ce domaine, autant pour ses acteurs que pour la société toute entière. Nous sommes donc exigeants.

Nous voulons que cette campagne à venir prenne à bras le corps , pour une fois, les enjeux de l’art et de la culture. D’autant que nous pensons qu’avec la volonté de changer la société et en affirmant le choix de « l’harmonie entre les êtres humains et avec la nature », on est tenu de placer l’imaginaire, le symbolique, le sensible, comme la raison, au cœur du projet politique.

Nous rêvons donc de dialogues fructueux avec la société, nous visons des conquêtes nouvelles et pour cela nous revendiquons notre liberté. Nous revendiquons, pour toutes et tous, l’égalité des conditions de production des biens symboliques.

Une société humaine se juge à ses œuvres. Au moment où l’on voit les injustices et les inégalités sortir par tous ses pores, où la colère gronde, nous voulons, partout, « créer des foyers pour l’imagination. C’est l’acte le plus politique, le plus dérangeant que l’on puisse imaginer ». Nous voulons y contribuer.

Premiers signataires :

Christian Benedetti, comédien, metteur en scène, directeur de théâtre, Luc Chareyron metteur en scène, Christine Citti, comédienne, François Clavier, comédien, Xavier Czapla comédien, Laetitia Dosch, comédienne, metteuse en scène, Valérie Dréville, comédienne, Mark Etc, metteur en scène arts de la rue, Coco Feilgerolles comédienne, Joël Hubaut, artiste plasticien, Laurent Klajnbaum acteur culturel, Léa Le Bricomte, plasticienne, Claude Levêque, artiste plasticien, Josquin Macarez, délégué artistique, Christian Malaurie, anthropologue de l’art et du design, Chiara Mulas, artiste plasticienne, Alice Mulliez et Florent Konne, duo d’artistes plasticiens, Olga Papp, chef costumière, Sophie Passarre actrice culturelle, Gilles Perret, réalisateur, Serge Pey, poète, Aldo Romano, musicien, Aimée-Sara Bernard, comédienne, Michel Simonot auteur, sociologue, Françoise Romand, cinéaste, Joséphine Serre, autrice, metteuse en scène, Kazem Shahryary, poète, Diane Wurtz Dj, réalisatrice.

pour rejoindre et signer la tribune : noussommespour.art@gmail.com

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