Depuis plus d’un an, tous les insoumis font campagne pour la levée des brevets sur les vaccins contre le Covid. L’épidémie de coronavirus révèle l’unité de l’Humanité. L’exposition au virus de populations dans quelque point de la surface du globe menace l’ensemble des êtres humains. D’où le fait que l’ère des pandémies comme celle du changement climatique est propice à la prise de conscience de l’existence d’un « peuple humain ». Dans ce contexte, le camp mondial que nous représentons en France pousse pour adopter des solutions collectivistes pour nous sortir de cette situation.
Le vaccin contre la Covid 19 a toutes les raisons d’être mis en liberté d’accès, de production et de diffusion. c’est-à-dire en « licence libre ». C’est la seule méthode efficace pour vacciner en masse et librement, les riches comme les pauvres, les pays du nord comme les pays du sud. Ensuite, le vaccin est un produit global de l’intelligence et du travail humain. Il n’aurait jamais pu être découvert sans le travail de recherche mené par des scientifiques du monde entier depuis janvier 2020 et dont les résultats ont systématiquement été mis en accès libre. Ensuite, les laboratoires privés n’auraient pu le développer sans les subventions qu’ils ont reçues des États.
À nos yeux, les brevets sur les vaccins et les traitements sont des manières pour les entreprises du big pharma d’imposer un tribut au peuple en échange de leur santé. C’est pourquoi la question du vaccin libre était tellement importante pour nous. Les Insoumis ont participé à plusieurs actions au cours de ces derniers mois pour faire avancer cette cause. J’ai commencé à demander des vaccins libres et gratuits dès le mois d’avril 2020. Ainsi, je le proposais en ces termes exacts lors d’un meeting numérique : « La France doit faire une proposition solennelle à toute l’Humanité. Il faut dire que nous sommes partisans du fait que le vaccin contre le coronavirus soit universel, gratuit, distribué à tous sans aucun profit. » C’était le 17 avril. Je recommençais quelques semaines plus tard. Le 14 mai, invité chez RTL, j’ai mis sur la table une méthode simple pour lever les brevets sur les vaccins : émettre une licence d’office. Puis les insoumis ont intégré cette question à la proposition de loi pour un pôle public du médicament, défendue en commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale le 27 mai 2020.
Nous nous sommes aussi inscrits dans un combat international. Le 20 février 2021, l’ancien président du Brésil Lula et moi-même avons été à l’initiative d’une tribune internationale pour suspendre les brevets. Nous l’avons signée avec une soixantaine de personnalités du monde entier dont l’ancien président équatorien Rafael Correa, l’ancien ministre des Finances allemand Oskar Lafontaine, des syndicalistes et responsables d’ONG d’Asie et d’Afrique. Ce texte a circulé et a servi de point d’appui pour la mobilisation des nôtres dans certaines parties du monde. Ainsi, le 23 avril dernier, le Parlement andin a fait sienne notre déclaration, en ma présence, à La Paz, en Bolivie.
Parallèlement à nos propres prises de positions, une demande officielle existait dans les institutions internationales. Il s’agit de l’Inde et de l’Afrique du Sud. Depuis le 2 octobre 2020, ces deux pays ont déposé auprès de l’organisation mondiale du commerce une motion afin de suspendre les droits de propriété intellectuelle sur les vaccins, traitements et matériel médical utiles dans la lutte contre le Covid. Au fil des mois, de plus en plus de pays ont rejoint cette position. Il se sont heurtés au refus de l’Union européenne et de Macron à deux reprises.
Au niveau européen, les députés insoumis ont été très actifs. Ils ont dénoncé la connivence insupportable entre les dirigeants de l’Union et les laboratoires privés. Ils ont agi sans relâche pour faire avancer l’idée de la levée des brevets. D’abord comme parties prenantes de l’initiative citoyenne européenne « pas de profits sur la pandémie », portée par des médecins de plusieurs États européens, des partis politiques, des syndicats et des associations. Le 28 avril dernier, notre groupe de députés européens a déposé un amendement pour la licence libre. Les députés de droite, les macronistes et même les socialistes l’avaient rejeté.
Mais Joe Biden a changé la donne. En effet, le Président des États-Unis s’est déclaré le 5 mai en faveur de la proposition de suspension des brevets. Jusqu’ici, son pays faisait blocage avec l’Union européenne, occupant son rôle classique de protecteur des profits des multinationales. Il a changé de position. Macron, qui racontait encore la veille le contraire, s’est immédiatement aligné. Il avait pourtant beaucoup bataillé contre cette idée. Par exemple le 19 février 2021 lors d’une interview au Financial Times : « je pense que ce n’est pas le bon débat, que ce n’est un débat utile ». Ou encore devant l’Organisation mondiale de la santé le 23 avril : « Nous entendons beaucoup parler en effet de transfert ou d’absence de propriété intellectuelle. Le sujet, nous le savons aujourd’hui, n’est pas celui-là. »
Victoire ! Le 19 mai, le Parlement européen a voté une résolution reprenant les positions que les insoumis y ont défendu pendant des semaines. Notons que les députés macronistes dans leur grande majorité n’ont fait que s’abstenir mollement. C’est un début. Mais leur retournement, ainsi que celui de Biden, ne s’est pas produit pas magie. C’est le résultat de cette campagne mondiale menée pendant des mois. Elle a maintenu une pression constante, fait connaitre auprès du grand nombre les enjeux et finalement eu raison des gouvernements les plus récalcitrants. La levée des brevets doit encore être décidée. Nul doute que le lobby pharmaceutique et ses gouvernements alliés feront tout pour la retarder. Pour nous c’est une double victoire. D’abord concrète puisqu’elle va permettre à des centaines de millions de personnes d’accéder au vaccin. Ensuite culturelle : même Joe Biden a été obligé d’admettre que les règles du capitalisme sont inefficaces pour régler la pandémie.