COP ou pas cap ?

Les COP se suivent et se ressemblent. Hélas. Cela fait trente ans que les conférences internationales et les rapports scientifiques tirent la sonnette d’alarme climatique. Pour quel résultat ? Il y a 5 ans, les États participants à la COP21 s’accordaient pour contenir le réchauffement climatique en dessous de 2 °C, voire le limiter à 1,5 °C. L’Accord de Paris était signé dans un tonnerre d’applaudissements. Pourtant, à la veille de la COP26 qui se tiendra à Glasgow, le bilan n’est vraiment pas bon.

La pandémie n’a été qu’un répit en trompe-l’œil. En 2020, les émissions de gaz à effet de serre sont au plus haut. Si cela se poursuit, l’Organisation météorologique mondiale prédit un réchauffement d’environ 4 degrés d’ici à la fin du siècle. Cette nouvelle donne climatique pourrait s’imposer plus vite que prévu. Ainsi, dans le premier volet de son rapport publié en août 2021, le GIEC estime qu’au rythme actuel d’émissions, la barre de 1,5°C de réchauffement sera atteinte avant 2030.

On n’en finit plus de lister les perturbations déjà à l’œuvre : inondations, montée des eaux, incendies géants, ralentissement du courant océanique… Pour s’arrêter à +1,5°C et son lot de conséquences irréversibles, il faut diviser par deux les émissions mondiales de gaz à effet de serre. Le temps est compté : on doit le faire en moins de 10 ans. Concrètement, cela signifie multiplier le niveau d’ambition par 7. Autant dire que la pente est raide ! Or, les engagements actuels sont très loin d’être suffisants. Même s’ils étaient atteints, ils nous conduiraient tout droit vers un réchauffement de +2,7°C à la fin du siècle.

Évidemment, le problème de ces engagements c’est leur caractère purement déclaratoires. L’Accord de Paris ne prévoit aucun mécanisme de sanctions. Résultat, la litanie des promesses se transforme en compétition d’affichage diplomatique. Les objectifs de neutralité carbone à horizon 2050 voire 2060 sont faciles à brandir. Ils ne coûtent rien à court-terme. Et même s’ils étaient atteints, ils permettraient seulement de contenir le réchauffement à +2,2 °C. Nous ne sommes donc pas dans les clous de l’Accord de Paris.

La COP26 doit permettre de rehausser à nouveau les ambitions. Il faut l’espérer. Mais sans dimension contraignante, cela sera un nouveau coup d’épée dans l’eau. D’ors et déjà, le ver est dans le fruit. En effet, l’article 6 de l’Accord de Paris permet la mise en œuvre de mécanismes autorisant les pays à s’acheter des crédits de droit à polluer pour tenir leurs engagements. La compensation carbone et la régulation par le marché sont un leurre. En effet, autoriser les entreprises à planter des arbres pour continuer à polluer est une fausse solution. Il faut donc y renoncer.

Au contraire, il est urgent de créer du droit international contraignant. 2000 scientifiques et 700 ONG réclament un traité de non-prolifération des énergies carbonées. J’y suis pleinement favorable. La Bolivie propose aussi l’instauration d’un international de Justice climatique et environnementale depuis 2009. Des négociations en faveur d’un traité pour contraindre les multinationales à respecter les droits humains et l’environnement patinent depuis 2014. Qu’attend-on ?

La COP26 doit aussi se pencher sur d’autres aspects non moins cruciaux. Je parle des financements. Il s’agit d’aider les pays en développement à opérer la bifurcation écologique et à s’adapter aux conséquences du changement climatique. Cela presse car celles-ci sont déjà concrètes. Ainsi, à Madagascar, un million de personnes subissent la première famine au monde causée par le changement climatique. Pour cela, les pays développés se sont engagés à mobiliser 100 milliards de dollars chaque année de 2020 à 2025. Mais cette somme ne sera pas réunie avant…2023. Pendant ce temps, les 1% les plus riches de la planète polluent 100 fois plus que la moitié la plus pauvre de l’humanité.

Pour réduire les émissions de gaz à effet de serre, il faut sortir des énergies fossiles. Pour l’heure, celles-ci sont arrosés de 11 millions de dollars de subventions publiques par minute à l’échelle mondiale. Autant d’argent qui n’est pas investi dans les énergies renouvelables et la modification en profondeur de nos façons de produire. Pire, d’ici 2030, les prévisions mondiales de production de charbon, de pétrole et de gaz sont deux fois supérieures à celles compatibles avec une limitation du réchauffement à +1,5°C. Pourtant, les gouvernements ont les moyens d’agir. En effet, via les entreprises d’État, ils contrôlent plus de la moitié de la production mondiale de combustibles fossiles.

Le lobbying anti-climat continuer de tourner à plein régime. Certains États cherchent carrément à influencer la rédaction du dernier rapport des scientifiques du climat. Greenpeace révèle ainsi que l’Organisation des pays exportateurs de pétrole a tenté de faire supprimer la conclusion suivante : « Si le réchauffement doit être limité à 2°C, environ 30 % du pétrole, 50 % du gaz et 80 % des réserves de charbon resteront incombustibles ». Mais supprimer les phrases n’enterre pas les problèmes. Côté français, Total avait connaissance de son impact climatique depuis 50 ans. Qu’ont-ils fait ? Rien sinon pire : user pendant longtemps de la stratégie du doute pour empêcher toute avancée.

Avec Macron, auto-proclamé champion de la Terre, la France est loin d’être exemplaire. Le gouvernement français continue de subventionner massivement les énergies fossiles et ne prévoit pas d’y mettre un terme avant 2035. Il été condamné en octobre 2021 pour inaction climatique. Entre temps, Macron a décidé d’abaisser encore les ambitions climatiques de la France. En un tour de passe-passe, il a revu à la hausse les émissions de CO2 autorisées jusqu’en 2023. La loi Climat votée cet été est déjà obsolète. À ce rythme, la France n’atteindra pas la neutralité carbone avant 2085.

Pourtant, le rapport RTE et Négawatt démontrent qu’atteindre le 100% renouvelables et la neutralité carbone en 2050 est tout à fait possible. Nous avons « huit ans pour élaborer les plans, mettre en œuvre les politiques et finalement y parvenir. Le temps presse dangereusement » insiste la directrice du Programme des Nations Unies pour l’Environnement. 2030 commence en 2022.

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