Le 21 janvier 2023, Jean-Luc Mélenchon prenait la parole lors de la manifestation à l’initiative des organisations de jeunesse contre la réforme des retraites du gouvernement d’Emmanuel Macron.
Pour voir le direct de la marche en intégralité : https://youtu.be/e6AIswdDdCg
Retrouvez ci-dessous la retranscription de son discours :
« La vérité, c’est qu’ils n’ont pas compris pourquoi nous sommes là. Nous ne défendons pas seulement, mais ce serait suffisant, le droit de marquer la pause dans l’existence, mais surtout, nous disons le temps de la vie, celui qui compte, ce n’est pas seulement celui que vous croyez utile parce qu’il produit. Le temps n’est pas seulement le temps contraint qui est socialement utile, celui du travail, c’est aussi le temps libre.
Et le temps libre c’est le temps de la vie non pas inactive, mais de la vie dont on dispose soi même, où l’on décide soi même de ce que l’on va faire. C’est-à-dire vivre humainement et socialement pour y faire non pas ce que d’autres ont décidé, mais que ce que soi même on a décidé de faire : vivre, aimer, ne rien faire si l’on veut s’occuper des siens, lire de la poésie, faire de la peinture, chanter ou ne rien faire.
Le temps libre est celui où nous avons la possibilité d’être totalement humains. Voilà de quoi nous parlons et eux ils disent : “il faut travailler davantage”. Mais alors nous nous demandons pour quoi faire ? Pourquoi ? Quand la tendance générale du siècle passé a été de diviser le temps de travail nécessaire par deux et qui ont augmenté ce que l’on appelle la richesse par 50 ?
Pourquoi faudrait-il travailler davantage ? Pourquoi faudrait-il produire davantage ? Non. La clé de l’avenir et du futur, ce n’est pas de produire davantage parce que ça, c’est la mort assurée de la planète. Ce qu’ils produisent, en plus, c’est du jetable. Ce qu’ils produisent en plus, c’est du gâchis quand 30 % de la production agricole s’en va en gâchis, quand chaque personne dans sa vie est conduite involontairement à détruire tant de kilos de nourriture.
La question posée n’est pas celle de produire davantage, c’est de produire mieux. Et pour le faire, il faut travailler moins.
La clé du futur écologique, c’est qu’il faut travailler mieux, donc travailler moins. Et en travaillant moins, la peine pourra être répartie plus également entre tous. Si bien que travailler moins, c’est travailler tous et c’est peiner moins. Ce que nous sommes en train de faire, nous sommes en train de défendre le droit de vivre pleinement, humainement, dans un temps libre, dans un temps auto choisi.
Et eux, que veulent-ils faire ? Ce qu’ils font toujours, c’est-à-dire essayer de transformer toute chose vivante ou inanimée, la transformer en marchandise. Eh bien, les deux années qu’ils veulent vous prendre ne feront pas travailler une seule personne de plus, je le sais bien, ce sera des chômeurs de plus, ce sera des malades de plus, mais ce sera surtout de la vie en moins.
Et cette vie qu’ils veulent marchandiser : “allez travailler, disent-ils”. Mais alors, qui va faire ce qui est fait aujourd’hui dans le temps libre, dans le temps gratuit ? Vous autres qui vous occupez de vos petits enfants à cette occasion, même quand ils vous énervent. Eh bien, ce temps de vie qui leur permet à eux les petits d’être pleinement humains parce qu’ils ont ce rapport avec vous, qui va le faire ?
Vous allez donc payer quelqu’un pour le faire ? C’est-à-dire que vous aurez transformé en marchandise ce qui était avant de l’amour gratuit, du don de soi, du partage, de la construction humaine d’une génération à l’autre. Voilà ce que vous voulez faire monsieur Macron, soyez maudits de vouloir transformer toute notre existence en marchandise, comme vous l’avez fait avec la santé, comme vous êtes en train de le faire dans l’éducation au prix de cette monstrueuse grossièreté qui s’appelle Parcoursup. A bas Parcoursup ! Soyez maudits pour vouloir tout transformer en marchandise, tout salir, tout gâcher, tout réduire, tout quantifier. Laissez ce grand souffle que l’on voit ici, dans ces rues, de ces gens magnifiques qui viennent de tous les horizons et pour toutes les raisons, vous dire le seul slogan qui vaille : vive la vie, à bas la mort ! »