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Perquisitions : l’interminable feuilleton

L’interminable feuilleton des perquisitions et mises en causes arbitraires de mes comptes de la campagne de 2017 continue ! Cette fois-ci, c’est à mon avantage. Je viens d’être relaxé de deux plaintes en diffamation déposées contre moi par l’ancien président de la Commission nationale des comptes de campagne. Mon intention n’est pas ici de relancer si peu que ce soit des polémiques qui m’ont déjà assez pourri la vie pendant tant d’années dorénavant par des jeux médiatico-politiques où la justice est assignée à un rôle de terrain d’action par des personnes mues par la haine politique.

Cinq ans plus tard, voici l’énième retombée de cet évènement. Comme suite à deux plaintes de François Logerot en octobre 2019, un procès m’a opposé à lui le 29 novembre 2022.

Il les a perdus, comme on dit. François Logerot a été, de 2005 à 2020, pendant quinze ans, le Président de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques. C’est lui qui, après avoir validé le compte de campagne LFI de la présidentielle de 2017, l’a pourtant signalé à la Justice. Selon certains journalistes, il voulait se protéger ainsi d’une campagne de presse engagée par d’autres journalistes sur ce thème. Il en est suivi un interminable feuilleton de fuites organisées et de pseudo rebondissements abimant interminablement l’image des personnes concernées. Cette peine d’infamie m’a été infligée pendant quatre ans quand bien même je ne suis pas mis en examen et que mes comptes de campagne ont bel et bien été validés.

Ceci m’oblige donc une fois de plus à un rappel (résumé !) des événements et circonstances pour ceux qui étaient trop jeunes à l’époque pour avoir suivi l’évènement ou ceux qui s’y intéresseraient seulement à présent.

De nombreuses critiques publiques ont été faites à La Commission Logerot notamment parce qu’elle s’est trompée sur l’évaluation des comptes de campagne de monsieur Sarkozy et sur la façon dont ont été traités les signalements de presse précis sur certaines dépenses portées au compte du candidat Emmanuel Macron. Mais c’est la seule fois où une critique donne lieu à poursuite judiciaire. Depuis, il apparait que le parquet national financier se pose aussi des questions sur l’évaluation du compte d’Emmanuel Macron pour cette année 2017 où pourtant j’étais obstinément seul à être mis en cause par un signalement.

Quoiqu’il en soit, on doit se souvenir que 1/ Mes comptes de campagne ont été validés 2/ Je ne fais l’objet d’aucune mise en examen. L’enquête préliminaire dure maintenant depuis quatre ans. 3/ J’ai proposé le réexamen public de mon compte de campagne soit par la commission soit par les médias qui le souhaiteraient. Aucune réponse n’a jamais été donnée à mon offre ni par les médias le plus virulents à mon encontre ni par aucune autorité ni organisation politique.

Jusqu’au mois d’août dernier, cette procédure a été l’occasion de « fuites » régulières auprès des membres d’une boucle courte (coucou !) de journalistes qui les ont systématiquement mises en scène de manière hostile et flétrissante parfois contre l’avis d’une partie de leurs collègues dans leur propre rédaction. Elles se sont égrenées au fil des évènements et des élections, singulièrement bien sûr dans la campagne présidentielle.

Quel est le rôle de la CNCCFP, la commission Logerot ? C’est un organe administratif chargé d’analyser les factures des dépenses de chaque candidat à l’élection présidentielle. Ce contrôle oblige les candidats à déclarer la totalité de leurs dépenses, quelle qu’en soit la nature. Cette déclaration doit être absolument exhaustive. Tout, absolument tout, doit être déclaré sans tri préalable. Tout : cela signifie que ce n’est pas le candidat qui choisit ce qu’il demande de rembourser. Puis la Commission décide, elle-même, librement, ce qui est remboursé (jusqu’à hauteur du plafond des dépenses remboursables, évidemment). Sur cette base, elle doit prendre deux types de décisions. D’abord évaluer si le total de ces dépenses reste inférieur au plafond de dépenses autorisées. Ensuite, décider quelles dépenses seront remboursées. Les dépenses non remboursées font l’objet d’une « réformation ». Ces « réformations » se font d’après des règles qu’établit la commission et elle seule. Elle donne lieu à discussion entre ses membres. La « réformation » d’une dépense ne signifie aucunement un jugement à son sujet mais une appréciation de sa conformité aux règles et normes de remboursement établi par la Commission. Rien de plus rien de moins. Cela n’a donc rien à voir avec les insinuations de certains journalistes quand ils laissent penser que ces « réformations » démasqueraient une intention de tromper la Commission. Par exemple quand le mandataire financier du candidat déclare les cafés consommés par l’équipe sur le terrain d’un meeting, le candidat ne demande pas du même coup leur remboursement. Il est obligé de le faire et la Commission décide de son côté si cela doit être remboursé ou non.

Un lourd manquement éthique a vite été révélé avec la désignation de Jean-Guy de Chalvron comme principal rapporteur sur le compte de campagne de LFI en 2017. En effet, il avait été le directeur de cabinet de Louis Mexandeau, ministre socialiste, avec lequel j’ai eu de nombreux différends politiques quand j’étais membre de ce parti. De Chalvron n’avait mentionné à aucun moment ce potentiel conflit d’intérêts. De l’aveu même du Président Logerot, s’il l’avait su, il ne l’aurait jamais désigné. L’autre rapporteur, monsieur Hillaret, a confirmé que De Chalvron m’était personnellement hostile. Point également en débat : le défaut de formation des rapporteurs. De son aveu même, De Chalvron, n’a bénéficié que de deux jours de formation en droit électoral. Ce qui explique que son point de vue n’était pas adapté à la tâche et qu’il « voyait du pénal partout ». Avec son équipe, il avait six mois pour analyser près de cinq mille factures de LFI. Jean-Guy de Chalvron a démissionné de la commission le 22 novembre 2017. Selon les termes du président François Logerot, il a « quitté le navire sans même nous l’expliquer ». Cette démission fracassante intervient alors qu’il n’avait pas fini sa mission. Dès lors, les autres membres de la commission ont dû tout reprendre au point de départ, selon leur propre déclaration devant les policiers.

Au départ, les récriminations du rapporteur De Chalvron à la presse concernent seulement ses divergences avec François Logerot. Il lui reprochait d’avoir un pouvoir prépondérant pour trancher définitivement les critères de « réformation » des comptes en général (et donc aussi celui de Jean-Luc Mélenchon). Ce conflit n’intéressait pas les médias. Mais la présence de « Jean-Luc Mélenchon » paru vite être l’occasion d’un buzz profitable. C’est donc sous cet angle qu’un média a concentré son attention sur mon seul dossier courant 2018. Pourtant, la validation finale de mon compte de campagne était déjà intervenue depuis le 21 décembre 2017. Le ciblage personnel se prolongea comme une véritable méthode. En effet, seuls ses comptes de campagne furent distribués aux journalistes dans une clef USB lorsque tous les documents de toutes les campagnes électorales furent mis à la disposition de la presse. Aucun autre compte n’était donc analysable de la même façon ni aussi directement accessible. Quoiqu’il en soit, aucun média ne fit d’analyse de ces comptes et tous se contentèrent de recopier les affirmations fausses de l’un d’entre eux. C’est pourquoi avec la LFI j’ai proposé la reprise et l’examen public de tous ces comptes. J’ai ensuite précisé que si besoin je proposais seulement que cela soit fait pour les miens. Ni la commission ni les médias concernés n’ont jamais répondu à cette invitation.

Il n’y avait aucune suspicion sur aucun aspect du compte de campagne LFI de la part des commissaires chargés de les examiner. D’ailleurs, le total des « réformations » sur ce compte s’élève à seulement 430 000 euros sur un total de 11 millions de dépenses ! A peine 3% du total ! Compte tenu du fait que toutes les dépenses sans exception ont dû être déclarées cela prouve le sérieux des dépenses et la conformité de leur engagement dans 97% des cas alors même que les règles de dépenses n’étaient pas toutes connues avant la remise des comptes.

Cette validation des comptes est devenue définitive à l’expiration de son délai de recours le 13 février 2018. Comme je n’ai rien demandé, je n’ai rien contesté de ces « réformations ». De plus, en évitant la déclaration de mon association « l’ère du peuple » comme micro parti, j’ai fait économiser 1,3 million au contribuable. Je devrais être plutôt félicité que mis en cause !

Pourtant, après avoir décidé cette validation, le président François Logerot de la CNCCFP a fait un signalement judiciaire du compte le 16 mars 2018. Le journal L’EXPRESS confirmait alors la cause réelle : « la publicité autour de la démission du rapporteur De Chalvron aurait, selon nos informations, conduit la CNCCFP à se décider d’effectuer un signalement le 16 mars 2018 au Procureur de la République de Paris, parallèlement à sa décision de valider le compte de campagne ». Incroyable ! La commission se déclarait incapable de vérifier la véracité des sous-entendus de De Chalvron contre la sincérité du compte ! Cela alors même que c’est sa raison d’être. Cela alors qu’elle venait de valider les comptes ! Et alors que les articles de presse ne comportaient aucune indication précise incriminant la sincérité de mon compte ! Et cela alors même que par sa décision, la commission avait démenti les accusations de monsieur De Chalvron ! Seul un média audiovisuel s’était risqué à citer un chiffre de coût/minute de vidéo jugé excessif. Pourtant il s’agissait du prix du marché conformément aux exigences de la Commission ! LFI s’interrogea publiquement sur le fait que le journaliste concerné avait caché à sa propre rédaction être lui-même propriétaire d’une agence de communication travaillant notamment pour des élus PS !

On voit comment seules des mises en causes médiatiques répétées, sur un mode allusif, sans arguments précis, ont créé une ambiance conduisant à un signalement « ouverture du parapluie » de la part de François Logerot qui ne mentionne aucun fait ni sujet précis de suspicion dans son signalement. C’est là très exactement le mécanisme de la boucle média-police-justice qui a permis dans tous les pays la mise en place de l’instrumentalisation politique de la justice.

C’est encore par voie de presse que j’ai appris, le 29 mai 2018, l’ouverture de l’enquête préliminaire visant le financement de ma campagne. L’Office central de lutte contre la corruption et les infractions financières et fiscales (l’OCLCIFF) était alors saisi, avec pour objectif de procéder à des vérifications sur une « éventuelle violation des prescriptions du code électoral relatives au financement des campagnes électorales ». « Éventuelles », pas davantage de précisions.

Alors commence le grand spectacle outrancier et abusif. Car les comptes eux-mêmes ne montrent rien d’illicite. Faute d’éléments trouvés dans les documents, l’OCLCIFF procédait le 16 octobre 2018, à la perquisition de 17 lieux – dont 15 domiciles privés – dans l’espoir de trouver « par surprise » (dixit la procureure de Paris) des éléments à charge. Ici nous sommes en plein régime de « présomption de culpabilité » sur la base d’un signalement pourtant sans aucun faits précis à charge. L’événement se situe près de quatre mois après l’ouverture de l’enquête préliminaire. Autant dire que si les perquisitionnés avaient eu des intentions malveillantes que resterait-il à trouver chez eux ? La « surprise » n’a aucun sens, surtout quand il manque des personnages clefs de la campagne dans la liste des perquisitionnés (comme le directeur de la campagne) mais que s’y trouvent des gens qui n’avaient aucune responsabilité dans celle-ci. Nombreux sont ceux qui en ont déduit qu’il s’agissait d’une mise en scène politique. En effet le caractère exceptionnel et jamais égalé dans l’histoire politique de telles perquisitions a été souligné par tous les observateurs dont le Président du Sénat, en raison de leur envergure sans précédent, contre le siège et les dirigeants d’une formation politique d’opposition dont le président d’un groupe parlementaire.

Les perquisitions ciblaient ou bien oubliaient (selon des critères inconnus) divers participants à ma vie politique (jusque dix ans auparavant pour des contrats de travail parfois très réduits) et à ma campagne présidentielle. Elles accumulaient les erreurs d’adresses, de personnes et de conduites des opérations (un récit drolatique reste à écrire). Elles étaient, de surcroit, émaillées d’incidents, très largement relayés dans la presse. Le parquet décidait, là encore de façon inédite, de faire citer plusieurs responsables politiques avec moi devant le Tribunal correctionnel de Bobigny pour « rébellion et provocation » aboutissant à une série de peines et de dédommagements financiers sidérants. Rien de tel ne fut décidé contre madame Le Pen à propos d’incidents plus graves (dissimulation ostensible de matériel réclamé par les perquisiteurs) mais largement comparables quelques mois plus tard au siège du FN au cours d’une perquisition pourtant elle aussi relatée dans la presse.

Le livre en cause, « Et ainsi de suite », est un plaidoyer politique. Ces événements exceptionnels ont été l’occasion pour moi de mener une réflexion personnelle approfondie sur leur signification politique. « Et ainsi de suite » publié aux éditions PLON, prend la forme d’un journal, rédigé au jour le jour. J’ai livré ma version des événements et mon analyse politique au fil de la plume et de récits sur divers thèmes. J’ai engagé cette écriture après la révélation du fait qu’un des substituts du procureur qui a mené la perquisition à mon domicile avait été membre d’une « mission d’échange des bonnes pratiques » auprès d’un juge brésilien bien particulier. Car celui-ci en effet avait inculpé et fait condamner à tort et pour des raisons politiques l’actuel président Lula depuis lors réhabilité en 2021 et réélu président du Brésil en 2022. Le livre paru le 19 septembre 2019, à la veille du procès qui devait se tenir à Bobigny. Il me paraissait inacceptable qu’aucun commentateur n’ait jamais évoqué ni étudié l’une des innombrables irrégularités ou conflits d’intérêts qui émaillent toute la procédure depuis le début (et qui ne sont pas toutes présentées ici mais le seront le moment venu selon le déroulement des évènements à venir et les besoins de ma défense). Cela me conduit à identifier l’évènement comme un cas d’instrumentalisation politique de la Justice comme il s’en est produit contre la plupart des leaders de gauche dans le monde. Connu sous le nom de « lawfare », le procédé a donné lieu à propos de cette affaire à un documentaire.

L’écriture me sert aussi « d’exutoire », je le reconnais, pour parler de cette séquence. Elle a été d’une très grande violence politique, mais aussi spécialement éprouvante à titre personnel. Pendant les quatre années suivantes, la presse y a fait référence et pendant huit mois les images en ont été diffusées tous les soirs dans le générique d’une émission regardée par un million de personnes. Mesurons le choc que représentent les perquisitions à mon domicile ainsi qu’à celui d’une dizaine de mes anciens collaborateurs, la déferlante médiatique elle-même suivie d’un renvoi devant le tribunal correctionnel. Au fil des pages de mon livre, sont évoqués des sujets plus généraux. Mais aussi les liens entre la justice, le pouvoir et la presse, où la façon dont les enquêtes peuvent être menées dans différents contextes politiques. C’est dans cet ouvrage qu’ont été publiés les propos poursuivis par Monsieur François Logerot, au sein d’un chapitre démarrant dans l’émotion des termes suivants : « 13 août – 22 heures. Je me repasse la scène. »

Pour sa plainte, François Logerot met en cause d’une part des mots très polémiques et d’autre part un extrait du texte du livre. Pour ce qui est des mots, cela vaut pour toute polémique politique et on a vu désormais pire à l’Assemblée nationale et à la télévision. Sans exagérer, on peut aussi comprendre la véhémence dans le contexte de violences morales et psychologiques injustes que j’ai subies. Mais le plus substantiel est l’accusation des chefs de « diffamation publique à l’égard d’un citoyen chargé d’une mission de service public » sur la base de passages précis de l’ouvrage. Cela peut laisser penser à une volonté d’empêcher l’appréciation de mes comptes. C’est à mes yeux le plus important. En effet je n’ai aucun compte personnel à régler avec monsieur Logerot que je ne connais pas. Par contre, je suis directement concerné personnellement par les imputations sur mon compte de campagne qui est absolument régulier et validé par monsieur Logerot lui-même. Quels sont les passages de mon livre concernés par la plainte de monsieur Logerot ?

1« Le président de la Commission nationale des comptes de campagne, François LOGEROT, s’est offert le ridicule d’opérer un signalement auprès du parquet deux mois après avoir pourtant validé l’ensemble de mes comptes. Pourquoi ? Selon L’Express c’est parce qu’il avait lu dans la presse qu’il y aurait un problème. Ah le brave homme. Il a vite vu son salaire augmenté de 57%. »

2 « Le président Logerot a jugé bon de signaler ces donateurs. Mais pas le candidat Macron qui a accepté leur argent de trop ! Fine mouche ce Logerot ! » « J’ai déjà dit qu’après nous avoir signalé, son salaire a été augmenté de 57%. L’ingratitude est mal acceptée dans ces milieux ».

Peut-on dire que ce soit là des expressions exagérément violentes en général et singulièrement dans le contexte ? Pas sûr en Droit en tous cas. Sur le plan du Droit, pour être diffamatoire, une allégation doit imputer un fait précis, attentatoire à l’honneur, susceptible de faire l’objet d’un débat contradictoire sur la preuve de la vérité affirmée par celui qui accuse. En droit, lorsque les propos tenus expriment une opinion ou un jugement de valeur, ils ne peuvent pas être jugés diffamatoires. La Cour de cassation a ainsi pu juger que relèvent du « simple jugement de valeur » les propos d’un avocat au sujet d’une transaction fiscale entre le groupe Pinault et le ministère des Finances, la qualifiant de « troublante coïncidence » et affirmant : « il y a eu incontestablement une transaction très avantageuse pour Monsieur X dans des conditions qui sont très choquantes ». (Crime. 14 mai 2009, n°08-15.903) *

Des termes autrement plus durs ont été employés par d’autres. Ceux utilisés par moi sont plus mesurés que les mots sur le même sujet de l’article du PARISIEN du 6 juin 2018, intitulé « Grosse augmentation de salaire pour le président de la Commission des comptes de campagne », mettait en exergue que « cette augmentation intervient pile au lendemain de l’annonce de l’ouverture d’une enquête préliminaire sur les comptes de campagne présidentielle de Jean Luc Mélenchon qui avait donné lieu à la démission fracassante de l’un des rapporteurs ». Aucune poursuite n’a été engagée par François Logerot contre ces lignes…

De la même manière, un article de L’OBS en date du 7 juin 2018, intitulé « Comptes de campagne : le président de la Commission répond aux polémiques » soulignait que la CNCCFP était « la cible de critiques » pour avoir « saisi la justice sur des soupçons de surfacturation de la campagne de Jean-Luc Mélenchon » et être « passé à côté » d’éléments laissant penser que le candidat Emmanuel Macron avait bénéficié d’importantes ristournes.

Comme candidat; je n’évoque pas uniquement le signalement de mon propre compte. Je rappelle notamment les choix arbitrés par la CNCCFP concernant certains dons qui ont bénéficié à la campagne du candidat Emmanuel Macron. En effet il a été décidé par l’organe présidé par Monsieur François Logerot, de procéder au signalement de quatre donateurs de la campagne du candidat Emmanuel Macron. Mais sans que cela le conduise à faire un signalement du mandataire qui a perçu et bénéficié de ces dons et dont la responsabilité aurait pu être engagée. « Le président Logerot a jugé bon de signaler ces donateurs. Mais pas le candidat Macron qui a accepté leur argent de trop ! Fine mouche ce Logerot ! » ai-je écrit. Le passage poursuivi a donc pour objet de critiquer ce choix. Je n’ai pas été le seul à le faire Il a aussi été discuté publiquement dans la presse. Par exemple, le journal MARIANNE s’est interrogé, dans un article en date du 21 février 2018 sur un fait saillant resté pourtant sans suite. L’hebdomadaire a posé la question de savoir : « si la responsabilité du mandataire du candidat sera elle aussi interrogée. En effet, en délivrant un reçu fiscal pour deux dons quand un seul y était éligible, celui-ci s’est aussi mis sous le coup de la loi puisque le Code général des impôts (articles 1740A quater) dit ceci : ’’toute personne, organisme ou groupement qui délivre irrégulièrement des certificats, reçus, états ou attestations permettant à un contribuable d’obtenir une déduction du revenu ou du bénéfice imposable, ou une réduction d’impôt, est passible d’une amende fiscale égale à 25% des sommes indûment mentionnées sur ces documents’’ ».

Je n’exprime rien de plus qu’un jugement de valeur sur l’action de François Logerot. C’est un droit de critique qui appartient à tout citoyen à propos de tout acte public. Ce qui est mis en cause c’est la décision et son incohérence. Dans le premier passage, il est tout d’abord indiqué que le plaignant s’est « offert le ridicule d’opérer un signalement auprès du parquet ». Une telle affirmation constitue une opinion sur ce signalement, dénué de sens puisqu’il va à l’encontre de la décision de la CNCCFP elle-même de valider le compte de campagne. C’est à ce titre que je l’ai qualifié « ridicule », ce qui n’est pas une injure mais une appréciation politique. Le reste du passage dans le livre expose d’ailleurs, comme le journal L’EXPRESS, comment le signalement aurait été opéré uniquement par peur d’un retentissement médiatique (« …c’est parce qu’il avait lu dans la presse qu’il y aurait un problème… »). Ainsi je critique une décision prise par seule peur d’accusations par médias interposés à la suite de la démission du rapporteur Jean-Guy de Chalvron. Je mets en cause la valeur du motif d’une décision aussi lourde de conséquences pour moi.

Dans ce passage, je qualifie aussi de façon narquoise de « brave homme », pour souligner ironiquement l’augmentation d’un fonctionnaire dont les décisions professionnelles sont pourtant aussi critiquables de mon point de vue. Ce dernier a en effet vu sa rémunération augmenter de 57%, ce qui est un pourcentage très élevé, en plein mandat et de façon rétroactive au 1er janvier de l’année 2018, ce qui est totalement inhabituel. Je ne suis pas le seul à m’être interrogé. Beaucoup plus directement à ce sujet, l’association ANTICOR a également considéré qu’il s’agissait d’un sujet interrogeant l’intérêt général. Elle a engagé un recours gracieux, le 17 juillet 2018, auprès du Premier Ministre, estimant que : « le fait d’augmenter ainsi le président d’une autorité administrative indépendante au cours du mandat de ce dernier est susceptible de porter atteinte à son indépendance ».

Logerot déclenche pourtant contre moi seul une action judiciaire au motif que ce type de remarque sur sa rémunération insinuerait qu’il ait fait l’objet de corruption passive. Ce n’est pourtant pas ce que je dis. Mais s’il le croyait pourquoi Logerot n’a-t-il pas poursuivi tous les auteurs qui ont laissé entendre autrement plus directement dit que c’était le cas ?

Tout cela rappelle comment dès le mois de juin 2018 des questions légitimes se sont posées, sur les choix opérés par la CNCCFP quand elle choisit de signaler un seul candidat alors que le doute existait bien plus matériellement sur un autre. Les mêmes questions ont été publiquement posées sur le moment et la rétroactivité de la rémunération du Président de la CNCCFP. Ces questions ont été formulées dans toute sorte d’organes de presse. Pourquoi suis-je le seul poursuivi ?

Le livre « Et ainsi de suite », est éminemment politique. Il a pour objet de répondre aux nombreux commentaires dont mon action a fait l’objet en raison du déroulé des perquisitions. Il se positionne dans le cadre du débat que peut et doit animer un parlementaire face à des choix perçus comme arbitraires et franchement contradictoires, de la part d’une autorité administrative indépendante dont le fonctionnement est mis en cause depuis de nombreuses années, avec à sa tête un Président lui-même objet de vives critiques dans la presse pour les décisions que je lui reproche comme d’autres. Alors pour ma défense je demande que me soit reconnu le bénéfice de la « bonne foi ». Je réclame pour les militants politiques une liberté de ton particulière quand ils s’expriment dans une polémique politique. Au cas précis, de surcroit, je suis moi-même mis en cause personnellement sur un mode pénalisant. François Logerot cherche à éviter tout débat sur sa fonction de Président de la CNCCFP. Est-ce légitime de la part du tenant d’une structure administrative, certes indépendante, mais toujours soumise comme tout autre en démocratie à la vigilance publique ?

Les citoyens sont alertés. Ils peuvent voir comment une campagne de titres de presse, même très allusive, permet d’obtenir une incrimination judiciaire. Celle-ci envoie ensuite le prévenu pour des années dans le circuit judiciaire, très couteux en temps, argent et nerfs, des convocations et dépositions. Tout cela dans une ambiance de fuites relayées ensuite avec des commentaires possiblement malveillants et des accusations toujours flétrissantes.

Ce procédé continue encore aujourd’hui contre plusieurs dirigeants LFI avec son lot de titre racoleurs. Même quand cela est suivi de présentations qui parfois montrent exactement le contraire de ce que dit le titre. Elles permettent une stratégie de la « diffamation judiciaire », consistant à présenter les motifs d’investigation dans le vocabulaire du droit pénal. La répétition des termes « escroquerie en bande organisée » ayant permis d’accabler des dizaines de fois des gens payés au salaire de 1700 euros mensuels pour un excédent final après impôt de 6000 euros à une association sans but lucratif ! Et cela parce que le trésorier est accusé d’avoir décidé au lieu et place du président. Considéré alors comme « gestionnaire de fait » cela établirait à soi seul « l’escroquerie » et la ribambelle de termes infamants qui vont avec est reproduit avec délice par les journalistes hostiles à LFI ! Exemple : puisqu’il est gestionnaire de fait untel voit ses comptes réputés « faux » s’ils sont « faux » il y a « usage de faux » et « recel » etc… La même règle appliquée à d’autres associations de tout type enverrait des milliers de leurs présidents au tribunal. Le sommet du ridicule vient quand l’accusation d’escroquerie s’applique à quelqu’un qui n’a jamais reçu aucun salaire ni un quelconque avantage matériel (ticket de restaurant, défraiement de taxi ou autres) créant ainsi la catégorie d’ « escroc bénévole », en quelque sorte. Le cas des « comptes de campagne de Jean-Luc Mélenchon » est une combinaison de malveillances politiques médiatiques, de méthodes pataudes de pied nickelé dans leur mise en œuvre.

D’innombrables fuites de presse ont eu lieu à la suite de la perquisition du 16 octobre 2018. Sans suite, sans sanction, même quand en février 2018 il y eut la publication dans l’OBS d’une photo de scellés (!) et d’une description de mon comportement lors de mon audition au sein de l’OCLCIFF. Nous avons demandé le dessaisissement de l’OCLCIFF. Des plaintes ont été déposées après chaque fuite. Elles ont été classées sans suite où alors elles « stagnent ». Aucune des actions des Insoumis n’a jamais abouti.

Pourquoi ? C’est l’évidence : ce système marche dans une boucle : pouvoir/police/presse/justice où chaque élément anime et dépend des effets de l’autre. Dans ce quadrilatère, les Insoumis sont sans levier. En effet, aucun média ne peut reprendre à son compte les interrogations sur les innombrables irrégularités de cette affaire depuis le début. Ni sur les comportements du juge Dominique Blanc chargé du dossier bien qu’il ait été avant cela détaché pendant cinq ans comme directeur adjoint des services d’une région présidée par un socialiste, à l’époque où j’étais opposé au PS comme député européen de la circonscription. Un juge par ailleurs signataire d’une tribune favorable à la réforme de la justice prônée par François Hollande. Désormais, il est de nouveau muté (à Rennes) après déjà deux changements (de son fait) dans la conduite de l’enquête. Cette étrange protection médiatique d’un homme du système est un fait. Elle a lieu soit par parti pris politique, soit par peur de l’interruption de l’accès aux informations illégalement disponibles par les « fuites ». Car elles résultent d’un système opaque, très fermé et très concurrentiel. Et très protégé par ceux qui le font fonctionner. Au point d’être capable de relancer des affaires ou de vouloir les orienter par des harcèlements sur les juges. Ou bien par des harcèlements publics comme celui cherché par deux journalistes cet été pour substituer l’actualité de leurs accusations sans fondement (et sans suite) à celle du lancement politique de nos journées de rentrée.

Les militants savent depuis cinq ans ce qu’est l’évolution autoritaire du régime sous lequel nous vivons. Le soupçon sur la Justice est désormais relayé par des accusations ouvertes formulées par des organisations de police factieuses. Il est relayé par la volonté du pouvoir qui en supprimant la police judiciaire veut placer la possibilité de la conduite des enquêtes judiciaires dont il se méfie sous l’autorité de la seule direction de la police.

La conscience républicaine dicte un comportement qui doit être plus éclairé que jamais : ne pas faire de notre réplique contre l’injustice que nous vivons et les brutalités que nous subissons un réquisitoire contre une autorité sans laquelle aucune République libre n’est vivable.

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