Les blocages paysans sur les routes, celui du budget Macron-PS par la droite, et combien d’autres causes mettent en mode pause notre pays. Le Président est aux Emirats… Ses épigones à Paris semblent hors sol. De très larges secteurs de la population n’ont plus la tête aux bastons parlementaires. Tout semble suspendu à je ne sais quelle attente, d’on ne sait quel lendemain, comme si le présent était devenu totalement incertain et démotivant. La bataille des paysans est un moment significatif du débordement dégagiste qui agite la profondeur du pays. Ce sentiment touche tous les secteurs de la société. L’un après l’autre en témoigne. C’est le sens du moment politique français. Face à tout cela, rien ne semble tenir. Et aucune autorité ne semble capable de sortir par le haut des impasses qu’elles n’ont pas vu venir. Le report de la décision de l’Union européenne en témoigne. Il aura suffi de la France et de l’Italie pour que tout soit bloqué. Tant mieux. C’est aussi une leçon à mes yeux. L’Allemagne n’est pas l’incontournable de l’Europe. À retenir pour la suite. En France face aux paysans ? La FNSEA attend que les CRS fassent le boulot. Et le gouvernement est presque aux abonnés absents. Et ainsi de suite.
Tout montre une ambiance générale de décomposition. Il est donc assez peu probable que les élections municipales échappent au dégagisme. RN d’un côté, LFI de l’autre avancent alors en face à face un peu partout sur le terrain comme alternative à l’ancien monde politique. Dans le Nord, autour du cas Arcelor Dunkerque. Dans le monde paysan en colère. Et sur des dizaines d’autres fronts qui passent sous les radars. Pour les Insoumis, dans ces conditions, toutes les réunions préparatoires pour les municipales sont des succès de masse. Nous découvrons. Car telle n’était pas l’ambiance. La recomposition des forces politiques se prolonge dans des contextes de plus en plus troubles et souvent insaisissables. On a pu observer l’effondrement de la droite politique dans sa campagne pour prendre le leadership du combat contre « l’islamogauchisme » à l’occasion de la commission dont Wauquiez était l’inventeur. Elle a un sens plus élevé qu’il n’y paraît. Où est la stratégie ? Où sont les chefs, où sont les relais ? Tout a disparu ! Mais la hargne de la classe médiatique maintenue est contre LFI en dépit de sa mise hors de cause dans l’affaire des liens avec les islamistes. C’est un signal fort aussi de décomposition morale. Car cela ne s’explique pas sans l’influence de certaines parties intéressées. Le cas spectaculaire du mensonge du journal Le Monde est un temps fort de ce moment de déchéance. Le journal macroniste n’a plus de boussole. La haine n’en est pas une.
Le Monde confirme son engagement aveuglé contre LFI à mesure que l’extrême droite se rapproche du pouvoir selon les sondages. Certains mettront en cause les racines historiques du journal à l’heure où les fondamentaux reprennent le dessus. De fait, « l’esprit de Vichy » est de de retour dans la classe médiatico-politique. Mais je ne le crois pas. Je crois qu’il s’agit d’un point de vue lié aux ambassades qui influencent traditionnellement cette rédaction et quelques autres. Dorénavant, Le Monde n’oublie jamais de combattre frontalement la force politique centrale capable de mener un combat concret contre l’extrême droite : LFI ! On l’a vu avec la nomination d’Olivier Pérou à la tête de la rubrique politique sur la gauche, confiée à l’ancien journaliste de l’hebdo de droite-extrême : L’Express. Celui-ci faisait aussitôt un livre La meute, qualifiant LFI de secte et collant tous les ragots sur la vie privée de nos dirigeants sans épargner même les enfants. Récompense immédiate, le rubricard s’est aussitôt vu attribuer la responsabilité du suivi de l’Assemblée nationale. Lui ne manque pas de faire connaître de plus grandes ambitions. Un temps, la direction de la rédaction a voulu faire croire qu’elle ignorait la préparation de ce livre quand elle a embauché Pérou. Mais maintenant qu’une « édition actualisée » de l’égout dont il est l’auteur est prévue dans la période des municipales ou pour ouvrir ensuite la période présidentielle ? Tout baigne.
Au total, Louis Dreyfus, le directeur de la rédaction a validé, en accord avec les milliardaires propriétaires du titre, un tournant politique. Il est désormais bien éloigné de la position « d’observateur lucide » dont se targuait la rédaction autrefois quand elle combattait de Gaulle ou soutenait Balladur. Tout ce petit monde agit ouvertement au nom de détestations plus profondes et structurelles. C’est une première fois, depuis la fin peu glorieuse de la Collaboration, qu’un journal en France peut reprendre une imputation de lien entre une religion et un parti de gauche sur le mode du « judéo-bolchevisme » désormais converti en islamo-gauchisme. L’esprit de Vichy est de retour. Ce travail de sape qui ne mentionne pas l’extrême droite mais cherche à abattre son adversaire central est la cotisation devenue ordinaire de toute la bonne société. Elle trouve ainsi une façon de se rendre utile à la restructuration actuelle de la droite française, sans se compromettre directement.
C’est un travail de sape sans limite professionnelle, intellectuelle, morale ou politique. En atteste le compte rendu publié par Le Monde du rapport de la commission anti-LFI. Le titre du Monde est un mensonge éhonté : « Entrisme islamique : la stratégie LFI documentée ». Dans la version en ligne c’est pire car plus affirmatif : « Liens entre partis et islamisme : la commission d’enquête documente la stratégie électorale de LFI. » Mensonge : les chefs du renseignement français et surtout le rapport initial qui a motivé la création de la commission ont affirmé sans détour l’exact contraire. Ce titre n’est pas celui de l’auteur de l’article. Il a été imposé par la chefferie du journal. Et d’ailleurs le sous-titre le dément aussitôt. : « la commission d’enquête parlementaire voulue par la droite échoue à démontrer une collusion systémique ». Contradiction éclatante ! Un titre et un sous-titre qui se contredisent est un fait assez remarquable pour être relevé. Surtout quand l’article zigzague entre des affirmations et sous-entendus malveillants. Mais il est obligé de dire : « la commission conclut de manière plutôt nuancée que le risque d’entrisme concerne « toutes les sensibilités politiques » : « Lors des auditions de la commission d’enquête, en particulier des services de l’Etat (ministère de l’intérieur, services de renseignement, préfets), il n’a pas été signalé que certains partis politiques seraient, au niveau local, davantage visés par des militants islamistes. » Bref, la commission de droite est plus nuancée que la chefferie du « Monde ». En fait, l’accusation du journal est concentrée dans deux phrases qui expliquent son positionnement. « La deuxième partie du rapport, en revanche, est entièrement consacrée à LFI, présentée comme la formation la plus problématique dans ses rapports avec des acteurs islamistes, en particulier depuis le 7 octobre 2023, le militantisme propalestinien créant un terrain de convergences avec les islamistes. Outre la question palestinienne, une vision décoloniale partagée, la défense des minorités ou le rejet de l’islamophobie offrent des sujets de rapprochement. » Ici, plus besoin de faire du commentaire ni même d’aller plus loin dans la lecture. Tout est dit. Et bien dit dans les formes de l’hypocrisie qui révulse désormais tant de monde, de toutes opinions, qui pense d’un point de vue français. L’entre-soi qui a organisé les représailles contre tout ce qui critiquait le génocide a fait un exemple avec le blacklistage infâme de Blanche Gardin. Elle se croit imparable ! Elle ne se rend pas compte par exemple du service qu’elle nous rend. Rien ne disqualifie mieux cette partie de la classe médiatico-politique que ce genre de phrase. Elle se montre, sans s’en rendre compte, plus que jamais en tant que « deuxième peau du système ». Car le génocide des Palestiniens est la forme néo-coloniale désormais du trumpisme mondial. Et Le Monde croit que les gens du commun ne l’ont pas compris. Comme si la collusion du RN avec l’extrême droite israélienne et ses soutiens français n’avait pas déjà été comprise par des millions de gens.
Le titre mensonger du papier du Monde, sa photo de moi pour illustrer sa thèse manipulatrice, tout cela et maints déjeuner en ville pour remotiver les journalistes qui regimbent à faire le sale boulot ne compenseront pas les trente millions de vues cumulées par mon audition. Et ce score a une raison de fond. Mon audition a surtout permis une respiration dans le monde de l’islamophobie médiatique asphyxiante qui s’est abattue sur le pays. Car ce couvercle mental offense désormais une majorité de consciences de tous bords ! Oui : de tous bords. Et de toutes religions ! Car le temps de l’unanimité des communautés d’illuminés fanatiques de Netanyahu est terminé. Le retournement est très largement engagé. On lit alors autrement la conclusion de cet article du journal sous influence. Notre lutte contre le génocide et pour la cause palestinienne serait du « clientélisme électoral ». On connaît cette thèse raciste dont les auteurs semblent ne même plus mesurer la gravité anti-nationale. Leur propre clientélisme est devenu naturel et spontané. La conclusion du Monde n’en est que plus édifiante. « LFI se livre assurément à un clientélisme électoral envers la communauté musulmane. Probablement de manière plus visible, plus virulente et plus systématique que ses prédécesseurs. Ce pari lui fera-t-il gagner plus de voix qu’elle ne risque d’en perdre, dans une France qui se droitise à toute allure ? Rien n’est moins sûr. » Ne pas se soucier d’un résultat électoral de séduction de la droite dans la lutte contre un génocide, cela s’appelle l’honneur de la conscience de gauche. Le Monde peut-il le savoir ? Rien n’est moins sûr non plus.
Quand tout sera consommé, on aura vu un cas historique. Jamais dans l’histoire en effet un mouvement politique n’aura été traité comme nous le sommes collectivement et individuellement. Nous subissons le marquage discriminant qui maintient l’ordre moral politique actuel. Il s’agit de salir et d’enfermer LFI dans un roman préfabriqué. À présent, on finit par bien voir les gros doigts qui tirent les ficelles. Ils unissent les rédactions par leurs relais et leurs éléments de langage. Il faut y ajouter le rôle des agents d’influence. On a découvert ceux des Émirats arabes unis. Ils ont bien sûr leurs propres objectifs assez éloignés de la politique française. Mais notre pays est devenu l’open bar de toutes les manipulations étrangères. Russes, Israéliens, Émiratis, agences suisses et j’en passe sans doute, sont dans la place comme chez soi. Les uns ont des ambassades, les autres des sièges sociaux. Chacun avec ses objectifs et ses méthodes, les uns pour punir le pays de Macron qui a fini par reconnaître l’Etat de Palestine, les autres comme dans une embrouille dont le fil se perd parfois entre les étages. Le silence qui a accompagné nos révélations sur les actions d’infiltration des Émirats m’a impressionné.
Jour après jours, la banalisation de l’extrême droite est désormais le dress code mental de la classe dominante médiatico-politique pour autoriser la haine de LFI. Les digues de résistances à droite sont quasi toutes effondrées. Selon moi, les ultimes résistants finiront par craquer. Alors pour finir qui peut envisager la défaite politique de l’extrême droite venant sans notre participation essentielle ? Sinon qui ? La droite républicaine ? C’est fini. La gauche traditionnelle ? Son activisme anti-LFI pour ne parler que de cela en dit long sur ses priorités. Tout ce petit monde accepte un « cordon sanitaire » face aux insoumis. De qui une telle ligne fait-elle le jeu à l’évidence ? Par pur calcul politicien, le PS et les Verts comptent sur le soutien de la droite et « autres » au deuxième tour des municipales face aux Insoumis. Leur hauteur de vue se régale de la lecture du Monde leur bulletin paroissial. Tel est le niveau du « débat politique » en France.