Les dirigeants libéraux français, comme Emmanuel Macron, fantasment beaucoup sur le « couple franco-allemand ». Malheureusement pour eux, c’est souvent un amour à sens unique. Ces dernières années, le gouvernement allemand a fait preuve d’une déloyauté systématique sur nombre de projets communs. C’est le cas dans le domaine si sensible de la défense. Depuis 2017, les trahisons s’accumulent. Pour le pouvoir macroniste, peu importe, il faut continuer à célébrer coûte que coûte cette romance imaginaire. Ne serait-ce que pour faire passer plus facilement la transposition en France de la politique de la droite allemande. En janvier 2019, Macron a signé un nouveau traité de coopération avec l’Allemagne, dit traité d’Aix-la-Chapelle. Depuis, nous avons régulièrement à l’Assemblée nationale des séances à la gloire de notre voisin et de son gouvernement. Il est entendu notamment que la tant rêvée « Europe de la défense » doit passer par une coopération de plus en plus systématique avec l’Allemagne. À mes yeux une aberration dangereuse pour l’indépendance de la France et une méconnaissance absurde des causes a l’œuvre dans l’histoire qui ont provoqué trois invasions de notre territoire par nos voisins.
Voyons ce qu’il en est depuis l’élection d’Emmanuel Macron. Le gouvernement allemand a mis fin à l’entente spatiale avec les Français. Il a décidé de rompre unilatéralement et sans en prévenir personne un accord international sur le sujet. Les accords de Schwerin ont été signés en 2002 entre la France et l’Allemagne. Pour éviter une concurrence dans le domaine des satellites entre les deux pays, les Français s’engageaient à recourir à la technologie allemande pour les satellites radars et l’Allemagne à la France pour les satellites optiques. Les gouvernements français, depuis, ont toujours respecté leurs engagements. Mais en novembre 2017, le gouvernement allemand a passé commande à une entreprise allemande pour deux satellites optiques.
En juillet 2017, Macron avait mis en scène un conseil des ministres franco-allemand. À la sortie, son gouvernement avait annoncé une nouvelle coopération dans le domaine de l’armement. La France et l’Allemagne allaient travailler ensemble à la conception et la fabrication de missiles air-sol sensés armer l’hélicoptère de combat Tigre. En 2018, l’Allemagne a tout simplement claqué la porte. Sans plus d’explication le gouvernement de Merkel a jeté son dévolu sur un missile israélien, le Spike. La modernisation de l’hélicoptère lui-même d’ailleurs, devait se faire à deux. Mais les Allemands ont finalement passé une commande à Boeing pour des hélicoptères Apache.
Plus récemment, le gouvernement allemand a fait à la France exactement la même chose concernant un avion de patrouille maritime. L’administration Biden a récemment annoncé la signature d’un gros contrat avec Berlin. Les Allemands vont leur acheter plusieurs avions Poséidon pour renouveler leur flotte. D’après le gouvernement américain, cette commande devrait permettre de couvrir les besoins allemands « au cours des 30 prochaines années ». Nos partenaires ont-ils pris la peine de nous informer de ce qu’il allait advenir du projet MAWS que nous avons en commun sur le sujet ?
Enfin, il y a le cas du SCAF, l’avion de combat censé remplacer le Rafale. Une sottise. Nous sommes et devons rester le seul pays capable de construire d’un bout à l’autre des avions de ce type. Pour une raison que je ne m’explique pas, Macron a décidé que ce projet aussi, la France devait le mener en commun avec l’Allemagne. Nous n’en avons pas besoin. Nous avons créé le Rafale, qui est le meilleur avion de combat du monde, seuls. Nous avons la technologie, les ingénieurs, les ouvriers pour créer un produire un avion. C’est donc une faveur que nous faisons aux Allemands. Mais ceux-ci réclament toujours plus. Le chef d’État major des armées de l’Allemagne a notamment exigé l’accès à l’ensemble des brevets de Dassault Aviation. Dassault a refusé et il a raison en tous points. L’Allemagne n’a jamais ce genre de requête pour les armes qu’elle achète aux États-Unis.
Macron se fait rouler dans la farine. Il livre nos technologies de pointe clé en main à l’Allemagne. Il est encore temps de faire autrement. Nous n’avons pas besoin de toutes ces coopérations. Nous avons une industrie d’armement. Elle nous permet d’être indépendants. Le gouvernement allemand n’a aucune intention de se détacher des États-Unis pour la défense de son pays. Au début des années 1980, il était aussi question d’une coopération pour produire un avion de combat, avec le Royaume-Uni. La coopération a capoté. L’eurofighter est un avion européen, c’est-à-dire lourd, lent et inefficace. Les Français ont produit seuls un avion de combat : le Rafale. Nous pouvons être indépendants. Donc nous devons l’être.