Le quinquennat d’Emmanuel Macron aura bien été celui des ultra-riches. Avec lui comme Président, ils n’ont jamais pris autant d’argent. Le dernier classement du journal Challenges des 500 plus grandes fortunes de France est exemplaire. Il nous apprend que le patrimoine des plus riches français atteint cette année 1000 milliards d’euros. Autrement dit, leur patrimoine a doublé depuis le début du quinquennat de Macron ! Pour l’an dernier seulement, leurs fortunes ont augmenté en moyenne de 30%. C’est la hausse la plus importante jamais enregistrée par Challenges. Rappelons que la même année, la France a subi une dépression de -9% de sa richesse. Un million de personnes ont basculé dans la pauvreté. C’est dire quelle sorte de parasitisme totalement déconnecté de l’économie réel ces milliardaires exercent.
Concrètement, les oligarques français ont ramassé pour eux 230 milliards d’euros pendant la crise. Si tout cet enrichissement avait été capté par les impôts, il n’y aurait aucun déficit public, ni de l’État, ni des organismes de sécurité sociale. S’il avait été utilisé pour créer de nouveaux emplois, il aurait pu rémunérer pendant un an 4 à 5 millions de personnes au salaire moyen. Mais en 2020, nos milliardaires ont préféré licencier. Depuis mars 2020, 1000 plans sociaux ont été déclenchés. On peut citer par exemple Patrick Drahi, 13 milliards d’euros de fortune personnelle et propriétaire de SFR, qui a décidé d’un plan social de 1700 postes cette année. Ou de la famille Mulliez, qui va supprimer 1500 emplois dans les magasins Auchan qu’elle possède. Ou encore de la famille Michelin, il est vrai plus modeste puisqu’elle ne pèse que 1,7 milliards d’euros. Ils suppriment 2300 postes de salariés.
Si on regarde l’ensemble du mandat d’Emmanuel Macron, les chiffres crèvent encore plus le plafond. Le montant des 500 plus grosses fortunes de France a presque doublé. Elle est passée de 570 milliards d’euros à 1000 milliards d’euros. Bernard Arnault, l’homme le plus riche de France, a vu son magot tripler depuis 2017. Cette accumulation extraordinaire est le résultat de la politique de cadeaux mise en place par Macron depuis son arrivée au pouvoir. Entre la suppression de l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF), la flat-tax sur les revenus financiers, la baisse de l’impôt sur les sociétés, la suppression de « l’exit tax » contre l’évasion fiscale, on ne compte pas moins de 38 milliards d’euros de cadeaux pour ces dernières années. Sans compter bien sûr les facilités accordées pour licencier, baisser les salaires ou augmenter le temps de travail des salariés.
L’ère macroniste est une période bénie pour les milliardaires français. Mais, rassurons-nous, cela n’influera aucunement la ligne éditoriale des rédactions du Parisien ou des Échos, propriétés de Bernard Arnault. Ni celles du Monde ou de L’Obs, dont l’actionnaire, Xavier Niel, a gagné 2 milliards d’euros sous Macron. Encore moins pour L’Express, RMC ou BFMTV, possédés par Patrick Drahi, Le JDD ou Europe 1 qui appartiennent à Lagardère ou encore TF1 et LCI pour Martin Bouygues. Il faut pour compléter ce tableau citer Vincent Bolloré, propriétaire des chaînes Canal+, CNews et C8. La concentration des richesses en France va avec une captation entre moins de 10 mains de la plupart des médias du pays.
À l’heure du 14 juillet, il faut donc regarder par-dessus l’épaule de cette date sacrée. Moins d’un mois plus tard, le 4 août 1789 avait été votée l’abolition des privilèges d’Ancien Régime en France. Pourtant, on a l’impression que les privilèges et le régime aristocratique n’ont fait que changer d’habit. La Révolution de 1789 est-elle à refaire ? « Le peuple n’a-t-il brisé le joug de l’aristocratie féodale que pour retomber sous le joug de l’aristocratie des riches ? », questionnait déjà Robespierre. Il agace. Le Journal de Paris se pourlèche après la séance du 27 octobre 1789 : « Hier, Robespierre est monté à la tribune. On s’est rapidement aperçu qu’il voulait encore parler en faveur des pauvres, et on lui a coupé la parole ».
Car la question du droit de propriété est vite devenue un enjeu politique central. Elle l’est restée. Les députés d’alors défendent dans leur écrasante majorité le droit illimité de propriété. Le concept de « bien commun » ne l’a jamais effleuré sinon pour en combattrre l’existence quand elle est là notamment dans les biens communaux. Robespierre dénonce ce droit de propriété comme étant « le droit de dépouiller et d’assassiner ses semblables » du fait de sa conséquence : l’accumulation d’un côté au prix du dépouillement de l’autre. Il déclare : « nul homme n’a le droit d’entasser des monceaux de blé à côté de son semblable qui meurt de faim ». Pour lui, comme pour nous, le droit de propriété doit nécessairement être limité. Il réclame la limitation du droit de propriété au nom de la dignité humaine, de la redistribution des richesses et de l’abolition de l’esclavage. Robespierre résume : « la première loi sociale est celle qui permet à tout être humain d’exister ! Toutes les autres lois sont subordonnées à celle-là ! ». Aux yeux de Robespierre, la question de la répartition des richesses est directement liée à la question de la répartition du pouvoir. Il se prononce donc pour une démocratie donnant au peuple le droit de contrôler et de révoquer ses élus, ou de voter lui-même directement ses lois sans passer systématiquement par ses représentants. Nous portons encore ce programme. Tel quel.
À l’heure où le bilan se fait de l’incroyable accumulation de richesses qui s’est opéré à un bout de la société sous le régime de Macron, à l’heure où se produit une telle concentration des moyens de pouvoir audio-visuel qui domine les esprits en les harcelant du matin au soir de diversions, il est l’heure d’un nouveau 4 août qui abolisse les privilèges de la nouvelle caste dominante, celle des oligarques. La poignée de très riches ne s’est pas contentée de tout contrôler sur le plan matériel. Elle veut prendre le pouvoir dans les esprits aussi. Elle fait une vertu publique de son désir destructeur fait d’accumulations et de prédations sans fin. De ses mœurs lamentables qui la poussent à récompenser de toutes les façons possible l’apologie sans trêve des instincts les plus vils d’égoïsme social et les discriminations sociales ou religieuses les plus triviales. Sa cupidité n’a pas de bornes. À l’heure ou l’écosystème lui-même en est la victime, il y a un devoir de salut public à se souvenir que le 14 juillet a rendu possible le 4 août. Une nouvelle abolition des privilèges est nécessaire, plus profonde, plus éradiquante, plus irréversible que la précédente. Elle est possible en 2022. Par les urnes.