L’héritage de la société ou la société des héritiers ?

J’ai pu développer ma proposition concernant l’impôt sur l’héritage sur RTL le 9 janvier dernier. La réforme que je propose permettrait de rapporter à l’État 10 milliards d’euros. Grâce à cette somme, nous pourrions financer l’allocation d’autonomie que le programme « L’Avenir en commun » veut verser aux jeunes de plus de 18 ans et aux lycéens professionnels : 1063 euros par mois pour tous. Ainsi, en luttant contre la société d’héritiers, nous pouvons constituer et verser un « héritage de la société », c’est-à-dire une allocation permettant aux jeunes de conquérir leur autonomie et surtout, de se former.

Comment arriver à une telle somme ? D’abord, il s’agit de comptabiliser pour chaque héritage l’ensemble des dons et héritages reçus au long de la vie. Car aujourd’hui, il y a une remise à zéro du compteur tous les 15 ans. Cela permet aux plus grosses fortunes de planifier leurs donations. De la sorte elles profitent plusieurs fois d’un abattement sur les 100 000 premiers euros légués. En fait beaucoup de gens ne peuvent pas profiter de cet abattement plusieurs fois dans leur vie pour la bonne raison qu’ils ne possèdent pas plusieurs fois 100 000 euros ! La moitié des ménages français possède moins de 120 000 euros de patrimoine. Ils ne paient déjà rien et pas davantage avec notre système. Mais aujourd’hui à coups de donations qui exemptent, les plus gros héritages payent moins de 10 % d’impôts sur ce qui est transmis.

Nous choisirons quant à nous 120 000 euros comme seuil. Qui reçoit moins ne paye rien. De cette façon la moitié de la population pourra léguer l’ensemble de son patrimoine sans aucun impôt sur les successions pour ses descendants. Puis, nous renforcerons le barème que pour les 1% des patrimoines les plus élevés. Enfin, nous créerons un héritage maximum, c’est-à-dire une tranche à 100% au-dessus de 12 millions d’euros. C’est-à-dire 100 fois le patrimoine moyen. Rappelons  encore que quelqu’un qui reçoit 12 millions d’euros reçoit d’un coup l’équivalent de 8 siècles de SMIC. Ça laisse de quoi voir venir.

J’ai fait une proposition complémentaire sur RTL pour régler une situation que beaucoup trouvent injuste. Il s’agit de cas d’héritages indirects. Parfois il s’agit de personnes avec lesquelles le lien affectif est, lui, bien direct. Pour ce cas qui existe de plus en plus dans la société moderne, nous devrons créer un statut d’adoption sociale. Qu’un parrain, un beau-parent, un frère ou une sœur, un ami puisse adopter socialement son filleul, l’enfant de son conjoint, son frère, sa sœur ou son ami. Ainsi, le lien d’entraide réciproque sera formalisé par un statut qui réglera notamment les inégalités dans l’héritage.

Le Conseil d’Analyse Économique, un organisme qui dépend du gouvernement a confirmé dans une note qu’il était possible d’augmenter les recettes de l’impôt sur les successions de 10 milliards d’euros en ne touchant qu’à ce que payent les 1% des plus gros héritages. Notre réforme diffère légèrement de celle qu’il propose. Contrairement à lui, nous préservons le Pacte Dutreil qui protège la transmission des entreprises familiales, même si on pourrait y faire quelques ajustements. Et surtout, nous instaurons l’héritage maximum pour les 0,01% héritages les plus importants, une mesure qu’il ne propose pas.

C’est un choix profondément politique. Nous l’assumons. Pour nous, une limite doit être apportée à l’accumulation. Aujourd’hui l’héritage est redevenu le principal facteur de reproduction de la domination de classe. On laisse faire ? Une société d’héritiers et de rentiers on a déjà connu. C’était l’ancien régime monarchique.

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