camarades fraternite jean luc melenchon

Mes camarades, au moins le respect, à défaut de fraternité !

Depuis des semaines, maints hauts dirigeants du PCF s’adressent à moi ou parlent de moi dans des termes que je ne crois pas productifs pour la suite des évènements. Ils insistent notamment sur le fait que j’aurais décidé de proposer ma candidature sans en avoir averti qui que ce soit. De ce fait, je serais un « candidat de droit divin » (André Chassaigne, président du groupe communiste à l’Assemblée nationale) et qu’avec Jean Lassalle je devrais « aller à Lourdes » puisque nous « entendons des voix » (Olivier Dartigolles, porte-parole du PCF). Je ne cite rien de Pierre Laurent par respect pour les communistes que son statut lui fait représenter. Je voudrais d’abord donner quelques informations de nature à faire connaitre l’histoire véritable.

En dépit du « solo » rabâché sur tous les tons, TOUS les dirigeants savaient ce que je comptais faire. En effet, je l’ai exposé personnellement et directement à chaque leader : Pierre Laurent, Clémentine Autain, Liêm Hoang-Ngoc en décembre, Christian Pierrel en janvier. Les deux premiers m’ont expliqué sans détour qu’ils étaient partisans d’une primaire bien avant que celle-ci soit proposée par Libération et Cohn-Bendit. D’ailleurs, un dirigeant national du PCF siégeait au comité d’organisation préfiguré par Caroline De Haas. J’ai dit à chacun pourquoi j’étais hostile à cette orientation et rappelé l’analyse de mon livre écrit en 2007. De leur côté, les dirigeants du PG n’ont cessé de dire leur analyse identique sur le sujet à chaque occasion où il est venu en discussion.

Tout le monde savait donc tout sur la position de chacun à ce sujet. Tout le monde, sans exception. Sauf la date. Et pour cause. Car lorsque la primaire Libération/Cohn-Bendit a été proposée, le PCF a donné son accord sans discussion d’aucune sorte avec ses partenaires. J’ai refusé, comme annoncé, cette sommation d’entrer dans le piège des primaires. J’en ai tiré la conclusion qui s’imposait d’autant plus tranquillement que le porte-parole du PCF avait déclaré le Front de Gauche « cliniquement mort ». Et je suis passé à l’action. Aussitôt, le soir même de ma déclaration sur TF1, et depuis cette date sans trêve, le PCF est le seul parti dont les dirigeants font campagne contre moi. Avec des mots très durs comme j’en ai rappelé les plus récents.

Un autre des refrains sur le sujet est que j’aurais annoncé ma candidature de façon « imprévue » et « personnelle ». Imprévue ? Pas pour les premiers dirigeants, je viens de le dire. Mais pour les autres non plus ! En effet, ma préparation à la candidature était dans tous les journaux depuis de nombreuses semaines en réponse aux questions qui m’étaient posée sur le thème par les journalistes, pratiquement à chaque interview. « Je dois me préparer comme si je devrai être candidat » : cela fut publié à la une du Monde avec une photo ! Mais j’ai aussi déclaré : « je me prépare », « je suis disponible », « il faudra bien que je dise mon avis pour éviter qu’on me pose la question sans cesse ». Ce qui m’avait valu déjà plusieurs remarques publiques désobligeantes auxquelles je n’avais déjà pas répondu. Mais surtout, la demande que je sois candidat est inscrite dans le vote de la résolution du CN du PG du mois de janvier et elle a été présentée à chaque parti membre du Front de gauche, par envoi mail de cette résolution et aux membres de la coordination du Front de gauche. Ma proposition n’était donc pas imprévisible le moins du monde non seulement pour les premiers dirigeants ni pour les lecteurs de la presse. De même savais-je que je bénéficierais du soutien du PG.

Une mauvaise habitude est prise de dire que je serais « seul ». Il est très méprisant de considérer que le parti dont je suis membre, qui demande ma candidature puis la soutient lorsque je la propose, n’est rien. Il est très méprisant pour les 90 000 personnes qui appuient ma proposition de candidature qu’elles ne sont rien tant que le PCF n’a pas donné l’accord qu’il refuse puisqu’il préfère les primaires. Je propose ma candidature hors cadre des partis et sans avoir demandé de permission parce que cela correspond à l’analyse que je fais du moment politique et de ses nécessités comme moyen d’enclencher, si j’y parviens, un ample mouvement ouvert, bien plus large que le « rassemblement de la gauche » visé par la primaire et que sa composition et appellation mêmes rendent impossible.

En réalité, s’il y a un solo et une décision unilatérale prise hors et contre tout cadre collectif, c’est celle du PCF d’entrer dans la préparation des primaires pour choisir une candidature à la présidentielle et pour répartir à la proportionnelle du résultat de ce choix, les candidatures aux législatives. Et le PCF est le SEUL parti du Front de gauche engagé dans les primaires. Tels sont les faits. Pour autant, je respecte la décision du CN du PCF d’entrer dans la primaire. Elle a été prise à 85% des voix. Elle est donc indiscutable. C’est une orientation. Ce n’est pas la mienne, ni celle d’aucune autre composante du Front de gauche.

Je demande donc que soit respectée la diversité de nos points de vue. Et donc je demande que soit respecté mon engagement, ma proposition de candidature et les soutiens que j’ai reçus venant des citoyens et  tous les secteurs du Front de Gauche. Il n’est pas acceptable que le porte parole du PCF déclare que je mets mes pas « dans ce que la Ve République produit de pire en termes de présidentialisme à outrance, entretenant l’idée que le peuple a besoin d’un homme providentiel tous les cinq ans ».  Telle n’est pas ma proposition chacun le sait. La violence des propos tenus est destinée à créer un fossé infranchissable et une mise à l’écart dont je peux annoncer qu’elle se retournera contre ses auteurs, tant est grande la soif de combat commun et indépendant de nombre de communistes.

Conformément à mes propositions et à celle du PG depuis janvier 2014,  la démarche « La France Insoumise » vise à créer progressivement et collectivement un mouvement politique commun. Il se construit autour de ma proposition de candidature, autour d’une plateforme internet interactive au-delà des partis actuels. Il rassemble toutes les personnes qui veulent agir ensemble et mettre à jour en commun le programme que j’ai mis en débat, celui qui en 2012 a recueilli 4 millions de voix et qu’il faut profondément actualiser et même dépasser. Cette démarche reçoit un bon accueil : près de 90 000 parrainages citoyens, 800 groupes d’appui constitués, des dizaines de milliers d’euros de petits chèques de soutien. Les sondages sont très encourageants y compris celui qui porte sur 20 000 personnes interrogées. Il me place à 11% quand Hollande est à 14%. Certes ce n’est pas suffisant, bien loin de là. Mais tout de même quand avons-nous commencé si haut ? Pourquoi serions-nous incapables de rassembler bien davantage et jusqu’à porter le programme jusqu’au second tour ? Pourquoi faudrait-il que seul le PCF m’accable de sarcasmes et déprécie un effort auquel, je tiens à le signaler, participent déjà un nombre non négligeable de communistes, de socialistes, d’intellectuels et de syndicalistes qui n’ont pas fait leur choix par adulation personnelle mais par accord politique sur une démarche collective ?

Je ne cherche ni à rallier ni à débaucher. Chacun fera bien ce qu’il croit juste et honnête de faire. J’ai confiance. Mon énergie est tournée du côté de la campagne à faire pour entrainer une majorité de notre peuple. Je crois qu’il peut se fédérer autour de ses aspirations sociales, écologiques et républicaines, sans présenter de carte de parti ni être impliqué dans des accords électoraux avec des partenaires gouvernementaux dont ils combattent la politique. Bienvenue, sans a priori, à qui veut se joindre à cet effort, faire campagne pour convaincre et voter ensemble. Je suis certain que la remobilisation sociale en cours est un précieux vecteur de prise de conscience politique. Je crois que notre capacité à être présents au deuxième tour ne dépend pas d’arrangements et d’addition de forces contradictoires comme la primaire le prévoit. Je crois qu’elle dépend de notre capacité à convaincre en toute clarté et cohérence qu’un autre futur est possible.

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