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Discours au meeting du Front de Gauche pour changer d’Europe – Zénith

Comme nous sommes heureux de nous retrouver si nombreux et si ardents ! Et ce n’est que le début. Merci à tous ceux qui, par leur travail et leur dévouement militant ont rendu possible ce beau moment. A présent d’ici, c’est au pays tout entier que nous nous adressons, avec gravité et sens des responsabilités. 

La limite atteinte

Chers concitoyens qui nous écoutez, comme vous, nous avons conscience d’entrer dans un moment charnière de l’histoire de notre pays et du monde. Devant nous est commencé l’effondrement du système construit sur la financiarisation et la marchandisation de toutes les activités humaines. Chacun commence à bien sentir que la rapacité, l’égoïsme, la cupidité du modèle d’accumulation capitaliste de notre temps conduisent la société humaine à l’abime. Ainsi on voit bien que le changement climatique est commencé. Il porte en lui des bouleversements inouïs. Notre écosystème est en cause. Impasse du capitalisme. Impasse du productivisme. Les bases même de la civilisation contemporaine atteignent leur limite sous nos yeux.

Les esprits sont disponibles 

Dès lors bien des gens révisent leurs anciennes certitudes. Dorénavant, ils sont prêts à entendre ce qu’ils n’auraient pas écouté hier. Dépassement du capitalisme, nationalisation, planification écologique ne sont plus des mots bizarres. En quelque sorte, les esprits sont devenus disponibles. Un grand chambardement est engagé. Dans la vie et dans les têtes. Beaucoup de gens recherchent honnêtement des points d’appui pour réfléchir et agir utilement. Ils ne pensent pas seulement à leur situation personnelle. Ils cherchent des solutions bonnes pour tous. Ils sentent bien qu’il va falloir écrire un autre futur collectif, une autre civilisation, c’est à dire non seulement un autre partage des richesses mais aussi d’autres modes de vie, d’autres façons de produire et de consommer. L’action politique doit être à la hauteur de cette exigence! C’est une immense responsabilité. Cette responsabilité, nous ici, nous proclamons que nous l’assumons.

Quelle gauche nous sommes

Chers concitoyens, le Front de Gauche vous propose un autre chemin pour le peuple français, pour l’identité républicaine de notre patrie et pour l’Europe. Nous sommes la gauche stable et concrète. Nous sommes la gauche qui s’intéresse au pays davantage qu’à elle-même. Nous sommes la gauche qui sait qu’on ne peut en finir avec la crise sans quitter le système économique et politique qui l’a provoqué… Nous mesurons l’ampleur de la tache. Nous savons qu’elle nécessite une nouvelle majorité politique et une intense implication citoyenne. Donc nous prenons nos responsabilités. Voilà pourquoi nous sommes la gauche qui sait se rassembler, et pas celle qui cultive les divisions. Nous nous unissons pour rendre possible le rassemblement du peuple lui même.

Un programme, une stratégie 

Chers concitoyens, nous ne vous mentons pas. Ce que nous vous disons aujourd’hui à propos de l’Europe nous l’avons défendu avec constance et sans jamais céder depuis que nous nous sommes mobilisés ensemble pour la victoire du non à l’Europe libérale en 2005. Nous nous présentons devant vous, franchement, honnètement,
-avec un programme: changer d’Europe, nous allons le présenter tout au long de la campagne électorale.
-avec une stratégie concrète pour constituer une nouvelle majorité politique populaire: le front de gauche,
Une nouvelle insurrection civique
Chers concitoyen, comme en 2005, nous appelons à une insurrection civique contre le programme que vient de rappeler le communiqué commun des chefs d’État européen à Bruxelles. Alors quoi ? Encore ? Je lis :
• «plein respect des règles de concurrence»
• «Souligner que le protectionnisme n’est pas une réponse à la crise actuelle»
• «promouvoir l’ouverture des marchés» «au niveau mondial» et «au plan interne.
C’est consternant! Voila le bilan de cette folie: l’Europe ce devait être la solution, mais maintenant l’Europe c’est le problème. L’Europe va mourir du libéralisme. Pour nous il faut faire le contraire de ce programme.
-moratoire immédiat sur toutes les ouvertures à la concurrence: rail, poste, électricité!
-bouclier douanier sélectif au frontière de l’Europe pour tarir le dumping social et réduire l’empreinte écologique du contenu des échanges commerciaux
-abolition de la semaine de 65 heures, – -salaire minimum interprofessionnel dans tous les pays
-critères de convergence sociale par le haut,
-instauration d’un droit de veto suspensif sur les licenciements pour les Comités d’entreprises européens

La solution c’est le peuple

Comment y parvenir? Nous ne sommes pas le camp des résignés et des «à quoi bon». Nous, nous croyons que notre pays contient une formidable réserve d’énergie, de savoir faire, de dévouement pour peu qu’on s’adresse à qui la possède: le peuple, la classe des salariés, madame et monsieur tout le monde, les femmes et les hommes du rang qui chaque jour font tourner la machine du quotidien, du mieux qu’ils peuvent, leur grand cœur tout entier dans l’ouvrage. Nous affirmons qu’il est vain de s’en remettre à l’homme ou à la femme providentiels, de se laisser intimider par les belles personnes qui caquètent ou les puissants qui pérorent!
Nous nous proclamons que face au tohu-bohu qui s’avance, toute la solution est dans le peuple, dans son intelligence collective, dans son implication civique dans sa volonté politique. Libérer cette énergie populaire tel est le projet du Front de gauche.
Notre premier adversaire c’est l’abstention
Alors s’il en est ainsi, si l’implication populaire est bien la clef de toute solution, alors l’élection européenne est une chance. Oui une chance car le peuple va parler. Le peuple doit parler. Il a le pouvoir avec ses bulletins de vote de renverser la donne. Il peut imposer ses priorités politiques. Nous voulons commencer maintenant, de cette façon, la révolution par les urnes dont ce pays à tant besoin. C’est pourquoi, nous disons des à présent que notre premier adversaire dans cette élection c’est l’abstention. Le peuple absent des urnes! C’est le rêve de tous ceux pour qui le peuple présent dans la politique est un cauchemar. C’est déjà un scandale que le découpage de ces circonscriptions bidons destinées seulement à réserver la grosse part aux grosses bouches! Alors n’allons pas, en plus, leur servir les plats!

Une élection politique décisive

Ceux qui disent que cette élection ne compte pas vous enfument! Comment pourrait-elle ne pas compter! C’est la première élection politique nationale depuis la présidentielle! Les bulletins de vote vaudront donc bilan! Ce sera la dernière élection politique sur un sujet global avant la prochaine élection présidentielle! Les bulletins de vote vaudront donc projet. Qu’on ne me dise pas que ce n’est pas la question posée par une élection européenne. Au contraire! Car cette élection unit comme jamais, indissolublement, la politique européenne et la politique nationale. Voici pourquoi.

La politique du quotidien 

C’est en application des politiques décidées au niveau européen que la vie quotidienne des français est mise aux normes libérales. Et avec quelle ampleur! Depuis 1992, 37000 règlements et 6000 directives, chaque année 700 directives nouvelles entrent en application. 80 % des lois qui s’appliquent à nous sont des transpositions de directives. 100% de nos lois doivent être conformes aux traités européens. Mais rien de tout cela ne se fait sans l’accord des gouvernements nationaux. Ils sont donc tous responsables et tous coupables. Mais le pouvoir de droite en France est davantage responsable et davantage coupable qu’ailleurs. Davantage, oui!

Coupables du traité de Lisbonne

Davantage coupable car c’est le président Sarkozy qui est l’auteur du traité de Lisbonne, du moins si l’on en croit ses vantardises de l’époque! Ici, dans cette salle comme dans le pays, personne n’a jamais admis que le «non» des français en 2005 ait été méprisé et bafoué et que ce soit le représentant des français qui ai lui-même commis ce mauvais coup. Forfaiture! Nous n’avons jamais admis la légitimité du Traité de Lisbonne! Il est la copie en plus long et en plus compliqué du Traité Constitutionnel que le peuple français a repoussé. Nous n’avons jamais admis, la confiscation de la décision qu’a été l’adoption par le parlement de ce traité. Nous sentons encore la brulure de la colère que nous ont inspiré les députés et sénateurs, socialistes, Verts et Radicaux de gauche qui par leurs votes au congrès de Versailles ont rendu possible cette honteuse manœuvre! L’honneur de notre démocratie, à gauche a été sauvé par les parlementaires communistes et ceux des socialistes qui ont été fidèles au mandat populaire comme nous l’avons été par exemple à cette tribune avec Marc Dolez et Marie Georges Buffet.

Coupable de la présidence française

Oui Nicolas Sarkozy est coupable plus qu’un autre du désastre actuel. Car le président de la République français vient d’être Président de l’union. Et c’est sous sa présidence que des dizaines de directives libérales ont été prises, avec son approbation!
Il et donc responsable et coupable, par exemple
-quand la directive de la honte a été finalisée, lors d’une réunion du conseil présidé par ses ministres Borloo et Bussereau.
-quand a été relancée avec l’accord du gouvernement français la directive temps de travail avec l’opt out à 65h hebdomadaire,
-quand a été confirmée la libéralisation du transport ferroviaire de voyageur dès 2010
-quand a été validée l’achèvement de la libéralisation électrique et gazière
Dans chaque cas c’est lui qui tenait tantôt le stylo tantôt le buvard!

Coupable de bellicisme

J’ajoute à ce bilan particulier de la droite au pouvoir en France ce qui reste comme une misérable capitulation sans condition devant l’Empire nord américain. Je veux parler de la décision de réintroduire notre pays dans le commandement intégré de l’Otan. Ainsi finit, conformément aux décisions du traité de Lisbonne, l’esprit de défense indépendante tous azimut qui singularisait notre République. Il fournissait pourtant à l’Europe un contre modèle, un point d’appui pour une politique de défense réellement indépendante. Anti laïque ardent, le président Sarkozy, chanoine de Latran a déjà beaucoup cotisé à la théorie américaine du «choc des civilisations». A présent il vient d’enchainer la France aux aventures militaires de l’Empire. Tel et dorénavant notre abaissement. Nous voulons en sortir dès que possible car il y va de la pmaix du monde autant que de notre honneur de peuple libre.

Pour dire oui à l’europe il faut dire deux fois non à Sarkozy

En résumé, français !, si vous vous voulez dire « oui » à une autre Europe et oui à une autre politique vous devez commencer par dire deux fois «non». Non au traité de Lisbonne de Nicolas Sarkozy, non à la politique de Nicolas Sarkozy en métropole et outre mer. Pour nous donc cette élection c’est deux référendums en un seul vote. Nous appelons les français à dire qu’ils veulent une autre politique, une autre europe! Nous leur proposons donc pour le dire de sanctionner sévèrement les listes de l’UMP. L’UMP de Sarkozy! « Union pour Maintenir la Profitation! » Voilà ce que c’est! Pour nous, le moment est venu de faire dans les urnes ce que nos compatriotes des Antilles et de la Réunion ont fait dans la grève!

Une nécessité politique

Comme ils ont fait front dans la lutte sociale, front dans la rue, faisons front dans la lutte politique, front dans les urnes. La lutte sociale et la lutte politique sont pour nous les deux formes d’une même réalité. Telle est le sens de la proposition qu’ont formulé ensemble le Parti Communiste français et le Parti de Gauche en commençant a construire le Front de gauche. C’est cette ambition que nous mettons en partage. Ce front de gauche vient de s’élargir sous vos yeux avec la déclaration de Christian Picquet. Sa construction est dorénavant notre travail et notre bien collectif. Nous ne nous mobilisons donc pas pour un coup électoral à la gloire d’un parti ou d’un leader. Nous nous mobilisons pour que les français disposent d’un outil fiable à gauche libèrent leur énergie politique, pour qu’ils puissent maitriser leur destin. Notre but ce n’est pas la simple union entre nos Partis politiques, même si tout commence par là. Notre but c’est l’union et l’implication populaire. C’est que le peuple lui-même puisse former un front de gauche face au désastre du capitaliste qui s’avance. L’accord de nos organisations est un facilitateur, un déclencheur de rassemblement populaire. C’est pourquoi nous maintenons tendue la main à nos interlocuteurs du NPA, des Alternatifs, du MRC, de L’ADS, des écologistes de gauche. Ni rebuffades, ni prétexte à géométrie variable ne nous lasseront. Car nous connaissons l’enjeu. Tous unis nous pouvons à la fois battre la droite et passer en tête de la gauche, réglant de cette façon tous les problèmes qui ont condamné la gauche à l’échec.

Au sommet et à la base 

Pour autant nous n’attendrons pas pour commencer notre travail de mobilisation. Nous avançons, nous construisons Nous prenons nos responsabilités. C’est le sens de notre rassemblement aujourd’hui. Mais il est essentiel de rappeler qu’il ne se limite pas à un accord national. Dans les départements nous voyons déjà des groupements locaux, des associations politiques, venir se joindre aux comités d’initiatives du Front de gauche. Ce processus nous voulons qu’il fasse boule de neige, qu’il s’amplifie, qu’il soit contagieux. Et nous devons aller plus loin. Nous voulons l’ouvrir à chaque personne qui voudrait y prendre sa place. Oui on peut participer à titre individuel au Front de gauche. Chacun peut rejoindre le comité de soutien, chacun peut participer au travail d’information et d’éducation populaire que nous allons entreprendre. Notre tache est immense. Au moins une réunion par canton! Des milliers d’initiatives partout dans le pays. Toute aide sous toutes ses formes est la bienvenue. Notre première force c’est notre nombre, c’est que nous sommes partout, que nous parlons à tous et d’abord à ceux à qui personne ne parle jamais de politique. Je veux résumer mon propos par une formule. Le Front de gauche veut devenir un Front Populaire. A la base et au sommet. Le Front de gauche doit être le peuple lui-même qui agit politiquement. Voila notre ambition. Aujourd’hui nous ne faisons que commencer. Mais nous commençons. Et dorénavant parce qu’il y a chaque jour qui passe ajoutera sa pierre si modeste qu’elle soit à l’édifice qui se construit.

Mots de fin

Amis et camarades, chers concitoyens qui nous écoutez, je conclus. Des temps troubles s’avancent, mais des horizons nouveaux se dessinent. Le pire n’est pas qu’il y ait tant de problème à affronter. Le pire serait que nous renoncions à trouver des solutions. Comme l’a dit le président bolivien Evo Morales, «Le pire ne serait pas que le capitalisme du vingtième siècle s’effondre, le pire serait que le socialisme du vingt et unième siècle soit incapable de se lever».
Le temps qui vient est celle de l’audace, du courage et de l’imagination. La France indomptable et insoumise, la France « ma belle, ma rebelle, qui donne quelque chose du gout du bonheur et laisse la lèvre sèche » comme l’a si bien chanté Ferrat, regorge d’énergie pour changer le monde. Nous sommes ses serviteurs.

Vive le Front de Gauche! Vive la république!

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