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15.01.2017

La grippe à l’hosto

L’hôpital a-t-il attrapé la grippe ? Non bien sûr. Mais il est très malade. De tous côtés, des alertes me sont lancées. Les urgences sont débordées et les hôpitaux incapables de faire face à l’épidémie de grippe. Je dis que ce n’est pas d’abord la faute de la maladie en question. Bien sûr, je ne néglige pas la violence de la grippe. J’ai lu que 18 000 personnes seraient mortes de l’épidémie il y a deux ans, lors de l’hiver 2014-2015. D’ailleurs, il y avait déjà eu par exemple cette année 13 morts dans une seule maison de retraite ! À Paris, tous les indicateurs d’activité des pompes funèbres vont dans le même sens. D’une année sur l’autre aux mêmes dates, l’activité mensuelle de janvier est d’ores et déjà dépassée. Tout cela alors que le pic de l’épidémie ne serait pas encore atteint. Sur le terrain, tous les témoignages convergent : notre pays est devenu incapable de faire face à une épidémie pourtant prévue, cyclique et finalement sans difficulté thérapeutique.

Tel est le bilan d’une politique du manque chronique de personnel et de lits aux urgences et dans tout le système hospitalier. Celui-ci est aujourd’hui au bord de l’effondrement. Les hôpitaux ne tiennent encore debout que grâce à l’incroyable dévouement de tout leur personnel, des médecins urgentistes aux infirmiers, aides-soignants, brancardiers etc. Mais cela ne durera pas toujours. La vidéo de Sabrina Aurora, l’interne en médecine, a été vue par huit millions d’internautes. Cela montre qu’il existe une opinion de masse que la situation inquiète au plus haut point.

Cette épidémie est un donc un parfait révélateur de ce qu’est devenu notre système de soins sous la férule du libéralisme. Il est temps de rappeler que ce système politique a toujours justifié ses diktats et la récitation permanente de ses mantras par son efficience. Une belle arnaque. Là où le libéralisme s’applique, très vite, plus rien ne marche !  Une bonne occasion de montrer que les soi-disant « compétents » qui gouvernent ne font rien d’autre que créer les conditions du chaos. Dans la santé, il faudra faire tout autrement dès que possible. Pour l’instant c’est le règne du bavardage au sommet de l’État.

La Ministre de la santé a donc demandé mercredi 11 janvier aux hôpitaux de « reporter les opérations non urgentes ». Pourquoi ? Pour soulager les urgences face au pic de grippe. Mme Touraine explique ainsi que les urgences sont « aux limites de leurs capacités ». En effet, pour faire face, ici on rappelle des retraités, là on rajoute des lits dans des chambres individuelles, ailleurs on cherche des vacataires pour épauler le personnel en sous-effectif. Diantre, les urgences hospitalières de la sixième économie du monde sont mises en tension maximale par une simple grippe !

Mais, non, Mme la Ministre, l’hôpital n’est pas malade de la grippe. L’hôpital est malade de votre politique depuis cinq ans et de celle de vos prédécesseurs. Marisol Touraine se vante d’avoir réduit le déficit de la Sécurité sociale. Mais elle ne dit pas à quel prix ce résultat a été obtenu. Depuis 2015 et jusqu’à cette année 2017 s’applique un plan d’austérité à l’hôpital. Sur ces trois ans, le gouvernement applique 3 milliards d’euros de coupes budgétaires dans l’hôpital. Cela revient à fermer 16 000 lits ou à supprimer 22 000 emplois ! La cause du désordre vient d’abord de là avant de venir de la grippe !

Cette épidémie sonne comme un désaveu pour tous mes concurrents à la présidentielle. D’abord pour les anciens ministres Macron ou Valls qui portent la responsabilité des budgets en question adoptés quand ils étaient encore membre du gouvernement aux plus hauts rangs. Notez aussi que Benoît Hamon a voté pour deux des trois lois de financement de la Sécurité sociale en question là où d’autres « frondeurs » s’abstenaient.

La grippe prouve aussi par l’absurde que les propos de M. Macron, de M. Fillon ou de Mme Le Pen sur la santé sont déconnectés de la vie réelle. M. Macron et M. Fillon prétendent que les Français devraient se « responsabiliser » en matière de santé. M. Fillon l’a encore dit le 12 décembre dernier dans sa tribune publiée dans Le Figaro. Selon lui, « Il convient, par ailleurs, de responsabiliser chacun en simplifiant les nombreux dispositifs de franchise actuels et le ticket modérateur qui sont un maquis incompréhensible ».

Emmanuel Macron a dit la même chose le 2 novembre sur Médiapart : « Je propose que chacun puisse se responsabiliser et payer en fonction de ses propres risques ». Mais que veut dire « se responsabiliser » à propos de maladie ? Cela veut-il dire éviter de tomber malade en même temps que tout le monde ? Savent-ils ce qu’est une épidémie ? C’est lorsque de nombreuses personnes sont contaminées par la même maladie. Et pourquoi plusieurs personnes sont-elles contaminées par la grippe au même moment ? Parce que c’est un virus, et que c’est donc contagieux ! Comment se responsabiliser dans ces conditions ? Comment éviter de tomber malade en même temps que les autres en pleine épidémie ? Faut-il arrêter de parler avec ses voisins ? Arrêtez d’aller travailler ? Arrêter de vivre pour éviter d’être contaminés ? C’est grotesque.

Le programme M. Fillon est aussi mis en cause sur un autre aspect, commun avec Mme Le Pen. Les deux projets reposent sur la suppression des remboursements partiels ou totaux de soins par la sécurité sociale. Par exemple, quand Mme Le Pen propose de supprimer l’aide médicale d’État pour les étrangers sans-papiers. Ou quand M. Fillon a proposé de « focaliser l’assurance publique universelle [c’est-à-dire la Sécu] sur des affections graves ou de longue durée, et l’assurance privée sur le reste » comme cela était écrit dans son programme sur la santé dans la primaire.

Depuis, ce programme a été effacé du site internet du candidat et François Fillon assume de l’avoir « retiré ». Mais ce projet était bien avancé : notez ainsi que dans Les Échos du 25 novembre dernier, la porte-parole de M. Fillon pour la santé, Mme Dominique Stoppa-Lyonnet, envisageait explicitement de dérembourser… « la grippe » ! Elle estimait que celle-ci, comme « l’optique, le dentaire, les audioprothèses n’ont pas à être financés par l’assurance-maladie de base ». Il reste à M. Fillon et Mme Le Pen à apprendre que les microbes et le virus de la grippe passent d’un individu à l’autre sans se soucier de savoir s’il a des papiers, ou si sa complémentaire va le rembourser. Et que par conséquence, pour protéger les Français et ceux ayant une complémentaire, la méthode la plus efficace consiste à … soigner et rembourser tout le monde !

Une autre idée aberrante de M. Fillon est d’imposer un jour de carence pour les fonctionnaires en arrêt-maladie. Il explique que c’est pour aligner les fonctionnaires sur les salariés du privé qui peuvent se voir imposer trois jours de carence. Un jour de carence, c’est un jour où vous n’êtes pas indemnisés par l’assurance-maladie lorsque vous êtes en arrêt maladie. Pourquoi ne pas aligner tout le monde en le supprimant dans le privé ? Ce serait nettement plus pertinent du point de vue de la santé publique. Parce que le principe du jour de carence est particulièrement absurde en cas de maladie contagieuse. Car pour éviter de perdre un jour ou plusieurs jours de salaire, le salarié va travailler, même s’il est malade. Et avec la grippe, il contamine ses collègues au lieu de rester au chaud chez lui. Là encore, la mesquinerie et la jalousie sont mauvaises conseillères pour aborder efficacement les questions de santé.

Notre programme en matière de santé me parait nettement plus efficace et pertinent. Peut-être parce qu’il part de la réalité humaine et non des objectifs comptables ou de l’intérêt financier des actionnaires des assureurs privés. Ainsi, la suppression des dépassements d’honoraires chez le médecin et le remboursement à 100% par la Sécurité sociale des soins permettraient de faciliter une prise en charge rapide des malades évitant ainsi une aggravation de leur maladie. Aujourd’hui, un Français sur trois renonce à des soins pour des raisons financières ! Et ensuite, quand son état est devenu trop grave, il se présente aux urgences venant participer de l’embouteillage à cet endroit du système de santé.

Pour faciliter l’accès aux soins, il ne suffit pas de mieux les rembourser. Il faut encore les rendre physiquement accessibles. C’est-à-dire combler les déserts médicaux. Pour cela, nous proposons la multiplication des centres de santé, combinant médecins généralistes et spécialistes. Dans ces centres officieraient des médecins publics, fonctionnaires. Je suis certain que des milliers de jeunes gens sortants des études d’infirmiers ou médecine seraient tout à fait disposés à travailler dans ce cadre, avec un rythme, des conditions et environnement de travail compatibles avec les projets qu’on peut avoir pour soi et sa famille à l’âge de 30 ans ou en fin de carrière.

Évidemment, une forte priorité devra être donnée à reconstruire l’hôpital public. Il a été tellement mis à mal par l’austérité. Mais aussi par l’absurde système de « tarification à l’activité », généralisée par M. Fillon quand il était Premier ministre ! Ce système fait dépendre le financement de chaque hôpital sur le nombre et le type de pathologies prises en charge. Ainsi, il faut faire du chiffre sur certaines pathologies même si les opérations ne sont pas absolument nécessaires car elles « rapportent ». Après quoi et en toute hypothèse, il faut pousser les patients à sortir au plus vite pour faire baisser la « durée moyenne de séjour », etc. Il faut mettre fin à ce système fou.

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