M ercredi matin, l’hémicycle du parlement de Strasbourg était quasiment vide. On y discutait pourtant de la nomination de Van Rompuy et de la camarade travailliste baronne Ashton. Les présents ont débondé des tonneaux de congratulations selon l'usage. Mais ils ont dit aussi leur frustration. C’est dire le désenchantement qui règne dans cette enceinte. Barroso lui-même est resté un moment. Puis il est parti. Bancs vides et grisaille bureaucratique. Ce matin seulement, deux heures avant le vote, sont arrivés en langue française les sept pages d’amendements à la proposition de résolution sur le « programme de Stockholm », plan quinquennal sur la sécurité et la justice. Je jette le tout à la poubelle. Je ne veux même pas faire semblant de m’accommoder. Je voterai contre tous ces trucs liberticides écrits dans la langue des envahisseurs. A propos d’envahisseurs : en fin de note je donne des nouvelles des exploits des anglo-saxons en Irak. Cœurs sensibles s’abstenir. Mes alertes électroniques de presse me préviennent de l’épisode socialiste de l’élimination de Julien Dray en Essonne par la direction socialiste. C’est plus intéressant. Je réagis. Sinon je parle aussi d'un épisode d'Hadopi servi à la sauce europe.
HADOPI EN DEBAT EUROPEEN
Je donne une information à propos de ce qui a occupé tout le débat sur Hadopi en France. On a passé ici à Strasbourg, en troisième lecture la directive européenne sur le sujet. Pourquoi troisième lecture ? Tous les autres points faisaient l’objet d’un accord entre la Commission européenne, le Conseil européen et la majorité du Parlement européen comme on l’a vu lors du récent vote, le 6 Mai dernier. Cependant la «restriction d’accès à certains utilisateurs» continuait de faire obstacle du côté du Parlement européen. En effet, aucune garantie du respect de la présomption d’innocence n’était donnée. Tiens, tiens ! Encore la présomption d’innocence si mal connue de certains socialistes. Donc sur la base de la directive telle que rédigée, on pouvait restreindre ou couper l’accès à internet d’un utilisateur sans autre forme de procès. On sait ce que Sarkozy fait de cette autorisation. L’amendement proposé par le Parlement européen pour y pallier est « l’amendement 138 » qui stipule: « (…) aucune restriction ne peut être imposée aux droits et libertés fondamentaux des utilisateurs finals sans décision préalable des autorités judiciaires (…) sauf quand la sécurité publique est menacée, auquel cas la décision peut intervenir ultérieurement » Le comité tripartite de conciliation est parvenu à un accord. On nous dit que si le texte final ne fait pas allusion aux autorités judiciaires, c’est parce que ce sont parfois d’autres instances qui prennent ce genre de décisions dans les pays de l’UE. Justement c’est le problème à nos yeux ! Mais il nous a été assuré dans le texte que les restrictions d'accès à internet "ne peuvent être instituées que si elles sont appropriées, proportionnées et nécessaires dans le cadre d'une société démocratique". De telles mesures ne pourront être adoptées que "dans le respect du principe de la présomption d'innocence et du droit au respect de la vie privée" et selon une "procédure préalable, équitable et impartiale "». Tout le monde a l’air content, mais pas moi. Rien de toutes ces formules n’est vraiment contraignant. Ayant sous les yeux dans mon pays à quels abus de pouvoir tout cela peut donner lieu, je vois bien qu’ils peuvent continuer avec ce texte et même s’en réclamer. J’ai donc voté contre. De toute façon, la concurrence libre reste le premier impératif assigné à cette directive. Sans moi.
SOUVENIRS SANS NOSTALGIE
J’ai été trop longtemps militant en Essonne pour m’en désintéresser totalement à présent. Mais si je relève comment a procédé la commission exécutive fédérale du PS dans ce département, c’est parce qu’elle soulève une question de principe en général. Je commence par dire que je connais bien cette instance socialiste dans laquelle j’ai siégé vingt huit ans. Mon portrait est encore accroché dans le couloir qui conduit dans la salle de délibérations, avec ceux de tous les autres premiers secrétaires fédéraux qui ont dirigé cette fédération depuis 1971. Je connais aussi presque tous ceux qui y siègent aujourd’hui. Aujourd’hui l’homme fort du département est Manuel Valls qui tient les commandes essentielles. Le président du conseil général est son vassal et le premier secrétaire son employé. Rien ne se fait sans son avis. Je connais. J’ai tenu le rôle. C’est donc lui l’auteur de l’élimination de Dray avec l’appui enthousiaste de tous ceux qui tueraient père et mère pour qu’une place se libère et permette à la file d’attente des petits vassaux d’avancer d’un cran vers la lumière de l’élection automatique. Tout cela en ayant un œil sur les futures élections territoriales à la sauce Sarkozy. En effet leur savoureuse liste annexe de candidat à élire à la proportionnelle permettront aux bien placés d’aujourd’hui de se maintenir en fonction demain. Dès lors il faut lire ce que dit Manuel Valls et les larmes qu’il jette sur le sort de Dray comme un record d’hypocrisie. Tel est aujourd’hui le PS. Ce n’est certes pas mon affaire et je n’oublie rien des coups que Dray m’a porté dans ce département du temps où je m’échinais moi aussi dans ce monde kafkaïen. Mais une fois de plus c'est de notre rapport à la justice, nous gens de gauche, dont il est question. Je note la performance lamentable de ces champions de la morale en face de Julien Dray.
COUPABLE C'EST SUR! INNOCENT PEUT-ETRE
Je n’en suis pas surpris. Valls est de ceux qui ont jeté des pierres contre le lamentable Frédéric Mitterrand alors même qu’il n’était ni inculpé ni poursuivi, fusse par lui. Il a perdu tous repères républicains fermes. On se souvient, j’espère, comment Manuel Valls avait cru bon d’ajouter dans cette circonstance qu’un problème générationnel le séparait de ses ainés sur la question du rapport à la loi et à la règle à propos de la pédophilie. C’était une infamie qui suffisait à évaluer sa capacité à respecter ses contradicteurs. Sur ces bases ces malheureux socialistes mélangent justice et vengeance, inculpation et pilori, rumeurs et faits. Et cette fois ci l’absurdité de ces méthodes éclate sous les yeux de tous. Julien Dray n’est pas inculpé. Mais aux yeux des socialistes de l’Essonne il est présumé coupable avant toute inculpation. La preuve : ils affirment que si Dray n’est pas inculpé alors ils le rétabliront sur leur liste ! Ils le déclarent donc coupables et c’est à la justice de le proclamer innocent ! C’est exactement le contraire de ce que proclame la déclaration des droits de l’homme lorsqu’elle affirme que chacun est présumé innocent aussi longtemps qu’il n’est pas jugé coupable !
LA RUMEUR COMMANDE
Cette modeste affaire de tête de liste situe bien le point où les voici rendus en matière de principe républicain. La vérité est que Dray leur pose problème en fonction des informations qui ont été diffusée à son sujet. Et cela non du fait du contenu vrai ou non de la rumeur mais en raison de l’impact que cela a pu avoir sur l’opinion. La rumeur est tout pour eux, qu’elle soit fondée ou calomniatrice. La question de savoir si ces informations sont fondées ne se pose pas pour eux. C’est pourtant essentiel sur le plan des principes, surtout quand on sait que Dray dément le tout. Sa négation semble aussi inouïe que les accusations diffusées. S’il a raison, alors ce qui lui a été fait est monstrueux. Et ceux qui viennent de l’éliminer y auront eu leur part. S’il ment, on le saura assez tôt. Mais pas avant son éventuelle inculpation, et de toute façon pas avant la fin de son éventuel procès. J’ai bien dit «éventuel». Ces gens si pusillanimes doivent savoir que la justice et ses procédures sont une protection de notre liberté individuelle et collective et non une corvée formelle. Qu’aucun des élus, députés et autres, membre de l’instance socialiste essonnienne n’y ai pensé est incroyable ! Le résultat souligne bien dorénavant le grotesque de la situation. En effet, Julien Dray n’est même pas inculpé ! Mais il est quand même éliminé de la liste. Pourtant, à l’inverse, la tête de liste régionale et le président du groupe socialiste à la région ont été inculpés, jugés et condamnés. Mais ils sont maintenus en tête des listes sans avoir été suspendus un seul jour de leur fonction en cours de route ! Il est vrai qu’ils ont désormais purgé leur peine. Mais ils n’ont pas encore été amnistiés. Donc les socialistes «moraux» qui éliminent Dray, les investissent en connaissance de cause. Mais du moment que la presse n'en parle plus, où est le problème?.
CRIMES DE GUERRE
Ca se passe dans l’Irak occupé par les américains. Tout le monde sait quel bonheur goute ce pays depuis qu’il a été libéré de l’odieuse dictature qui l’accablait. Evidemment c’est de l’humour noir. L’occupation anglo saxonne du pays après l’agression militaire organisée par le fils Bush n’en finit plus de produire ses horreurs. Le bilan de la prétendue libération de l’Irak est celui du martyr de ce pays. Dans maints cas on peut parler de crime de guerre. Actuel ou passé, ou bien en cours. Ainsi à Fallujah, ville martyrisée par des bombardements américains sans véritable objet. En septembre dernier, sur 170 enfants nés au principal hôpital de Fallujah, 24% sont morts la première semaine, ¾ présentaient des difformités (pas de tête, deux têtes, un seul œil, pas de membres). En 2002, dans le même hôpital, sur 530 naissances, 6 bébés étaient morts, un seul présentait des difformités. Des médecins irakiens et britanniques mettent cause l’utilisation de phosphore blanc et de munitions à l’uranium appauvri utilisées lors des bombardements de la ville en 2004 par l’armée d’occupation. Ils demandent aux Nations unies d’ouvrir une enquête indépendante. Une pétition a été lancée pour soutenir cette initiative.