Cette note parle de Frèche, du parlement européen, de Nancy, de Charles le téméraire, du froid, du train et de l’industrie automobile. Ca fait quand même beaucoup. Mais quand j'écris, j'écris pour de bon.
NERON ET LES ELEPHANTS
Je n’ai pas vu mais on m’a raconté. Frèche en majesté sur la Quatre ! Il joue sa partie avec pugnacité. Il parait qu’il va faire le tour des plateaux de télé et radio. Les médias ont décidé que ce serait le match Mandroux/Frèche. Le reste n’existe pas pour eux. Toute la vie politique, péniblement reconstruite en dehors du cirque local, est ravagée en quelques jours ! Tout ça par ce que Frèche a trouvé avec Mandroux pire éléphant que lui pour circuler dans les magasins de porcelaine ! Saluons l’immense talent des stratèges de la rue de Solferino ! Depuis qu’ils ont décidé de faire la liste Mandroux, Frèche a gagné cinq points dans les sondages et toutes les listes de gauche sont rabattues à la limite de la barre des dix pour cent. Seuls de graves paranos diraient que de tels stratèges sont en train d’assurer la réélection de Frèche. Ils auraient alors empêché qui que ce soit d’autre qu’eux d’ouvrir une alternative. Ainsi ne seraient-ils pas privés demain de l’accès au pouvoir régional. Des gens normaux diront juste que c’est une manœuvre particulièrement mal conçue. Il est vrai qu’en faisant campagne contre une personne on ne va pas bien loin. Mais le PS n’a rien à perdre dans cette affaire. Pile ses mandroutistes sont élus, face ses fréchistes sont élus. En effet dans cette histoire pas un des membres de la liste Frèche, c'est-à-dire les 90 % du PS réel de la région, n’est exclu du PS. A tous les coups on gagne ! Nous tous qui avons des années de lutte contre ce système nous serions alors sacrifiés sur l’autel de l’image de Martine et des autres pures bonnes consciences certes un peu tardives et poussives de la rue de Solférino. Le fétiche pantelant de Mandroux sera abandonné des stratèges solfériniens aussi vite qu’ils l’ont lancé dans le jeu de quilles ! Bien sur, chaque jour qui passe, les grands esprits qui sont en train de créer ce gâchis nous pressionnent pour que nous courrions tous nous inscrire sur la liste de «la seule qui, peut gagner», celle là même qui est en train de faire perdre tout le monde ! Mais nous sommes pugnaces et méthodiques. La campagne avance, les soutiens s’affirment. Revol a de bons nerfs d’acier. Son attitude tranquille et sa patience à décliner dans tous les registres son programme sont entendues et appréciées. Le reste nous sera donné par surcroit.
NANCY DANS LE FROID
Il y avait déjà quelque temps que je n’avais pas senti cette sorte de bise glaciale sur le visage. Avec quelques flocons qui virevoltent le tableau est complet qui me ramène à ces jours de Jura ou je courais la campagne avec le chien. Le froid n’a pas la même qualité dans l’est de la France et à Paris. Ici c’est Nancy. Je me doutais que cette sorte de froidure donnerait de la neige. Je me souviens soudain que Charles le téméraire fut tué ici dans au cours d’une bataille à peine livrée où les siens étaient déjà mi-morts avant d’avoir commencé. Il faisait très froid. Autant qu’à présent sans doute. On retrouva la dépouille du grand duc d’Occident à demi mangée par les loups. Sa superbe avait été vaincue par la longue patience à la manœuvre du roi Louis XI. Et par sa propre bêtise et fatuité. A Nancy, je suis venu soutenir le Front Lorraine de gauche. C’est un nid de rebelles. En plus des miens, des écolos alternatifs (dont la tête de liste régionale), gauche unitaire, m’pep et ainsi de suite, il y a les communistes du bassin sidérurgique qui ont décidé de faire équipe avec le «Front Lorraine de gauche», sept conseillers généraux communistes sur huit en Meurthe et Moselle, la jeunesse communistes et bien d’autres. On ne sait pas ce que ça donnera sur le plan électoral. Mais tout ce qui est gagné en fraternité n’est pas près de se perdre.
LORRAINNE CŒUR D’ACIER
J’ai fait le saut ici, à Nancy, depuis Strasbourg. Par la même occasion je découvre les militants locaux du Parti de Gauche venus en délégation des quatre départements de la région. Ceux-là ne montent jamais à Paris. Et ils sont si loin des circuits de transport rapide ! Puisque j’y suis, je dois mentionner, à l’intention des amoureux du rail comme je le suis moi-même, que j’ai découvert aussi la gare «lorraine TGV». Une merveille avec une enseigne lumineuse gigantesque, pas écolo pour un rond! Mais elle est installée en plein champs selon la tradition des coins de France où l’on n’a pu s’accorder entre villes pour l’arrêt du train. Comme en Picardie ou à Montchanin en Saône et Loire ! Dans ce coin sinistre, battu par une bise sibérienne, il faut donc venir en voiture, pour prendre le train. Hum ! Dans l’obscurité gelée l’imagination va son chemin. Peut-être est-ce là que gisait le cadavre du téméraire et peut-être y a-t-il des loups qui dévorent encore les voyageurs assommés par le froid. On poireaute avec Brigitte, Rémy son couteau suisse, et François. Pas de buvette à l’horizon ! Un hall de gare. Mais un cadre somptueux qu’illuminent d’improbables lustres. 180 kilos pièces ! De toute beauté, il est vrai. Un écriteau m’apprend qu’ils ont été fabriqués par l’entreprise Saint Louis et je me promets d’y faire un saut, la prochaine fois que je reviendrai dans ces parages, si on m’y invite. Le chef de gare, que je croise tandis qu’il prépare l’arrivée du train, d’entrée m’appelle Jean-Luc. Je ne le connais pas et lui non plus. Je suis ému par cette familiarité qui n’était nullement irrespectueuse, bien au contraire. Je reviens au Parti de gauche en Lorraine. Ici pas de querelle de personnes pour les places, pas de geyser de discours fielleux sur la démocratie tenus par les battus des investitures, pas de trotskistes infiltrés qui terrorisent du verbe de maigres cohortes d’aigres coupeurs de cheveux en quatre. Le parti de gauche en Lorraine est une petite troupe opiniâtre et militante, composée d’élus de base, conseillers généraux et municipaux, de prof retraités ou pas et de responsables syndicalistes cégétistes, du textile notamment et du transport. Il ya aussi, plus un groupe de jeunes, étudiants et dirigeants de l’UNEF, et de jeunes ouvriers. Surprise agréable, les jeunes sont tous marxistes (marxien précise un étudiant !) Un bol d’oxygène intégral !
LE PERE PEINARD
J’ouvre le journal et je tombe sur le portrait de mon ancien ami et collègue sénateur, Jean-Pierre Masseret que j’ai connu partisan d’Henri Emmanuelli avant de le trouver groupie de Ségolène royal. Aujourd’hui il prétend « unir du NPA au Modem » ! Je déplore qu’il ne mentionne pas le Père Noël et la fée Clochette pour son projet car l’un et l’autre suivront surement aussi le mouvement derrière Masseret le jour où ses trouvailles stratégiques auront un sens concret. Les nôtres ici sont en bataille pour empêcher la gauche de finir en pantoufles politiques ! Car la dynamique impulsion du président Masseret est celle dont le journal du coin annonce qu’elle crée une campagne « peinarde » ! Pas pour dire qu’il se la coule douce puisqu’il est certain de gagner comme tous les socialistes, mais pour dire qu’il est à la peine parce que personne ne vient à ses réunions. Ni supporters ni opposants, que des obligés réunis dans une ambiance ouateuse de semi coma politique ! Moi, pour être entendu dans la salle comble du bistrot où l’on se réunissait, j’ai du grimper sur un banc aux côtés de Philippe Leclerq notre tête de liste et de Serge de Carli le président de notre comité de soutien, un communiste grand teint, président du groupe communiste au conseil général de Meurthe et Moselle. Les deux ont fait le tour des questions politiques du coin dans leurs discours. Et moi ? Le reste. Ici, dans cette salle, c’est Lorraine cœur d’acier. On se remplit les poumons de l’air de la lutte implacable et du salariat à tête de pioche. Je recharge les batteries !
BOUILLIE EUROPEISTE
A présent je suis écœuré ! Et pourtant je suis blindé ! Dans l’hémicycle du parlement de Strasbourg, viens de parler le lamentable Martin Schultz, grand chef de « l’alliance progressistes des socialistes et des démocrates ». Beuark ! Il vient d’annoncer sa capitulation sans condition à la commission qui vient chercher son investiture. Il ne faut pas que « l’idéologie bloque l’Europe» caquète-t-il dressé sur ses ergots de pseudo réformiste! On a bien ri sur les bancs de gauche ! Et il a conclu «vous avez notre confiance pour les cinq ans qui viennent» après avoir rappelé que trois des sept vices présidents sont sociaux démocrates ! Ce que Cohn Bendit a qualifié d’un mot : « nous avons assisté à la coalition des hypocrites » Brocardant les pauvres sociaux démocrates, il lance « ils sont incapables de dire pourquoi ils soutiennent cette Commission mais moi je vais vous le dire : c’est parce qu’ils soutiennent leurs commissaires ». Ce que le Martin Schultz confirme lamentablement : «quand on exige 100% de résultat et qu’on obtient 50% notre tache n’est pas de voter contre… Même dix pour cent c’est bien !» avec des adversaires pareils la droite n’a pas besoin d’amis ! Car je rappelle qu’il s’agit de participer à une commission totalement dominée par les néo libéraux ! Et que même dans cet attelage contre nature les sociaux démocrates sont très loin de former 50% du collège !
LE VER SE TORTILLE SUR L’HAMECON
Inutile de préciser que la droite n’a pas finit de rire de ce genre de palinodie. Le Martin Schultz se tortillait comme un vers sur son hameçon au cours d’une allocution ponctuée de ricanements et d’éclats de rire. Si bien que, au nom du PPE, la droite européenne, l’UMP Joseph Daul a pu déclarer moqueur : « le PPE était le seul à présenter un candidat à la présidence de la commission avec monsieur Barroso ! La prochaine fois les autres groupes devraient aussi en présenter un, ce serait mieux pour la démocratie et ça éviterait à certains de faire une campagne « stop Baroso » et de voter pour sa commission après ! » C’est exactement ce que j’ai moi-même dit ! Sauf que ce n’est pas «la prochaine fois» qu’il faudrait présenter un candidat, mais cette fois ci ! On se souvient que les sociaux démocrates ne se sont évidemment pas précipités pour présenter une alternative à Baroso. De leur côté les socialistes français qui avaient d’abord juré par la voix de Martine Aubry qu’il y aurait un candidat ont ensuite disparus du paysage sans autre forme d’explication! Pourtant les sociaux démocrates dirigent trois gouvernements. Ils sont donc en état de proposer un candidat. Et ils sont ici le deuxième groupe de députés. Le bilan est nul ! Les trois chefs de gouvernement sociaux démocrates ont soutenus la candidature de Baroso !
BAVARDAGES SOCIALISTES
Dans ce contexte le reste des interventions venant de ces bancs notamment celles des socialistes français est tellement en dessous de la main que c’est à pleurer. Ainsi quand Catherine Trautmann s’indigne : « les auditions ont confirmé nos craintes » Ah ! Mais quelles craintes ? La politique sociale, l’atlantisme ? Non ! Rien de tout cela. Son indignation est totalement formelle : «les auditions ont confirmé nos craintes : la seule priorité de ce collège sera de ne pas gêner le conseil ». Travailleurs de tous les pays, mobilisez vous pour que la commission ne soit pas au service des gouvernements que vous avez élu, c’est le nouveau drapeau de lutte que vous propose les socialistes français. Sans oublier la mise en garde d’Harlem Désir qui condamne l’approbation « d’une commission faible qui ne sortira pas l’Europe de la crise ». Plus politicien tu meurs ! Ne pleurons pas trop, les socialistes français ont voté contre Baroso et sa commission. Au contraire de tous les autres socialistes européens. Je pourrais moquer leur isolement, leurs hypocrisies et le reste. Mais je ne le ferai pas et je pense qu’il ne faut pas le faire. En effet, tant qu’ils conservent cette distance avec la capitulation pure et simple de leurs homologues sociaux démocrates européens, l’avenir de la gauche reste ouvert en France. Décrocher le Parti socialiste français du bloc européiste social démocrate est un objectif politique en vue de la refondation de la gauche en France.. Bon après cela, que sauront les français de tout cela ? Rien, comme d’habitude. Le dégout est général, il est vrai ! Le Quotidien «Les dernières nouvelles d’Alsace» appelle cela « la guéguerre des étoiles » et folklorise ce débat. Ce qui signifie que les grands champions du bourrage de crane européiste eux-mêmes pensent que tout cela est une mauvaise plaisanterie. « Le parisien », autre journal populaire y consacre une brève de dix lignes.
UN RUDE MOMENT
Je voudrai revenir sur le grand jury «RTL-Le figaro-LCI» Finalement il a été moins question de ce qui avait été prévu et davantage de sujet étaient totalement imprévus. Ce n’est pas grave mais frustrant pour ce qui a été préparé sans venir sur la scène. C’est risqué quand on vient sur des sujets que l’on a moins préparé ou pas du tout. Il faut alors improviser. Ce n’est rien quand il s’agit de dossiers thématiques car il est bien rare qu’il y en ai d’absolument neuf et qui n’ai pas déjà donné à travailler dans un passé récent. Mais quand on vient sur des questions à la frontière des personnes et de la politique, c’est plus périlleux. Par exemple si la première dépêche qui est tombée portait sur ce que j’ai dit a propos de Strauss Kahn, je peux avouer que cela a été totalement improvisé quand aux formules utilisées. Je suis assez satisfait de la réplique et je n’y changerai rien s’il fallait y revenir. Mais je le signale pour la gourmandise des lecteurs de ce blog.
UN BON MOMENT
Mais ce « Grand Jury » RTL Le Figaro LCI a été un moment que j’ai apprécié parce qu’on y a pas mal parlé du fond. En particulier j’ai été ravi de pouvoir enfin une fois parler de politique industrielle grâce aux questions de Revel de LCI ! J’ai donc apprécié l’émission en dépit des erreurs que je me reproche d’y avoir fait : termes erronés, mots oubliés, raisonnements inachevés. Et en dépit des sujets que l’on n’a pas eu le temps de traiter comme la crise financière en Europe ou la question de la dette en France. Ce qui est réconfortant c’est le nombre des échos, mails et sms reçus en retour. Mais je reste sur ma faim a propos d’une question. Je veux donc y revenir. Il s’agit de la question de l’automobile. Je trouve que je n’ai pas su me donner le temps de développer mes arguments. Je refusais de me dire « d’accord avec Estrosi » pour la raison que cette façon de formuler ma pensée sur le sujet aurait dénaturé ma façon de voir les choses. Et comme je savais qu’il n’y avait plus le temps de venir sur le fond du dossier, j’ai botté en touche. Quand Apathie me demande si les voitures françaises doivent être fabriquées en France, « comme le dit Estrosi » je réponds « ca se discute ». Mais justement on n’a pas eu le temps d’en discuter. Ce qui se discute c’est ce que dis monsieur Estrosi. J’y viens donc.
FAITS ET MOUVEMENTS DE MENTONS
Ici je mets de côté le modèle de civilisation que portent l’automobile et son impact écologique. Je m’en tiens à la logique interne du dossier Commençons par rappeler l’enjeu de ce secteur sur l’emploi. La France est le quatrième producteur automobile mondial. La Chine vient en effet de nous prendre la troisième place. Ce secteur génère 2,5 millions d’emplois soit 10 % du total des emplois du pays. On décompte 700 000 emplois dans la production automobile en général entre les constructeurs et les équipementiers. A ceux là il faut ajouter 1,8 millions d’emploi qui en dépendent directement dans les garages, routes etc. On comprend pourquoi Estrosi se sent tenu de dire quelque chose, dans le style des mouvements de menton familiers à l’équipe Sarkozy. La réalité aurait mérité qu’on s’y arrête. A en croire l’UMP, Sarkozy et Estrosi auraient empêché la délocalisation de la production de la Clio IV vers la Turquie. Que vaut cet engagement ? Ce que valent les paroles de patrons et de d’UMP en général. Pas grand-chose. Car la production de la Clio 4 ne devrait commencer que dans 3 ans. D’ici là, Renault a donc le temps de changer d’avis. Comme l’avait fait Mittal en dépit de ses promesses à Sarkozy de sauver l’emploi à l’aciérie de Gandrange. D’autant que la délocalisation de la production des Clio (génération 3 actuellement) est déjà bien avancée. 60 % des Clio sont déjà fabriquées à Bursa en Turquie. Il s’y produit 175 000 voitures par an. Et il ne reste plus à Flins que 40 % de la production 125 000 voitures par an. Ce qu’ont obtenu Sarkozy et Estrosi, c’est donc juste le statu quo sur cette situation déjà très dégradée. Voila pourtant comment Claude Guéant sur Europe 1 le 16 janvier 2010 a présenté les choses : « La décision prise par Renault nous donne tous les apaisements. »Apaisés de tous les pays réjouissez-vous.
SARKOZY INVENTE L’EAU CHAUDE et FROIDE
Ce n’est pas tout. Sarkozy aurait aussi obtenue davantage de Renault selon le même Claude Guéant toujours sur Europe 1 le 16 janvier 2010. Une prouesse pour celui qui avait oublié de prendre des actions et des sièges au conseil d’administration des banques quand il était en train de les gorger d’argent. Cette fois ci, changement de tableau. Il aurait obtenu « la proposition que désormais un représentant de l'Etat siège au comité stratégique de Renault » ! Quel exploit ! Malheureusement pour la crédibilité de monsieur Guéant: un tel comité stratégique existait déjà chez Renault. Il s’appelle Comité de stratégie internationale et il compte déjà un représentant de l’Etat en la personne de Catherine Bréchignac ! La pauvre ! Son patron l’a oublié ! 2videmement le ridicule était très grand. C’est sans doute pourquoi, histoire de jouer le jeu de la communication de l’Elysée, Renault a annoncé la création d’un nouveau comité stratégique … Mais attention, une précision fondamentale a été donnée : ce comité sera certainement rattaché ou fusionné avec celui qui existe déjà. Ouf ! On a frôlé la dépense inutile. De toute façon à quoi bon s’énerver. Renault a en effet précisé qu’il n’aurait qu’un rôle d’ « information et consultation ». Et nullement de décision. Les décisions sur la stratégie industrielle de Renault sont en effet prises ailleurs … aux Pays-Bas où se tient chaque mois le directoire de la holding Renault-Nissan. Sans l’Etat français qui n’est représenté que dans le conseil d’administration de Renault SA qui entérine ce que décide la holding mère.
ET LES AUTRES DELOCALISATIONS DE RENAULT
Cette affaire concernant la Clio n’est que l’arbre qui cache la forêt des délocalisations organisées par Renault, et sur lesquelles Sarkozy et Estrosi n’ont rien dit. En attestent deux exemples récents. Au Maroc d’abord. En 2008, Renault a signé un accord avec le Maroc pour construire une gigantesque usine sur 300 hectares à Tanger, pour 600 millions d’euros d’investissements. L’objectif étant de passer de 30 000 véhicules produits au Maroc à 200 000 puis 400 000 par an. Mais ces voitures ne seront pas destinées aux marocains. 90 % de la production, centrée sur la gamme économique Logan, sera destinée à l’exportation hors du Maroc. Renault a présenté ce projet comme ayant vocation à devenir « le site le plus compétitif du monde » pour le groupe. Ce n’est pas tout. Voici l’Inde ! Toujours en 2008, Renault a finalisé avec l’Inde un accord industriel pour construire une grande usine à Chennai pour sa filiale Nissan. Pour 780 millions d’euros d’investissements et un objectif de 400 000 véhicules produits par an. Et ces voitures ne sont pas seulement destinées au marché indien comme l’a indiqué le n°1 de Nissan lui-même : « l'Inde sera une nouvelle base d'export qui permettra à Nissan d'être compétitif dans la chaîne d'approvisionnement internationale. » Les premières voitures sont sorties de l’usine en janvier 2010. Estrosi ment donc ouvertement quand il affirme : « une voiture française, destinée à être vendue en France, doit être fabriquée en France ! » On comprend pourquoi je ne pouvais accepter, même pour une simplification de fin d’émission de me dire d’accord avec l’idée que les voitures françaises doivent être produites en France, « comme le dit monsieur Estrosi ».
L’EUROPE ? UNE NUISANCE PERMANENTE
De toutes les façons, quelques soit le mauvais coup, l’union Européenne, «qui protège » gnagni gnaga n’est jamais loin pour donner le coup fatal. La commission est le meilleur allié des délocalisateurs à la direction de la régie Renault. Dès l’annonce du Plan français d’aide à l’automobile, la Commission avait déclaré le 10 février 2009 que « toute obligation de garder une unité de production en France rendrait ces aides illégales ». Et à l’issue du Sommet européen du 2 mars 2009, la Commission s’était réjouie d’avoir obtenu de la France que « les conventions de prêt avec les constructeurs automobiles ne contiennent aucune condition relevant de la localisation de leurs activités en France. » En clair : au nom de la libre concurrence, les constructeurs doivent avoir le droit de délocaliser. C’est ce que Nelly Kroes, la commissaire à la concurrence a encore rappelé à la France début janvier 2010. Un zèle libéral qui lui vaut d’être promue vice-présidente dans la nouvelle commission Baroso. Celle que viennent d’investir… les députés européens de l’UMP !
LES FRANCAIS ONT DES DROITS SUR RENAULT !
L’argent public des français est fortement mis à contribution dans Renault. Cela nous donne des droits. L’Etat possède encore 15 % du capital de Renault et il dispose de 18 % des droits de vote. Deux administrateurs de l’Etat siègent pour cela au Conseil d’administration de Renault. L’Etat est donc le premier actionnaire de Renault. Pour mémoire, la part de l’Etat était majoritaire jusqu’en 1996. Là, l’excellent monsieur a bradé les avoirs de l’Etat en le faisant passer de 54 % à 46 %). Puis les gouvernements de droite ont encore réduit la part de l’Etat en 2002 et 2003 en la faisant alors descendre de 28 % à 15 %. Par contre, 4 milliards d’euros d’aides ont été versés par l’Etat en 2009, sous forme d’avances remboursables à Renault. L’entreprise et ses actionnaires privés peuvent encore dire merci pour les 500 millions d’euros de primes à la casse payées par l’Etat en 2009 puisque Renault en est un des principaux bénéficiaires. Surement aussi qu’ils auront une pensée émue pour les braves gens qui vont payer à leur place les 300 millions d’euros que Renault va économiser en 2010 grâce à la suppression de la taxe professionnelle.
LE PILLAGE DES FRANCAIS
En dépit de toutes ces participations publiques, l’influence stratégique de l’Etat sur Renault est quasi nulle, alors qu’elle devrait contribuer à réorienter ses productions. Notamment pour tenir compte de la crise écologique. Et ce serait l’occasion de voir un vrai débat a propos du véhicule individuel de l’avenir. Sans autre forme de procès il semble convenu que ce soit la voiture électrique qui ait les faveurs de l’Etat et de la firme… Le moins qu’on puisse dire c’est ça se discute. Pourtant l’Etat a subventionné la future voiture électrique de Renault, la Zoé. Une fois de plus sans avoir aucune garantie à propos de la localisation de l’activité. Et pas de petites sommes ! 100 millions d’euros en capital, 150 millions pour la chaîne de fabrication des batteries, sans parler du bonus fiscal de 5 000 euros qui sera offert à l’achat. Or même si la Zoé doit être assemblée à Flins, Renault avait prévu de produire l’essentiel de ses composants en dehors de France. Et Estrosi n’a obtenu qu’un engagement pour que 60 % des composants viennent de France … ce qui veut dire que près de la moitié seront produits à l’étranger ! Un comble pour un projet subventionné par les français.
LE DUMPING DE RENAULT
Les aides de l’Etat n’ont rien changé à la stratégie de dumping de Renault. Le plan de 6 000 suppressions d’emplois annoncé en 2008 n’a pas été remis en cause, alors même que l’entreprise est bénéficiaire ! Sournoisement, Renault considère qu’il n’a aucun compte à rendre à l’Etat sur sa mise en œuvre car officiellement le plan a été lancé avant que Renault reçoive les aides. Rusé, non ? Pire, Renault a provisionné 600 millions d’euros de stocks options dans ses comptes 2008, à distribuer à ses plus hauts cadres et dirigeants, alors que les salaires ouvriers de l’entreprise ont chuté en moyenne de 15 % en 2008 du fait du chômage partiel. Et l’entreprise exige par-dessus le marché des syndicats le gel des salaires pour 3 ans, l’allongement du temps de travail et de nouvelles mesures de flexibilité. Le tout pour remplir l’objectif d’être «être le constructeur généraliste européen le plus rentable ». Face à cela quel crédit donner à ce que promet Etrosi ? Aucun bien sur.