Jour de mouise ordinaire

J’écris ces lignes depuis mon banc à Strasbourg au parlement européen. Dans cette note ça parle de football, de la Belgique et des stagiaires. Je vous signale que la lettre de liaison numéro un de ce blog vient de paraitre et qu’elle est envoyée à ceux qui se sont inscrits en utilisant le formulaire à droite de l’écran en pied de page. Il en paraitra une par semaine. Je suis sûr que tous ceux qui se sont inscrits depuis des mois sans rien voir venir ont dû être bien surpris. Puis ravis, je le souhaite. Ma lettre s’appelle le « petit courrier du blog de Jean-Luc Mélenchon ». On dira : « le petit courrier ». Et c’est une merveille. Ceux qui s’inscrivent peuvent donc faire un bout de chemin avec moi. Ca peut être intéressant. De toute façon si ça ne leur convient plus, hop, ils peuvent se désinscrire. On va voir ce que ça donne.

Ces footballeurs sont vraiment nazes ! Attention, je ne me risque pas à donner un avis sur leurs talents de joueurs. Je ne connais rien à l’art de pousser une balle au bout du pied. Je ne parle même pas d’un membre de l’équipe ou d’un autre en particulier ! Je ne connais pas leurs noms ! J’ai même oublié celui du gars qui s’est fait offrir une gamine prostituée pour son anniversaire. Et aussi celui du rigolo qui s’est moqué de moi sur « Canal plus » en prétendant que j’étais un menteur parce que, parlant de moi il a déclaré : « lui aussi sa maison vaut des millions ! » Pauvre garçon ! Toute sa tête est dans ses pieds, ça s’entend ! Des millions ma maison ! Même avec ma maison de campagne ça n’en fait pas un de million, tant s’en faut ! Ce type n’arrive pas à croire qu’on puisse vivre en dessous du million d’euros quelque part. Non, je ne parle pas de tout ça. Je sais juste que ces machines à sous sur patte qui suivent le ballon, souvent de loin, ne se prennent pas pour rien ! Donc ils ne veulent pas rencontrer la Secrétaire d’Etat, madame Rama Yade ! Et quoi encore ? Ces gens ont perdu tout sens commun. Cette femme représente notre pays que cela nous plaise ou pas ! A l’étranger on respecte son pays en respectant ses représentants. C’est comme ça chez les gens civilisés. Ceux là ont été lobotomisés par le fric. Ils finissent par me révulser ! Même en politique on évite de critiquer son pays à l’étranger. Et quand on le fait, à gauche, on s’arrange pour inclure sa critique dans un champ plus large (le capitalisme, l’impérialisme, bref tout ce dont notre droite est la représentante en France comme il y a en a partout ailleurs). Si nous en sommes capables, alors que nos empoignades sont si vives, qui sont ces gens pour se donner des airs et refuser de rencontrer celle qui nous représente tous ? Parce qu’elle a fait des remarques sur leur hôtel ! Décidément c’est le cauchemar ces garçons ! On aurait dû leur dire qu’elle était la représentante de la banque de France, ils auraient compris de quelle autorité il était question puisqu’ils se moquent de celle de leur pays ! Le fric pourrit tout, c’est sûr !

Je suis dans l’hémicycle à Strasbourg. Mon collègue Elie Hoarau, député réunionnais du Front de Gauche bataille sur le budget européen. Il est teigneux Elie. Il ne se laisse pas faire. Même s’il sait comme moi quelle vaste mauvaise blague est cette discussion puisque le parlement n’a aucun pouvoir d’amendement. Mais le sujet, par contre, est grave. Depuis les accords de libéralisation signés entre l’union européenne qui nous protège d’un côté et, de l’autre, la Colombie et le Pérou, tout un ensemble de bouleversements se dessinent. Côté latino, cet accord est un coin enfoncé dans les institutions régionales qui ont volé en éclats entre ceux qui voulaient signer l’accord et ceux qui ne le voulaient pas pour protéger leurs productions locales. Le socialiste péruvien, Alan Garcia et le proto fasciste colombien Alvaro Uribe ont bien tiré dans le dos de leurs collègues. Ils ont signé l’accord. Mais nous aussi, les Français, nous allons déguster. Car les « régions ultra périphériques » de l’union européenne comme la Guadeloupe et La Martinique sont sacrifiées. Toutes les productions à l’exportation comme la banane se jouent au dumping social. Si mal traités qu’ils soient les paysans antillais sont des nantis par rapport aux malheureux péruviens et colombiens. Les prix de revient sont sans commune mesure. Un idiot m’a dit une fois : « en baissant les prix des marchandises on augmente le pouvoir d’achat des consommateurs sans augmenter le poids des salaires dans les coûts des entreprises !» Intelligent, non ? Problème : cette façon de baisser le prix des marchandises fait qu’il n’y a plus de salaires et donc plus personne pour acheter ! C’est la contradiction de base qui mine le modèle capitaliste de production et d’échange ! On n’aura même pas la consolation de se dire que ça pourrait pousser au développement des cultures locales vivrières. C’est tout le contraire ! Parce que cela aussi sera importé. L’igname, la patate douce, tout cela aussi se joue au dumping social ! Bref, j’arrive ici pour m’entendre jouer la musique ordinaire de « l’Europe qui protège », cette mascarade ! Les Antilles françaises vont bientôt voir se démanteler tout ce qui a été acquis en deux siècles de lutte pour l’égalité. Mais c’était l’égalité avec la métropole qui était en vue. Là, ils vont être mis à égalité avec les misérables du Pérou et de Colombie qui peinent et suent du sang pour ces cultures qui vont ruiner les autres. C’est beau comme de la concurrence libre et non faussée. Dites merci à ceux qui vous ont amené là !

Il y a eu des élections en Belgique et les séparatistes flamands les ont gagnées. Comme l’a dit leur dirigeant, il s’agit d’un processus « d’évaporation » de la Belgique. Cet homme fait le gentil. Il a gagné mais il propose aux autres de prendre le poste de premier ministre. On se demande pourquoi. Les socialistes se disent prêts à gouverner avec ces flamands séparatistes très très à droite. Rien ne peux plus surprendre de leur part ! En Slovaquie, ils ont gouverné avec l’extrême droite. En Israël aussi !
J’ai déjà dit ici même ce que je pensais de cette affaire de Belgique. Evidemment il faut inscrire notre action dans le cadre d’un respect intransigeant des frontières. Il ne peut pas y avoir d’exception à cette règle. Pas à cause des Belges mais à cause des Allemands, des Hongrois et de quelques autres qui ne se sont jamais vraiment accommodés de certaines frontières. Inutile de créer des précédents. Mais que se passe-il si les Flamands font « s’évaporer » la Belgique ? C’est cela qui peut nous concerner. Les Flamands ont déjà bien rassemblé en un tout cohérent les institutions loufoques de ce royaume de circonstance. Je dis de circonstance parce que je n’oublie jamais que ce royaume fut inventé par les Anglais pour tenir les Français à distance des ports trop proches de leur île. Bref, pendant ce temps les Wallons, se sont dispersés. Leurs chefs sont infestés d’hyper fédéralisme micro local à la sauce des balivernes bien connues sur ce thème. Cinq ou six niveaux d’institutions se superposent, suintant comme un puits de pétrole dans le golfe du Mexique un clientélisme infect. Le reste suit : école, mutuelles, assurances, hôpitaux tout est réparti entre soi et communautarisé à mort et de pallier en étage remonte dans la main des partis politiques, nouvelles tribus qui s’entretiennent à coup d’allégeances clientélaires davantage que de n’importe quoi d’autre qui ait seulement l’apparence d’une idéologie.
On a compris que je suis un « rattachiste », comme on dit. Si les Flamands s’en vont, si la Belgique « s’évapore », alors que les Wallons viennent avec nous. Ce serait la conclusion d’une pente prise il y a des siècles et maintenue sans désemparer dans les sentiments populaires des Wallons comme des Français. Mais ces sentiments affectueux ne me font pas perdre de vue ce qui est l’essentiel à ce moment précis.
La balkanisation à laquelle pousse le modèle européen commence donc en Belgique. Pour moi ce n’est pas un cas isolé ni une exception en Europe. La dynamique interne à l’union européenne pousse à cet émiettement des Etats nations qui n’est que la forme territoriale de la concurrence généralisée. Le bon échelon subsidiaire pour ce modèle, c’est la grosse région, le land, la province d’ancien régime. Naturellement la résistance du matériau national est d’autant plus faible que la nation est récente ou que son unité est fragile historiquement. Dans la liste des fragilités il y avait en premier lieu les états multinationaux. Du type Tchécoslovaquie. La partition a été quasi immédiate. Vient la Belgique. A venir ensuite, l’Italie, créé en 1860 et tenaillée par le séparatisme de la Ligue du nord, l’Espagne, déjà profondément clivée par les autonomies de Catalogne, Pays basque et ainsi de suite, puis aussi le Royaume pas si uni que ça des Anglais, des Ecossais et ainsi de suite. Ce qui se passe en Belgique est un symptôme de la régression européenne. Pas une singularité. Ou bien on peut dire que c’est la forme singulière d’un processus général. Il est invariant d’échelle. Dans la logique du « plus de marché, moins d’Etat », la concurrence des territoires est la règle, dans les nations et entre elles. Ne vous moquez donc pas de l’affaire belge, suivez là comme on surveille un thermomètre.
La question du fractionnement des Etats est devenue universelle, d’ailleurs. Sous les coups de boutoirs de la concurrence généralisée, dès qu’un avantage en nature se constate quelque part « le territoire » affiche une volonté d’autonomisation croissante pour bénéficier seul de l’avantage. Vous avez remarqué ? Je mets des guillemets à « territoire » ! C’est naturellement parce que je parle de la population qui s’y trouve et davantage encore de l’invention par ses élites d’une identité « territoriale » spécifique. Il y en a toujours une  disponible en remontant s’il le faut jusqu’aux branches si différentes des arbres dans lesquels se perchaient nos ancêtres simiesques ! Le mot « territoire » est devenu une euphémisation des vocables identitaires et ethnicistes. Ceux là sentent trop le maurassien qui sommeille dans chaque apologiste des « territoires » et autre « terre qui ne ment pas ». Pour cette raison même ceux là sont aussi d’ardents européistes fanatiques du principe augustinien de « subsidiarité » que la démocratie chrétienne a réussi à faire passer du droit canon de l’église à la novlangue européenne sans que personne ne s’en rende compte. Bien sûr, la « concurrence des territoires » est le vecteur délicieux d’une naturalisation, en quelque sorte, de la concurrence libre et non faussée.
Mais c’est aussi une stratégie de contrôle lourdement pratiquée par l’empire nord américain pour balkaniser ceux qu’il affronte. Il y a toujours un kosovar de service pour faire office de tireur dans le dos. En Amérique latine, la CIA souffle sur les braises et nourrit les portefeuilles des plus extravagants indépendantismes micro locaux. C’est une caractéristique universelle. Du Tibet à la Bolivie, l’empire défend de malheureuses minorités opprimées qui ont pour commune caractéristique d’être tout à fait conformes à la théorie du « choc des civilisations », d’être donc des champions du « nous et eux » que décrit Samuel Huntington, et surtout de menacer de l’intérieur un ennemi de l’empire.

Vous savez tous ce qu’est un stagiaire ? Oui ! Il y en a partout. Et tout le monde a au moins un jeune à la maison qui est stagiaire. Garçon ou fille, tous sont soumis à ce bizutage professionnel de longue durée. Vous n’en savez rien, mais la droite au Sénat a commencé à détricoter l'embryon de statut des stagiaires qui avait été acquis de haute lutte en 2006 sous le gouvernement Villepin. Par exemple il y avait obligation de rétribution à partir de 3 mois de stages. Quel privilège ! Tellement rigide ! Les modernes étaient révulsés par cet archaïsme. Les salauds l’ont rêvé, la droite la fait. Le prétexte est toujours du même bois ! Que disent ces messieurs dames qui trouvent que ça fait trop cher de l’esclave ? Ils pleurent, comme d’habitude, et ils frappent cruellement comme à regret ! C’est pour leur bien que les stagiaires doivent être maltraités ! C’est trop cher regrettent-ils ! Toujours trop cher ! Ils disent redouter que ce coût terrible réduise l’offre de stage ! Ces braves gens, au cœur si grand, ont donc voté le 30 avril au sénat une proposition de loi pour exclure certaines formations de ces droits. Dans le paquet il y a, notamment les étudiants en travail social, c'est-à-dire les futurs assistants sociaux par exemple. Ca suscite une levée de bouclier chez les étudiants concernés. Mais pourquoi donc, grand dieu ! Quelle ingratitude pour leurs bienfaiteurs ! Ne comprennent-ils pas que s’ils doivent demain s’occuper des pauvres autant qu’ils le soient eux-mêmes pour mieux comprendre la situation. Bon ! Assez plaisanté jaune. La vraie question est : pourquoi personne ne vous parle-t-il de cela ? Devinez ! Parce que les rédactions de vos journaux favoris sont remplies jusqu'à la gueule de stagiaires. Pendant l’été et pendant les vacances c’est mêmes eux qui font tourner les boites. Je n’ai pas eu besoin de chercher bien loin les deux témoignages que vous allez lire. Compte tenu des perfidies très caractéristiques de la mentalité anti politique que contiennent ces deux textes vous allez comprendre que ce sont des stagiaires journalistes. Attention ce ne sont pas des étudiants en journalisme ! Leurs études sont achevées. Une nouvelle occasion de confirmer tout ce que j’ai dit à propos des conditions de travail dans cette profession et le poids qu’elles pèsent dans la qualité de la production de la matière première de la citoyenneté qu’est l’information.

Le témoignage de Mathieu, 24 ans, diplômé du CELSA. « 398,13 euros. C’est le jackpot que je gagne, chaque mois, en stage dans une grande agence de communication. Autant vous dire qu’à 24 ans, je ne suis pas prêt de rembourser la dette que j’ai contractée pour payer mes études. Quand les politiques se saisiront-ils enfin du scandale des stages payés au lance-pierres ? Je suis dans une grosse boîte qui tourne essentiellement grâce aux stagiaires. Le travail de formation, pourtant inhérent à la progression du stagiaire, a été totalement dévoyé. Celui-ci est considéré comme un employé à part entière. On pourrait s’en féliciter, si le salaire suivait ! Que nenni ! On nous demande de  mouiller la chemise mais nous n’avons même plus les moyens de nous en offrir ! Un jour, mon chef m’a demandé en toute tranquillité d’effectuer une veille de l’actualité financière le week-end, et de lui envoyer ma note pour le dimanche soir. Motif : « il y a un sommet super important ; il faut que tu sois en alerte ». Quand je lui ai rétorqué que je n’étais pas censé travailler le week-end, a fortiori vu le montant de ma « gratification », il m’a répondu le plus sérieusement du monde : «C’est toi qui devrais nous payer pour être ici. Tu ne te rends pas compte de tout ce qu’on t’apprend » ! C’est vrai : ils m’auront appris que le combat pour le progrès social avait encore un sens.
Il est véritablement urgent de revaloriser de façon substantielle le salaire minimal des stagiaires. 30% du SMIC, c’est beaucoup trop peu. On nous rétorque que si l’on augmente trop la gratification, les entreprises n’embaucheront plus de stagiaires ! C’est faux ! Car les boîtes qui abusent le plus de stagiaires sous-payés sont de grosses sociétés qui ne peuvent pas se passer d’eux, et qui seront donc toujours prêtes à en prendre, tant que ça leur coûtera moins cher que d’embaucher des jeunes en CDD !
Les conséquences de la politique salariale actuelle sont socialement désastreuses. Concrètement, quels jeunes, aujourd’hui, peuvent véritablement se permettre de faire un stage de 6 mois dans une agence de communication, dans le secteur culturel, dans l’humanitaire ou dans le journalisme ? Réponse : les fils à papa ! Car même s’il est attiré par ces métiers, un boursier n’envisagera tout simplement pas cette éventualité, une telle indemnité ne lui suffisant même pas à se nourrir. C’est ainsi que la reproduction sociale fonctionne à plein, entre ceux qui, soutenus financièrement par leurs parents, se résignent à accepter ces stages mais retardent leur autonomie, et ceux qui renoncent à se tourner vers certains secteurs, faute de moyens. Au prix d’y laisser leur rêves… »

Le témoignage de Mathilde, 23 ans, diplômée de l’université Paris-Dauphine  « Tu vas enchaîner les stages et un jour ça mordra à l’hameçon. »  Phrase d’accueil pour la jeune diplômée que je suis au début de mon stage de fin d’études.
À première vue, on pourrait donc croire que les employeurs ne sont pas familiers du concept de convention de stage. Grossière erreur. Ils connaissent au contraire trop bien les rouages administratifs des établissements d’enseignement supérieur : ces derniers « permettent » maintenant aux diplômés de conserver leur statut d’étudiant une ou deux années après leur fin de cursus. La recette est simple : les jeunes en galère qui arrivent sur un marché du travail ravagé, voire fictif, payent une partie des droits de scolarité de leur école, en échange de quoi ils « ont la possibilité » d’obtenir une convention et donc de faire des stages. J’insiste sur le caractère ironique des expressions entre guillemets.
Car ce système revient tout simplement à contraindre les jeunes à payer des droits de scolarité pour faire des stages dont les indemnités tournent souvent autour de 400 euros mensuels. De là à parler d’exploitation, il n’y a qu’un pas.
« Mais c'est la crise » : le sempiternel refrain des employeurs pour justifier le nombre de stagiaires dans leurs entreprises. Elle a bon dos la crise. Certaines entreprises tournent avec un taux de stagiaires avoisinant 40% de leur personnel : la faute à la crise. Des instituts d’enseignements supérieurs poussent des jeunes Bac+5 à postuler à des stages sous-payés : là encore la faute à la crise.
Inutile de préciser par ailleurs que ce système est condamné à perdurer. Car en effet qui aurait intérêt à le dénoncer ? Les hommes politiques bien contents de trouver des petites mains surdiplômées pour répondre à leur courrier ou les entreprises de médias tout aussi reconnaissantes de la serviabilité de jeunes journalistes désespérés ?
Ces messieurs qui nous exploitent, ceux-là mêmes qui parfois se fourvoient en leçons de morale sur les plateaux de télévision n’ont souvent pas beaucoup de scrupules. La génération de 68, celles des valeurs, de l’entraide et de la liberté, a-t-elle à ce point changé pour abuser remords des jeunes d’aujourd’hui ? Il y a quarante ans, nos aînés réclamaient plus de liberté. Nous aujourd’hui réclamons simplement du respect. »

Ici dans l’hémicycle, il est question du temps de travail des chauffeurs routiers. Tout le monde devine que « l’Europe qui protège » est mobilisée pour réduire toutes les limitations au temps de travail. Des « indépendants », bien sûr ! En vain mon collègue allemand, ancien syndicaliste s’emporte-t-il pour rappeler que le but du droit social est de protéger les gens fusse contre eux-mêmes ! En face, des esclavagistes raffinés plaident pour le droit des petites entreprises, des « indépendants » et bla bla bla ! Parlent ensuite des députés barbares, baltes, évidemment, qui dénoncent la volonté de tout codifier, tout encadrer ! A vomir ! Et maintenant voila une série de ratiocineurs ! « Comment savoir si quelqu’un est en train de nettoyer son camion ou la voiture de sa femme » ! « Il faut cesser de faire monter les coûts de transport », « il faut laisser chacun organiser sa vie comme il l’entend ! Qu’est ce qui vous permet de dire que des travailleurs indépendants vont prendre des décisions qui leur sont défavorables en ce qui concerne leur sécurité ? ». Impossible de prendre la parole. Impossible de fendre le rideau de l’eau courante de ces sornettes cruelles. Je me souviens de ce soir de débat sur une loi d’amnistie au Sénat. J’avais bataillé pour faire retirer du champ de l’amnistie les patrons  routiers condamnés pour avoir fait travailler leurs employés au-delà des limites. J’avais eu une large majorité. Tout le monde savait de quoi on parlait. Quelques temps auparavant un gars stupéfait avait tué dix personnes en s’endormant à son volant ! Grands dieux que fais-je ici ? Je sors respirer…
Tout va de mal en pis sur le continent. Mais les élites hallucinées qui gouvernent et toute la superstructure des institutions, belles personnes, médias et ainsi de suite continue à débiter avec ardeur les sottises qui nous ont conduites jusqu'à ce point.

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