Je vais à Bordeaux, Lyon, Grenoble

Jparis-republique'ai beaucoup couru de tous côtés ces temps ci et pas toujours à bon escient. Me lever à six heures moins le quart du matin, une fois de plus, pour aller me faire interroger à la matinale de Canal plus sur ce que je pense de DSK, deux jours après ma déclaration de candidature, n’est pas ce que j’ai fait de plus intelligent.  Je ne pouvais pas prévoir ce que ce serait, certes. Mais que de fatigue pour rien. J'ai lu ce numéro de "Libération" qui titre sur moi, à la une, dix minutes avant d'entrer sur le plateau. Rude reveil matin. Demain départ en tournée de réunions politiques jusqu'à samedi le forum de Libération à Grenoble. Dimanche, débat avec Manuel Valls sur Europe1. Mais d’abord des nouvelles de la révolution citoyenne.

(BY-NC-ND) Merci à Anne Dallongeville pour les photos qui illustrent ce billet.

La continuité du mouvement révolutionnaire en Tunisie est tellement riche de sens ! Parti du terrain social, le mouvement a immédiatement pris un chemin politique en se concentrant sur la question de la démocratie. Sans relâche ni trêve la volonté de faire partir tous les membres de l’ancien régime se maintient et se renforce.  « Qu’ils s’en aillent tous ! » dit le mouvement. Le mot new-york-2d’ordre venu d’Amérique latine a bel et bien traversé l’atlantique. Les évènements en Egypte, mais avant eux ceux de l’Algérie, dessinent un tableau cohérent. Il  signale comment à une communauté de causes correspond une communauté d’effets. Sans entrer ici davantage dans une analyse déjà maintes fois argumentée sur ce blog, cette série d’évènements confirment la thèse sur laquelle est bâtie la stratégie du Parti et qui le conduit à proposer la perspective de la « révolution citoyenne ». Vous notez que j’essaie d’en parler de façon aussi concise que possible cette fois-ci. Mais comment taire combien je suis impressionné par la vitesse à laquelle une analyse comme celle-ci s’est vérifiée. Autrefois il y aurait eu sans doute un ardent débat à gauche pour confronter les thèses en présence à propos de l’avenir de la gauche dans ce contexte. Aujourd’hui il ne se discute de rien. La révolution tunisienne est un article exotique. Personne, sinon mes amis et moi, sur ce blog comme dans nos tracts et discours, ne se risque à dire que l’affaire tunisienne nous implique et que sa capacité de contagion nous concerne.

Sous nos yeux le bug français dessine ses propres contours. La marmite chauffe. Comment ceux qui font si grand bruit à propos de l’exigence démocratique ailleurs en font-ils si peu de cas pour ici. Comment le pouvoir de droite, et son chef Nicolas Sarkozy, qui vient de déclarer n’avoir pas pris la mesure de la frustration des tunisiens ne se demande-t-il pas s’il n’est pas en train de commettre la même erreur dans ses propres frontières ? Je ne pose pas la question comme une formule de rhétorique pour accabler un gouvernement déjà si enfoncé dans les sondages et dans l’espnew-york-3rit du tout venant, si j’en juge par ce que je vois et j’entends autour de moi. Je ne considère ici que les effet  si semblables d’une cause si évidemment commune. Comment l’équipe de Ben Ali est-elle devenue absolument aveugle et sourde devant ce qui a éclaté et les a emportés ? Et comment tous les observateurs ont-ils été atteints de la même cécité ? Comme ce fut le cas en Argentine, en Bolivie et ainsi de suite. Comme ce fut le cas de Louis Capet au moment du fameux échange « c’est une révolte ? » « Non sire, c’est une révolution ». Dans la notice injurieuse que Christophe Barbier a rédigée avant de me remettre le grotesque prix de « la révélation politique de l’année », je lis ces lignes qui décrivent si bien l’état d’hallucination satisfaite des puissants. « A l’heure où l’indignation  est tant à la mode, il serait coupable de faire croire au peuple que s’enflammer sans réfléchir, casser plutôt que bâtir, détester une partie des français plutôt que de chercher l’union nationale est la voie à suivre. Depuis longtemps, dans notre pays jacquerie rime avec escroquerie, et les plus pauvres sont souvent les dupes de leurs agitateurs. Quand Mélenchon prend pour mentor Poujade et Bolivar, il en sort une leçon politique bien inquiétante ».  L’aveuglement des puissants n’est pas seulement le fait qui accompagne les évènements et se révèle ensuite dans son rôle décisif. C’en est une des causes. Parce qu’ils croient profondément que tout peut durer toujours, ils sont certains que la résignation, habilement accompagnée par des discours et subterfuges, les garantit pour toujours. Jusqu’au point de ne plus douter d’aucune façon d’eux-mêmes, ni de leur bon droit à prendre les décisions absurdes qui leur valent les compliments de la bonne société, tout aussi conditionnée qu’ils le sont eux-mêmes. Le moment venu nous les cueillerons comme fruits murs. Ils seront sidérés et aussi impuissants devant les évènements qu’un lapin devant les phares d’une automobile.  D’où l’importance de savoir avec clarté où aller et comment dès lors qu’il faut chevaucher des  évènements de cette dimension.

ni-dieu-niAujourd’hui je vois les mécanismes se mettre en place pour se rassurer. Ainsi de la thèse ridicule longuement développée notamment par « le Figaro » et quelques supplétifs des agences d’influences nord américaines. Thèse selon laquelle ce seraient les étasuniens qui auraient « lâchés » et « fait partir » Ben Ali. On comprend le profit de propagande pour les intéressés, perdus de réputation dans le monde entier depuis leurs exploits irakien, afghan, leur centre de torture de Guantanamo et leurs prisons secrètes dans le monde. Pas question de laisser entendre que l’empire est en train de s’écrouler comme s’est écroulé celui de l’union soviétique. Avec l’Egypte, ca finira pourtant par y ressembler. Mais le cœur de cette fable est de nier les faits. Les nier comme pour les effacer ou en tous cas désamorcer leur force de contagion. Non le peuple et son action n’y est pour rien. Ce sont les états unis et les belles personnes entre elles qui ont tout manigancé et réalisé. Sinon quoi ? Le peuple, devenu populiste avec ses slogans écrits en français, à la face du monde serait donc de nouveau devenu un acteur de l’histoire?  Oui, en effet. Tel est ce moment.

Comme ces lignes sont portées sur ce regard international, je dis mon étonnement que lparis-18ea conférence de presse de Nicolas Sarkozy le 24 janvier dernier à propos des prochains G8 et G20 n’ait pas été davantage commentée. Il est vrai que dans la mesure où il implique le candidat surnaturel des socialistes, du fait de son FMI, la réserve est de mise. Pourtant je crois que c’est un moment très parlant d’aveuglement au plus haut niveau qui a été donné. Une fois de plus face à des problèmes qui menacent de tous côtés, un flot de paroles ambigües, d’entourloupes à peine maquillées et d’obstinations dans l’erreur. Etrange entrée en matière du raisonnement, d’abord ! Pour Sarkozy, puisqu’il y a eu un changement d'équilibre entre les puissances mondiales, les institutions mises en place en 1945 ne conviennent plus et que de ce fait le G20 qui représente 85 % du PIB mondial doit être l'instance prédominante. Il souhaite donc le renforcer. Donc contre l'autorité et la représentativité de l’ONU. Notamment en dotant le G20 d'un "secrétariat" "pour suivre en permanence la mise en œuvre des décisions prises et instruire les dossiers". Qu’il y ait déjà un comité de l’ONU pour le commerce et le développement et un organisme pour la lutte contre la faim et pour l’agriculture au sein de l’ONU n’est même pas mentionné. La position traditionnelle de la diplomatie française passe ainsi sur un autre plan sans qu’il en ait été discuté nulle part et sans que personne ne s’en émeuve.

Comme d’habitude ont été prises pour argent comptant des dizaines de phrases toutes faites sans aucune vérification de ce que les faits montrent à l’inverse. Ainsi quand il s’est émerveillé sur les mesures déjà prises par le G20. Par exemple à propos des prétendues « nouvelles règles sur les réserves en capital des banques ». Non seulement il s’agit d’un ratio riquiqui de 8 % mais aucune de ces règles n'empêchent les banques de spéculer avec l'argent déposé par les paris-rue-berthepersonnes individuellement contrairement à ce qui avait été immédiatement mis en place après la crise de 1929. Ou bien son enthousiasme pour « la régulation des hedge funds ». J’ai longuement abordé ce sujet ici même à propos des dispositions prises par notre chère « Europe qui protège » dans ce domaine. L'activité des hedge funds n'est nullement régulée. Ils sont simplement enregistrés par les institutions européennes et reçoivent de ce seul fait l’autorisation de circuler librement sur tout le territoire de l’Union….Le morceau le plus consternant du discours de Sarkozy concerne son appréciation très positive de l'encadrement des bonus des traders dont il prétend qu’il est un résultat des précédente réunions. D’où vient cette certitude ? Mystère. Les traders ont encore reçu d’énormes bonus en 2010. Les 400 traders disposant des plus hauts bonus ont reçu en moyenne 1,65 million d'euros. Le record individuel a dépassé 10 millions d'euros. Cette embrouille en a appelé une autre. Celle sur la taxation des capitaux. Nicolas Sarkozy est, dit-il, partisan d’une "taxation sur les transactions financières". Elle est selon lui "morale". Pas moins. Elle est aussi "utile pour dissuader la spéculation" et "efficace pour disposer de nouvelles ressources". La suite elle est immorale compte tenu du niveau du bobard ! Car le même affirme :"la France n'est pas […] favorable au contrôle des capitaux". Alors comment ca marche sa taxe Tobin à lui ? Car pour taxer les transactions financières il serait nécessaire de contrôler avec précision les mouvements de capitaux. Non ?

Le pire est pour à présent. Face à la déferlante de papier dollar bidon qui déstabilisent la planète économique et la mettent en péril de basculer que dit notre grand leader ? "La France ne souhaite pas revenir à un système de changes fixes". Et pour que l’on comprenne mieux qui est ainsi épargné et remis au pinacle des nations : "La France ne souhaite pas remettre en cause le dollar […] qui joue un rôle éminent et doit être une monnaie forte". Et même "Le dollar est merdeet restera la devise prépondérante". Fermez le ban. La monnaie commune mondiale de référence ? Motus. L’évaluation du risque d’effondrement ? Motus. Les parades à ce risque ? Motus. Par conséquent tout le monde comprend que tout ce qui se dira et fera à l’occasion de ces deux sommets illégitimes des pays qui possèdent tout délibérant pour tous les autres ne sera que phrases. Les problèmes trouveront un autre chemin pour se régler.

 Ce mercredi matin le journal « Libération » a fait sa une avec mon portrait. Grand honneur. Mais le titre ! Mazette ! « L’homme qui veut faire battre DSK » Que l’intéressé ne soit pas candidat n’a pas l’air d’émouvoir les rédacteurs de cette une. Que ce ne soit pas du tout mon angle d’entrée dans le débat, et encore moins « mon obsession » comme l’écrit Laurent Joffrin, non plus. Je n’ai pas l’intention de faire battre DSK. Je veux l’écarter. Je ne le veux pas pour raison de délit de sale gueule idéologique », ou parce qu’il serait « réformiste », mais parce que la politique qu’il incarne dans le mouvement socialiste et par sa pratique à la tête du FMI ne répond à aucun des besoins du moment et se présente comme l’anti thèse de la révolution citoyenne à laquelle j’appelle. C’est donc un débat. Est-ce permis ? Non. C’est un crime de lèse majesté.

L’édito de Joffrin s’achève par une tirade qui nous rappelle le bon vieux temps des délicatesses de la propagande « des années trente » comme le dit si finement, sur la page d’à côté le délicieux Cambadélis. « Mais avec cette tactique de destruction, voter Mélenchon sera bientôt voter Sarkozy. » Dès lors ce texte est une première. Nous connaissions le « vote utile ». Nous voici rendus au irlande-inishbofin-5vote obligatoire. Est-il vraiment raisonnable dans ces conditions de voter et même de faire une campagne électorale. Finalement le procédé est tellement violent que je me demande si j’en suis bien le destinataire. En effet l’article montre bien que je stagne dans les sondages. Certes c’est le lendemain de l’annonce d’une enquête qui me situe à dix pour cent des intentions de vote dans la tranche d’âge de ceux qui votent le plus. Mais si je stagne pourquoi s’inquiéter ? Je finis par croire que cette mise en garde brutale s’adresse à tous ceux, dans le PS qui pensent exactement comme moi. Surtout parmi les candidats socialistes. A tous le même message. Silence dans les rangs. Si le message arrive sous cette forme c’est que Paris bruit de la rumeur du retour de l’homme providentiel dès le mois de juin. Et comme ses magnifiques sondages sont dorénavant à la baisse tandis que désormais on sait que deux de ses concurrents socialistes, Martine Aubry et François Hollande peuvent battre Sarkozy, il fallait réagir. Je sers de prétexte. Mais la question reste : « à quoi bon s’encombrer de l’homme du FMI qui repousse 10 % des électeurs, c'est-à-dire les deux tiers des intentions de vote de l’autre gauche, si deux autres font l’affaire face à la droite? Voila ce qui ne se règlera pas avec des insultes. Moi je dis que si c’est Strauss Kahn, l’élection est compromise. Et comme moi pensent des milliers de socialistes et gens de gauche qui ne prennent pas les sondages pour vérité révélée.

Mais je sais que ma candidature est un problème. C’est pourquoi les deux éternels stratèges « d’AG du mouv », sympathiques eternels  étudiants du PS, Cambadélis et Hamon, ont construit une stratégie que je vois s’effriter avecirlande-galway amusement. Premier temps il s’agissait de trouver une faille entre le PC et le PG. Ils ont donc tapé sur le clou tant et plus de l‘OPA de Mélenchon sur le PC ». Argumentaire qui fut pieusement recopié par toutes les petites mains liées au PS. Le PCF n’aurait pas d’autre salut que dans une bonne alliance sans condition ni chichi avec le grand frère. Patatras, ça ne marche pas. Il est vrai qu’en organisant une opération comme celle des candidatures communes verts PS pour faire battre les sortants du Front de gauche dans le val de Marne et l’Essonne, la démonstration a été faite jusque dans le plus petite section du PC ou du PG de ce que sont en réalité les bonnes intentions du PS !  Maintenant voici le deuxième temps, articulé de longue main. Tacher de redonner de l’air au NPA. Pour cela confirmer les raisons de son refus de toute alliance avec le Front de gauche. Les deux compères se répandent donc sur tous les coins de bistrot médiatique. « Vous verrez Mélenchon sera notre ministre ». Pschitt ! Ca ne marche pas non plus. J’ai répondu sans détour à cette question. J’étais sûr qu’ils iraient en escalade à l’erreur. Persuadés, avec quelques raisons, que personne ne vérifie jamais rien dans le petit monde des médias, voici le bobard qui tue, que je perce comme une baudruche. Hamon a déclaré que nous tapions sur le PS mais que nous discutions avec lui des circonscriptions. Personne ne lui a rien demandé à ce sujet. Le canard peut donc vivre sa vie et servir à ce que de droit là où ça doit servir à trois semaines du congrès du NPA et pendant ses votes internes.

Car la grande trouille c’est qu’en plus on finisse par s’entendre avec le NPA. Ou avec un bout de celui-ci. Il s’agit donc de colmater la brèche. Voici donc ce que j’écris en toute lettre. Nous l’avons d’ailleurs dit dans un communiqué que malheureusement « Libération paris» a oublié de citer quand il s’est fait un devoir de recopier sans ciller le bobard de Benoit Hamon. Je dis : Hamon est un menteur. Il n’y a aucune négociation nulle part sur quelque circonscription que ce soit. Un menteur ! Mais il peut me démentir tout de suite et faire de moi le menteur. Allez Benoit ! Vas-y ! Dis où ces négociations ont lieu. Où elles en sont parvenues? Sur quoi elles portent ? Vas-y, dis-le. Nous t’y autorisons complètement. Alors ? Il n’y aura rien. Hamon est un menteur. Son but est d’instrumentaliser le NPA comme il a déjà cherché à le faire lors de l’université d’été de son courant. Car la division de l’autre gauche est le principal rempart de la domination des sociaux libéraux. Il n’y a pas besoin d’être un génie pour comprendre ça ! Et ils ont une belle peur de ce qui se prépare, de la dynamique qui pourrait se nouer autour de nous. Hamon davantage que les autres. Car il lui faut bien une bonne raison pour habiller sa capitulation sans condition devant Strauss Kahn le moment venu et justifier son entrée au gouvernement Papandréou « pour peser à gauche ». Pour immobiliser dans un jeu d’appareil des milliers de militants qui vont cruellement manquer à notre bataille. Ainsi va la « gauche » du PS.

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