Après le Remue Méninges

2 septembre 2011 : Communiqué
Régle d’or en Espagne : non au coup d’Etat financier !

Par 316 voix contre 5, le Parlement espagnol vient d’adopter la constitutionnalisation de la "règle d'or". Une coalition de députés sociaux démocrates et libéraux en déroute vient d’abandonner sa souveraineté budgétaire et de graver dans le marbre constitutionnel un dogme imbécile.

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L es lecteurs attentifs ce blog constatent que cette introduction a changé.  En voici en effet une version actualisée. C’est une bonne nouvelle qui me conduit à revoir ma copie. L’émission sur C/Politique avec Géraldine Muhlmann, d'abord reportée aura bien lieu, finalement, ce dimanche 4 septembre. Vous devinez combien j’en suis heureux. Je vous y donne rendez vous car c’est un moment extrêmement dense de politique que cette émission. Elle fonctionne comme une aide à la compréhension  d’une pensée et de ses contradictions éventuelles plutôt que comme un coupe gorge du type des émissions avec Apathie. Cela veut dire que le sujet de l’émission y est bien l’invité et non le journaliste comme le croit Apathie.

Je vous retrouve aussi, si vous y êtes intéressés, bien sur samedi soir chez Ardisson sur « Salut les terriens ». Cette émission a été enregistrée ce jeudi. Le montage est en cours et je crois que c’est une rude épreuve pour les professionnels qui l’ont en charge car sur le plateau la polémique fit rage avec Henri Guaino. Il y a surtout une séquence terrible avec une ouvrière d’une entreprise délocalisée dont les ouvriers n’ont plus de paye depuis quatre mois. Samedi après midi, je suis à la foire de Lille. J’achève ma tournée des stands syndicaux dans l’espace de la fédération du Parti Communiste où je suis invité à dire quelques mots avant le repas.

Dans cette note je parle de la dernière rentrée scolaire du gouvernement Fillon, et des prises de positions de certains responsables socialistes à ce sujet. Puis je reviens sur mon discours de clôture du Remue Méninges de Grenoble à propos du thème de « l’offre publique de débat » et son contenu. Enfin je traite de l’ambiance autour du Remue Méninges.

La rentrée des classes sera piteuse. 16 000 postes supplémentaires sont en effet retirés du système éducatif en cette rentrée. Cela porte la perte d’effectifs à 80 000 postes depuis l'élection de Sarkozy en 2007. Et ce n'est pas fini puisque 14 000 nouvelles suppressions sont programmées pour 2012. La liste des méfaits que cela entraîne est interminable. Et leurs conséquences à long terme pour la société et l'économie sont inestimables. Chaque euro économisé aujourd’hui coute des centaines et des milliers d’euros perdus sur le long terme. La politique scolaire de Nicolas Sarkozy frappe tout le parcours d’accueil scolaire des jeunes. A l'école, la scolarisation des plus petits recule. A deux ans elle était de 35 % en 2002, quand a pris fin le gouvernement Jospin. Elle est aujourd'hui de 15 %. Le prix de ce recul sera lourd à payer, pendant longtemps. Car la scolarisation au très jeune âge est un facteur d’éveil fondamental. Pour les enfants de toutes les catégories sociales. Je le précise car j’entends si souvent de sottises sur la vie délicieuse que serait celle des jeunes des milieux favorisés enfermés dans les névroses familiales que cela me semble nécessaire de souligner que le savoir et la scolarisation collective sont des bienfaits universels. Quand bien même pourrions-nous disposer d’un professeur par élève que nous n’organiserions pas l’éducation nationale de cette façon. L’école de tous et pour tous est un bienfait pour tous.  

En primaire les coupes claires frappent fort. Les intervenants de langue étrangère et d'enseignement artistique sont en voie d'extinction. Les Réseaux d'aide aux élèves en difficulté aussi avec la suppression totale des postes d'enseignants qui leur étaient affectés. Au collège et au lycée, les classes se surchargent et les dédoublements de cours se font rares. Et on ne compte plus les options qui disparaissent. Je m’inquiète particulièrement de ce qu’on appelle les orientations par défaut. C'est-à-dire l’affectation d’élèves dans des cursus qu’ils ne choisissent pas, tout simplement parce que le choix ne leur est pas offert. Ces affectations par défaut se multiplient, notamment vers l’apprentissage, à mesure que la droite ferme des lycées professionnels. 53 d’entre eux ont disparu depuis que Sarkozy a été élu. Le système éducatif public est en train de se décomposer. Il faut savoir que ses personnels vivent leur tache avec le sentiment d’être au bout du rouleau. D'ailleurs même le Figaro écrit pudiquement que « la rentrée tourne au casse-tête pour les proviseurs ». Je crois que le but de la droite libérale n’est pas seulement de faire des économies et de comprimer les dépenses de l’Etat. Il s’agit, bien sûr, d’élargir le marché privé de l’éducation en poussant les gens à y avoir recours. Pour parvenir à ce transfert, rien de tel que la désorganisation du service public. En faisant baisser ses performances, en paralysant son fonctionnement, les libéraux pratiquent cette stratégie du dénigrement que nous connaissons bien dorénavant. 

L'appel à la grève lancé pour le 27 septembre par l'ensemble des syndicats du secteur est donc un acte de salubrité publique. Il nous concerne tous. Au nom du Front de Gauche, à la tribune du meeting de clôture de notre « Remue Méninge », j’ai appelé  chacun à soutenir ce mouvement, à y participer chacun a sa façon et à exprimer comme il le peut sa solidarité. Il nous faut d'autant plus le faire qu'à gauche tous ne le font pas. Je dois avouer que face à un tel désastre, je suis sidéré par les positions sur l'Ecole que j'entends dans les interventions des candidats à la primaire socialiste. 

Nous étions en droit d’attendre autre chose. Dans les conditions actuelles cela s’apparente à un mauvais coup dans le dos. Voyez plutôt. Dans le Parisien du 24 août 2011, Martine explique "aux syndicats d’enseignants" qu'"on ne pourra pas tout faire". Qu’est ce que ce « tout faire » ? Quel syndicat le demande ? Je n’aime pas cette façon de laisser entendre que la défense frontale de l’Ecole serait le fait d’un maximalisme irresponsable. Mon impression défavorable est confirmée par cette autre assertion qui fait mine d’être du bon sens et qui n’en est pourtant guère. "Il faudra mettre plus de profs là où on en a vraiment besoin, accepter qu’il y ait plus d’élèves par classe là où les enfants vont bien, et moins d’élèves là où ils ne vont pas bien." Et elle ajoute cette remarque navrante : "A mon époque, on était quarante et on n’avait pas trop de difficultés." Faut-il d'abord rappeler à Martine Aubry que les difficultés scolaires ou sociales ne sont pas une maladie ni une tare personnelle comme le suggère pourtant sa distinction entre "élèves qui vont bien" et "élèves qui ne vont pas bien ". Peut-être faut-il seulement trouver dans cette expression mal choisie un écho du vocabulaire anglo-saxon des théories du "care" auquel Martine Aubry a dit plusieurs fois qu’elle se référerait. Si j’étais plus sévère j’y trouverai l’idée sous jacente que les maux sociaux sont des "phénomènes biographiques" comme le dit le blairiste Anthony Giddens. Et qu'ils doivent être traités par des "solutions individualisées". Ce qui est exactement la façon de dire les choses que propose régulièrement Martine Aubry. De mon côté je partage le diagnostic des organisations syndicales de l’éducation nationale.

C’est d’ailleurs le point de vue traditionnel de la gauche, me semble-t-il. Nous considérons au contraire que ces difficultés, en général, sont principalement le produit d'un ordre social qui compromet le progrès humain. Dès lors, leur solution ne réside donc que dans des garanties collectives conquises contre ce système. Quant à la remarque finale d'Aubry sur son expérience personnelle des 40 élèves par classe, elle m'oblige à rappeler quelques évidences sur l'évolution du système éducatif depuis 50 ans. Quand Martine Aubry est entrée au collège en 1961, c’était à Notre-Dame des oiseaux, dans le 16ème arrondissement de Paris ! On comprend que pour ceux qui s’y trouvaient « ça allait » ! Je ne lui en fais pas le reproche. Mais non, ça n’allait pas bien pour tout le monde. Dans ce système éducatif, il y avait 45 % des enfants qui arrêtaient après le certificat d’études et n’allaient même pas au collège en 6ème. Autour de moi, au collège d’Yvetot, dès la cinquième, bien des copains partaient en apprentissage. Et quand Martine Aubry est arrivée en classe de terminale, en 1967, et moi à la rentrée 1968, il n’y avait que 15 % d’une classe d’âge qui arrivait au bac ! Il y en a 71 % aujourd’hui. A l’époque, seuls 60 % des candidats obtenaient le bac ! A présent ils sont 86% à y parvenir, toutes filières confondues. Le vieil adage des nostalgiques, « moi de mon temps », n’a jamais mené nulle part, on le vérifie une fois de plus. Donc, toute comparaison avec cette époque est plus qu’hasardeuse.

Suggérer qu'on pourrait se satisfaire de 40 élèves par classe du moment qu’il s’agit de jeunes « qui vont bien » est une immense sottise! Si cela vise les « gosses de riches » ce n’est pas davantage acceptable. Réfléchissons. Leurs parents auront vite fait de les emmener là où ils seraient mieux accueillis, ce qui est bien normal pour des parents. L’école publique n’a pas vocation à être « l’école des pauvres entre eux ». Ensuite je le répète, le caractère public laïque et métissé de l’école est un bienfait pour tous, quelle que soit la condition sociale des parents. Le contraire est réactionnaire. Je note d'ailleurs que quelqu'un avait déjà fait le même raisonnement qu'Aubry il y a quelques mois. Il s'agit du ministre Luc Chatel qui expliquait le 1er juin sur RTL qu'«il faut concentrer davantage de moyens là où il y a davantage de besoins. A Henri IV à Paris, on peut être 32 par classe sans problème; par contre, dans un collège d'une zone difficile, il ne faut pas être plus de 22 ». 

On retrouve la même banalisation de l’idée d’une école à plusieurs vitesses dans les propositions avancées par un autre émetteur socialiste. Il s’agit de la  Fondation Terra Nova. Elle propose dans un récent rapport d'augmenter massivement les droits d'inscription à l'université. Pour la bonne conscience on continuerait d’en exonérer les boursiers. Et elle donne des chiffres : « un triplement des droits d'inscription en licence ». C'est-à-dire passer de 177 euros à plus de 500 euros en licence. Quant aux droits en master, Terra Nova suggère même de les faire grimper à 1.000 euros contre 275 aujourd'hui. Ce système existe déjà. Aux Etats-Unis où les droits d'inscription ont doublé depuis 2001. Ils s'y situent désormais entre 3 000 et 12 000 dollars annuels pour les universités publiques et entre 10 000 et 30 000 dollars pour les universités privées. Cela est le résultat direct de l'autonomie donnée aux établissements et du désengagement financier public. Qui est justement la pente donnée à notre enseignement supérieur par Sarkozy depuis 4 ans avec la loi LRU. Au Front de Gauche nous récusons complètement cette logique. Et nous défendons l'abrogation de la loi LRU sur les universités qui en est l'instrument. 

François Hollande a aussi parlé d'éducation à la Rochelle. Il a expliqué que « ça a été une faute lourde de Nicolas Sarkozy de priver le système éducatif de moyens humains et financiers pendant toute la durée de son mandat.» C’est bien dit et c’est tant mieux. Du pur cynisme.  Car c’est le même homme qui a déjà exprimé exactement le contraire il y a quelques mois  dans l'Express (5 avril 2011) en déclarant  qu'il ne reviendrait pas sur ces suppressions de postes ! En effet quand Hollande indique dans cette interview qu'il faut "sanctuariser le nombre de fonctionnaires dans l'éducation", le journaliste lui demande si "on sanctuarise au niveau de 2007 ou à celui de 2012 ?" Et Hollande répond sans ambigüité : « Non, au niveau 2012 même s'il faudra mettre des moyens supplémentaires sur l'école primaire. » Vous avez bien compris. Cela signifie que si Hollande était élu, les postes supprimés par Sarkozy, y compris ceux de cette rentrée, ne seront pas rétablis, notamment au collège et au lycée. Ceux qui vont se mobiliser en cette rentrée pour sauver des classes et des postes ne doivent donc rien attendre d’une telle gauche qui ne lui propose rien d’autre que d’accepter son sort.  

Comme on m’a reproché de ne pas dire assez ce que nous ferions à la place de ceux qui dirigent aujourd’hui, je donne les propositions du programme du Front de gauche. En fait je crois que cela permettra de stimuler la lutte à la rentrée. Le Front de Gauche s'engage à mettre en œuvre un plan de recrutement pour rétablir, notamment, les postes supprimés. Nous proposons aussi de renforcer le service public en étendant la scolarité obligatoire de 3 à 18 ans (à la place des bornes de 6 à 16 ans aujourd'hui). Nous voulons ouvrir un droit à la scolarité dès 2 ans. Nous rétablirons également la gratuité complète de l’éducation malmenée par sa marchandisation. Nous n'abandonnerons plus le soutien scolaire aux griffes du privé. Pour nous il doit être pleinement assuré par le service public d’éducation. Et nous augmenterons de 50 % les moyens de l’enseignement professionnel pour accompagner l'élévation du niveau de qualification du grand nombre. Je sais qu'on peut le faire. Car je l'ai déjà fait. Je ne peux manquer de le souligner pour me faire bien comprendre. Avant que la droite ne commence son saccage, j'avais comme ministre de l'enseignement professionnel augmenté de 45 % les recrutements de professeurs de lycée professionnel de 2000 à 2002. 

Les trois jours de Remue méninges à Grenoble ont été magnifiques. Ils ont atteint les objectifs qui leur avaient été fixés. D’abord pour les participants. Ce fut un formidable brassage intellectuel autant qu’humain, tant de gens se découvrant, constatant leur diversité d’approche mais surtout leur proximité de point de vue. Deux mille personnes ont ainsi partagé à un moment ou à un autre nos travaux. Le mélange des générations a aussi été un stimulant dont il ne faut pas sous estimer l’impact sur le moral collectif. Cette forme d’écoute mutuelle et ce rejet du sectarisme qui a fait tant de ravage dans les rangs de notre gauche dans le passé me parait être une conquête essentielle pour notre gauche. Selon moi elle vient de loin. De la campagne de 2005 en fait. C’est là que, chacun étant sorti de chez soi, le mélange se fit à partir des argumentaires communs et des powerpoints partagés. Je retrouve cet état d’esprit. Je vois que le mécanisme fonctionne d’une façon assez automatique. Dans la mesure où il n’y a que peu de codes de langage et de culture communs, chacun est obligé d’expliquer ce qu’il dit assez clairement pour être compris au premier degré par ses interlocuteurs. Ce simple état de fait évite des milliers de malentendus et de surcharges venus des polémiques du passé. Un fond de l’air donnant l’envie du succès aide en tout, j’en conviens.  

Le rassemblement final dans la patinoire de Grenoble a été très réussi je crois. L’habituelle publication des chiffres de participants m’estomaque toujours autant. Mille chaises occupées, des gens debout et deux travées de gradins remplies  donnent entre 800 et mille participants pour les comptes rendus. On ne s’en fiche pas. L’évaluation du remplissage d’une salle un dimanche matin 28 aout n’est pas une question de courtoisie. C’est de la politique. Notre nombre à cet instant de la campagne est un bon thermomètre et une incitation agir pour ceux qui l’observent. Je pense que la table ronde qui a précédé mon discours a été une bonne démonstration de la cohérence des points de vue entre les organisations du Front de Gauche. La forme, moins fastidieuses qu’un défilé d’orateurs, a bien valorisé les propos et la pensée de chacun. Pour ma part j’ai entendu ce qui s’est dit comme un argumentaire commun à plusieurs entrées. En cela il restait dans le registre de l’éducation populaire auquel nous sommes attachés.  

Mon discours voulait fonctionner dans ce registre. Mais il avait d’autres tâches à accomplir aussi, bien sur. En tous cas je me suis efforcé de bien préparer toute la partie compliquée qui explique la crise et la question de la dette. Une nouvelle fois cela m’imposait une diction longue avec les effets de style que vous avez pu constater et qui me valent des comparaisons que je trouve finalement flatteuse avec d’autres orateurs du passé. Je m’amuse de penser qu’à ma façon, je crée un style qui sera ensuite collé comme une étiquette à d’autres. Je les plains d’avance. J’ai lu qu’on attribuait ma manière de parler comme un qualificatif pour décrire le message des autres. C’est Platini qui, parait-il, parle comme moi quant au fond. La comparaison me valorise. Pas sur que ce soit la même chose pour lui. 

Mon message politique tenait en six points. D’abord que cette élection de 2012 est un atout et non un empêchement ou une corvée. Ensuite qu’il ne faut à aucun moment oublier le défi de la crise de l’écosystème dont aucun pouvoir ne s’occupe sérieusement. Après cela j’ai voulu décrire en quoi consistait le « coup d’état financier » qui se déroule en ce moment en Europe contre la souveraineté démocratique des peuples. Puis j’ai montré que nous avons deux moyens de répliquer : la lutte sociale sans attendre  2012 et le rassemblement politique d’une majorité du peuple. Delà j’ai déduit une « offre public de dialogue » notamment en direction de la gauche, depuis le NPA jusqu’au PS. J’ai enfin décrit des éléments de notre style de campagne.  Je veux, à partir d’extraits que je choisis dans le texte retranscrit de mon discours, donner à voir ce que j’ai dit réellement. Je regrette que mon appel à la lutte sociale derrière les syndicats n’ait pas eu d’écho. J’y reviendrai dans une prochaine note. Mais je veux surtout que le texte en main vous puissiez analyser précisément ce que j’ai dit à propos de « l’offre publique de débat ». J’ai remarqué en effet des erreurs de compte rendu à ce sujet qui nécessitent des éclaircissements. Dans la mesure où cette idée est présente a deux moments différents du discours, je les ai rapprochés dans le collage que vous allez pouvoir découvrir à présent.  

« L’élection qui se présente en 2012 est une chance et non une corvée ! Elle n’est pas un obstacle, elle est un moyen extraordinaire : confrontés à des défis immenses, nous allons pouvoir y répondre avec des bulletins de vote, c’est-à-dire d’une manière organisée, consciente, délibérée. Oui, c’est la forme que nous préférons ! Mais nous mettons en garde les puissants, les dominants : si vous refusez au peuple le moyen de ce débat et de sa décision, si vous moquez sa souveraineté et le droit qu’il a de savoir ce qui se passe, si vous nous enfermez les uns ou les autres dans des caricatures pour transformer cette élection en une pitrerie, alors vous verrez se lever des vents violents dont vous n’avez pas idée aujourd’hui, vous qui vous croyez à l’abri du peuple, et qui ne le serez jamais ! C’est pourquoi, parce qu’il y a de tels problèmes et parce qu’il y a ce moyen, le vote, je dis à la droite : respectez la souveraineté populaire ! Le débat que nous devons avoir est nécessairement long ; nécessairement, il est compliqué. Maintes et maints se demandent de quel côté se tourner, qui ne réfléchissent pas seulement d’après des étiquettes politiques, mais qui cherchent à comprendre d’après les solutions qui sont proposées. Je dis à la droite : il faut faire cesser cette mascarade, ces faux suspens de vos candidatures qui auraient lieu ou n’auraient pas lieu. Il est temps que le président de la République, qui sera le candidat de l’UMP, dise qu’il est le candidat de l’UMP ; il est temps que les centristes cessent cette danse qui ne nous permet pas de savoir qui est là pour proposer des idées, ou qui est là pour rabattre des voix vers Nicolas Sarkozy. Respectez le peuple ! Avancez-vous franchement en proposant votre image du futur, et permettez qu’enfin les bulletins de vote tranchent.

Et la même chose vaut pour tous nos camarades et partenaires à gauche. J’en profite pour dire ceci : le Front de Gauche ne mène aucune guerre de personnes ; le Front de gauche ne refuse le débat avec personne ; le Front de gauche ne méprise personne, à la condition qu’on le respecte et qu’on accepte de débattre avec lui des sujets qu’il propose, des perspectives qu’il ouvre. Je suis lassé d’être harcelé, d’avoir à me prononcer sur qui je préfère dans cette primaire qui n’est pas notre affaire, qui regarde le Parti socialiste que nous respectons dans sa démarche. Nous ne nous déterminons pas sur des personnes, mais sur des projets politiques. Nous n’avons pas d’adversaires à gauche mais, oui, nous avons des divergences. Et les exposer, demander qu’elles soient tranchées par le peuple, ce n’est pas entretenir des polémiques inutiles ou tirer à boulets rouges, comme je l’ai vu ; c’est tout simplement respecter le droit du grand nombre à se mêler de ses affaires. Cette règle, c’est celle qui nous permet de mettre cette élection à sa place : elle doit être un grand temps d’éducation populaire collective ; nous allons apprendre les uns des autres en nous écoutant, en argumentant, non seulement à l’intérieur de la gauche mais, je le dis, en ayant les débats lucides, argumentés avec la droite. Il faut faire vivre pleinement notre démocratie. Je suis disponible pour débattre et défendre les propositions du Front de Gauche avec tous ceux qui sont d’accord pour discuter des propositions qui éclairent l’avenir. J’y suis disposé aussi bien face à la droite que j’y suis tout naturellement avec nos partenaires, même lorsqu’ils sont nos concurrents à gauche. (…) Nous devons nous rassembler et, bien sûr, rassembler la gauche. Il n’y a pas de victoire possible pour la gauche sans rassemblement. » 

« Mais qu’est-ce que ce rassemblement ? Je prie qu’on cesse de se référer uniquement aux opérations politiciennes qui nous sont proposées – des arrangements en catimini dont on entend parfois dire qu’ils ont commencé (je le démens totalement.)… Des arrangements, des répartitions de postes (il paraît même qu’ils se sont réparti des ministères, des circonscriptions, quoi d’autre encore ?) Non ! Ce qu’il s’agit de rassembler, ce ne sont pas les appareils, ce ne sont pas les états-majors – et il faut des états-majors, il faut des organisations -, c’est le peuple qu’il s’agit de rassembler ! La priorité, c’est le rassemblement populaire ! C’est le peuple qu’il faut rassembler. On ne le rassemble pas en lui mentant – mais pour qui prenez-vous les Français ? Vous croyez qu’ils ne sont pas capables de se rendre compte que certains sont déjà partis dans la course à savoir lequel  est le plus austère par rapport à l’autre ? Et lorsque je le dis – mais je ne m’en réjouis pas -, on me dit : « Ah, ben ça élargit vos parts de marché ! » On se trompe ! Nous ne sommes pas une boutique, une épicerie qui aurait – comme c’est normal – à vendre des produits. Notre objectif, c’est le futur, notre objectif, c’est le rassemblement humain autour d’objectifs communs de progrès. Nous ne nous réjouissons pas de voir ce comportement de ces responsables socialistes qui, en se mettant à genoux dès le mois d’avril, et en aggravant l’ardoise à mesure que les semaines passaient dans une surenchère absolument folle entre eux, ont dit qu'ils atteindraient l'objectif des 3% pour cent de déficit public d'abord en 2017, puis en Avril c'était en 2014. Cet été, pris de furie, les voici revenus à 2013, et même, à un moment donné, on a entendu 2012 !  Alors, pourquoi pas ? Voyons. »  

« Comment ferait-on ? Mais… qu'est-ce qu'on comprime ? Les dépenses ? Ou bien est-ce qu'on augmente les recettes ? Et si on augmente les recettes, alors nous disons : doivent exclusivement payer ceux qui le peuvent. C'est-à-dire : les banques – qui ont réalisé vingt et un milliards de profit l'an passé -, les compagnies du CAC40, et notamment celles qui n'ont pas payé un euro d'impôt à la patrie qui les a fondées, comme Total, les hyper-riches, les riches ! Le peuple ne paiera pas un euro ! Est-ce que c'est clair ? Vous avez le droit de ne pas être d'accord, mais, si vous êtes d'accord, c'est ici que ça se passe. C'est ici que ça se fabrique. Je dis qu'il faut un cynisme inacceptable pour, après avoir dit, comme l'a fait François Hollande – qui est le responsable d'avoir ramené le curseur de 2017 à 2014 puis à 2013 –  aller dire à La Rochelle que, « si tout le débat est entre l'austérité de droite et l'austérité de gauche, alors c'est la démocratie elle-même et l'Europe qui sont en cause ». Cynique ! C'est lui qui a engagé cette compétition ! (…) Eh bien, je vous le dis, on ne rassemblera rien ni personne avec une telle méthode. Les peuples ne sont pas, et notre peuple n'est pas, un peuple qu'on distrait avec des blagues, des bonnes paroles, des retournements de situation inouïs. Notre peuple est sérieux, et il sait qu'il est question de choses qui engagent de façon déterminée son avenir. Rassembler le peuple, c'est parler clair. Alors, pour qu'il n'y ait pas d'ambiguïté, et parce que je ne veux pas que nous passions notre campagne dans une espèce d'isolement mutuel : personne ne parle à personne et tout le monde s'enferme dans ses certitudes. » 

« Je fais une offre publique de débat à tous nos partenaires de gauche, qu'il s'agisse de nos camarades du NPA ou qu'il s'agisse de nos camarades socialistes. Je vous en prie, acceptez le débat ! Discutons de nos idées, demandons à notre peuple ce qu'il en pense. Je ne vais pas être long, je ne prends qu'un exemple. Je vous pose la question : si nous avons convenu qu'il nous faudra développer les services publics, revenir sur les suppressions de postes, notamment dans l’Éducation nationale – mais pas seulement dans l’Éducation nationale -, si nous voulons une justice assez sereine pour délibérer au nom du Peuple français dans la grandeur du souci de l'égalité et de la liberté, il nous faut des moyens. Eh bien, si nous voulons tout cela, alors il faut cesser la politique d'appauvrissement de l’État délibérée qui a été organisée. Il faut donc des recettes nouvelles. Je vous ai dit tout à l'heure : nous, on peut ! Je pose la question : êtes-vous d'accord pour dire que nous proposons comme objectif à tous les Français que les revenus du capital soient taxés à égalité avec ceux du travail ? C'est-à-dire, en moyenne, tous les prélèvements sont pour les revenus du travail de quarante pour cent, pour les revenus du capital, ils sont de dix-huit pour cent. Il s'agit donc d'aller chercher vingt-deux points d'impôts dans la poche des riches. C'est un sujet qui est assez grave, qui nécessite un renversement du niveau des prélèvements tel qu'il ne faut pas biaiser avec lui : il ne faut pas le mettre au détour d'une page ou d'une conversation, comme un de ces vœux pieux que l'on formulerait d'autant plus facilement qu'on s’apprêterait à y renoncer l'instant d'après. » 

« Taxer les revenus du capital comme ceux  du travail, c’est une mesure de justice et de dignité personnelle. L’argent qui se gagne à la sueur de son front, à la force de son intelligence et de son dévouement au travail doit être traité avec la même dignité et le même respect et les mêmes précautions que l’argent gagné, en dormant, sur le dos des autres !  C’est une affaire de dignité, de morale de la vie, de respect de soi, que cette taxation ! Alors, vous le voyez, les socialistes ne peuvent pas, s’ils en sont d’accord avec nous,  passer à côté de la leçon qui va avec ce mot d’ordre. Il faut que le peuple s’en mêle. Tirons la leçon de notre histoire : tous les gouvernements de gauche, quelle qu’ait été leur  bonne  volonté, se sont brisés sur le même écueil : l’implication populaire n’a pas eu lieu. Il faut donc cesser de gouverner comme nous avons gouverné dans le passé. Il faut gouverner autrement, c'est-à-dire de bas en haut plutôt que de haut en bas. Il faut appeler le peuple à l’action, et c’est ce que nous nommons la révolution citoyenne. »

Mon discours de clôture du Remue méninge a été retransmis par LCP Public Sénat et par LCI. J’en remercie ces deux chaines. D’une façon générale les médias de presse écrite et audio visuelle ont été bien présents pendant nos trois jours de travail. Dans ces conditions nous pouvons dire que nous avons supporté la comparaison avec l’Université socialiste de La Rochelle sans être effacés du tableau, ce qui n’est pas un mince exploit. La disproportion de temps de parole accordé aux uns et aux autres n’est pas un problème aussi longtemps qu’elle n’aboutit pas à notre effacement. Car le problème posé ne vient pas seulement de l’a priori politique qui peut se trouver à la tête d’une rédaction.  J’ose même dire que c’est rarement le cas. Les militants politiques comme Jean Michel Aphatie, cantonnés dans une niche de la grille horaire, pèsent moins sur la forme de l’information que le directeur des « ressources humaines ». En effet il faut connaitre les conditions matérielles de fonctionnement des médias pour comprendre la difficulté d’une telle juxtaposition de réunions politiques. Leurs équipes sont très réduites, surtout pendant l’été, les moyens matériels peu nombreux. Dès lors, la part affectée à « la gauche » est inscrite dans cet ensemble. La diminution des moyens, la contraction des couts est une donnée qui pèse directement sur la production médiatique et explique un grand nombre des biais et simplifications auxquels elle a recours pour s’y adapter.  La multiplication des médias ne soulage pas ce problème. Au contraire elle aggrave le tableau. Une concurrence impitoyable fonctionne qui pousse aux extrêmes le modèle économique du fonctionnement de chacun. Journalistes en CDD, cameramen en contrat d’intermittent du spectacle, durée de travail inouïe sont souvent la règle générale et le traitement correct l’exception. Le recours aux « boite de prod. » pour fournir la matière première des grandes chaines finit souvent, comme bien des sous traitances dans la production en général, par une surexploitation vertigineuse des personnels. Je renvoie au livre d’Ignacio Ramonet sur le sujet car il décrit à mon avis assez bien le bouleversement en cours et les tendances du futur sur le sujet. 

 Actuellement, en pratique, la plus grande difficulté pour l’expression politique vient de la confusion des rôles qui se présentent face à moi. Journalistes professionnels, « indépendants », occasionnels, associatifs, rédacteurs de blog personnels ou collectifs se présentent ensemble, dans une cohue souvent humiliante pour eux, et se perturbent les uns les autres. A ceux-là s’ajoutent « les humoristes », qui se présentent comme des journalistes, mais dont ce n’est pas le métier réellement. Leur métier c’est faire de rire de tout, à n’importe quel prix et par n’importe quel moyen. C’est bien leur droit. Mais la confusion des genres avec les métiers de l’information conduit à des situations professionnelles ingérables. Car ils n’hésitent pas à s’incruster dans les rendez-vous de leurs collègues, à les piétiner pour filmer devant eux la scène de travail, au mépris de tous les usages et codes, au point de provoquer une exaspération générale dont ils disent eux-mêmes, en privé, avoir honte. De Paris, des autorités invisibles les aiguillonnent et leur capacité sociale de dire non est égale à zéro compte tenu de leur statut de précaires. Imaginez la tête des militants quand ils entendent une équipe comme celle du  « Petit Journal » déclarer qu’elle « n’en a rien à foutre du discours ! On est venu filmer les moches ». Oui, « les moches », vous avez bien lu ! Le mépris de la dignité humaine de cette façon de faire de l’info soit disant drôle est parfois consternant. J’espère que cela ne passera pas à l’antenne.

Coup d'oeil. A lire un article que je trouve drôle sur "Mariane 2" à propos de l'équipe de la coopérative "Médiascope" qui prend en main nos outils de communication. Et pour l'humour et la détente , à voir cette page de blog de ce pauvre Jean-Michel Aphatie qui s'en prend une fois de plus à moi sur le mode nuancé qu'on lui connait. Cette fois ci vous pourrez y lire cette merveille "Il semblerait plutôt que Jean-Luc Mélenchon rêve d’un monde sans journalisme, où seraient seulement présents des femmes et des hommes posant des questions qu’il aimerait entendre et auxquelles il serait tout disposé à répondre." Je déments totalement. La lecture et le travail de Jean-Michel Aphatie me manqueraient trop dans un tel monde. Je ne parle pas bien sûr de ses questions, car ce sont toujours les mêmes ce qui est lassant, ni de ses interviews car la dernière que j'ai faite avec lui, c'est lui même qui l'a qualifiée de "totalement incohérente" avant de rendre l'antenne. Incohérente parce que je ne voulais pas faire les réponses qu'il attendait. Un plateau de télé n'est pas un commissariat mais Aphatie ne le sait pas. Tant mieux car c'est trop drôle de le voir faire le gentil pour mieux être méchant. 

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