Entre Strasbourg et Metz

aaa-03Cette note est rédigée à la va-vite dans le train de Paris à Strasbourg où je vais rejoindre mon banc. Dans ces cas-là, vous le savez, vous n’y coupez pas, je vous parle d’Europe. Ici il est question du nouveau traité et de l’élection du candidat commun de la droite et des socialistes, Martin Schultz à la tête du parlement européen. Mais avant ça je vous parle un peu de la campagne. Et le reste vous n’avez qu’à le lire pour le savoir. Car je dois quitter ce clavier pour retourner à de la relecture de texte à publier. Je n’en finis pas. Je passe ma vie à écrire et relire autant qu’à parler. Je ne me plains pas. J’ai toujours aimé ça. Et maintenant comme jamais.

Je n’ai pas chômé, mes amis. J’attaque mon quinzième jour sans pause à l’exception d’une grasse matinée ce lundi. Mais il était temps. Jeudi l’émission de France 2. J’ai lu que j’ai préparé ça en faisant de bons repas. Tu parles ! J’en serais mort ! Puis dès le lendemain matin une superbe rencontre avec des lecteurs du journal gratuit Métro. Une vidéo sur LCI permet de retrouver ça. N’empêche : encore deux heures d’exigence maximum car c’est un tirage à quatre millions d’exemplaires ! Puis repas sur le pouce avec mon équipe pour faire le bilan de la télé ! Départ pour Nantes car j’aime arriver la veille et que j’ai rendez-vous aaa-02bavec le collectif contre l’aéroport Notre-Dame-des-Landes. Dans le train on prépare la réaction à l’affaire Standard & Poor’s. Communiqué, dispositif de mobilisation, tout se cale dans le carré où nous sommes installé avec Martine Billard, par téléphone avec François Delapierre et Manuel Bompard. Je joins Pierre Laurent à Berlin, on affine. Arrivé sur place, rendez-vous pendant deux heures avec les copains et les associations contre l’aéroport Notre-Dame-des-Landes menés par Françoise Verchère. Ils ont dû me trouver très moyen car je mourais de sommeil. Moi je n’en ai pas perdu une miette et appris des arguments pour plusieurs autres dossiers. Le lendemain matin, trois quart d’heure sur France 3. Une magnifique édition de l’émission politique. Mais ce n’est pas une promenade de santé car les quatre qui sont là ne laissent rien passer, eux non plus. Repas avec l’équipe, les journalistes qui suivent ce déplacement. A ma table, le maire de Saint-Herblain, le socialiste Charles Gauthier. Un vieil ami personnel qui a tenu à m’accueillir ostensiblement. Après ça, pause conférence de presse sur place, au Zénith. J’y retrouve Patrick le Hyaric. On tient ensemble la partie commune, il fait le reste après que je suis reparti dans ma loge pour la préparation du discours. Je boucle ça avec Laurent Maffeïs le responsable des Etudes au Parti de Gauche. On finit par caler deux ou trois des plaisanteries politiques du discours, notamment la comparaison avec les Dalton qui a demandé du temps pour être bien en bouche, si j’ose dire. On vérifie les chiffres qui seront donnés. C’est toujours la hantise. Delapierre m’a rejoint dans ma loge. On récapitule. Vient le meeting. Puis le repas avec les copains du coin qui tiennent encore debout, ivres de bonheur. Ils espéraient quatre mille personnes il y a en avait six mille. Dimanche on démarre tôt. Retour à Paris. Micro sieste pour recharger la pile. Puis départ vers le siège de Standard & Poor’s où bataillent les copains depuis deux jours. Tout le monde est remonté à bloc. Je prends la parole perché sur un capot de voiture, ça me plaît. Par contre je force la voix comme un gamin sans expérience et elle se casse. J’ai pas eu le temps de chauffer l’outil. Voilà. C’est un résumé. De la diagonale. Mais ça donne l’ambiance et leaaa-05b rythme. Je ne me plains pas. Je suis porté par les camarades. Janvier c’est le mois de l’assaut du Front de Gauche. On fera le bilan en fin de mois. Pour l’instant, il faut aller au pas de charge, et trouver la cadence.

J’ai reçu une masse considérable de commentaires et d’échos de mon passage dans l’émission de France 2 « Des paroles et des actes ». Que des encouragements. J’ai pu constater l’impact considérable de ce type d’émission pour faire connaître un programme et le personnage qui le porte. Je n’en parle pas autrement qu’au cas particulier qui est le mien. On m’a parlé de « l’enthousiasme » que cela a déclenché. Il a été assez fort pour en trouver écho jusque dans bien des médias qui deux jours après en firent état après un silence d’abord coulé dans le bronze. Je n’en dirai rien de plus que ce que vous pouvez vous-même en savoir d’après ce que vous avez entendu ou ressenti. Bien sûr vous connaissez notre difficulté particulière. Bayrou avec moins de téléspectateurs et une mauvaise prestation progressa aussitôt de quatre points dans les sondages avant de doubler purement et simplement ses intentions de vote. Pour ma part avec davantage de téléspectateurs et une réussite constatée par les professionnels eux-mêmes, je me vois accorder un point et demi de progression par l’IFOP de madame Parisot, et pas une intention de vote supplémentaire par IPSOS-le Monde. Que des amis du peuple bien connus ! Je note une différence de ton cependant. Jusqu’à jeudi ces précieux esprits disent de mon score qu’il « stagne » entre six et huit pour cent. Maintenant ils n’hésitent pas à noter que je « plafonne entre six et huit ». Faussement affligés et mortellement répétitifs, les questionneurs automatiques couinent, la tête penché pour m’asséner la vraie question qui tue, directement recopiée des argumentaires socialistes : « Comment se fait-il que vous n’êtes pas plus haut dans les sondages alors que la crise… ragna gna ». Leur stupidité hargneuse ne les conduit jamais à se demander comment il se fait que la gauche est à un point aussi bas au total, alors qu’il n’y a plus que cinq candidats en lice dont un est réputé en quantité indétectable, et les deux autres ne faisant pas davantage ensemble que quatre points. Six mille personnes se rassemblent à Nantes pour le meeting du Front de Gauche ? 20 000 viennent ensuite sur notre site écouter le discours ? Pas une image télé ! Pas une ligne, pas une photo dans les journaux des importants. Et le commentaire du « Nouvel Observateur » de noter finement que nous avons fait venir des cars « de toute la France ». Oui, « de toute la France », rien de moins ! Le « Nouvel Observateur » oublierait-il nos cars de l’outre-mer ? Surtout ceux en provenance de la Polynésie française ! Je galèje ! Mais le journal qui offre un ordinateur à ceux qui s’abonnent croit-il que nous ayons besoin d’en faire autant pour attirer jusqu’à nous ? En fait ce qui me frappe à cette étape, c’est que de telles grosses ficelles n’attristent plus les nôtres, je le vois bien. C’est 2005 qui recommence par les deux bouts ! En haut et en bas un mépris croisé. Il est sain et vivifiant. De notre côté, il ne doit pas rester d’illusion sur tout ce petit monde des importants. Notre socle 00tiendra bon à proportion du dégoût qu’il ressentira pour leurs prescriptions et injonctions. Chaque jour qui passe, les méprisés apprennent à se guérir de toute considération pour ce dessus du panier qu’il s’agit tout de même de vaincre.

Parmi les commentaires de nos amis et surtout ceux qui me sont remontés des écoutes collectives, ce qui m’émeut le plus, c’est l’accueil qu’a reçu ma réponse à la question sur mon « premier déplacement ». J’ai parlé d’aller en Algérie, « si les algériens le permettent ». De partout là où on m’écoutait, ce furent applaudissements et cris ! Je ne sais combien sont venus depuis me serrer la main pour ces mots. J’ai dit « la guerre est finie ! On est une même famille, maintenant : on s’aime». J’improvisais les mots. J’ai laissé parler le cœur. Je me suis défini comme un « maghrébin européen ». De tout ce que j’ai fait, dit, écrit, je voudrais que reste ces mots d’amour s’ils ont fait avancer quelque chose entre nous tous ici, et là-bas. Et s’ils peuvent créer la mode de ne plus parler des maghrébins seulement à propos des « quartiers » ou avec des paroles paternalistes de compassion.

Mardi, à l’Usine, siège de campagne du Front de Gauche, nous avons reçu la délégation de la CGT menée par Bernard Thibault. Un moment très fort de la campagne après que la veille nous avons été reçus déjà par Annick Coupé et ses camarades au siège de « Solidaire ». Selon l’AFP « Jean-Luc Mélenchon (Front de Gauche) et Bernard Thibault (CGT) ont affiché mardi leurs convergences anti-austérité, à la veille du sommet de l'Elysée que tous deux jugent "anti-social". » La rencontre a duré près de deux heures. Puis nous avons tenu02 ensemble une conférence de presse commune au siège même, en présence de Pierre Laurent (PCF), Martine Billard et Christian Piquet. J’ai dit que j’étais « très ému et honoré » que la CGT « ait eu l'élégance de venir à notre siège de campagne », en soulignant que cette rencontre avait pour intention de « démonter la comédie qu'a préparée le chef de l'Etat avec son soi-disant sommet social dont la conclusion est annoncée d’avance : ce sera "encore plus d'austérité". » J’ai dit de Nicolas Sarkozy qu’il est un « homme aux abois qui gesticule comme quelqu'un en train de se noyer. » Bien sûr, je ne suis pas dupe du fait qu’il fait son job de classe en quelque sorte. Bernard Thibault,  de façon très forte pour moi, a salué « l'honnêteté intellectuelle de Jean-Luc,et rappelé « l'aspiration très répandue dans nos rangs pour un changement de président de la République et un changement de comportement des élus politiques à l'égard du fait syndical » au regard de la manière dont s'est préparé ce sommet qui s'annonce « anti-social ». Mais, mercredi à l'Elysée, « j'y vais à l'offensive », a déclaré le responsable cégétiste, déplorant que le président « ne retienne que les revendications patronales ». « Ils ont justifié des plans de rigueur au motif de vouloir conserver les 3 A » et maintenant que la note a été dégradée, ils vont « nous expliquer qu'il va falloir continuer », a-t-il dit, appelant à manifester mercredi. Bernard Thibault a dénoncé l'« attitude schizophrène du gouvernement » face au triple A, jugeant que « la conclusion est la même à chaque fois, plus d'austérité pour les salariés ». « S'il y a des économies à faire, je suggèrerai peut-être demain d'arrêter les subventions de l'Etat aux agences de notation ! », a-t-il lancé. L’AFP note que je l’ai approuvé. Cela va de soi. Et mieux en le disant. Pour ma part j’ai voulu relever plusieurs "convergences" avec le secrétaire général de la CGT. Et surtout sur le "danger" de « renversement de la hiérarchie des normes, qui mettrait non pas la loi ni la convention collective au-dessus de tout, mais l'accord individuel ou d'entreprise »: « ce serait un renversement inouï dans lequel les salariés seraient broyés ». J’ai dit : « Nous avons aussi une "perception commune du danger de récession que comporte la politique du gouvernement" qui se refuse à augmenter les salaires, nécessaire à la "relance de l'activité" », et j’ai souligné que notre programme prévoit des mesures partagées avec la CGT, comme le « salaire minimum à 1.700 euros ». Bien sûr, j’ai rappelé que nous étions d’accord ensemble, un  « accord absolu » sur le « retour de plein droit à la retraite à 60 ans ». Ce n’est pas le cas de tout le monde, pas vrai ? La suite sur le sujet, je compte la dire à l’occasion de mon meeting à Metz ! Je crois que ce meeting va être diffusé en direct sur le site Place au Peuple. En effet nous avons testé le procédé à 03Nantes, sans faire trop de publicité c’est vrai parce que nous étions en phase expérimentale. Maintenant ça va tourner. Chacun de vous si isolé qu’il soit va pouvoir s’impliquer dans l’argumentaire et bénéficier de notre élan commun là où il se réchauffe.

J’écris ces lignes sur mon banc au parlement européen à Strasbourg. Le mardi matin a été élu le président de ce parlement. Pourquoi fallait-il voter ? Parce qu’un accord entre la droite et le PS prévoit un tourniquet entre eux au perchoir. Grosse connivence. Je l’ai dit. Je l’ai écrit. Je n’ai pas voté. Aussitôt Catherine Trautmann, une socialiste pour laquelle j’ai bien de l’estime, me prend à partie prétendument au nom de « l’ensemble de la délégation socialiste française ». L’ensemble ? Chère Catherine, je connais la maison et je sais donc que ce n’est pas vrai. Il y a longtemps que le petit jeu des connivences entre socialistes et droite au parlement européen soulève de grosses colères au PS français ! De même j’ai parfaitement capté combien le résumé de mon communiqué est spécieux ! Ah ! cher « ensemble de la délégation socialiste française », vous aimeriez tellement avoir un adversaire caricatural ! Mais puisque vous me cherchez, vous allez me trouver, comme d’habitude. La déclaration selon laquelle Martin Schultz mériterait notre soutien en raison  des « positions qu’il a défini ces dernières années en notre nom sont sans équivoque ».  Mauvaise plaisanterie ! Schultz est une caricature de social libéral. Ses votes sont en effet sans équivoque ! Mais si vous insistez il sera indispensable de souligner quels ont été les votes de la délégation socialiste française. Le dernier en date qui vous a vu adopter « le paquet rail » en est un exemple douloureux pour ceux qui ont voté pour vous pensant défendre le service public ! Le rappel de vos votes au parlement européen avec la droite, les mesures que vous avez soutenu sur la politique d’austérité, vos exploits en faveur de la libéralisation des services04 publics comme celui du rail et ainsi de suite sont assez présents à mon esprit. Je vous donne rendez-vous pour la suite de la discussion sur mon blog européen.

Au Parlement européen en ce moment, outre les travaux habituels, on vit au rythme des négociations du fameux « traité » sur l’ « Union pour la stabilité budgétaire » inspiré début décembre par le couple Merkel/Sarkozy. Les informations sur les négociations nous arrivent en anglais, via les députés de la commission parlementaire des affaires constitutionnelles. Trois membres de cette commission, deux de droite et un social-démocrate, ont été gracieusement conviés à la table des négociations. Mais seulement en qualité d’observateurs ! C’est trop mignon, non ? Mais les rédacteurs avaient-ils vraiment le choix ? Ce traité intergouvernemental prétend tout de même avoir pour vocation de s'incorporer dans le Traité de Lisbonne. Inviter trois pauvres députés européens sans aucun pouvoir décisionnel, histoire de faire démocratique, était donc un minimum. Il permettra aux habituels enthousiastes de service de mentionner au détour d’une phrase, avec cet air de componction satisfaite qui est le chic des eurolâtres, que « les parlementaires européens ont été associés ». Je me régale d’avance des griots médiatiques qui vont répéter ce bobard sans vérifier et que ce sera un bonheur de ridiculiser. 

Le contenu du projet de traité change d'un jour sur l'autre. Mon équipe parlementaire tourne en bourrique. Il lui faut sans cesse comparer les textes anglais pour y repérer les nouveautés. Et moi je dois dire que mon emploi du temps ne m’invite guère à vivre au rythme de ce genre de palinodie. Je suis même plutôt très agacé de constater ce bazar ! Il y a des choses qui ne bougent guère cependant. Ainsi pour la règle d'or que ce traité veut imposer à tous les peuples des Etats qui le ratifieront. Celle-là ne change pas. « Les budgets des administrations publiques sont à l'équilibre ou en excédent en termes de recettes et de dépenses ». Voilà pour la règle. Elle est réputée respectée si vous restez dans les clous du Pacte de Stabilité (3% de déficit et 60% de dette). Mais ce n’est pas tout. Il faut 05aussi que votre déficit n'excède pas 0,5% « en données corrigées des variations conjoncturelles et déduction faite des mesures ponctuelles et temporaires ». Clair n’est-ce pas ? C’est le style de la maison. Ce charabia, c’est ce que les économistes appellent le « déficit structurel ».

Une notion floue qui n'a à ce jour aucune définition commune et partagée en Europe ! Elle est basée sur l'idée que certaines dépenses n'existent que du fait de la conjoncture du moment. Comme le coût du renflouement des banques par exemple. Ces dépenses-là ne doivent pas être comptabilisées avec le reste du déficit. Par contre les dépenses liées aux services publics ou à notre système de santé sont des dépenses structurelles. Elles doivent donc être réduites. Peu importe si de telles réductions alimentent la crise. Dans la logique de ce système, les dépenses qui seront alors faites pour éteindre le feu seront considérées comme "conjoncturelles" et donc non comptabilisées. Il est donc moins grave d’avoir à réparer des dégâts que de les provoquer. Je caricature à peine. Un calcul du "déficit structurel" des Etats est néanmoins réalisé régulièrement par les services de la Commission européenne. Celui de la France était estimé à 3,9% du PIB en 2011 par la Commission européenne. 3,9% du PIB ça représente 78 milliards d'euros. Pour rentrer dans les clous du nouveau traité (0,5%) ce sont donc 68 milliards d'euros d'économies qui devront être réalisées, soit près de 8 milliards de plus que le budget de l'Education Nationale. Notez tout de même que cette règle pourrait être revue. La ministre de l'Economie du Danemark, pays qui préside l'UE depuis le 1er Janvier, a en effet indiqué que son gouvernement était en désaccord avec la manière dont la Commission européenne calcule le dit "déficit structurel". Elle fait du zèle.

Autre constante dans les diverses versions du traité : l'obligation pour les Etats de « faire prendre effet (à la règle d'or) dans la loi nationale de façon contraignante et permanente, de préférence au niveau constitutionnel, de façon à garantir son respect dans le processus budgétaire national ». Notez que jusqu'à mardi de la semaine dernière, l'obligation de constitutionnaliser cette règle d’or était totale. Mais face au refus du Danemark de constitutionnaliser une telle règle, la formule de compromis emberlificotée que j’ai citée plus haut a été trouvée. L'idée reste la même : il s'agit de contraindre les parlementaires à se conformer à la règle. Un autre point qui ne varie pas est l'obligation de mettre en place un « mécanisme automatique de correction » en cas d'écart important de la règle. C’est-à-dire un mécanisme que personne n’aura le droit de contester dans aucune Assemblée Nationale. Dans la dernière version du traité, il est précisé que c'est la Commission qui concoctera le dit mécanisme. Elle fixera aussi le calendrier dans lequel les "corrections" devront être mises en œuvre par l'Etat. Toutes les versions du traité permettent aussi à la Commission de sanctionner financièrement les Etats membres de la zone euro ayant ratifié le texte. C’est une évolution car 06dans le fameux "6 pack", le « paquet gouvernance économique » entré en vigueur en décembre dernier, l'aval préalable du Conseil était requis. Au moins les Etats pouvaient faire semblant d’avoir encore un peu de pouvoir.

Le plus dur pour travailler ce texte, c’est ce qui change d'un jour sur l'autre. La première mouture du texte, sortie du chapeau de Monsieur Van Rompuy le 16 décembre dernier, prévoyait par exemple qu'à partir de sa ratification par 9 Etats membres de la zone euro, le traité puisse entrer en vigueur dans les Etats l'ayant ratifié. Vendredi dernier ce chiffre avait été porté à 15. Ce mardi il était tombé à 12. Ces variations ont le mérite de nous donner une idée du rapport de force en faveur de ce traité qui ne s'appliquera qu'aux Etats qui l'auront ratifié. Elles nous indiquent aussi à quelle pression auront à faire les peuples qui obtiendront la mise en place d'un référendum sur la ratification de ce traité. En France, la Constitution, en vertu de son article 11, permet d'organiser un référendum sur la ratification d'un traité « à l'initiative d'un cinquième des membres du Parlement, soutenue par un dixième des électeurs inscrits sur les listes électorales ». Ce référendum, c’est notre affaire. Nous allons en faire la propagande dans les mois à venir. Et nous engagerons nos partenaires européens à faire de même partout où c'est possible.

L’IFOP est le plus vieil institut de sondage français. Il bénéficie ainsi d’une image de respectabilité dans le monde des sondeurs. Pourtant, c’est bien l’IFOP qui vient d’inventer un nouvel instrument inquiétant. Le « Rolling 2012 » est présenté par l’institut comme « une innovation pour décrypter la course à l’Elysée ». Mais derrière ce terme anglais se cache un risque d’abus supplémentaire dans l’utilisation des sondages. L’IFOP a en effet décidé de nous abreuver quotidiennement de sondages. Du 12 janvier jusqu’au second tour de l’élection présidentielle, l’IFOP publiera un sondage chaque soir sur le site de Paris-Match. Tous les jours, entre 300 et 350 personnes seront interrogées en ligne, puis les résultats seront cumulés sur 3 jours pour obtenir un échantillon relativement « représentatif ». 07Les sondages en ligne comportent déjà de nombreux « biais », comme on dit pour désigner les arnaques de cet exercice. L’IFOP en rajoute de nouveaux en imaginant ce système de sondages quotidiens avec une rotation de l’échantillon.

A chaque publication de sondage, des énormités peuvent être relevées. Voyez. Les journalistes ne cessent de mettre en avant Marine Le Pen depuis des mois, à toute occasion. Mais en fait les sondeurs sont incapables de se mettre d’accord quant bien même ils se vantent du sérieux de leurs méthodes. L’IFOP et OpinionWay ont tous les deux publié un sondage le 12 janvier. Pour l’IFOP 21,5% des Français voteraient pour Marine Le Pen tandis qu’OpinionWay annonce un score de 17%. 4,5 points d’écart, cela fait quand même beaucoup pour des méthodes dites sérieuses.

A présent ces différences deviennent amusantes quand on sait que ces deux sondages sont « sponsorisés » par la même entreprise, Fiducial. Pourquoi dis-je « sponsorisé ». C’est la nouveauté. Il s’agit là encore d’un phénomène qui devient de plus en plus courant, mais qui passe inaperçu dans les commentaires. Les instituts de sondage s’associent à des entreprises ! Celles-ci financent les sondages. En échange leur nom est accolé au sondage. Fiducial sponsorise donc deux sondages, publiés le même jour, avec les mêmes techniques. Mais les deux institut voient 4,5 points d’écart sur les intentions de vote en faveur de Marine Le Pen. Tel quel.

Encore une fois, aucune abstention n’est prédite dans les derniers sondages publiés. Tous les électeurs vont voter et savent pour qui dès à présent, c’est bien connu. L’IFOP a tout de même le mérite de poser une question qui nous éclaire sur le sujet. On découvre alors que 45% des personnes interrogées pour le sondage du 12 janvier déclarent pouvoir changer d’avis. Dès lors que la moitié d’un échantillon affirme ne pas être sûr de son intention de vote, on peut sérieusement se demander ce que veut dire le sondage lui-même.

Dans "austéritaire" il n'y a pas qu'austérité. Il y a aussi « autoritaire ». La politique d'agression contre le peuple n'est possible que si le peuple reste amorphe. Voilà pourquoi ceux qui résistent sont pourchassés ou empêchés. On se souvient du cas de Xavier Mathieu, syndicaliste de Conti poursuivi en justice pour avoir refusé un prélèvement ADN.

C'est aussi le cas de plusieurs de nos camarades du Front de Gauche. Dimanche 7 janvier dans le centre de Paris, rue Rambuteau, plusieurs militants communistes ont dû se soumettre à un contrôle d'identité. Le motif invoqué par les policiers est "atteinte à l'ordre public". Diantre ! Que leur reproche-t-on ? D'avoir vendu L'Humanité-Dimanche sur un marché. C’est pourtant ce que font des milliers de communistes partout en France chaque week-end depuis des décennies. Ils ont été repérés par le dispositif de vidéo-surveillance. Un comble. La co-présidente du Parti de Gauche et députée de la circonscription, Martine Billard, a interpellé le commissaire du 3e arrondissement de Paris ainsi que le Préfet de Police sur cette atteinte à la liberté d'expression et à l'action d'un mouvement politique. Surtout que celui-ci compte un groupe dans chacune des deux assemblées. La réponse du préfet de Police, Michel Gaudin, donne raison aux militants. Dans une lettre, il indique qu' « une solution autre que celle mise en œuvre par les policiers intervenants ce jour aurait dû prévaloir ». Il s'est même senti obligé de préciser qu'il a demandé « à l'ensemble des effectifs de police de la capitale la nécessité de faire preuve de souplesse et de discernement lorsqu'ils sont amenés à intervenir sur la voie publique, lors d'un rassemblement de nature politique, notamment dans la perspective des échéances électorales à venir ». Mais dans ce cas, comme souvent, la meilleure protection est encore la solidarité. Un rassemblement a donc été organisé dimanche 14 janvier au même endroit autour du président du groupe Front de Gauche au Conseil de Paris Ian Brossat. Une bonne façon de montrer à ceux qui08 nous trouvent encombrants qu’ils n’en auront jamais fini ! Le 7 janvier, il y avait une poignée de militants. Le dimanche suivant, une centaine. Voilà de quel bois sont fait ceux qui composent le Front de Gauche : des têtes dures qui ne cèdent pas et qui ne se laissent pas intimider.

Je profite de ce moment de ma note pour vous signaler deux décisions municipales inacceptables. Au nom de "l'ordre public", les maires UMP de Valenciennes dans le Nord et de Pélissanne dans les Bouches-du-Rhône ont pris des arrêtés municipaux interdisant la distribution de tracts sur la voie publique. A Valenciennes, l'arrêté prévoit que pour distribuer des « tracts publicitaires, dépliants, programmes et imprimés » sur le marché, il faudra en avoir obtenu l'autorisation du maire au moins deux semaines avant. Le maire, Dominique Riquet met en avant des questions de "propreté" et « la gène occasionnée pour les chalands ». Ce monsieur est aussi député européen UMP. Il siège dans le groupe du Parti Populaire Européen aux côtés des amis de Viktor Orban, le chef du gouvernement hongrois autoritaire. Qui se ressemble s'assemble. Pour être complet, je veux souligner que Valérie Létard, sénatrice UMP et ancienne ministre de Sarkozy est sa première adjointe. Et je ne serais pas complet si je ne vous disais pas que Jean-Louis Borloo est conseiller municipal dans la majorité de Monsieur Riquet. On se demande ce qu'attendent ces "humanistes" pour protester contre la décision de leur chef de file. A Pélissanne, avant Noël, des militants du Front de Gauche ont été interpelés pour « trouble à l'ordre public » pour avoir enfreint l'interdiction de distribuer des tracts sur le marché. Ils distribuaient un tract d'appel à l'inscription sur les listes électorales. Pour contourner l'interdit, nos camarades ont ensuite essayé de distribuer des tracts en dehors du marché avec une petite table. Interdit aussi ! Cette fois, on leur reproche une « utilisation abusive de l'espace public ». Ma camarade du Parti de Gauche Hélène Le Cacheux a dénoncé cette situation sur son blog. Du coup, ne manquant pas d'imagination, nos camarades ont décidé de décorer un arbre avec des paquets estampillés « Front de Gauche ». Apparemment, le maire n'a pas encore pris d'arrêté municipal l'interdisant !

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