Le peuple solidaire ne se laissera pas faire

OLYMPUS DIGITAL CAMERACette semaine aura été celle de l’annonce de l’axe de campagne de l’UMP. Les déclarations de Claude Guéant, l’interview de Nicolas  Sarkozy forment un tout. C’est l’extrême-droitisation de la droite. Anti-immigrés, anti-chômeurs, la division et la haine partout pour tous. Réplique : le peuple solidaire ne se laissera pas faire ! La preuve visible est donnée par l’affluence dans les meetings du Front de Gauche ! Je parle assez de tout cela dans ces meetings !  Et je vais encore en parler autant dans les émissions auxquelles je vais participer ! Je vais donc consacrer cette note à des coups d’œil de campagne.

En illustration de ce billet des images de l'installation technique du meeting de Villeurbanne mardi dernier. Merci à Marilou Mula pour ces photos.

Cette semaine je n’ai guère eu le temps nécessaire pour passer devant ce clavier. Je l’ai payé d’un manque de fluidité dans la partie technique de mes discours à Villeurbanne et à Montpellier. Ne souriez pas ! Car écrire ici me prépare quand je travaille à formuler aussi simplement que je le peux les argumentaires que je vous présente par écrit. Mais il n’y a eu aucune pause. Ni jour, ni soirée. Les temps passés à voyager en train pour rejoindre mes deux rendez-vous étaient consacrés à la préparation des "partitions" pour mes deux discours. Auparavant, j’avais dû relire plusieurs autres entretiens de presse qui devaient paraître ou qui vont le faire bientôt. Le temps médiatique le plus fort, c’était évidemment la rencontre avec le journal « Libération » publiée le mardi dans un ensemble de neuf pages qui m’étaient consacrées. C’était pour nous au Front de Gauche un événement, et je crois que cela le fut aussi pour les lecteurs qui achetèrent largement le journal, si ce qu’on me dit est vrai. Pour moi, c’était un joli moment de voir les lieux et l’équipe d’un journal qui occupe une telle place dans notre imaginaire de gauche. Avant ça Jean-Jacques Bourdin m’avait cuisiné une heure sur RMC et BFM. J’avais donc bien chauffé tous les muscles du cerveau. Par conséquent j’étais à l’aise devant tous ces gens car une interview de cette sorte à Libération se fait devant toute la rédaction, une partie assise, les autres debout. L’art de lire sur les lèvres et sur les visages m’a OLYMPUS DIGITAL CAMERAappris que tous ces gens sont davantage partagés qu’il y paraît de l’extérieur. Il y a ceux qui me détestent et le cachent très mal. Et il y a ceux qui écoutent et partagent tout ou partie de ce que je dis. Ils sont plus nombreux que cela se voit en lisant les pages politiques du journal. Ce n’est pas le seul journal où il en est ainsi.

Parmi tous les moments si forts que j’ai vécus cette semaine, un d’entre eux reste avec une force spéciale. Pourtant, les trois meetings de la semaine, les heures passées en route avec mon équipe, les retrouvailles avec les militants locaux, les milliers de gens vus, ceux à qui j’ai parlé et serré la main, tout cela est comme une grande symphonie de contacts humains qui ont imprimé mille marques sur mon esprit et mes sentiments. N’empêche. Ma tête est restée scotchée sur ce sofa où j’étais assis en compagnie de ces jeunes femmes d’un foyer d’accueil près de la place de la Bastille. Jeunes femmes battues, pourchassées, bref : réfugiées ici pour une escale dans la vie avec le projet de reprendre son existence en main. Il s’agissait d’une rencontre autour du thème des luttes des femmes et de la signature d’un pacte pour l’égalité. C’est une chose de connaître un problème par des discussions et des lectures. C’en est une autre de le lire sur de jeunes, si jeunes visages. Ces femmes en savent bien davantage que moi sur la vie, je crois, quoique je sois leur aîné et de très loin. Quelques-unes d’entre elles ont fait un film qui fonctionne comme un message collectif. Sa force d’expression doit aux registres qu’elles ont de nouveau utilisés devant moi. C’est une parole sans effet de dramatisation ni misérabilisme. Juste un art de dire les choses simplement et clairement de sorte qu’on ne puisse pas refuser de les entendre. Dès que j’ai le lien, soit avec ce film soit avec celui qui aura été fait de mon passage dans ce foyer je le placerai ici et ailleurs dans le blog. Ces instants sont restés gravés en moi. Ces images de la rencontre me rattrapèrent encore au Blanc-Mesnil tandis que je parlais à la tribune. Elles me suggérèrent toute une phase imprévue du discours. Je me mis à donner alors la déclinaison pour les femmes de tout ce que j’évoquais dans le programme « L’Humain d’abord ». EtOLYMPUS DIGITAL CAMERA j’expliquai alors pourquoi la révolution citoyenne serait d’abord le fait des femmes. Ce ne sera pas la dernière fois. Vous savez, le lendemain de cette soirée dans ce foyer, on m’apprit que la jeune femme enceinte qui était là avait perdu les eaux le soir même après la fin de cette petite assemblée. Je souhaite bienvenue à la nouvelle petite personne. Préparons-lui un monde meilleur. 

Mardi, avant le meeting du soir à Villeurbanne, je me suis rendu à l’usine Arkema de Saint-Fons dans le Rhône. Je n’ai malheureusement pas pu visiter directement les ateliers. En effet Thierry le Hénaff, le PDG d’Arkema, a refusé que je sois accompagné par les délégués du personnel ! Mais j’ai pu rencontrer les salariés et discuter avec eux avant de m’exprimer devant leur assemblée. Leur situation est tellement caricaturale qu’on la croirait tout droit sortie d’un manuel anticapitaliste. Arkema est le premier groupe français chimique. Organisé en trois branches, Arkema cherche à se débarrasser de ses activités vinyliques. C’est-à-dire de la production du PVC. Tout le monde connaît ça. Le PVC est un matériau indispensable pour tout le secteur de la construction. On en fait aussi bien des fenêtres que des tuyaux et bien d’autres choses. De l’emballage aussi c’est-à-dire des bouteilles, des films plastiques, et ainsi de suite. Cette branche vinylique produit l’essentiel du PVC français et du chlorure de vinyle, le principal composant du PVC.  Tout est menacé d’être rayé de la carte.

Aujourd’hui, les salariés d’Arkema se battent contre un projet de vente. Une vente au tarif incroyable. A lui seul ce prix est une offense. On devine en l’entendant la combine. Car il s’agit d’un euro « symbolique » ! Oui, un euro ! Voilà le prix demandé pour acquérir six sites industriels, leurs 1 800 salariés et leur immense savoir-faire. Et l’entreprise vendeuse ajoute cent millions de prime au repreneur. On devine la manœuvre. Car le repreneur est un vautour de belle espèce, un financier américain basé en Suisse. Le monsieur s’appelle Garry Klesch. En 1997, cet homme a racheté Myrys, un OLYMPUS DIGITAL CAMERAfabricant de chaussures. En 2000, il a fermé l’ensemble des usines et revendu tous les magasins. En 2007, Garry Klesch s’attaque à la fonderie d’aluminium de Vlissingen aux Pays-Bas. 14 mois plus tard, 140 salariés étaient licenciés. Même scénario en 2008, avec la fonderie de Delfzijl aux Pays-Bas. Cette fois-ci ce sont 185 licenciements après le rachat par ce même Klesch. En 2010, c’est une raffinerie de Heide en Allemagne qui fera les frais de la méthode : 80 licenciements un an après le rachat. En fait, Garry Klesch n’est pas un investisseur mais un « dépeceur ». Il achète des entreprises pour les liquider et faire sa marge sur l’immobilier. Les salariés d’Arkema ont donc de bonnes raisons d’être inquiets. La situation d’Arkema me rappelle tout à fait le scénario que décrit dans son livre Jean-Louis Beffa, l’ancien PDG de Saint-Gobain avec qui j’ai débattu dans l’émission Des paroles et des actes. Jean-Louis Beffa explique comment les grands groupes déclarent aujourd’hui vouloir se recentrer sur leur « cœur de métier », comme ils disent, et se débarrasser des branches les moins « profitables ». C’est exactement ce qui se passe ici. Arkema a tout d’abord été sortie du groupe Total. Puis aujourd’hui, c’est l’activité vinylique qu’on cherche à sortir du groupe Arkema. La concentration sur le « cœur de métier » est le joli mot qui permet qu'une méthode de management et de spécialisation des activités entraîne ou bien le contrôle le plus étroit par « le  marché »  ou bien le dépeçage le plus efficace pour maintenir le niveau de profit d’un investissement. Vu ?

En fait, les grands groupes sont prêts à tout pour augmenter leur « profitabilité ». Alors qu’une rentabilité de 5% était jugée tout à fait correcte il y a encore quelques années, les financiers qui dirigent aujourd’hui l’industrie revendiquent une « profitabilité » à deux chiffres. Ils sont prêt à licencier des centaines de personnes, à exercer une énorme pression sur les salariés restants, pour atteindre une rentabilité de 15% voire de plus de 20%. Pourquoi ? Qui exerce cette pression ? Les fonds de pensions et d’investissement qui placent leur argent dans les entreprises. On voit ce que vaut le mythe de la « main invisible » qui saurait correctement « allouer la ressource ». L’ère des fonds de pension est celui de la prédation pure. Leur présence est un signe avant-coureur de mort et de souffrances. Evidemment, le premier actionnaire du groupe Arkema, est le fonds spéculatif Greenlight Capital. Il exige une rentabilité moyenne de 22 % pour ses placements. Mais à Arkema, les salariés résistent. L’ensemble des organisations syndicales ont refusé le projet de reprise du dépeceur. Point positif dans cette lutte : Garry Klesch a une phobie absolue de la grève. Il a ainsi refusé de racheter une raffinerie suisse car celle-ci était alimentée par un pipeline en provenance de Marseille et « peut donc éventuellement être affectée par une grève » comme l’a déclaré Garry Klesch dans une interview duOLYMPUS DIGITAL CAMERA "Bulletin de l’Industrie Pétrolière". Il va être servi le monsieur ! Les gars étaient tous sur la scène de notre meeting le soir ! Et en tenue de travail par-dessus le marché !

Le soir à Villeurbanne, j’ai consacré la partie centrale de mon discours à expliquer ce que serait la nouvelle hiérarchie des normes sociales dans notre pays dès que passerait la loi Sarkozy sur « les contrats compétitivité-emploi ». C’était assez long comme ça déjà ! J’ai donc passé du temps sur la question de la modification du contrat de travail décidée par l’assemblée l’autre nuit et qui est directement liée à cette question !  Car l'offensive générale de l'UMP contre la durée légale du travail s’est durcie. Le programme de l'UMP pour 2012 prévoit de renvoyer la discussion sur la durée du travail à des accords de branche ou par entreprise, là où le rapport de force est le plus favorable au patronat. Dimanche 29 janvier, Nicolas Sarkozy a annoncé la généralisation et l'institutionnalisation de ce qu'il appelle les « contrats compétitivité-emploi ». J'en ai déjà parlé sur ce blog et j’y ai consacré un long moment de mon discours à Villeurbanne. Pour que le contrat de Nicolas Sarkozy fonctionne, il fallait d’abord lever un verrou. C’est ce qui a été fait. Si je vous en parle de nouveau, c'est parce que l'UMP l’a fait voter à l'Assemblée dans la nuit de mardi 31 janvier à jeudi 1er février. C'était au détour d'une proposition de loi apparemment anodine sur la « simplification du droit » déposée par le député UMP Jean-Luc Warsmann. Il s'agit de légaliser l’obligation pour les salariés d'une entreprise de renoncer à une partie de leurs droits au nom du chantage à l'emploi. Avec les salaires, le temps de travail sera en première ligne de ce nouveau dispositif.

De quoi s'agit-il ? L'article 40 de cette proposition de loi indique que  « la mise en place d’une répartition des horaires sur une période supérieure à la semaine et au plus égale à l’année prévue par un accord collectif, ne constitue pas une modification du contrat de travail ». Il s'agit donc de sortir la modification des horaires de travail, du contrat de travail. C'est technique mais cela a une conséquence directe. Ce qui ne relève pas du contrat de travail peut être modifié sans l'accord du salarié. Alors que pour modifier un contrat de travail, il faut « l'accord exprès » du salarié comme l'a encore réaffirmé la Cour de Cassation le 28 septembre 2011. La proposition Warsmann vise à annuler cette jurisprudence protectrice pour les salariés. Car la Cour de Cassation avait jugé que « l’instauration d’une modulation du temps de travail constitue une modification du contrat de travail qui requiert l’accord exprès du salarié ». Or, pour que la logique OLYMPUS DIGITAL CAMERAdes « accords compétitivité-emploi » s'applique totalement, il faut qu'un accord d'entreprise défavorable puisse s'imposer à tout salarié, même sans son accord, et avec toute la sécurité juridique pour l'entreprise.

Un changement d'horaires de travail peut avoir des conséquences très importantes pour la vie des salariés. C'est ce qui justifie que cela fasse jusqu'à présent partie intégrante du contrat de travail. Par exemple, c'est en fonction des horaires de travail que s'organise toute la vie de famille, notamment pour les femmes. Mais des horaires de travail dépend aussi la possibilité pour un salarié d'aller travailler, surtout s'il emprunte les transports collectifs. On voit donc bien qu'obtenir l'accord du salarié avant tout changement n'est pas seulement une question de politesse. Aujourd'hui, il peut refuser de changer son contrat de travail. Bien sûr, ses relations avec son employeur seront plus difficiles mais il ne peut juridiquement pas être licencié pour ce seul motif. Dorénavant, ce sera tout autrement. Si les nouveaux horaires ne lui conviennent pas, il aura deux possibilités. Soit le salarié refuse l'accord collectif et il se retrouvera sans emploi, sans indemnité, et sans allocation chômage car cela équivaut à une démission. Soit il accepte l'accord collectif mais ne l'applique pas et il pourra être licencié pour faute, c'est-à-dire sans indemnités mais avec allocation chômage. Voilà le monde que prépare la nouvelle offensive de l'UMP !

Vous avez été nombreux à réagir sur le titre de la une du journal « Le Monde » qui reprend la vieille assimilation dans le « populisme » de ma candidature et de celle de Marine Le Pen. Ce n’est pas un cas isolé.  Ainsi sur RTL, jeudi 2 février. Jean-Michel Apathie recevait Marine Le Pen. Après plusieurs questions sur la retraite, Jean-Michel Apathie lui dit : « Mélenchon dit : "Du coup, elle me pique toutes mes idées. Marine Le Pen me copie tout le temps." ». Bien sûr nous n’avons jamais dit cela. Nous avons ironisé sur le fait qu’elle empruntait nos expressions telles que les « invisibles », le « pistolet à bouchons » et ainsi de suite. Mais l’interjection de Jean Michel Apathie laisse penser qu’il y aurait en quelque sorte certaine communauté de vue, donc des idées OLYMPUS DIGITAL CAMERAinterchangeables. Selon moi, ce sont les derniers remugles de la « ligne Plantu ». Vous vous souvenez du dessin infâme de l’homme qui me montrait en uniforme nazi braillant le même discours que Marine Le Pen tandis qu’en arrière-plan Jean-Marie Le Pen jetait une larme d’émotion ? Plantu est un faux naïf. Avide d’argent il a accepté et reçu un prix de la liberté de la presse de 10 000 euros payés des mains du sultan du Qatar ! Le Qatar est un des pays qui a envoyé des troupes et du matériel pour réprimer la révolution au Bahreïn. Bref, c’est ce Plantu qui créa une mode qui dura plusieurs semaines, et jouissait de m’insulter après avoir appris que cela m’affectait. Je fus d’abord désemparé. Mollement défendu par ceux qui dans la presse savaient l’infamie du procédé, je repris pied en menant la charge avec mes amis. Dans le même registre, cette semaine, il y a eu aussi Alain Duhamel. Il est monté en ligne contre moi, avec la violence boursouflée qui est la sienne quand il s’agit de moi. Les chroniqueurs de RTL ont sans doute des consignes. Ce gars n’est vraiment pas un aigle. Juste un bouddha content de lui-même qui radote depuis le règne de Léonid Brejnev les mêmes refrains auto-satisfaits. A la veille de la précédente présidentielle il s’était fait remarquer par un ouvrage pédant sur les présidentiables avec une liste de candidat sur lesquels il faisait des arpèges rococos. Avec son flair imparable et sa grande capacité de connaissance des vraies vérités, il avait juste oublié Ségolène Royal. On voit le genre. Le machisme parfumé. N’empêche qu’il n’y a plus grand monde pour croire que cette sorte de manœuvre ait une chance de fonctionner. D’ailleurs, si l’on met de côté le titre du journal « Le Monde » qui assimile Le Pen et le Front de Gauche au sein du même terme improbable de « populisme », on constate que l’article dit et décrit tout autre chose. C’est-à-dire qu’il explique les différences fondamentales entre les deux programmes. La seule cotisation rédactionnelle à l’air du temps chez les belles personnes qu’on y trouve, est cette mention vague que les programmes se rejoindraient sur la méfiance à l’égard de la finance et le SMIC notamment. Deux erreurs. Nous ne nous « méfions » pas de la finance. Nous voulons lui briser les reins. Pas elle. Quant au SMIC, il est faux de dire que Marine Le Pen soit sur notre position à 1700 euros ! C’est tout le contraire. Elle dit ne pas croire à l’augmentation du SMIC et dit même que c’est à l’Etat d’augmenter les salaires!  Impossible de comprendre comment deux journalistes informés ont pu se tromper à ce point. Ni pourquoi ils ne mentionnent pas une divergence aussi terrible que celle qui nous sépare sur le remboursement de l’IVG ! Passons. Je ne leur en veux pas. Pour l’essentiel, le papier vise à montrer les différences et c’est déjà bien mieux que le titre. Ce n’est pas le seul journal où je note une différence croissante d’approche entre la base qui écrit et enquête et le sommet qui vit entre soi, va sur les plateaux de télé et dicte les titres. Dans la presse, c’est-à-dire dans les professions intellectuelles, il y a aussi un bouillonnement, des questions, des angoisses sociales, qui ne trouvent pas leur compte OLYMPUS DIGITAL CAMERAdans l’auto-satisfaction permanente et moralisante des nomenclatures rentières de la crème médiatique. Voir la chronique de Pierre Marcelle dans « Libération » ce vendredi. Il y a des failles dans la muraille du système. Je m’attends à ce que cela se voit un jour ou l’autre bien davantage qu’aujourd’hui.

Comme le tableau qui se met en place est celui de 2005, et comme la répétition n’existe pas en politique, c’est une étape qui va être franchie au moment où les mêmes mécanismes de verrouillage se mettent en place. Déjà il est clair qu’un vaste réseau de contournements de la sphère médiatique officielle s’opère par internet. Emerge alors un véritable contre-circuit qui a sa propre puissance et qui rayonne d’après d’autres normes, charriant ses effets en grappe et par rebonds d’un réseau social à l’autre. Certes il n’est pas encore en état de lutter face à la télévision. Quoique la technique du streaming ne tardera pas à faire bientôt ses preuves. Non pas tant seulement en audience. La marche est haute en effet. Mais en capacité de prise à revers des mensonges et petits arrangements qui sont le ciment du corporatisme audiovisuel. J’ai bien repéré l’impact des meetings diffusés en streaming. J’ai encore mieux noté la reprise de volée que la campagne du « Petit Journal » contre mes amis et moi vaut à l’émission de divertissement sur les réseaux où circulent vidéo-décryptages et humour décapant.  Mais face à la presse papier, la messe est dite. Les blogs et les OLYMPUS DIGITAL CAMERAsites pèsent aussi lourd en influence que les catéchismes permanents de la presse quotidienne. Surtout face aux monopoles gris, monocolore et souvent sectaire de la presse régionale.

Reste que la plus grande puissance de feu adverse se concentre dans l’audiovisuel. L’incroyable abus de pouvoir qui donne tout aux mêmes dans la presse papier y est tout aussi violent. Mais il est mis à nu par le travail du CSA. Comme il y a des règles il est possible d’y faire appel et d’interpeller quand elles ne sont pas respectées. C’est ce qui se passe en ce moment. Sur la base des pointages que publie le CSA, nous l’avons saisi pour savoir quelle suite serait donnée aux incroyables écarts constatés. 75% du temps radio et 70 % du temps télé est attribué au deux mêmes : l’UMP et le PS. Nous, le Front de Gauche sommes réduits à l’état de traces, en dépit de l’impression que font mes passages télé. La technique pour nous réduire est simple. Elle vient de se durcir. La quasi-totalité des chaînes semblent n’accepter que moi. Comme cela est tout bonnement physiquement impossible d’être à deux endroits en même temps chaque matin, chaque soir et chaque samedi dimanche, des choix sont faits par l’équipe de campagne. Ces choix éliminent évidemment les traquenards organisés du PAF dont le but exclusif est l’humiliation des invités et la glorification des animateurs militants médiacratiques.  Mais le reste du temps les refus sont seulement le résultat d’un exercice d’ajustement du calendrier. Car je dois aussi pouvoir faire des meetings, des réunions de travail et même des pauses. Puis, lorsque mon emploi du temps a été rempli, mon bureau de presse a dû refuser les invitations. Mais nous proposons toujours d’autres noms pour répondre à l’invitation. Car le Front de Gauche ce n’est pas une seule personne. Nous sommes riches de diversité et de talents. Commence alors un petit jeu très spécial. Les invitants hélas non satisfaits, nous demande de signer des feuilles où nous déclarerions refuser de venir. Ces déclarations sont OLYMPUS DIGITAL CAMERAdestinées au CSA pour prouver que la disproportion de temps d’antenne est de notre fait. Vous suivez ? Sachez donc que nous adjoignons une liste de propositions de noms de camarades après chaque refus concernant ma participation. Tous les autres ont droit de faire défiler leurs porte-paroles. Apparemment pas nous. Ça changera j’en suis certain.

En tous cas on ne lâche rien. Ainsi quand j’ai été accroché par « Le Point » qui m’accusait de « mentir » à propos de la couverture médiatique du meeting de Besançon. Aussitôt la caste corporative s’est jetée sur cette importante affaire. D’une façon curieuse puisque nul ne releva que le papier du « Point » accusait aussi les stations de France 3 d’être des « bastions de la CGT ». Les mêmes que le déséquilibre de notre temps d’antenne et de parole n’émeut d’aucune façon ont aussitôt sauté sur l’occasion de se donner des airs de victime. Le papier de la rubrique « désintox de Libération » a été spécialement odieux. Il fut publié comme une provocation le jour même où le journal me recevait pour faire ce numéro spécial paru mardi dernier. Une semaine où la rubrique me tomba dessus avec une égale mauvaise foi à deux reprises, signe de l’agacement de la droite social-libérale du journal à propos de mon passage. Le papier avait en fait une fonction corporatiste claire : nier le bien fondé de nos protestations contre le sort qui nous est réservé en régions selon l’humeur des rédactions locales de France 3 et selon le degré de sectarisme des journaux locaux. La preuve en a été rappelée à l’occasion de mon passage à Montpelier. J’y ai été invité pour une interview dans « le Midi libre ». Et j’ai été accueilli dans le 19/20 de France 3  Languedoc-Roussillon puis, nous avons enregistré l'émission « La voix est libre » diffusée ce samedi. J’en déduis que pour ces médias la campagne électorale mérite du soin et une information diversifiée. A Lyon la caste ne m’aime pas et n’est pas gênée de le montrer. Pas d’invitation à France 3, ni au « Progrès » ni au « Dauphiné ». Aussitôt « Libération.fr » glapit : « Mélenchon se plaint encore… gna gna gna ». C’était tout le sens de la manœuvre : « Quoi ? Vous vous plaignez encore, alors que nous savons bien que vous mentez ! » Vous voilà fixés. « Le Progrès » lui n’a pas besoin du masque que s'offre avec telle rubrique parisienne « ma corpo est sacrée ». Il assume. Quand on demande pourquoi il ne propose pas un entretien comme souvent ailleurs en région, la réponse est OLYMPUS DIGITAL CAMERAclaire : « C'est notre choix éditorial et nous n’avons pas de compte à vous rendre ». C’est un journal sans complexe. Il m’avait accusé d’un « lourd passif germanophobe », je ne sais pas pourquoi. Mais il ne passa jamais mon droit de réponse après avoir pourtant accepté de le recevoir.

Pour défendre ses confrères, le journaliste de « Libération » explique que ceux-ci bouclent à 22 heures. Et à cette heure, j'étais encore en train de parler. C'est vrai. Mais les 4 500 personnes étaient présentes depuis 20 heures et ce nombre constituait à lui seul un événement politique de grande ampleur pour la région. Ensuite, « Libération » explique que « L'Est républicain » a rendu compte de ma visite à Peugeot scooter de Mandeure avec une photo en une et un article en page deux. C'est vrai. Pour autant le journal ne dit pas une ligne du meeting. C'est « Libération » qui le dit : « Certes, le journal n'a pas fait de compte-rendu strict du meeting ». C'est un doux euphémisme puisqu'il n'a pas fait de compte-rendu du tout, ni strict, ni léger. « L'Est républicain » s'est donc bien livré à un acte de "négationnisme médiatique" contre le plus grand rassemblement politique de gauche organisé à Besançon depuis au moins 40 ans. Une paille ! Mes amis su place s’en sont bien expliqués. J’en ai retrouvé la trace sur un blog au nom exotique. Preuve de la diffusion dont est capable le net !

Enfin, pour bien montrer que ce black-out n'est pas seulement une question d'horaires mais bien une décision éditoriale, je vous livre la brève qui figurait sous l'article de « L'Est républicain » au sujet de mon passage à Mandeure. Voici ce qu'écrit « L'Est républicain » : « Que ses aficionados se rassurent, Mélenchon s’en est aussi pris à la presse. Sans raison, il s’est au beau milieu de son discours déchaîné contre ces journalistes qui disent de lui « qu’il tonne, qu’il éructe, ce qui veut dire cracher ». Il gerbe ces déclarations à chacune de ses sorties. Mais pour le coup, on le trouve sacrément hypocrite le camarade Mélenchon. Car hier, il éructait, et le mot n’est pas faible, sur tous les grattes-papiers dont son équipe de campagne a elle-même organisé le déplacement en terre comtoise. » Vous avez bien lu du « L'Est républicain » qui n'a ni le temps ni la place de parler d'un meeting de 4 500 personnes ! Mais il trouve le temps et la place de se livrer à une bordée d'injures contre moi. Il ne se le permettrait avec aucun autre candidat. « L'Est républicain » trouve normal de m'appeler "Mélenchon" alors qu'il ne se permettrait pas, par exemple, d'appeler le candidat socialiste autrement que "François Hollande" OLYMPUS DIGITAL CAMERAou "Monsieur Hollande". « L'Est républicain » trouve normal de dire du candidat du Front de Gauche, d'un parlementaire, qu'il « gerbe ces déclarations », c’est-à-dire qu’il vomit, sans que la rubrique « désintox de  Libération » n'y trouve rien à redire ! Même promo ? Même école ? Même club de golf ? Va savoir !

Le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) a publié ses premiers résultats sur la répartition du temps d’antenne pour la période dite de « l’équité ». Depuis le premier janvier, les chaînes de télévision et de radio doivent en effet veiller à garantir « une présentation et un accès équitables à l’antenne » aux différents candidats présumés ou déclarés à l’élection présidentielle. Cette année, le CSA a choisi de publier quatre rapports d’étape pendant cette période de « l’équité ». Nous avons donc étudié en détail le premier relevé des temps d’antenne qui concerne la période du 1er au 27 janvier. Déjà durant toute l’année de 2011, de graves dysfonctionnements avaient été constatés par le CSA. La commission a même dû effectuer des rappels à l’ordre publics, les chaînes de télévision et de radio ne semblant toujours pas prêtes à garantir le pluralisme d’opinion. OLYMPUS DIGITAL CAMERAAu mois de janvier, Nicolas Sarkozy et François Hollande se sont partagés à eux deux plus de 70% du temps d’antenne sur les chaînes de télévision et plus de 75% du temps à la radio. Au lieu de garantir le pluralisme indispensable dans tout régime démocratique, les télévisions et radios nous imposent le paysage du bipartisme.

Ainsi, le Front de Gauche n’a eu que 6% du temps d’antenne à la télévision. A la radio, la situation est encore plus dégradée pour le Front de Gauche. Nous n’avons eu que 4% du temps d’antenne. C’est à dire moins encore qu’Europe-Ecologie-Les-Verts. Sur certaines chaînes, le Front de Gauche a été complètement marginalisé : 3,7% du temps d’antenne sur TF1, 2,7% sur France Inter ou encore 1,8% sur Europe 1. La pire chaîne étant M6 qui n’a accordé que 1% de son temps au Front de Gauche tandis que le Front National a pu bénéficier de 60% du temps politique de la chaîne ! Ce traitement médiatique réservé au Front de Gauche n’est pas admissible. Surtout si l’on se souvient que le temps d’antenne est une entité qui désigne n’importe quel moment où il est question de nous. Ainsi les montages du « Petit Journal » contre nous sont du temps d’antenne mis à notre crédit. C’est dire où nous en sommes.

Le CSA dit tenir compte de plusieurs critères pour  apprécier « l’équité ». Il s’appuie notamment sur les réunions publiques organisées, les résultats aux dernières élections ou encore les enquêtes d’opinions. Chacun de ses trois critères montre une réelle progression du Front de Gauche : nous organisons des meetings de plusieurs milliers de personnes OLYMPUS DIGITAL CAMERAdepuis le mois de juin ! Aux dernières élections, nous sommes devenus la deuxième force de gauche du pays ! Le Front de Gauche progresse régulièrement dans les sondages depuis plus de 6 mois ! Le traitement médiatique qui nous est réservé est donc profondément injuste. Tout au long de l’année 2011, nous avions déjà subi un véritable “ ostracisme audiovisuel ”. Je vous renvoie à ce que j’en ai écrit.

Le mois de janvier confirme cette tendance. Il est urgent que le CSA rappelle fermement à l’ordre les chaînes de télévision et de radio. Je lui ai écrit pour le saisir. On va donc pouvoir observer le résultat. Car la tendance qui semble s’annoncer n’est guère favorable. En effet, loin de vouloir s’amender et de faire preuve d’imagination ou d’inventivité, c’est à dire de professionnalisme, certains médias et non des moindres ont eux aussi saisi le CSA. Mais c’est pour lui demander de changer la règle qu’ils ne respectent pas. Et même pire. Ils lui demandent de renoncer à la règle de l’égalité qui devrait prévaloir à partir du 22 mars. Mauvaise ambiance. Pour l’instant, ce qui est aussi en cause au fond c’est l’utilité des « commissions » et d’une certaine façon, des autres « hautes autorités ». Je n’en ai jamais été très partisan. Mais puisqu’elles sont en place, alors qu’elles fassent appliquer la loi comme c’est leur mission et comme la loi elle-même le prévoit. Sinon la loi a-t-elle un sens ou bien en sommes nous déjà au règne de l’arrangement de gré à gré ?

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