Dans cette note il est question de ma circonscription dans le Pas-de-Calais sur un mode impressionniste. Puis je viens sur la réunion de l’OTAN à Washington où le nouveau président français a signé un document atlantiste que je désapprouve formellement. Il dit que ses réserves ont été levées par les conclusions du sommet de l’organisation. Je montre qu’il n’en est rien. Enfin, je reviens sur ce que j’ai noté de ma lecture de ces médias devenus si curieusement favorables à la dédiabolisation de madame Le Pen.
Dimanche 3 juin c’est la Fête des mères. Une invention du régime de Pétain, prolongée dans l’objectif commercial que l’on devine. Emilienne Mopty aussi était mère. Les nazis l’ont torturée et décapitée pour avoir organisé une marche de solidarité avec les mineurs en 1941, grève contre l’occupant, pour les rations et la paie. Sa fille vit toujours. Mercredi j’étais à Dourges dans la cité minière Bruno. Une jeune femme que j’invitais à participer à la marche que nous organisons le 3 juin prochain m’a dit toute émue : « Mon grand-père était dans cette grève ! Il vient de me le dire. Il ne l’avait jamais dit avant. Il y était. Moi je viendrai avec vous. Je viendrai. » Le 3 juin on marche ! Et vous ? Nous partirons de la commune de Montigny-en-Gohelle dans la 11ème circonscription du Pas-de-Calais. On démarre à 15h30 du Puits Dahomey, rue de la Libération. En chemin, il y a deux haltes. Puis on arrive aux Grands bureaux des mines sur la commune de Billy-Montigny. C’est le trajet qu’ont fait les femmes avec Emilienne Mopty. Nous ce sera la marche « l’Humain d’abord ».
Pour illustrer ce billet des images de maisons prises à Rouvroy, une ancienne cité minière dans le Pas-de-Calais. Photos : S. Burlot.
Comment ont-ils pu supporter tant de malheurs ? Les guerres, les deux, sur place ! Avec la ligne de front à domicile pour la première, ses villes rasées et ses ossuaires monstrueux que gardent encore aujourd’hui les associations de vigilants. La seconde aussi ne fut guère moins terrible. L’occupant nazi créa une zone spéciale et fusillait à tour de bras. Une génération a eu la mine et la silicose qui tuait les hommes comme des mouches parfois avant même la quarantaine. Puis ce fut l’amiante. Et aussi les effluves liquides et gazeuses de l'usine Metaleurop qui ont pourri l’eau, la terre et l’air. Et toute l’activité sinistrée à tour de rôle : l’agriculture, le textile, la mécanique. Tout, absolument tout. Et ça continue. A partir du quinze du mois les commerçants survivent presque aussi chichement que leurs clients.
Ici la légende de la mine est omniprésente. On en parle sans cesse, à tout propos. Pourtant, personne n’aurait envie d’y retourner. Mais la mine vit encore de toutes les façons possibles. Souvenirs de famille, centre de soins, présence des morts, « partis » si jeunes souvent. « Mon mari est parti à trente-cinq ans monsieur Mélenchon. La silicose. C’était un très bel homme ». Les hommes vivaient dans la poussière de charbon au fond avant qu’on commence à injecter de l’eau sur le front de taille et qu’on ait des protections. De toute façon en surface, la poussière y était aussi. Partout. On m’a raconté que les hommes étaient payés à la tâche. Ils s’exténuaient donc. En mairie de Dourges, après l’accueil officiel, le maire Patrick Defrancq m’a montré dans son bureau une gayette, petit morceau du charbon arraché de cette façon. Curieuse boucle de l’histoire : le premier puits ouvert a été le dernier à fermer. Ça se passait à Oignies. Le maire socialiste Jean-Pierre Corbiset m’a raconté ça comme si j’y étais. La mine. La mine. C’est d’elle que sont venues toutes les conquêtes ouvrières qui ont ensuite construit ce que les pédants nomment notre « modèle social ». La première reconnaissance du syndicat, le premier délégué syndical, la première convention collective, la première obligation de pause hebdomadaire, la première limite au travail des enfants. Tout est parti de là, de ce périmètre dont les hauts lieux sont dans cette partie du bassin minier où je suis candidat. Tout. Même Robespierre. Sa mère est née à Carvin. Ici.
La mine partout. Les ayant-droit, les survivants en quelque sorte, ont le logement. Ce sont les anciens de la mine ou leurs épouses veuves. Les plus jeunes y vivent donc souvent avec les plus anciens. Les toutes petites retraites prennent le relai des indemnités en fin de droit. Le potager est redevenu vital. On le trouve collé à la maison, là où le logement mineur le prévoyait. Quand on revient dans le monde du salariat, qui paraît parfois si loin, on revient encore souvent à la mine. Ainsi quand il s’agit des aides à domicile. Qui en a besoin de façon si pressante sinon les veuves et les derniers mineurs les plus âgés ? Mais celles qui font le métier, car ce sont des femmes, courent après les heures pour tâcher de boucler des temps et des payes complets. Le précariat à l’état pur. Cadences inhumaine pour l’employé comme pour le bénéficiaire, temps de transport toujours moins pris en compte, et ainsi de suite.
Le plus curieux de ma campagne ici c’est la quantité de tracts anonymes que je dois subir. Certains sont de très petite taille. Des huitième de feuille, recto verso. Le dernier dénonçait mes revenus. Une obsession du Front national depuis un an. D’après moi c’est du traitement préventif. On m’attribue des revenus immenses pour contrecarrer le moment où il pourrait être question de la situation de la châtelaine de Montretout. Ou de son papa, dont un journal suisse prétend qu’il a des comptes en banques dans ce paradis de l’argent sale. A côté de ce type de tract j’ai droit aussi au demi-format. Un A5 comme on dit. Celui-ci est imprimé en vert et blanc et signé en arabe. Il enjoint « votons Mélenchon ». On peut y lire une phrase tirée de mon discours de Marseille « il n’y a pas d’avenir pour la France sans les arabes et les berbères du Maghreb ». On comprend l’intention. Cela doit révulser quelques abrutis. Mais fort heureusement ils ne votent pas. Soit parce qu’ils ne sont pas en état de le faire ou parce que pour eux, c’est bien connu, « tous pourris sauf maman ». Mais peut-être que ça fait plaisir aux enfants de la deuxième et troisième génération de l’immigration : ce sont de bons français, qui ne boivent pas, mais qui votent contre les racistes. Ceux que ma phrase dénonce et ceux qui ont fabriqué et distribué ce tract anonyme.
Une « nécessité pragmatique ». Tel est le terme sophistiqué choisi lors du sommet de l'OTAN de Chicago des 20 et 21 mai par François Hollande pour justifier une reculade dont on n’a pas fini de mesurer l’impact. Il a donné son accord pour le lancement de la première phase d'un « bouclier anti-missile ». Ce projet consiste pour les USA et leurs alliés de se doter d'un système de surveillance et d'interception de missiles qui seraient tirés contre des intérêts ou des territoires de ces pays. En fait, ce bouclier est un vieux projet national des Etats-Unis. Ils se sont évertués depuis des années à le greffer sur l'OTAN. Dans sa partie européenne, ce projet vise théoriquement à protéger l'Europe de tirs de missiles depuis le Moyen-Orient et en particulier l'Iran. En fait l’intention vise large. C’est bien pourquoi la Russie y voit une étape supplémentaire de la surenchère militaire des Etats-Unis à ses frontières. L'installation en Pologne et en Roumanie de missiles du fameux bouclier n’est pas vraiment un gage de paix donné à la Russie. Et de même à propos de leur prédisposition sur des navires nord-américains en Méditerranée et surtout en Mer Noire. Des lieux qui peuvent aussi bien servir à parer une attaque hypothétique de l'Iran qu'à menacer très concrètement la Russie et ses alliés.
François Hollande avait exprimé il y a à peine un mois, le 10 avril 2012, sur I>télé, son opposition au lancement d'un tel projet par l'OTAN : « Je suis réticent à l'égard de cette évolution. La première raison, c'est que nous n'avons aucune possibilité de participer industriellement à cette affaire et deuxièmement ça met en cause l'idée même de la dissuasion. » Deux bonnes raisons que je partage. Depuis, il justifie son revirement par le fait que ses réserves ont été levées par la déclaration finale du sommet de Chicago. Or cette déclaration n'a strictement rien changé au projet en question. Et cela tout simplement parce qu'il existait déjà avant ! Les principes ont été fixés en 2010 lors du sommet de Lisbonne de l'OTAN. A l'époque, Nicolas Sarkozy avait accepté que soit inscrit dans le concept stratégique de l'OTAN, un document de référence, la création d'une « capacité de défense anti-missile ». Le sommet de Chicago auquel vient de participer François Hollande a donc seulement lancé la première phase opérationnelle. En réalité, il s’agit de faire entrer en phase opérationnelle la prise en charge par tous les alliés d'un programme américain de défense anti-missile qui existe déjà lui aussi. Celui-ci a été décidé au Congrès américain par le vote de la loi sur le National Missile Defense Act de 1999. Il est d’ores et déjà géré par une énorme agence états-unienne, la « Missile Defence Agency ». Cette défense anti-missile repose sur plusieurs boucliers qui, en se recoupant, sont censés défendre le territoire des Etats-Unis et celui de leurs alliés. Avant même la décision du sommet de l'OTAN, les Etats-Unis avaient déjà commencé à déployer la partie européenne de ce bouclier, notamment en envoyant en méditerranée des croiseurs spécialement équipés de missiles d'interception.
La greffe de l'OTAN sur ce dispositif répond à deux objectifs des Etats-Unis. Le premier est politique. Il conforte la légitimité internationale d'un projet vivement contesté par la Chine et la Russie et potentiellement contradictoire avec les traités internationaux de désarmement. Le second est financier et industriel, car avec l’accord de la réunion de Washington les européens vont devoir contribuer à un projet dont le coût faramineux ne peut plus être supporté par les seuls Etats-Unis. C’est une sorte de relance de l’industrie américaine comme l’est tout grand projet d’armement dans ce pays !
Loin des objectifs qui sont affichés face à la menace théorique de l'Iran, ce projet est donc avant tout une démonstration politique et industrielle des Etats-Unis. C'est d'ailleurs exactement ce qu'en disait le rapport parlementaire de 2001 de Paul Quilés, adopté à l'époque par la commission de la défense. Humour de situation : François Hollande faisait partie à cette époque de ladite commission ! Ce rapport affirmait ainsi : « La défense antimissile est, avant toute chose, un projet idéologique, largement déterminé par des considérations politiques, technologiques et industrielles. Il répond au souci des Etats-Unis, non de rompre avec la logique de la guerre froide, mais d'en préserver un apport qu'ils considèrent comme fondamental : le maintien de leur supériorité technologique et de leur prééminence stratégique. » J’approuve absolument cette façon d’analyser le projet. Le rapport évoquait ensuite « les conséquences industrielles de premier plan qui découlent de ce rôle majeur de la défense antimissile dans la préservation de la supériorité technologique américaine. Quatre entreprises de première importance sont en l'occurrence concernées : Lockheed Martin, Boeing, Raytheon et TRW. Elles bénéficient de 60 % des crédits alloués par le Pentagone pour ce programme. […] les industriels n'ont pas ménagé leurs efforts pour favoriser la défense anti-missile et un système d'influence impliquant les congressistes, les industriels et les militaires existe sur ce programme dont le coût a été évalué entre 50 et 60 milliards de dollars. » Autrement dit, sous l’appellation euphémisante de « lobby », il s’agit d’un groupe de corrupteurs disposant d’un budget faramineux. On suivra donc avec beaucoup d’intérêt les prises de position, les tribunes et autres « conférences » qui vont assurer la promotion de cette belle, noble et pure idée ! On peut craindre le pire. Surtout dans un gouvernement qui compte huit membres qui sont passés par la « french american fondation ». Ce machin est une sorte de club « le Siècle » pour « young leaders » que le rêve américain et autres fadaises prétextes fascinent. Bref le gouvernement le plus atlantiste et le plus sous influence depuis bien longtemps.
Passons maintenant en revue les quatre questions qui motivaient les « réserves » qu’exprimait auparavant François Hollande. Puisqu’il prétend en être libéré à Chicago, voyons ce qu’il en est. D’abord « la maîtrise des coûts ». On vient de le voir : c'est précisément parce que les coûts d'un tel projet sont incontrôlables et incontrôlés aux USA que ces derniers y font participer les Européens. L'ensemble des rapports parlementaires sur le sujet soulignent d'ailleurs que la participation de la France à un tel « bouclier » évincera budgétairement d'autres projets de défense. Aucune raison d’être rassuré donc. Ensuite François Hollande serait dorénavant tranquillisé sur la part de « l'intéressement des industriels français à la réalisation des équipements nécessaires ». Là encore on se demande comment il a pu arriver à une conclusion positive. Car l'histoire du projet lui-même montre qu'il est conçu pour soutenir l'industrie d'armement nord-américaine. D'ailleurs les équipements d'ores et déjà déployés sur lesquels se greffe l'OTAN sont états-uniens. Les radars et les missiles intercepteurs positionnés en Méditerranée sont fabriqués par la firme Raytheon. Et les systèmes d'armes qui équipent les croiseurs et guident les missiles sont fabriqués par la firme Lockheed Martin. Il s'agit donc d'une technologie 100 % états-unienne, fruit de 40 ans d'efforts de recherche et de développement du Pentagone. A supposer qu'ils en grappillent des miettes, les groupes européens seront cantonnés dans ce projet à des missions de sous-traitance. Et celles-ci seront, de toute façon, financées par les Etats européens au détriment d'autres priorités de leurs propres budgets de défense.
Voyons à présent le plus important. Il s’agit de la remise en cause par ce bouclier de la capacité de dissuasion nucléaire autonome de la France. Cela concerne le cœur du raisonnement qui soutient la dissuasion. L’adversaire n’entreprend rien car il sait que la réplique sera dévastatrice. Il n’y a pas de petite bataille préalable ni de tentative d’aucune sorte qui soit réputée supportable ou acceptable ou possible. Tout ce qui atténue l’idée du choc unique et désastreux affaiblit le concept de dissuasion. Ici, du moment où l'on considère que la France a besoin d'être protégée concrètement d'attaques de missiles, on accrédite l'idée qu’il existe un pallier intermédiaire de guerre. On sous-entend donc aussi que sa force de dissuasion ne la protège plus intrinsèquement et qu'elle est donc vulnérable. Il y a donc une contradiction stratégique majeure entre une dissuasion nucléaire indépendante et la participation à un bouclier anti-missile états-unien. Une contradiction politique qui vient d'être rappelée par Pascal Boniface. D'ailleurs, sur le sujet, on peut lire des choses très claires dans le livre blanc de la défense nationale française. On ne peut pas dire que la doctrine soit imprécise, même si le vocabulaire est aussi codé que n’importe quel vocabulaire spécialisé. Voici ce qui est écrit concernant les menaces balistiques : « La France adoptera une stratégie de prévention active visant à limiter la prolifération balistique, tout particulièrement dans les zones les plus dangereuses. Elle s'appuiera sur sa capacité de dissuader toute intention d'un État de porter atteinte à ses intérêts vitaux par des moyens de ce type. » Et à l'inverse, la participation à un éventuel bouclier de l'OTAN n'y est évoquée que pour envisager des études à son propos. Un enterrement diplomatique. Car au-delà des études, et une fois opérationnel, ce bouclier constitue par définition une prolifération balistique considérable. Il remettrait donc sérieusement en cause la doctrine de défense française dans ses objectifs de dissuasion et de participation au désarmement multilatéral. Signalons qu’il percuterait aussi le droit international du désarmement en portant une nouvelle atteinte au traité sur le désarmement balistique. Cela tombe bien pour les USA qui essaient de l'enterrer depuis 2001 au grand dam de la Russie.
Enfin, la dernière réserve de Hollande concernait « le contrôle politique de l'utilisation du bouclier ». Or sur le plan opérationnel, rien ne permet de penser que quoi que ce soit ait changé. La raison en est technique. C’est simple à comprendre. Un rapport parlementaire cosigné par des sénateurs UMP et PS en juillet dernier le pointait : « Les délais de riposte à une attaque balistique seront extrêmement brefs et n'autoriseront pas de procédure de consultation et de coordination préalable ». Les règles d'engagement seront donc codifiées à l'avance et activées automatiquement sans contrôle politique préalable. Une codification qui est pour l'instant entièrement aux mains des USA alors qu'elle est extrêmement délicate. Car l'utilisation du bouclier pose des difficultés techniques lourdes. Comment gérer les détonations et les retombées lors de l'interception d'un ou plusieurs missiles. Ce n’est pas une question secondaire pour ceux qui se trouvent dans le secteur où le missile est intercepté. Car imaginez qu’il comporte une charge nucléaire ou chimique ? Sans oublier le problème que posent aux riverains des bases d'implantation du bouclier puisqu’ils deviennent eux-mêmes des cibles. Qu'il s'agisse de zones terrestres (en l'occurrence la Turquie, la Roumanie et la Pologne) ou marines (en l'occurrence l'est de la Méditerranée et la Mer Noire dont une partie sont des zones naturelles protégées).
Aucune des quatre réserves évoquées par François Hollande n'a donc été réellement levée. François Hollande a tout cédé aux américains, un point c’est tout. Et j’en suis désolé. Car je pensais que la fonction créant l’organe, il verrait vite quel sottise impériale est ce bouclier. A supposer qu’il fonctionne réellement un jour. Le bouclier anti-missile est comme l'OTAN elle-même : ce sont des projets des Etats-Unis, conçus par les Etats-Unis et pour les Etats-Unis. Du moment où la France ne remet pas en cause son appartenance à l'OTAN et sa participation à son commandement militaire intégré, elle n'a pas d'autre solution que de se soumettre à ce que l'OTAN, et donc les USA, décident. La dangerosité et l'inutilité pour notre pays du bouclier anti-missile sont donc une raison supplémentaire de défendre la sortie de la France de l'OTAN comme le propose le Front de Gauche. A ma connaissance, seul le journal « Libération » a traité ce sujet.
Il y a deux campagnes dans les quatorze communes de la 11ème circonscription du Pas-de-Calais. Il y a la campagne d’ « Henin-Beaumont », comme persiste à le dire, pour faire simple compte tenu du niveau intellectuel de leurs consommateurs, quelques-uns des médias parmi l’incroyable nuée présente sur place. Ceux-là viennent contempler sur place le miroir de leurs fantasmes. Ils viennent voir la brillante madame Le Pen, adorée du peuple, recevoir un formidable accueil et patati et patata. Lire « Le Monde » et les articles d’Abel Mestre. Parmi les votifs on notera cependant les étranges mœurs professionnelles de quelques-uns d’entre eux. Ce sont de purs agents de l’extrême-droite. Un petit groupe de provocateurs qui passent de l’un à l’autre sur place colportant ragots et médisances pour recueillir ensuite des réactions outrées et ainsi de suite. Naturellement ce n’est pas le cas de tous. Loin de là. Car il y a la deuxième campagne. Celle qui a lieu dans les quatorze communes. Des tas de gens de presse sont là, aussi perplexes que moi devant ce que nous découvrons ici. D’abord l’étendue des sacs d’embrouilles entre les notables socialistes locaux. Ensuite un Front national concentré dans une seule ville, absent de toutes les autres, payant ses distributeurs de tracts et colleurs d’affiches, magouillant avec certains socialistes sur le dos de leurs concurrents respectifs comme l’a révélé « Rue 89 ». C’est-à-dire le contraire de la légende dorée en vigueur dans certaines rédactions. A l’inverse notre réseau local qui s’appuie sur un Parti communiste actif et des syndicalistes omniprésents nous permet de tout voir tout entendre. Notre petit PG local et l’escouade venue avec moi de Paris quadrille aussi à merveille. Ainsi sommes-nous en état de repérer les arrivées de minibus parisiens avant les descentes de la grande madame sur les marchés. Pour autant le Front national, à 31 % dans la circonscription, est bien présent comme courant électoral. Comment entre-t-il dans les familles ? Par la radio, la télé, les reportages apologétiques. Bref, par toutes ces assignations de soi-disant « observateurs » dont le travail fonctionne en réalité comme une propagande.
Reste que le harcèlement de quelques mirmillons nous a déjà assez pourri la vie, comme pendant la présidentielle, pour que j’ai pris la décision, comme en pleine campagne présidentielle, de ne plus publier une bonne partie de mon agenda et m’éviter ainsi leur présence. Je pense bientôt tarir purement et simplement l’information sur mes occupations. Car la présence médiatique si elle a un intérêt évident a aussi parfois un inconvénient majeur. Celui de la manipulation. Elle peut changer le cours de la campagne. En tête du classement de ceux qui inventent la moitié de leurs informations en vue de recueillir l’autre moitié, les journaux proches du Front national du fait de leurs lecteurs : « Le Parisien » et « L’Express ». Un bon exemple pour éclairer le propos. Le « journaliste » du « Parisien » tweete que je me cache dans une voiture plutôt que « d’affronter » madame Le Pen sur le marché. Un pur bobard du genre « montre que t’es un homme, va te battre ». Le même se délecterait à coup sûr de pouvoir décrire, comme l’annonce tel autre de ses collègues une « bataille de coqs » dont je serais le responsable. D’ailleurs une évaporée munie d’une caméra, totalement surexcitée, m’a accueilli sur le marché en me demandant de commenter une poterie où deux coqs s’affrontent. Ce n’est pas beau le journalisme d’investigation chez les indigènes ch'tis ? Donc, je me serais caché selon « Le Parisien ». Aussitôt l’AFP reprend l’information et dix journalistes la recopient dans leur merveilleux papiers tellement couleur locale ! Problème de détail : je ne me cachais nullement. Mais où étais-je à l’heure où les vampires vont boire du sang sur le marché de Hénin-Beaumont ? Voilà la question que leur insondable curiosité professionnelle ne leur suggère pas de se poser quand il est si facile de recopier sans réfléchir. Vous allez voir jusqu’où va l’aveuglement de ces gens. A cette heure-là, j’étais à dix minutes de là, en urgence dans une usine, Meryl Fiber, dont les ouvriers avaient appris la veille qu’elle passera en redressement judiciaire mercredi qui vient. Plusieurs centaines de salariés sur le carreau. J’ai pris la parole devant eux, perché sur une estrade improvisée. Cela faisait une bonne occasion pour des images, pour du son, pour du papier, pour des tweets, non ? Quelqu’un d’entre vous a entendu parler de Meryl Fiber dans la journée ? Macache ! Pas un de ces grands Rouletabille n’a fait autre chose que de se monter sur les pieds dans les allées étroites du marché en piétinant les gens. Et de recopier les inventions de leur « collègue » du « Parisien », bon facho patenté qui ricane ensuite dans ses réponses à ceux qui l’interpellent sur ce curieux procédé. Je vous raconte tout cela pour que vous compreniez dans quelle ambiance une fois de plus nous évoluons.
Naturellement toute cette prose n’a aucun impact local car personne ne la lit. Il s’agit juste de la campagne nationale de ces organes de presse. Ce qu’ils publient n’est pas destiné au public local mais à celui du reste de la France. C’est de cette façon qu’il faut l’analyser. Qu’ont-ils à vendre ? Le « nouveau » Front national. Ici nous retrouvons le problème posé depuis le début de l’opération de « dédiabolisation » de l’extrême-droite. Une partie de la droite médiatique joue un rôle très actif dans le rapprochement entre l’extrême-droite et la droite classique. Elle a accompagné avec enthousiasme le glissement progressif de Nicolas Sarkozy dans cette direction. Elle entoure avec intérêt le travail de la droite « populaire ». Pour que l’opération fonctionne, il faut que son pendant soit mis en scène. C’est-à-dire créer une équivalence entre le Front national et le Front de Gauche. C’est la ligne que la droite cherche à construire. Ainsi quand Xavier Bertrand affirme que je ne suis pas républicain. Puis Copé lorsqu’il déclare que les programmes du Front de Gauche et celui du FN sont semblables. Parfois l’outrance explose davantage. Ainsi quand Copé, de nouveau, met sur le même plan Brasillach et Robespierre ! Sur le même plan l’homme qui voulait la déportation des enfants juifs et celui qui le premier a donné la citoyenneté aux juifs de France. On attend toujours la protestation du CRIF. Mais comme je suppose que, pour monsieur Prasquier, je suis surtout un « ami des arabes », il doit penser que tous les coups sont permis contre moi. Il devrait plutôt se méfier. Comme certains de ceux qu’amusait la polémique sur la viande hallal : ils se sont réveillés douloureusement quand ils ont réalisé qu’elle visait aussi la viande casher !