J'écris cette note alors que je suis encore un peu fébrile après ce discours sous la pluie devant le Panthéon. Ici, il est surtout question de la manifestation du 30 septembre et de l'événement que constitue le rejet massif par le conseil fédéral d'Europe-Ecologie-Les-Verts du traité européen. Je viens aussi sur les pénibles moments que nous avons dû passer tandis que la scène publique était encombrée par les retours agressifs de la religion. Je surligne ensuite une information passée inaperçue qui implique pourtant notre indépendance nationale. Enfin j'explique le sens de mes plaidoyers pour Chavez.
En illustration de ce billet, quelques portraits en costumes réalisés à l’occasion de la commémoration du 220ème anniversaire de la République au Panthéon le vendredi 21 septembre 2012. Photos : S. Burlot
Je viens d'apprendre le résultat du vote du conseil fédéral d'Europe-Ecologie-Les Verts à propos de la ratification du traité européen. 77 voix contre, 24 pour, 8 abstentions. C'est selon moi un événement politique d'ampleur. Majoritairement, un des deux partis de la coalition a rompu la solidarité politique gouvernementale. En soi ce n’est pas rien. Mais il s’agit d’un texte qui va être à l'origine de toute l'orientation du gouvernement pour les mois à venir. A cette heure, je ne me soucie pas de l'inconséquence qu'il y a pour Europe-Ecologie-Les Verts à voter de cette façon pour devoir ensuite appliquer les conséquences du texte qu'ils auront condamné aussi largement. Le fait marquant, le fait politique, le fait qui positionne cette formation pour l'avenir, pour les majorités politiques que nous pourrions constituer, c'est qu’Europe-Ecologie-Les-Verts ait dit « non » au traité européen. Ce vote met aussi la gauche du PS au pied du mur. Il devient plus difficile selon moi de se dédire quand une partie de la majorité gouvernementale et une aussi forte partie de la gauche parlementaire est aussi résolue. Car le « oui » et le « non » au traité européen ne sont pas une opinion parmi d’autres à propos de politique étrangère ! C’est une ligne d’ensemble dans chacun des deux cas. Elle concerne l’avenir de l’Europe et la conduite de la politique générale en France.
Ce vote tombe à pic. Il entre en résonance avec ce qui se passe dès à présent sur le terrain. J'en déduis que la mobilisation pour le 30 septembre devrait encore s'élargir. Car de jour en jour, d'heure en heure, la préparation de la manifestation prend de l'ampleur. Les cars et les trains s'affrètent, les covoiturages s'organisent. Il faut être conscient qu’un tel mouvement implique d’importants sacrifices financiers. La liste des organisations qui appellent s’allonge. Il y en a plus de 50 d'ores et déjà. Pour ne prendre que les syndicats j’ai noté la CFDT CFF, la CGT Finances, la CGT Educ'action, la CGT Livres (Filpac), la CGT Personnels des Organismes Sociaux, la très puissante Union régionale Ile-de-France de la CGT, la CGT FSA, le SNESUP-FSU, le SNU-FSU Pôle Emploi, le SNU-FSU Clias, le SNU-tefi. Et aussi la FSU et Solidaires Finances Publiques, Solidaires Douanes, Sud BPCE. On se souvient que l'Union syndicale Solidaires est déjà parmi les premiers signataires de l'appel unitaire. De réunion du collectif en réunion d’organisations la mise en place matérielle se précise. Il y a parfois de piquantes discussions. On se souvient des soupçons de « récupération » politique formulés et répandus en confidences « anonymes » (bien sûr) contre moi ou contre le Parti de Gauche. Qu’il est amusant de voir les mêmes à présent faire des pieds et des mains pour obtenir le droit de manifester distinctement avec leurs propres cortège et banderoles de parti ou de syndicat quand nous proposons de marcher tous ensemble, par région, par respect pour les montées collectives des camarades venus de loin. Qu’il est amusant aussi de voir toutes ces pressions pour organiser des prises de paroles finales quand nous proposons qu’il n’y en ait pas, tout simplement, parce que la sonorisation coûte affreusement cher, sachant que notre message est connu et que ce qui reste à savoir c’est si nous sommes en nombre ou pas. Pour finir, bien sûr, nous ne ferons de rien de tout cela un motif de fâcheries. Rien ne nous importe à part le succès, le sentiment de force qui se répandra, la prise de conscience qui émergera, le recul de la résignation, la vigueur du rapport de force. Parlez autant que vous voulez, défilez comme vous voulez, cela n’a pas d’importance. Ce qui compte c’est le nombre, la détermination, l’énergie, la dynamique ! Agissez, mobilisez, camarades ! Nous, nous n’avons pas d’intérêt distinct de ceux de l’ensemble du mouvement. Je crois celui-ci assez fort, dorénavant, pour rappeler à tous les états-majors le sens du collectif.
Un fait nouveau dans le contexte : la publication par « Le Monde » du texte de la loi organique qui serait déposée pour faire suite à l'adoption du traité par les assemblées. Du coup, avec la présentation du texte du traité au conseil des ministres, une certaine actualité s'organise. Des articles paraissent un peu partout dans la presse et les médias audiovisuels même y consacrent par-ci par-là quelques instants. J'estime que cela démultiplie notre capacité de sensibilisation. Une question paraît moins lointaine dès qu’on en entend parler à la télévision ou à la radio. Un appétit se réveille alors chez tout un chacun dans la mesure où nous avons entretenu au fil des années depuis 2005 une information polémique sur le thème. Dans ces conditions il est possible qu'au cours des prochains jours ce mouvement s'amplifie. Les médias peuvent décider que c'est un sujet d'intérêt dans la mesure où il existe assez de passion pour entretenir la discussion. Je pourrais assister également un retour des méthodes de diversion. Est-ce que ce n'est pas déjà le cas avec la relance du débat sur le droit de vote des immigrés aux élections locales que rien ne justifie sinon paraît-il des rumeurs de remise en cause de l'engagement du chef de l'État sur ce sujet. Les socialistes qui ont décidé de faire une pétition sur le thème ne sont-ils pas pourtant les mieux placés pour aller s'assurer par eux-mêmes de la véracité de cette rumeur ? Comédie ! Comment ne pas souligner l'incohérence de ces gens qui veulent étendre la citoyenneté à un nouveau groupe de personnes au moment même où par le vote d'un traité ils vont la réduire pour tout le monde. Une autre diversion, encore à la une du journal « Le Monde » aura été cette interview de Mme Le Pen. Car il fallait bien s'attendre à ce qu'elle profite de l'occasion si magnifique pour marquer son terrain. Elle l'a fait ! Et comment ! Elle a joué sur la confusion entre le port dans la rue de la Burqa et du voile pour exiger l'interdiction du voile et de la kippa ! Une provocation de plus dans une atmosphère déjà surchargée de surenchères à propos des religions. Je vois un avantage cependant à cette stupide nouveauté. Dorénavant il est devenu clair que Mme le Pen en revient bien aux traditions les plus profondes de l'extrême-droite française à propos de la communauté juive qu'elle veut montrer du doigt. C'est la deuxième fois. Ce fut le cas une première fois à propos de la viande halal. Dans le flot de sottises qui furent prononcées alors, très vite on en vint aussi à de nauséabondes considérations sur la viande kasher. Et déjà alors il s'agissait d'une diversion puisque cette « affaire » de la viande halal surgit en même
temps que nous essayions d'ouvrir le débat sur le MES, un autre traité européen, en pleine présidentielle où le thème était pourtant tout à fait à sa place.
Il n'en reste pas moins vrai qu'un intérêt médiatique pour le traité européen se constate. Je ne suis pas dupe des intérêts parfois mesquins qui sont de la partie. A droite, on jubile de voir le nouveau gouvernement venir, le béret à la main, défendre un texte rédigé par le précédent président ! A droite, on se réjouit de voir le Président de la République et le Premier ministre être contraints de diviser leur propre majorité et de voter avec l'opposition de droite pour faire passer un texte ! Mais à qui la faute sinon à ceux qui ont été assez cyniques pour penser que personne ne se rendrait compte de leur manœuvre ! Dès que Jean-Marc Ayrault a fait la bêtise de dire que « les lignes ont bougé », on se souvient que j'ai demandé lesquelles. La vérité est à la portée des moins curieux. Pas une ligne pas un mot pas un verbe pas un adjectif qui ait changé depuis la signature donnée par Nicolas Sarkozy. Comment Jean-Marc Ayrault pouvait-il croire que personne ne s’en rendrait compte ? Comment le ministre Cazeneuve pouvait-il croire qu'une aussi grossière ficelle de communication que son « oui de résistance » pouvait échapper aux sarcasmes du très grand nombre de ceux qui n'aiment pas qu'on les prenne pour des imbéciles ? Une fois de plus je note que les nouvelles excellences se croient toujours dans leur réunion de parti ou les mensonges et les arrangements avec la vérité passent sans difficulté du moment que les choses sont dites comme dans un murmure.
Je n'ai pas aimé du tout l'ambiance cette semaine avec ce retour violent et somme toute grotesque de la question religieuse sur la scène politique. J'avais eu un avant-goût avec l'empêchement fait à Caroline Fourest à la Fête de l'Humanité de pouvoir débattre. Cette histoire m'a beaucoup choqué. Qu'un débat soit rendu impossible à la Fête de l'Humanité décuple la violence du fait. Quelles que soient les raisons que peuvent avoir ceux qui veulent s'opposer à ces propos pourquoi le faire en empêchant qu'elle parle. Vraiment, je ne peux pas l’admettre. Je ne suis pas toujours d'accord avec Caroline Fourest, et comme les sujets qu'elle aborde touchent le plus souvent à des questions fondamentales, je reconnais qu'il peut m'arriver de mettre beaucoup de passion dans mes objections. Mais il ne me viendrait jamais à l'idée d'en venir à lui interdire d'exprimer son point de vue. Comment ceux qui pensent incarner les raisons d'une religion dont les fidèles souffrent déjà tant d'être minoritaires et souvent montrés du doigt peuvent-ils, à leur tour, recourir à l'ostracisme et à la stigmatisation par la force ! C'est incohérent. Je les crois très marginaux dans cette attitude. Ma conviction profonde est que dans leur masse les musulmans aujourd'hui, comme hier les juifs et les protestants, savent qu'ils ont un intérêt fondamental au respect du pluralisme et du droit d'expression des points de vue minoritaires. Quand il y a une religion dominante, toutes les autres ont intérêt à la laïcité de l'État et à la liberté de conscience la plus absolue.
J'en étais là quand histoire du film grotesque sur les musulmans tourné aux États-Unis devint une obsession médiatique du fait des violences qui se déclenchaient. L'affaire sent à plein nez la provocation bien organisée. Le déclenchement de manifestations de protestation et l'assaut meurtrier contre l'ambassade des États-Unis en Libye marquent une synchronisation troublante, intervenant soudain, des semaines après la mise en ligne du film. Tout surgit en pleine campagne électorale présidentielle aux États-Unis et tout est visiblement programmée pour nuire à Obama. Pour finir cela aura surtout permis, à échelle du monde entier, de remettre en scène l'équation qui sert d'épouvantail à la théorie du choc des civilisations qui est l'idéologie commune au 19 agences de sécurité et d'intelligence qui grenouillent dans l'ombre à Washington et se disputent les parts de subventions et les budgets. Nous en étions déjà la quand est arrivé la nouvelle « affaire » des caricatures dans « Charlie Hebdo ».
Aussitôt, de tous côtés, tombèrent les injonctions à se prononcer pour ou contre avec, dans chaque cas l'enfilade de conséquences soi-disant logique que les bons esprits y accrochent ! Reconnaître à « Charlie Hebdo » quand il le veut, comme il le veut, le droit de se moquer de qui il veut, avec bon ou mauvais goût, de faire ce qu’il veut du sujet qu’il décide de traiter n’est que l'application d'un principe fondamental de notre idéal : la liberté de la presse. Défendre la liberté de la presse n'implique d'aucune façon qu'on soit d'accord avec ce qu'elle publie. C'est quelque chose que nous savons-nous, dans l'autre gauche, mieux que les autres. Car la liberté que nous défendons là, c'est le droit pour la presse, dans la plupart des cas de nous insulter, de nous mépriser, de nous défigurer, de nous calomnier, de donner systématiquement raison à nos adversaires, de dédiaboliser les pires personnages de la vie politique tout en nous diabolisant chaque fois que possible. Nous défendons la liberté d’une presse partisane, hypocrite, faible devant les puissants et dure face aux faibles. Mais nous la défendons ! Le mauvais goût de « Charlie Hebdo » n'est rien à côté de celui d'un Christophe Barbier, d'un Alain Duhamel et autre médiacrâtes insultants, vaniteux et cupides. Et pourtant nous ne permettrions pas qu'on veuille les empêcher de débiter leurs obscénités intellectuelles. La liberté de la presse est une composante de la liberté une et indivisible que nous mettons au poste de commande de notre conception de la vie en société. Il n'y a pas d'autres bornes à la liberté que celles fixées par la loi. Comment avons-nous pu dévaler la pente au point qu'il soit nécessaire de rappeler de telles évidences ! Que le premier ministre se soit senti obligé de dénoncer dans ces caricatures une "provocation" montre le degré d’abaissement où en sont rendus dorénavant les technocrates sociaux-libéraux ! Parallèlement, que le ministre de l'intérieur ait interdit des manifestations de protestation contre ces caricatures est une autre aberration injustifiable. Avait-il des informations permettant de prévoir des troubles de l'ordre public ? Lesquelles ? Car, sinon, l'interdiction n'a aucun sens admissible du point de vue de nos libertés publiques. Le contenu d'une manifestation, ses mots d'ordre, ses raisons, ne saurait être un motif d'interdiction, sauf s'ils contreviennent à la loi. Le fait d'organiser une manifestation pour protester contre des caricatures ne contrevient pas davantage à la loi que le fait d'organiser, comme c'est le cas chaque année, une manifestation place de la Concorde à la mémoire de Louis XVI condamné pour avoir trahi la patrie il y a deux siècles de cela ! Mais, bien sûr, si pendant de telles manifestations étaient proférées des injures racistes ou bien des slogans hostiles à la République, ceux qui s'en rendraient coupables devraient être interpellés. Comment tous ces donneurs de leçons en matière de liberté, qui nous montrent aussi souvent du doigt, peuvent-ils à la première alerte méconnaître à ce point les bases élémentaires de l'esprit du droit républicain ? Ce sont des hypocrites ! Quand vont-ils se décider à interdire les séances de prière dans la rue contre les centres de santé où se
pratique l’IVG ? Quand vont-ils faire évacuer l’église Saint Nicolas du Chardonnet occupée par des intégristes qui n’y sont pas autorisés ? Quelles mines font dorénavant tous ses grands esprits quand ils entendent dire que la justice pourrait être saisie au nom du droit local alsacien qui comprend le délit de blasphème comme nous n'avons cessé de le dénoncer sous le regard apitoyé de ces importants ! Que disent à présent ceux qui se risquèrent même, comme c'est le cas de François Hollande, à vouloir mettre le concordat dans la Constitution pour mieux protéger ce particularisme qui accable l'Alsace ? Ayrault, Valls, et les fanatiques religieux ont en commun de penser que le droit s'interprète au fur et à mesure d'après leurs émotions ou leurs convictions. C'est ce qui les rend dangereux pour la liberté davantage que l'idée qu'ils s'en font !
Vous n’avez pas dû remarquer l’information, sans doute. Moi, elle m’a percuté rudement. Une fusion est envisagée entre le géant franco-allemand de l’aéronautique EADS et le britannique BAE, héritier de British Aerospace. Ici où là, quand quelqu’un en parle dans les médias, l’information n’est abordée que sous son angle commercial et financier. Jamais dans sa dimension stratégique et politique. Il a d’ailleurs été annoncé dans l’indifférence du gouvernement. Pas un mot de commentaire. Pourtant l’Etat français est un des principaux actionnaires d’EADS. Ce projet est la première initiative d’envergure du nouveau président d’EADS, l’allemand Thomas Enders, qui a remplacé le français Louis Gallois depuis juin dernier. Alors que Gallois était un défenseur de l’industrie attaché au rôle de l’Etat dans l’économie, Enders est un libéral qui a longtemps milité au sein de la CSU, l’aile ultraconservatrice de la majorité de Mme Merkel. Ce monsieur préside le club patronal allemand qui œuvre au rapprochement transatlantique, l’Atlantik Brücke e.V. C’est donc un artisan actif et ardent du grand marché transatlantique, le fameux GMT, dont il est impossible d’entendre parler en France alors qu’il est censé se mettre en place en 2015. Le souhait de ce Thomas Enders de se rapprocher du groupe britannique d’aéronautique et de défense n’est donc pas limité à l’aspect commercial et financier. En rompant l’axe franco-allemand qui a porté Airbus et EADS, cette fusion rendrait possible un nouvel axe germano-britannique à la tête du nouveau groupe. Avec un tropisme beaucoup plus transatlantique qu’européen. Car le britannique BAE est d’ores et déjà un groupe fortement intégré au complexe militaro-industriel états-unien. Il possède des filiales aux USA. Et il participe directement au développement du nouvel avion de combat des USA, le F35, qui a vocation à remplacer le F16, l’avion militaire le plus vendu de l’histoire. Cela isolerait un peu plus le programme français Rafale en Europe. En matière d’industrie de défense, cette fusion enterrerait donc toute velléité d’indépendance européenne face aux USA. Quant à l’aéronautique civile, BAE n’y a pas laissé de bons souvenirs. Lors de la constitution d’EADS en 1998, BAE avait en effet fait l’acquisition de 20% dans Airbus après avoir renoncé à intégrer EADS en tant que tel. Avant de se débarrasser de cette participation en 2006, contribuant directement aux difficultés financières d’Airbus. Ici je résume autant que je le peux pour ne pas surcharger de considérations techniques et historiques cette information. Mais je crois avoir fait sentir l’essentiel. Je suis scandalisé de voir que le gouvernement ne dit et ne fait rien. L’atlantisme historique et aveuglé de Jean-Marc Ayrault et François Hollande coupe ces deux hommes d’une compréhension vraiment informée des exigences qu’impose le souci d’indépendance et de souveraineté face aux Etats-Unis. Les allemands, habitués à vivre sous parapluie nucléaire et militaire des nord-américains depuis la partition de l’Allemagne, ne sentent pas les choses comme nous. J’estime qu’il faut s’opposer à cette opération. Je pense que le gouvernement qui a déjà accepté à Washington le prétendu « bouclier anti-missiles » est en train de laisser volontairement se mettre en place une conception de la défense qui mériterait au moins d’être assumée pour pouvoir être discuté. La plus grande méfiance est donc de mise face à ce projet de fusion, tant pour
l’indépendance de notre défense que pour l’avenir d’Airbus.
Je veux revenir un instant sur le sens que je donne à la publication dans mon précédent post d'un argumentaire à propos du bilan de la politique d'Hugo Chavez au Venezuela. Mon intention est d'expliquer les raisons pour lesquelles je soutiens la révolution bolivarienne. J'espère bien que mes arguments convaincront à leur tour d'autres personnes de regarder différemment la place particulière du processus politique en cours au Venezuela. Mais mon premier objectif est de contrecarrer deux attitudes qui me paraissent nuisibles à notre propre combat. La première est de se résigner, sans se renseigner, à avaler peu ou prou l'image générale que nos adversaires veulent donner de toute révolution qui contrecarre les intérêts de l'oligarchie où qu'elle soit dans le monde. Nos adversaires savent ce qu'ils font. Ils n'essaient pas de convaincre, ils ne citent jamais un fait précis. Leur but est de créer une ambiance de dénigrement en instillant l'idée qu'il existe une raison d'une dimension infâme chez celui qu’ils désignent à la vindicte. Leur intention n'est même pas de faire entrer quelque chose dans le crâne des autres. Il s'agit seulement de rendre suspect. Leur but est très précis. Ils veulent neutraliser l'opinion dans le cas où ils se décident à passer à l'action violente. Dans ce domaine leurs préparatifs sont constants et méthodiques. Ainsi, depuis plusieurs jours, voit-on dans la presse internationale que les enquêtes d'opinion, on ne dit jamais lesquelles, annonceraient un recul de Chavez, et un progrès de son concurrent, le candidat commun de la droite, de l’extrême-droite et des socialistes. Cette information ne correspond à aucun sondage. Ni à aucune donnée de terrain. Tout au contraire, les témoignages se recoupent pour montrer que la campagne de nos adversaires patine et que l'état-major qui la dirige est actuellement très divisé. Il n'empêche ! Quoiqu'il se passe sur le terrain, pour l’ennemi, le dispositif doit être mis en place pour contester le résultat si cela est possible. Cette contestation n'aura rien de rhétorique. Elle se déclenchera sous la forme d'occupations de places, de mouvements violents, comme dans le passé, à plusieurs reprises, la droite a essayé de le faire. Cette violence aura lieu si le résultat n’est pas massivement du côté de Chavez ! Le candidat des socialistes, de la droite et de l’extrême-droite, Capriles-Radonsky, a été lui-même personnellement extrêmement actif pendant le putsch et la séquestration de Chavez en 2002. C'est lui qui dirigeait le commando qui envahit l'ambassade de Cuba ce jour-là. Tel est en effet le « démocrate » que nous a vendu « Libération » et les autres journaux de la boucle des agences d'influence nord-américaines. De mon côté, en publiant des contre-informations comme d'autres le font partout dans le monde, je travaille à tenir les esprits en alerte et à aider à la compréhension de ce qui se passe vraiment. De cette manière, ceux que ces arguments auront intéressés, progressent en éducation politique. Ils comprennent mieux que la lutte que nous menons en France est insérée dans un front beaucoup plus large à l'échelle du monde où les avancées et les reculs des uns ou des autres nous impliquent tous. Et, bien sûr, en même temps nous préparons les esprits à devoir réagir en cas d’offensive putschiste pour former une chaîne internationale de résistance. Ceci me mène à la critique d'une autre attitude qui nous nuit beaucoup. C’est celle qui consiste à s'en tenir un point de vue de purs commentateurs, soupesant le bon et le moins bon, en acceptant de passer sur le terrain de nos adversaires. On parlera et on protestera contre tel aspect du chavisme en se taisant sur Guantanamo, le putsch au Honduras et au Paraguay. On ira parfois même jusqu’à ironiser sur la facilité de la distribution de la rente pétrolière. Et on oubliera que rien n’est moins habituel dans le monde que cette distribution comme en témoigne la situation dans les pétro-monarchies. Au fond, si ce qui est fait ici ou là par l'un des nôtres n'est pas parfait, exactement conforme à l'idée que nous nous faisons ici, en Europe, dans nos conditions particulières, et quand bien même nous avons cependant raison, de ce qui est le bien et ce qui est le mal, alors nous condamnons par avance, nous répandons notre scepticisme, et en définitive nous accompagnons la campagne de dénigrement. Ainsi s'agissant du Venezuela, de la Bolivie, du Paraguay, de l'Équateur, de l'Argentine, nous devrions ou bien admirer sans réserve, adorer, être émerveillés, ou bien, au contraire, acrimonieux et aigres, nous devrions d'un
haussement d'épaules et avec dédain rejeter d’un bloc le tout pour la partie qui n'est pas assez bonne à notre goût ! Cette attitude binaire est celle qui convient évidemment au format médiatique. Est-ce une raison pour accepter de laisser notre esprit se laisser modeler sur ces registres simplistes ? Pour ma part, j'ai toujours dit que je n'étais l'admirateur de personnes au sens que les commentateurs donnent à ce mot. Chacun des processus politiques engagés dans les pays de la vague démocratique est une source d'inspiration. L’inspiration c'est autre chose que « l'admiration » au sens de béatitude que l'on accole généralement à cette expression. C'est au contraire une attitude raisonnée, argumentée, qui fait la part des choses et cherche à tirer de ce qui est entrepris des enseignements concrets pour soi-même et pour l'action que nous avons à conduire. Bien sûr, je ne veux pas cacher que cela n'exclut pas beaucoup d'empathie pour les personnages que je suis conduit à fréquenter dans ces circonstances. Hugo Chavez au Venezuela, Rafael Correa en Équateur, Pepe Mujica en Uruguay pour ne citer que ceux-là, mais en pensant aussi aux autres et à nombre de ceux qui les entourent. Ils m'inspirent chacun un sentiment de communauté de vie et d'espoir qui s'enracine profondément dans mon imaginaire politique et ma détermination humaine.