Dans cette note il est question de la manifestation du 30 septembre dernier. Puis du Vénézuela dont l’élection présidentielle s’achève dimanche 7 octobre. Et enfin je reviens sur quelques-uns de mes arguments qui ont donné lieu à des séances médiatiques de prétendues « désintox » qui, en réalité, sont elles-mêmes toxiques. Si bien qu’il est assez souvent question des médias dans mes lignes. On connaît les raisons de doctrine politique qui me conduisent vers cet effort de décryptage permanent. Mais depuis quelques temps une nouvelle raison s’impose. La voici. Les médias sont seuls à mener bataille sur la scène politique. Où sont passés les partis politiques dominants? Le PS prétend se battre pour un traité européen. Où le fait-il ? Ou sont ses tracts, ses arguments, ses réunions ? L’UMP rappelle que c’est son traité, signé par son chef. Quand va-t-elle au-devant des français pour expliquer les bienfaits qu’ils doivent attendre de ce texte ? Sans le harcèlement médiatique pour le traité européen et contre ceux qui le combattent il n’y aurait aucune résistance en face de notre action. Même situation à propos du Vénézuela. La presse, et elle seule, mène une campagne ardente contre Chavez. La sphère médiatique de droite, d’extrême-droite, du centre et des sociaux-libéraux fonctionne donc comme un parti politique avec un agenda, des amis et des ennemis, des effets de répétition propagandistes clairs et assumés. « Désintox » s’il vous plaît ! Prouvez le contraire !
La manifestation du 30 septembre contre le traité européen et l'austérité a été un succès total. Nous avons annoncé 80 000 personnes. Mais peut-être y en avait-il davantage. En fait le cortège avait une longueur de 4 km et demi et il s'est écoulé pendant trois heures. L'ordre des délégations n'a pas été tout à fait respecté compte tenu du temps qu'il fallait attendre avant de démarrer. Nombre n'ont pas eu la patience ou la possibilité d’attendre. Ils ont donc quitté la place de la Nation pour rattraper par les trottoirs le cortège qui avançait. Pour autant, en gros, on voyait bien, à travers l'organisation, le contenu de la manifestation. De cette façon on peut dire que ce cortège était en lui-même un message plein de subtilités. Après le carré des féministes venaient les régions et parmi elles les départements. Ensuite les syndicats, pour l’essentiel Sud, des branches syndicales et unions régionales et locales de la CGT, et, bien sûr, la FSU d’une façon très significative. Ces cortèges ont été spécialement examinés de près par les observateurs de la vie syndicale. Leur densité, leur composition, les dirigeants qui ont incorporé leurs rangs, tout avait un sens. Après les syndicats venaient les organisations politiques. Certaines comme le Front de Gauche ou le POI avaient fait le choix d'une double présence dans les cortèges départementaux et en fin de manifestation. Bien sûr, le Front de Gauche était présent partout par ses drapeaux et ceux des organisations qui le composent, absolument partout, dans tous les cortèges, sur les trottoirs et même sur les balcons le long du trajet ! Cet amalgame était décidé de longue main. Notre intention au départ n’était pas d’avoir un cortège distinct. L’idée était de donner à voir une mobilisation populaire globale donc mélangée, sans appropriation particulière du mouvement. La consigne fut d’autant mieux répercutée que les camarades ont compris vite et bien comment le lobby politico-médiatique travaillaient à personnaliser ou à approprier la manifestation au Front de Gauche comme une manière d’envenimer les rapports et de rabougrir la mobilisation. Dans cet objectif, de mon côté j’ai donc décidé de ne donner aucune interview, aucun duplex, en début de manifestation ou en fin de cortège.
Reste que l’ampleur de l’événement doit être bien mesurée. Non seulement pour la satisfaction de l’effort récompensé de milliers de gens dans le pays, faisant toutes sortes de sacrifices pour être là. Mais par le contenu de ce qui s’est passé. N’en sortons pas. Commençons par noter qu'il s'agit de la première manifestation de rue contre un traité européen en France ! Ce fait n’ayant jamais été mentionné dans les commentaires je crois devoir le souligner parce que c’est au plan large de l’histoire un marqueur en France. Dans la presse étrangère, notamment anglo-saxonne et sud-américaine, c’est pourtant le fait qui aura été noté comme marquant. En même temps d’ailleurs que les photos grand angle soulignant l’ampleur du cortège dont aucune n’a été publiée en France à part dans « L’Humanité ». De mon côté c’est ce que j’ai d’abord commencé par dire en début de manifestation : « De ce jour commence l’entrée en action du peuple français contre l’Europe de l’austérité » et j’ai souligné qu’il y avait deux Europe qui se constituaient, face à face : celle des gouvernements et des banquiers et celle de la solidarité sociale contre l’austérité. Et c’est bien ce que je crois à propos de cette manifestation : c’est un commencement.
Et, dès lors, je veux souligner un deuxième fait : c’est la gauche qui organise la première manifestation contre cette Europe. Pas l’extrême-droite nationaliste comme en rêvaient tous ceux qui ont fait la courte échelle à madame Le Pen pour la remettre dans le jeu de cette partie. Ceux-là n’ont pas encore compris que madame Le Pen se tait à dessein. Le but de madame Le Pen est de réorganiser la droite autour d’elle. Pas de servir la soupe aux marioles qui veulent l’instrumentaliser pour leurs propres comédies. Ceux-là vivent encore dans leur petit monde où demain c’est hier qui continue sous le même soleil. Pourtant comme ils en ont rêvé de pouvoir flétrir tous les opposants en les rangeant sous la même bannière nauséabonde. Pschitt ! C’est raté. Donc c’est de gauche que part le signal du rejet de l’Europe libérale et de l’action organisée contre elle. Sans être dupe de l’effacement du Front National dans cette circonstance où nous avons pris la main, marquons le point pour mieux nous en assurer la prise.
Autre fait et non des moindres. La manifestation de ce 30 septembre est un fait sans précédent dans le contexte d'un nouveau gouvernement à direction socialiste. Surtout alors que celui-ci s'installe après 10 années de droite. Le stock d’indulgences est déjà épuisé ! Bien sûr la morgue d’un Jean-Marc Ayrault et l’indolence de François Hollande leur font ignorer la réalité de la rupture que leur comportement aggrave. Mais sur le fond, c’est bien d’une rupture dont il est question si l’on entend la parole venue des rangs des manifestants ainsi qu’en témoignent maints propos entendus et rapportés. Elle fonctionne à proportion de la tentative faite par le couple exécutif pour nier le problème posé par le traité européen, pour en camoufler le sens, pour intimider les opposants à l’intérieur de leurs rangs et à l’extérieur. Elle se répand à mesure que l’on observe les signaux venus du plus haut niveau du PS qui rejoignent nos dires. Successivement Claude Bartolone, Harlem Désir, et même Jean-Christophe Cambadélis ont eux aussi souligné l’absurdité de la règle des 3% de déficit. Dans le même temps Jean-Marc Ayrault devait avouer à la tribune de l’Assemblée qu’il avait menti et que le traité est bien le même que celui signé par Nicolas Sarkozy. Pour les roués et les blasés cet aveu n’est rien. Pour un citoyen ordinaire qui croit à la sincérité des propos publics, même quand il ne les partage pas, c’est consternant.
J'estime donc qu'un nouveau tempo est ainsi donné. Pensez-y bien. La leçon essentielle que nous avons tirée du bilan du passé est que, quelle que soit la qualité du gouvernement de gauche, et à plus forte raison quand il s'agit d'un gouvernement social-libéral comme aujourd'hui, aucune avancée n’est possible sans intervention et implication populaire. Précisons pour être bien complet. Il y a même pire : sans implication populaire la conscience collective de gauche régresse et la résignation en est le prix. En ce sens le succès de la manifestation sur un enjeu politique aussi élevé et complexe que le refus d'un traité européen inaugure une nouvelle saison des consciences dans l'histoire de la gauche. La fin des illusions et des indulgences sur le nouveau pouvoir peut se traduire par une impulsion positive et conquérante et non dans la résignation où le changement de camp. J’observe que le message est reçu en haut lieu où l’on affecte en apparence de nous ignorer. « Le Monde » rapporte cette remarque que je vous livre telle quelle : « En privé, le chef de l’Etat se dit en effet très préoccupé par ce qu’il appelle le fractionnement de la société française. Selon lui la gauche de la gauche est en train de changer de nature : d’aiguillon de la social-démocratie, elle est en passe de se considérer comme une véritable alternative à celle-ci.» Le tableau est campé, en effet.
Je me fais encore une remarque. Le succès de la manifestation a montré une disponibilité et une capacité militante à se mobiliser qui est tout compte fait très large. Mais compte tenu des difficultés que nous avons rencontrées, celles qui tiennent au coût des transports, à la difficulté de propager la consigne dans un délai si bref, au matraquage hostile ou sournois auquel nous avons été soumis, j'en déduis que notre potentiel est bien plus large que ce qui a pu être mis en mouvement ce jour-là. Ce point n’est pas secondaire pour moi, quand il me faut réfléchir à la suite des événements que nous aurons à mettre en mouvement. Bien sûr la forme de la présence du Front de Gauche n’a pas à être toujours la même. Il ne doit pas non plus se substituer à l’existence autonome des partis qui le constituent. Mais surtout il y a une intelligence des situations à avoir. Le mois de la discussion budgétaire concentre l’attention sur les assemblées parlementaires. Nos groupes vont avoir un rôle très particulier et ils vont être très regardés. En effet, « en l’état », comme l’ont déjà dit Pierre Laurent, Christian Picquet et la plupart des dirigeants du Front de Gauche qui se sont exprimés, le budget ne peut recevoir notre appui. Je pense que dans les prochains jours chaque composante du Front de Gauche se sera exprimée. La formule « en l’état » signifie que nous sommes respectueux du débat. Nous partons de l’hypothèse qu’il doit servir à quelque chose. Mais cela ne signifie pas que nous ayons des illusions. J’invite vraiment à ne pas négliger cette étape du débat parlementaire. C’est lui qui va mettre en valeur les arguments contradictoires et les logiques opposées, budget par budget. Car ce temps va être celui où des dizaines de milliers de syndicalistes, de militants associatifs et de personnes qui suivent les séances vont savoir à quoi s’en tenir avec précision. La majorité alternative de gauche va mûrir dans les consciences qui la feront naître à cette occasion. N’oublions pas que notre tâche est d’homogénéiser ces prises de consciences positivement. Nombre de cadres intermédiaires de la gauche n’ont pas encore compris ou admis la nature du budget et de la politique qui est appliquée. C’est à travers le débat budgétaire qu’ils vont comprendre et recevoir le choc. Dans la période il me semble que notre travail est d’expliquer en profondeur et de soutenir de toutes nos forces les luttes car elles sont aujourd’hui le creuset où s’amalgament les conditions de ce que nous appelons de façon un peu jargonnante « l’alternative à gauche ».
J’ai bien observé les freins que notre travail a dû surmonter. On peut dire que jusqu'à la dernière minute tout aura été tenté pour bloquer notre mouvement. Je ne suis pas dupe par exemple de l'extrême personnalisation à laquelle se sont livrés les commentateurs les plus malveillants pour réduire l'événement à une sorte de manifestations de soutien à ma personne. La page deux du « Monde » au sujet de mes prétendus « réseaux » n’a pas d’autre sens. La palme de la perversité comme d'habitude revient à « Libération », que son soutien au Parti socialiste, certes mal vécu par la rédaction, n'empêche pas de pilonner d'une façon constante le Front de Gauche. Evidemment tout commence par situer mon action dans le cadre mental qui obsède le rédacteur lui-même, celui de la névrose habituelle du petit bourgeois par peur du déclassement. J’agis « pour exister », cela va de soi et pas parce que j’ai des raisons rationnelles de le faire. Mais il y a mieux cette fois-ci. C'est ainsi que Lilian Alemagna prétend avoir rencontré des députés socialistes qui se seraient apprêtés à voter non à l'assemblée mais qui ne le feront pas pour ne pas être assimilés à moi ! Tordu mais si typique de « Libé » à notre sujet ! Rigolade ! Évidemment comme toujours dans ce genre de cas ce sont des « anonymes » qui s'expriment. Anonyme est le nom des ragots et des inventions de cette sorte de journalisme. Car pourquoi quelqu'un qui aurait une telle position politique refuserait-il qu'on le nomme ? Quel serait le risque ? Ne jouirait-il pas plutôt à la fois des compliments de Jean-Marc Ayrault et de la compréhension des partisans du « non » un peu mous du genou ? On peut donc parler ici d’une pure invention. J’invite d’ailleurs mes lecteurs à tenir en complète méfiance les journalistes qui ont recours à ces citations de soit-disant « anonymes » qui sont si souvent cités à charge contre nous. Le mal voulu est double : d’une part faire circuler de pures affabulations, d’autre part laisser entendre qu’il y aurait un risque à nous critiquer. Lequel ?
Puis l'ébranlement se fit. La place ne se vidait plus aussi vite qu'elle se remplissait. Ce fut pour moi un tel soulagement de constater que ce serait un immense succès. Pourtant France Info commença par débiter en boucle le chiffre déprimant de 15 000 personnes. Aussitôt jaillirent de leur terrier les haineux professionnels qui, sans être présents sur place, avaient cependant un avis réjoui. Ainsi ce pauvre diable de Jean-Michel Aphatie qui twitta la jubilation aux lèvres : « 15 000 personnes, jours d'échec pour le front de gauche ». Les répliques qui se diffusèrent aussitôt débordaient de l'humour des vainqueurs que nous étions déjà. Bien sûr, sur cette base, le lendemain, je ne pouvais donc pas accepter l'invitation qui m'était faite d'aller au « Grand Journal ». Je m’y serais pourtant rendu volontiers pour commenter cette journée et parler de la situation à Florange comme on me le proposait. Mais j’étais certain que Jean-Michel Aphatie se serait livré à une nouvelle provocation de ce genre. Tant pis. L'ambiance médiatique me suggère cependant une observation. La presse écrite parisienne n'a pas pu se détacher de son rapport polémique traditionnel avec moi. C’est le revers d’une promiscuité subie et sans fin depuis deux ou trois ans et d’un manque de professionnalisme de tous ceux qui créent des relations passionnelles avec moi. Cet effet personnel s’ajoute à l’engagement politique des personnes concernées ou de celle de leur journal. Mais ce n’est pas la seule réalité médiatique de cette circonstance.
Car la presse régionale quotidienne s'est située sur un tout autre terrain, plus factuel. Plutôt dans le registre de la presse internationale. Tous les éditorialistes ont enregistré ce fait qu’il s'agissait d'un événement politique d'un genre nouveau dans de telles circonstances. Tous ont relevé que la résurgence de l'opposition entre le oui et le non à propos du traité européen isolait la nouvelle équipe gouvernementale et les principaux dirigeants socialistes. Cela ne signifie pas que les commentaires aient été d’une quelconque façon en notre faveur ou qu’ils m’aient été personnellement favorables. Au contraire. Mais ce ne fut pas au détriment des faits. Ni de la capacité par leurs lecteurs d’en prendre connaissance.
Cette semaine la propagande contre Hugo Chavez va connaître un pic délirant. Toute la presse écrite et audiovisuelle va consacrer au moins un « reportage », article, éditorial, contre le président sortant du Vénézuela. Mes lecteurs savent ce qu'une telle campagne peut signifier. Il leur suffit de se référer à la façon avec laquelle ils sont eux-mêmes traités lorsque nous préparons une manifestation comme celle du 30 septembre dernier. Les manipulations, parti pris, persiflages, calomnies, insinuations, mensonges délibérés à la Aphatie, tout cela est amplifié par le sentiment d'impunité totale que la distance et l’impossibilité de vérifier si peu que ce soit les « informations » ainsi assénées. Le ton de la certitude et de la bonne conscience que vous leur connaissez va battre des records. J'ai déjà eu l'occasion de développer dans cette note les raisons pour lesquelles je voulais relever le défi et permettre, du fait même de la violence du choc qui est ainsi asséné, de promouvoir un véritable progrès des consciences qui se saisiront du problème. Mais encore une fois je veux rappeler l'essentiel. Nous ne sommes pas dans un colloque sur les formes désirables du changement de société. Nous sommes engagés dans une lutte physique entre ceux qui lorgnent sur le plus gros puits de pétrole du monde, leur griots politiques et médiatiques, et ceux qui veulent les empêcher de s'en emparer. Comme vous le comprenez parfaitement le but de cette campagne n'est pas de convaincre les électeurs français de ne pas voter pour Chavez ! Il s'agit de préparer les esprits à accepter un nouveau coup d'état sur place, contre le résultat des urnes. Les thèmes principaux de la campagne développée depuis plusieurs jours dans la presse de la boucle sous l'influence des agences nord-américaines montrent clairement la façon dont les choses s'organisent. Les « articles » et « sujets » prétextent un resserrement dans les enquêtes d'opinion entre le candidat de la droite des socialistes et de l'extrême-droite d'un côté, et Hugo Chavez. Des incidents sont montés en épingle pour faire croire à une volonté de violence organisée du côté de l'état-major de campagne de Chavez. C'est en Espagne que la presse aura été le plus loin dans ce domaine en annonçant que « Chavez est prêt à un coup d'état militaire contre les résultats des élections ». Cette méthode vise à faire porter par avance sur l'adversaire le poids des turpitudes qui se préparent du côté de la droite. En réalité tout montre dans la campagne que Chavez va l'emporter. Des dizaines d'observateurs internationaux sont déjà sur place. Ils viennent de tous les associations, instituts, organisations internationales de contrôle habituées à la surveillance du bon déroulement des élections. Pour ma part j’ai confiance dans leur travail. Bien sûr, certaines délégations sont d’un total parti pris. On se souvient peut-être de cette anecdote. Il s’agissait d’élection en Haïti. La délégation européenne dirigée par une écologiste commença par déclarer que les résultats étaient entachés de trop d'irrégularités pour être acceptés. L'ambassade des États-Unis disait la même chose. Mais quelques heures plus tard le département d'État nord-américain changea d'avis et reconnu le résultat. La prétendue « écologiste observatrice indépendante » s'inclina et changea elle aussi d’avis. En ce qui concerne le Vénézuela ou ne peut oublier comment les autorités américaines et même françaises prirent « acte » du coup d'état contre Chavez, sans autre émotion. Pas de naïveté donc !
Dans les circonstances actuelles toutes les informations convergent pour nous donner des raisons de nous considérer en état d'alerte politique. Dimanche sept au soir il y a une grande probabilité pour que la meute des réactionnaires mette en cause les résultats, comme elle a déjà menacé de le faire avant même que le vote ait commencé. Elle a agi de cette façon à chacune des précédentes élections. Sa détermination n'a pas changé au fil des échecs qu'elle a subis. Rappelons-nous l'année où pour discréditer les élections législatives, la droite les boycotta. Après quoi bien sûr elle dénonça le parlement « monocolore » de Chavez. Leur candidat, Capriles Radonsky, a beau être présenté sous le dehors rassurant d'un homme de centre-gauche, personne ne peut oublier comment il s’impliqua personnellement dans le putsch contre Chavez. Ce « démocrate » si sympathique, avec sa mine de playboy tel que le présente une certaine presse très influencée en France, dirigea le commando qui envahit l'ambassade de Cuba à Caracas lors du putsch ! Ce passé reste son programme : la violence, la haine du peuple quand il prend le pouvoir, les absurdes préjugés de la fantasmagorie anti communiste.
La commission internationale « Amérique Latine » du Parti de Gauche a produit un « kit militant » pour mieux comprendre les enjeux de l’élection présidentielle au Vénézuela. L’idée de départ est que sous le feu de la propagande médiatique à sens unique contre le président du Vénézuela, nous nous posons des questions et nous aimerions pouvoir répliquer. Le travail des camarades a évidemment un sens politique : il ne s’agit pas de faire un commentaire de journaliste, d’historien ou d’observateur extérieur qui aurait un regard « neutre » sur la question. Ils s’inscrivent donc dans la logique que nous portons sur le sujet : la révolution citoyenne est un train en marche en Amérique Latine. Il ne s’agit pas de rester sur le quai en se demandant s’il roule bien, s’il a suffisamment de vitesse ou pas. Il s’agit de savoir comment nous nous y accrochons et comment notre travail ici contribue à faire avancer la victoire commune de la gauche internationale. Les auteurs de ce travail se sont tous reconnus dans une remarque de l’ex-président brésilien Ignacio Lula da Silva : « Chavez, compte sur moi […] compte sur la solidarité et sur l’appui de chaque militant de gauche, de chaque démocrate et de chaque latino-américain. Ta victoire sera notre victoire. Un fort abrazo, un abrazo fraternel et merci, compagnon, pour tout ce que tu as fait pour l’Amérique Latine. » Le kit militant a été coordonné par le responsable de la Commission Amérique Latine, Eduardo Meneses. Il est basé sur le travail collectif de plusieurs camarades de la commission et du parti : Romain Migus, l’auteur du best-seller de décryptage sur le programme de la contre révolution vénézuélienne, Guillaume Beaulande, Ramzi Kebaili, Céline Meneses et Laurent Maffeïs. Pour répondre aux différents besoins d’approfondissement ou de simple argumentaire pour satisfaire les personnes qui se posent des questions autour de nous, ce « kit » a été conçu en différents chapitres thématiques. Ils permettent au lecteur de se déplacer de l’un à l’autre indistinctement, sans que cela nuise à la cohérence du texte et des arguments. Espérons que ce travail pourra inspirer des formations, ateliers de lecture, débats autour de documentaires ou toute autre initiative d’éducation populaire autour du Vénézuela et des avancées de la révolution bolivarienne.
Je fais l'objet d'une vigilance particulière lors de mes passages médias. Tant mieux. Europe 1 et France Info se sont donc intéressés de très près à moi après mon passage à France Inter lundi matin. Europe 1 n'y va pas doucement. Le site internet titre : « Le gros mensonge de Mélenchon sur l'espérance de vie des européens ». Vous avez bien lu ? J’ai menti. Je ne me suis pas « trompé », ce qui pourrait arriver après tout quand quatre journalistes parlent en même temps pour vous « poser leurs questions » comme ce matin-là ! Non, ces messieurs les experts le sont non seulement en chiffre mais aussi en cœur humain. Donc j’ai menti. Mais ce n’est pas tout ! Je ne suis pas seulement un menteur mais même un « gros menteur » ! Mais qui est le menteur dans la circonstance ? Jugez vous-même. Voici ce que j'avais affirmé à France Inter : « Je vous signale, monsieur Cohen, pour le cas où cette information ne serait pas venue à l'oreille de vos auditeurs que dans huit pays d’Europe, dans huit pays d'Europe, l’espérance de vie a reculé. Et où en particulier ? En Allemagne, ce qui nous est présenté comme un modèle. Peut-être qu’il serait temps de se rendre compte qu’il y a quelque chose qui ne tourne pas rond. » Je voulais naturellement parler de l'espérance de vie en bonne santé. D'ailleurs, ces médias y ont également fait référence. Que constate-t-on ? Les chiffres d'Eurostat montrent un recul dans 9 pays en 2010 par rapport à 2009 pour les hommes. Et dans 10 pays pour des femmes ! Je le confesse, je me suis trompé. J'ai sous-estimé la régression pour ce qui concerne les femmes ! Quant à l'Allemagne, elle a reculé de plus de 6 ans entre 2000 et 2008 ! Et que pour ce qui est des plus pauvres, l'espérance de vie tout court, et pas seulement « l'espérance de vie en bonne santé », a bel et bien reculé de 2 ans depuis le début des années 2000. J'en ai déjà parlé sur ce blog. Cette question de l'espérance de vie et de la qualité de vie est un marqueur central du progrès humain. Je profite de cet instant pour vous parler du séminaire "Inégalités de santé, espérance et qualité de vie" que tiendra le PG sur ce sujet sous la houlette de François Delapierre. La première soirée de réflexion aura lieu jeudi 4 octobre à 20h à l'Usine, aux Lilas, à côté de Paris. Elle sera animée par Frédéric Pierru, chargé de recherche au CNRS, sociologue spécialiste des questions de santé publique.
Je reviens à mon sujet. Donc, dans les médias, la mode est à la rubrique "désintox". Déjà, pendant la campagne présidentielle, la chaîne « I>télé » et le site internet « Ovni » vérifiaient les déclarations des principaux candidats. Ça s'appelait le "véritomètre". Le site internet existe encore. Et au terme de la campagne, le verdict est sans appel. Le candidat qui s'est le moins trompé dans les chiffres c’est … moi ! Je suis le seul candidat à dépasser les 60% d'exactitude quand Le Pen, Bayrou et Sarkozy n'atteignent même pas les 50% et que Hollande et Joly tournent autour de 55%.
Pour mettre sa rubrique "désintox" en images, le journal Libération s'est associé à la chaîne de télévision Arte. Manifestement, Libération et Arte sont moins vigilants avec le gouvernement qu'avec d'autres, dont moi. Ainsi, sur les dix dernières vidéos réalisées, une seule concerne le gouvernement. Le gouvernement ne se trompe pas et ne ment pas, voilà la « désintox » subliminale de ces journalistes indépendants, éthiques et d’investigation. Mais il y en a eu une contre moi sur une histoire de détachement de travailleurs étrangers au sein de l'Union européenne. Evidemment c’est une sottise et un coupage de cheveux en quatre. Sur le fond j’ai raison. Mais je m'étonne qu'à part Mediapart, aucun média n'ait relevé les mensonges de Jean-Marc Ayrault dans le débat sur le traité européen. Pourtant, il y avait de quoi faire. Pour notre part, nous en avons identifié au moins cinq. Ils sont présentés dans la rubrique "l'argument du petit courrier" de ce blog. Parmi ces mensonges de Jean-Marc Ayrault, il y en a un sur la règle d'or. Le 2 septembre, le premier ministre affirmait sur France Inter qu'« Il n'y a pas d'inscription dans le marbre, de cette obligation d'équilibre budgétaire ». J'ai déjà montré que c'était faux puisque c'est l'objet de l'article 3 du traité. D'ailleurs Libération a relevé ce mensonge des socialistes. Mais le journal a préféré accuser… Jean-Pierre Bel, le président du Sénat, plutôt que le premier ministre. Un autre mensonge des socialistes et de Jean-Marc Ayrault n'a pas été détecté. Je veux bien sûr parler de la renégociation du traité lui-même. Jean-Marc Ayrault avait affirmé plusieurs fois que « les lignes ont bougé ». Il a fallu plus d'un mois pour que la rédaction de Mediapart l'oblige à reconnaître qu'il n'en est rien et que « d'un point de vue juridique, c'est vrai, c'est le même texte » que celui signé par Nicolas Sarkozy. C'était le 23 septembre. On attend toujours le papier dans Libé et la vidéo avec Arte ! Mais la mentalité de bulletin paroissial a ses raisons que la raison connaît trop bien.
Après mon passage sur France Inter lundi, je note aussi que, si les journalistes de la brigade de la pensée nommée « désintox » font la chasse à mes supposées erreurs, leur corporatisme leur interdit de s’intéresser à celles de leur confrères dans la même émission. Mon échange avec Patrick Cohen sur la question de la dette en est révélateur. Sans que cela fasse réagir aucun de ces experts en mensonges, monsieur Cohen a en effet prétendu que « les économistes ne disent pas que la BCE pourrait prêter sans limite et sans frein aux Etats qui en auraient besoin ». Il s'agissait de disqualifier la référence que je venais de faire aux nombreuses expressions d'économistes contre l'austérité. Et bien Patrick Cohen se trompe. Un très grand nombre d'économistes, dont les plus éminents, disent bien que les Etats devraient se financer directement auprès de la BCE. Et ils critiquent les "freins et limites" actuellement mis à l'endettement public par le traité budgétaire européen. J'en veux pour nouvelle preuve l'appel d'économistes contre ce traité que le Monde a publié mercredi 3 octobre. Il ne s'agit pas de quelques économistes dans un coin mais de 120 enseignants-chercheurs et experts, issus d'une trentaine d'universités et centre de recherche. Et ils écrivent justement que « cette crise est aggravée par l’interdiction qui est faite à la BCE de prêter directement aux États pour des dépenses d’avenir, au contraire des autres banques centrales dans le monde comme la Fédéral réserve américaine ». Ils dénoncent « le refus d’intervention directe de la BCE pour les dépenses nouvelles". Et ils regrettent qu'"elle se contente d’un rachat restrictif des titres de dette sur le marché secondaire ».
Ce n’est pas tout. N'en déplaise à Patrick Cohen, je persiste et signe mon raisonnement concernant l'absurdité comptable de la mesure actuelle de la dette. A l'antenne lundi, ils s'y sont mis à trois pour me contredire, Cohen, Guetta et l'unique auditeur qu'ils ont fait intervenir comme par hasard sous le même angle qu'eux. J'expliquais qu'il est absurde de comparer le total de la dette qui est due sur plus de 7 ans et le flux annuel de richesse créée par le pays. Et j'indiquais que la seule comparaison valable est celle du coût annuel de la dette (47 milliards d'intérêt) avec la richesse annuelle créée. C’est donc 2,5 % de celle-ci dont il est question. Un salarié au smic aurait alors 25 euros de charge de dette par mois ! Un drame stratosphérique on le voit ! Mes contradicteurs ont cru pouvoir faire les malins en me répliquant que le coût annuel de la dette intégrait aussi le remboursement d'une partie du capital emprunté. Or c'est un argument purement rhétorique car ces remboursements annuels ne sont pas imputés sur le budget mais refinancés par de nouveaux emprunts. Sur les 180 milliards d’euros empruntés en 2012 par la France 81 milliards servent à financer le déficit et les 99 autres milliards servent à renouveler les emprunts arrivés à terme. A l'appui de mon raisonnement, j'ajoute que si l'on veut se livrer à des comparaisons sur le stock de dette, le bon sens voudrait qu’on le compare aussi au patrimoine économique total du pays. Il s'élève selon l'INSEE à 12 000 milliards d'euros. Avec cette comparaison d'un stock à un autre stock, la dette représente 16 % du total du capital du pays. Même en me levant à six heures du matin, la tête est meilleure que ne le croient ces messieurs, même en s’y mettant à quatre contre un !