François Hollande sera aux Assises de l’économie de la mer, à La Rochelle. Moi aussi. Le même jour. Sans surprise, il fera de belles phrases sur la mer et son économie. Il vantera la « croissance bleue ». Il se croira original et bien inspiré. En fait, comme il n’y est jamais venu, il ne connaît pas les sujets du moment. Ce sera donc la première fois pour lui en cinq ans. Pour moi ce sera la troisième fois consécutive ! Il était temps qu’il passe car c’est la dernière fois qu’il peut y aller en tant de président. Oui mais Nicolas Sarkozy n’y est jamais venu pendant son mandat ! Cela ne fait pas de François Hollande un président conscient de l’enjeu maritime. Il suffit de regarder son « bilan mer » en général, comme je l’ai évoqué à mon retour de Boulogne-sur-Mer sur ce blog. C’est encore plus vrai en matière d’énergies marines renouvelables en particulier. Dans les faits, son quinquennat est un naufrage. Cinq ans de perdus et des dégâts qui seront durs à rattraper.
Pas besoin d’aller chercher loin. Le gouvernement vient de publier par décret un texte essentiel pour la politique énergétique du pays. Stupeur : les énergies marines sont les grandes oubliées. Ce texte s’appelle la « programmation pluriannuelle de l’énergie » (PPE). L’obligation de publier ce document gouvernemental a été créée par la loi de transition énergétique. Il définit les orientations et les actions prévues en matière d’énergie pour les années à venir. Cette première édition a déjà plusieurs mois de retard. Rendez-vous compte : la première échéance fixée par ce plan concerne l’année 2018. C’est l’année où l’édition suivante de ce document doit être mise au point. Il était donc temps de dire quelque chose ! Car nous sommes presque en 2017. C’est presque risible : une programmation pluriannuelle qui s’accomplit en un an ! Ça c’est du Hollande !
L’autre échéance est celle de 2023. Je souligne au passage l’existence d’un document de « programmation pluriannuelle » jusqu’en 2023. N’est-ce pas là une forme de « planification », mot que les candidats à la primaire EELV me reprochent tant ? En fait, la principale différence entre cette « programmation » à la sauce Hollande et la « planification écologique » que je propose, c’est l’ambition des objectifs et les moyens d’actions mobilisés pour les atteindre. La « programmation pluriannuelle » fixe des objectifs timides et flous. Nous fixons des objectifs ambitieux et précis : sortir des énergies carbonées et du nucléaire pour une France 100% renouvelable en 2050.
Cette programmation pluriannuelle énergétique de François Hollande concernant les énergies marines renouvelables est plus que désolante. C’est si pitoyable que pour finir c’est un pur scandale. Je résume à grands traits. Le gouvernement prévoit une capacité de production par l’éolien en mer en 2023 comprise entre … 500 et 6 000 mégawatts ! Ce n’est plus une fourchette, c’est un râteau. Et ensuite ? Quels moyens concrets ? Le gouvernement prévoit seulement le lancement d’un appel d’offre pour l’éolien off-shore d’ici 2019. Or, l’appel d’offre en question, on le connaît. C’est celui qui a enterré le projet de Boulogne-sur-Mer, qui était fin prêt, au profit de Dunkerque pourtant très nettement moins avancé. Donc : un seul projet. Les élus de Charente-Maritime espèrent que la venue de Hollande aux assises de La Rochelle sera l’occasion d’annoncer un deuxième projet, au large de l’île d’Oléron. Mais rien n’est sûr. Donc au maximum, il y aura deux projets.
Et plus rien ensuite jusqu’en 2019. Or, même en comptant ce deuxième projet encore virtuel, le total de la puissance installée ne dépassera pas 3 500 MW. La fourchette annoncée est donc seulement un affichage. Il fallait qu’on puisse lire le chiffre de 6000 MW d’éolien off-shore. Pourquoi ? Parce que c’était le chiffre fixé par le Grenelle de l’environnement en 2009. Le résultat réel est tout autre. Si tout va bien, après les mandats de Nicolas Sarkozy puis François Hollande, en 2017 nous n’atteindrons péniblement, et avec trois ans de retard, que la moitié de l’objectif fixé en 2009 !
Le journal Le Marin rapporte l’amertume des professionnels du secteur. Olivier Perrot, président de France énergie éolienne est très critique sur le volet énergies marines. Pour lui, la programmation pluriannuelle de l’énergie « n’apporte pas la visibilité suffisante à la filière pour permettre un développement satisfaisant des investissements et des emplois ». Vincent Balès, directeur de l’entreprise d’éolien en mer WPD offshore France dénonce aussi la maigreur des projets annoncés : « comment, dans ces conditions, diminuer les coûts de l’éolien offshore et baisser les tarifs ? ».
La cause de nos déboires est uniquement liée au manque de volonté politique ! Les techniques sont au point. Certains projets ont démontré combien il était possible d’associer les pêcheurs pour que chacun y trouve son compte. C’est ce même manque d’ambition, doublé d’une absence de conscience de l’intérêt national, qui a fait que François Hollande a tout bonnement sabordé la filière industrielle de l’éolien off-shore. En 2014, il a accepté la vente de la branche énergies marines d’Alstom à l’américain General Electric. Et ces dernières semaines, il a donné son feu vert à la vente d’Adwen, la filiale d’Areva dans l’éolien offshore, à l’allemand Siemens et l’espagnol Gamesa. Deux fleurons technologiques français dans une filière d’avenir ont donc été abandonnés. Voilà ce que valent les phrases de ce gouvernement sur la « croissance verte » ou « bleue ».
L’éolien n’est d’ailleurs pas la seule victime de l’incurie du gouvernement. L’hydrolien qui utilise les mouvements des courants de la mer, et l’éolien off-shore flottant sont aussi méprisés. La programmation pluriannuelle de l’énergie ne prévoit aucun appel d’offre pour ces deux énergies d’ici 2021. Or un projet était censé être lancé en 2020 pour l’éolien flottant. Qu’est-il devenu ? Coulé. Vivement que nous soyons le gouvernement !