Interview de Raquel Garrido dans le JDD
« C’est l’une des plus proches de Jean-Luc Mélenchon. Depuis des années, elle est de tous ses combats jusqu’à devenir porte-parole de sa campagne présidentielle. Aujourd’hui, Raquel Garrido a décidé de tourner la page de la politique. Un choix, dit-elle, qu’elle ne fait ni en raison des récentes polémiques ni sur demande de l’ancien candidat à la présidentielle. »
Vous êtes une des voix de La France insoumise. Depuis la rentrée, vous êtes aussi chroniqueuse dans l’émission de Thierry Ardisson, Les Terriens du dimanche. Est-ce compatible ?
Je le croyais, mais le CSA a comptabilisé mes passages à l’antenne en temps de parole France insoumise, ce qui a créé un déséquilibre sur la chaîne. Le CSA m’a placée devant un dilemme. Soit renoncer à mon engagement politique soit être décomptée France Insoumise.
Avez-vous décidé d’arrêter la politique ?
Oui. J’ai réfléchi et j’ai fait mon choix. Compte tenu de l’essor du mouvement, je considère que je n’y suis pas indispensable. À la télé, il y a si peu d’Insoumis, tandis qu’à La France Insoumise, des « Raquel », il y en a plein ! Je tourne donc la page sans états d’âme.
Jean-Luc Mélenchon vous a-t-il demandé de faire un choix entre politique et télé ?
Jamais. Jean-Luc Mélenchon apprécie mes passages dans l’émission et il est content que je m’épanouisse. Je l’ai informé de ma décision. Il m’a dit qu’il comprenait.
Les récentes polémiques vous concernant vous ont-elles poussée vers ce choix ?
Je ne suis pas du genre à céder à la pression et aux injonctions, surtout quand elles sont malveillantes. Les spéculations vont bon train sur mon compte, méfiez-vous ! Je répète : pour maintenir ma chronique hebdomadaire il fallait l’ôter du décompte France insoumise. Pour cela, le CSA a exigé un retrait total de mes activités politiques.
Concrètement, vous ne serez pas présente le 25 novembre pour la convention de La France insoumise ou lors d’éventuelles marches de Jean-Luc Mélenchon ?
Effectivement. Ce retrait implique discrétion et retenue.
Vous ne serez donc pas candidate aux européennes en 2019 ?
C’est la conséquence logique.
Allez-vous demander votre carte de presse ?
Surtout pas ! Je suis avocate. Mon ordre a confirmé que j’exerçais dans le parfait respect de notre déontologie. Je suis indépendante de mon client, la maison de production TéléParis. Les modalités d’embauche des journalistes ou du monde du spectacle sont interdites aux avocats.
Faites-vous ce choix aussi pour des raisons financières ?
Je n’ai jamais perçu un centime en rétribution de mon engagement politique. Je parle quatre langues, j’ai une expertise en droit international économique. Si j’étais vénale, j’aurais fait avocate d’affaires, pas mélenchoniste !
Est-ce compatible de critiquer l’oligarchie tout en travaillant sur C8, la chaîne de Vincent Bolloré ?
Je dénonce la concentration oligarchique du pouvoir. Je n’ai pas mis d’eau dans mon vin. Avec Ardisson, je dis librement ce que je pense. Je n’ai aucun intérêt à m’autocensurer. Le téléspectateur veut une voix de rupture dans le cadre d’une émission où toutes les opinions sont représentées.
Vous avez répondu aux accusations du « Canard enchaîné » via le compte Snapchat de Jeremstar. Comprenez-vous que ce mélange des genres choque ?
J’adore le mélange! Ériger des murs et mettre des gens dans des cases est un mal que je déplore. Cette vidéo est un pied de nez à un petit monde journalistique agressif qui a ouvert une guerre contre moi à partir du 31 août, jour où j’ai posé une question sur les ordonnances Macron au Premier ministre.
Ne pensez-vous pas que votre place était du côté du média militant que lancent Sophia Chikirou et Gérard Miller plutôt qu’avec Thierry Ardisson ?
Le Média citoyen est un projet courageux et salutaire que je soutiens. Quant à moi, ne m’assignez pas ainsi à résidence. Ma vie entière a été parsemée de moments de grand chamboulement. Ma place est là où cette vie me mènera. Comme a dit le poète espagnol Antonio Machado : « Le chemin se fait en cheminant. »