Autrefois, on la défendait. Maintenant elle nous agresse. Il est vrai qu’on n’a rien à lui offrir pour l’aider à réfléchir. Entre temps, sa conscience et sa plume ont trouvé acquéreur. Madame Caroline Fourest se bouscule au portillon pour nous lapider mieux et plus souvent que d’autres professionnels de l’exercice. Cet été elle prenait à partie « l’honneur perdu de la France Insoumise ». Rien de moins. Mais il est vrai que nous refusions d’aboyer avec la meute contre le Vénézuéla.
Cette fois-là, après maintes agitations haineuses, la voici devenue un passe-plat ordinaire de la caste. Parti pris systématique pour l’extrême droite des beaux quartiers de Caracas, laïcité à géométrie variable, elle exhibe toute la panoplie du bon petit soldat de la caste. Cette fois-ci, le papier s’intitule « le procureur Mélenchon ». On y trouve une lamentable défense inconditionnelle des valeureux animateurs de « L’Émission politique » et de leurs prestations pourries contre moi. Et un pot-pourri nauséabond de tous les mensonges et ragots de ceux qui recopient trop vite les éléments de langage des agences d’influence.
On y lit par exemple que Chavez a interdit la seule télé d’opposition. C’est là un mensonge repris en boucle depuis des années par les répétiteurs des officines spécialisées. Et ainsi de suite. Le tout oscille entre lèche botte et cire pompe pour les « collègues » susceptibles de lui donner des piges.
Si ce n’était que cela, je ne perdrai pas un instant à en parler, pas plus que je ne le fais de la longue cohorte des deuxièmes couteaux du « zèle-qui-prouve-une-bonne-mentalité ». J’en parle pour que mes lecteurs ne manquent pas de connaître un des personnages de cet acabit, avant de se laisser prendre à ces airs de victime éplorée qu’ils se donnent partout où on leur donne la parole. Car madame Fourest n’est pas seulement caricaturale ! Elle est représentative d’une école particulière de la famille des pédants à gage. C’est la variété « je vous fais la morale à tous » car je prends de la hauteur et « la preuve que j’ai raison c’est que je crache sur tout le monde sans distinction ».
Car pour se faire entendre, elle montre patte blanche à l’opinion dégagiste qui pense à 70% que les médias mentent. Elle se sent donc obligée de dénoncer « la médiocrité abyssale de certains journalistes politiques et l’indécence sadique de certains plateaux de télévision ». Pas très élégante cette dénonciation globalisante ! Et c’est même assez prétentieux de sa part. Mais elle pense fournir avec cette grosse ficelle ce qu’il faut du typique renvoi dos à dos pour pourvoir jeter son fiel avec un air de pure sincérité. Tout ça pour en venir à la proposition de conseil du recours déontologique face aux mensonges volontaires des journalistes. Cette proposition serait une preuve décisive de ma volonté de dictature et de contrôle des médias que « même le FN » n’oserait pas.
Oui, selon Caroline Fourest, le FN, dont elle reprend les arguments, ne serait pas aussi dangereux qu’on a pu le penser. La madame nous accuse donc « sous prétexte de soustraire les médias à l’influence du privé » de « dessiner une mise sous tutelle politique de l’information ». L’indice de cette grave accusation est notre volonté, affichée dans le programme « L’Avenir en commun » de travailler pour avoir des « médias au service du peuple ».
Au service du peuple plutôt qu’a ceux des 9 milliardaires qui contrôlent 90% des médias. C’est-à-dire plutôt qu’aux mains nourricières qui payent Caroline Fourest pour faire son dur métier d’accusatrice publique de la « médiocrité abyssale » et de « l’indécent sadisme » de « certains » de ses confrères ? Ne s’est-elle pas donné la peine encore de fustiger le silence des salles de rédaction contre nos projets ? Et n’a-t-elle pas démasqué les responsables de cette situation que seraient le nombre de nos partisans dans ces rédactions ? Ce nouveau maccarthysme n’a pas peur de la délation puisque c’est pour le bien public. C’est ce que pensent toutes les inquisitions.
Ici, Caroline Fourest tient la preuve de nos intentions criminelles puisque nous allons « jusqu’à proposer de créer un Conseil National des médias composé de professionnels et de parlementaires » ! Horreur ! Prenez la mesure de l’abomination mes chers lecteurs : « ensemble, professionnels et journalistes seraient donc chargé de veiller au pluralisme des opinions mais aussi – et c’est le plus ambigu, écrit madame Fourest – de surveiller la qualité de tous les médias ». Cette surveillance et cette vigilance sur la qualité, seule madame Fourest est habilitée a l’exercer, comme on l’a vu et non pas vous, pauvres manants ! Elle seule peut et doit dénoncer les journalistes à la « médiocrité abyssale » et ceux qui sympathisent avec la Fi, et s’arrange pour que personne dans les rédactions, c’est bien connu, ne dénonce cette organisation plus dangereuse que le FN. Vous avez bien compris ?
C’est pour bien découvrir cette outrance bouffie de suffisance que je ne voulais pas que vous manquiez ça. Certes, les deuxièmes couteaux du zèle sont obligés d’en rajouter pour se faire remarquer. Mais ici c’est davantage. C’est un cas d’école. La personne accuse de ce qu’elle est en train de faire elle-même. Et se faisant, elle confirme l’intérêt de la proposition d’avoir un recours contre le mensonge et la manipulation. Car Bien sûr notre proposition ne prévoit aucun « contrôle politique » ni aucune sanction autre que symbolique.
Madame Fourest ment. Elle le fait sciemment car elle est assez informée pour savoir quelle est la réalité. Et d’abord parce que notre proposition n’a rien à voir avec le Vénézuela. Ses confrères journalistes en attestent. Mais peut-être sont ils d’une « abyssale médiocrité ». En tous cas, Arrêt sur images écrit à ce sujet « À quand un Conseil de déontologie du journalisme ? C’est la proposition portée par Jean-Luc Mélenchon qui a lancé cette semaine une pétition en ce sens. L’idée n’est pas neuve, elle compte d’ailleurs des précédents à l’étranger. De la Belgique au Québec en passant par l’Allemagne, petit tour d’horizon de quelques conseils de presse étrangers… aux pouvoirs très relatifs (…) Si Mélenchon remet l’idée sur le devant de la scène, il n’en est cependant pas l’inventeur : fondée en 2006, l’Association de préfiguration d’un conseil de presse milite pour que soit créé en France un organe de contrôle déontologique des médias, à l’exemple de ce qui existe dans d’autres pays ».
En Belgique, le conseil existe depuis sept ans, au Quebec le conseil a déjà 45 ans de fonctionnement, et davantage en Allemagne. Madame Fourest le sait. Elle ment donc sciemment. Et ces situations ne sont pas des cas isolés. Des instances de déontologie du journalisme existent dans de nombreux pays. Ce sont des structures indépendantes du pouvoir politique. Elles sont composées de représentants des journalistes, de la société civile et parfois des entreprises de presse. Elles offrent un recours aux citoyens ou groupements de citoyens la possibilité de déposer des plaintes au nom de la déontologie. Les sanctions que peuvent imposer ces instances sont généralement symboliques et non disciplinaires. N’est-ce pas ce que nous demandons ?
Assimiler cette demande a une volonté de « contrôle politique » et m’imputer une volonté de répression du fait de cette proposition, signale le niveau du mensonge volontaire de madame Fourest. J’y insiste, voyez la liste des pays qui disposent de ce genre d’instance. Voyez l’ancienneté de leur création. Dans ces conditions quel est le sens de la dénonciation par Caroline Fourest de notre proposition et sa grave mise en cause personnelle ? Car au Conseil de déontologie des journalistes de Belgique, créé en 2009 et déjà cité, s’ajoutent le, Conseil de la presse suédoise, créé en 1916, le Conseil des médias de Finlande, créé en 1927, le Presserat en Allemagne, créé en 1956, le Conseil de la presse du Quebec / Tribunal d’honneur des médias, créé en 1973 et déjà cité, le Conseil de la presse du Chili, créé en 1991, l’Observatoire togolais des médias, créé en 1999, et le Conseil de la presse suisse installé en 1977.
Donc madame Fourest ment. Et si un jour le peuple excédé par les abus de pouvoirs médiatiques décidait de ne pas se contenter de sanctions symboliques mais exigeait des amendes pour mensonge ou des radiations de la carte de presse, je le regretterai car je n’en suis pas partisan. Mais on saurait que c’est à des fautes déontologiques avérées et répétées comme celle de madame Fourest que cela serait dû.