traite de elysee

Non, monsieur de Rugy, nous ne signerons pas !

Vendredi 29 décembre dernier, monsieur de Rugy adressait aux groupes parlementaires de l’Assemblée nationale deux textes à signer pour la date limite du 4 janvier. Il s’agit d’un accord entre le Bundestag et l’Assemblée nationale d’une part et d’une résolution commune en direction de nos gouvernements respectifs en France et en Allemagne. Cela en vue de l’anniversaire du traité de l’Elysée qui a ouvert la nouvelle période amicale des relations franco-allemandes. Compte tenu de l’importance de ces textes et du bref délai consenti, quand bien même étions-nous tous en pause, nous les avons évidemment immédiatement étudiés vendredi, samedi, dimanche 31, le lendemain et ainsi de suite, bien sûr ! Évidemment, ces textes ne sont pas amendables, ils ont été écrits sans nous et nous sommes invités à signer pour approbation ou à ne pas le faire.

Nous ne signerons pas.

Pas seulement en raison du procédé brutal et autoritaire coutumier de la présidence de Rugy qui avait pourtant promis une préparation coopérative de l’anniversaire du traité de l’Élysée. Mais parce que ces textes sont d’abord une faute à l’égard de la communauté des nations parties prenantes de l’Union européenne qu’ils méprisent en les ignorant. Le format bilatéral franco-allemand prolonge une situation totalement dépassée depuis l’époque de l’Europe des six. Il ne mentionne les autres nations que comme autant de potiches sur la cheminée de l’illusoire bon vieux « couple franco-allemand ». Ce « couple » est ressenti à juste titre comme un directoire aussi arrogant qu’archaïque. Pour entretenir la fiction de cette relation privilégiée, les auteurs en viennent à dédaigner les relations et affinités réelles de la France avec l’Europe du sud et de langue latine. En effet c’est avec elle surtout que « nous sommes le plus étroitement liés au plan politique et sociétal » comme le dit le texte qui réserve pourtant cette affinité à la seule relation franco-allemande. La France n’est pas dans son rôle quand elle écarte ses interlocuteurs historiques.

Nous ne signerons pas. Parce que le contenu de ces textes ne correspond pas aux urgences de notre temps en Europe. La paix ne vient que par la préparation commune de la guerre. L’harmonisation sociale évoquée ne comporte aucune clause de non régression des droits acquis. Les textes n’envisagent aucune amélioration concrète nouvelle, pas même l’élévation du SMIC allemand au niveau français. L’économie n’est envisagée que sous l’angle du droit des sociétés privées ou le culte des nouvelles technologies. La crise de l’écosystème n’est abordée que pour renvoyer aux documents insuffisants déjà signés et à la création d’un marché carbone. Ainsi le pays le plus émetteur de gaz CO2 d’Europe et celui qui est le plus nucléarisé n’ont rien à dire sur leurs responsabilités devant la mise en danger de mort de l’écosystème.

Au total, ces textes sont indigents soit par le niveau de généralité auquel sont limités leurs vœux soit par une obsession économique bornée aux seuls critères techniques rabâchés du libéralisme le plus éculé.

Nous ne les signerons pas aussi parce qu’ils contiennent de nombreuses dispositions contraires à la nature Républicaine spécifique de la France en tant qu’État unitaire. L’attribution aux « districts européens » de compétences élargies et même de droits « d’expérimentation législative » constitue un changement de cap institutionnel dont nous ne sous-estimons pas le potentiel destructeur. C’est une chose de prendre en considération les revendications indépendantistes lorsqu’elles existent et que le vote des peuples les affirme. C’en est une autre de propager le démembrement de la souveraineté collective du peuple en « districts » concurrents, et d’engager le processus de destruction de l’État Nation, seul cadre actuel où s’exerce cette souveraineté. Nous voulons une Europe des peuples. Nous refusons les expérimentations hasardeuses qui commencent par défaire la France.

Une fois de plus les rédacteurs de ces textes, avec leurs méthodes a-démocratiques inséparables des objectifs de leurs « résolutions », usent du passage en force pour faire endosser des positions dont le grand nombre ne voudrait jamais si on lui demandait son avis. Une fois de plus les inspirateurs de ces textes veulent faire comme si les progrès de l’Europe de l’argent, de l’armement et du relativisme écologique étaient le progrès de l’Europe elle-même. Et cela alors même que les peuples sont tenus à l’écart de la décision, que leur refus de la guerre est ignoré, leur objectif de bien-être oublié, leur priorité pour l’impératif écologique nié.

Une fois de plus deux visions du futur de nos sociétés s’opposent. Le projet de la droite allemande et du parti présidentiel en France n’est pas celui du peuple républicain écologiste et social dont nous portons la parole. Certes eux ont aujourd’hui le pouvoir de décider. Mais nous avons le devoir de résister et de proposer de faire autre chose, autrement

DERNIERS ARTICLES

Rechercher