Emanuel Macron entretient une passion vénézuélienne des plus cocasses. Son principal conseiller en communication fut un participant essentiel à la campagne présidentielle du chaviste Nicolas Maduro. Pourtant dès qu’il fut élu, Macron s’aligna très strictement sur la diplomatie des USA et sur les personnages violents qui l’animent. Ces jours-ci a eu lieu un épisode peu relevé par la presse et même par les milieux anti-chavistes les plus radicalisés. En effet, personne n’y a fait attention, mais le président Emmanuel Macron a reçu à l’Elysée Juan Guaido, le chef du putsch raté au Venezuela.
Quoi que l’on pense du Venezuela et de son gouvernement, une telle réception interroge. Est-il normal de dérouler le tapis rouge pour un homme qui a fait une tentative de putsch dans son pays ? Un homme qui prétend y vivre sous une dictature mais qui s’y trouve pourtant en liberté après une tentaive de soulèvement et une tentative de putch militaire ? Un homme qui rentre et sort du pays sans obstacle après tout cela ? Est-il acceptable qu’il soit recu en grande pompe alors qu’il n’est même plus président de l’Assemblée nationale de son pays après avoir été battu par un autre opposant de droite au gouvernement chaviste ? En effet, le 5 janvier 2020, un groupe de députés frondeurs de l’opposition a ravi le perchoir de l’Assemblée National à Juan Guaido. Macron sait que loin d’être un point d’appui de l’opposition a Maduro Juan Guaido est considéré comme le principal diviseur de cette famille politique ! Alors pourquoi le favorise-t-il ?
Est-il acceptable vis-à-vis du peuple vénézuélien que la France soutienne un homme qui demande le durcissement de l’embargo économique des USA contre son pays ? Peut-on ignorer ce que cet embargo coûte de souffrances et de privations avec les pénuries de médicaments et d’objets de première nécessité (comme le papier hygiénique) ? Est-il acceptable de ne tenir aucun compte des révélations à propos de sa corruption faites par la presse de droite et par certains de ses ex-partisans comme l’ont révélé le très droitier journal PanAm Post (le 18 juin 2019). Mais aussi par le propre représentant de Guaido en Colombie, Humberto Calderon Berti (le 30 novembre 2019). Et plus récemment l’agence de presse Reuters (le 22 janvier 2020). Est-il acceptable que le président français fasse comme s’il ignorait les liens prouvés qui unissent Juan Guaido et ses proches au cartel narco-paramilitaire colombien Los Rastrojos ?
Et pour finir sur ces questions, en quoi une telle réception sert les intérêts de notre pays, de son audience dans les Caraïbes et en Amérique du sud ? Monsieur Guaido nous a déjà coûté cher. Suite à son auto-proclamation comme président du Venezuela les USA ont décrété des sanctions économiques contre le pays pour favoriser son putch. Les entreprises françaises ont donc été sanctionnées et ne peuvent plus commercer avec le Venezuela. Ce traitement ne s’applique pas cependant aux entreprises pétrolières des USA eux-mêmes qui comme d’habitude sont exemptées des sanctions que leur gouvernement inflige aux autres.
Quel est donc l’intérêt d’une telle réception ? Macron avait d’abord demandé de nouvelles élections législatives au Venezuela avant de s’aligner sur les Etats-Unis qui demandaient la démission de Maduro et manipulèrent en vain cinq coups d’Etat militaire au Venezuela pendant l’année 2019. On se souvient peut-être de ce sketch pitoyable ou Juan Guaido prévoyait une entrée en force dans son pays depuis la Colombie après un concert de soutien à la frontière. Un soulèvement avait été annoncé ainsi que l’entrée en dissidence de l’armée. Le concert fit « flop », l’entrée resta groupusculaire et l’armée ne bougea pas. « Rien ne s’est passé comme prévu » avait écrit le journal « Le Monde » pourtant favorable à ce coup d’Etat. Quant à la poignée de militaires qui firent dissidence de façon isolée, ce sont les Etats Unis eux-mêmes qui les ont enfermés dans un camp sur leur propre territoire. Les traitres sont toujours mal vus, même de ceux qui les utilisent et savent a quoi s’en tenir à leur sujet.
Macron a-t-il l’intention de faire avancer son point de vue à propos du Venezuela ? En quoi monsieur Guaido le permet-il ? Il refuse en effet tout compromis et toutes nouvelles élections . L’accueil à l’Elysée n’a donc aucune fonction pratique par rapport à la situation au Venezuela. Il s’agit seulement d’un acte de communication, à la demande des USA, pour relancer un personnage en pleine décomposition politique. C’est donc plutôt un mauvais coup pour la France et la relation avec le peuple du Venezuela.