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27.01.2020

Régime autoritaire. Insurrection perlée.

Étrange semaine. La suite du mouvement contre la réforme des retraites s’est entrelardée d’épisodes cocasses, symptômes d’une présidence en pleine turbulence dans des épisodes délétères. Ainsi de la scène équivoque dans les rues de Jérusalem. Les commentateurs se sont préoccupés de la sincérité du jeu de Macron. Personne n’a songé à se demander ce qu’il fallait penser du comportement de la police israélienne recommençant le numéro d’intimidation déjà tenté contre un autre président français. Pour ma part, accent ou pas, j’approuve Macron de ne pas s’être laissé impressionner par les sicaires de Netanyahou. Mais, laïque en toutes circonstances, je désapprouve formellement qu’un président de la République française aille faire des prières au mur des lamentations avec une kippa sur la tête.

La semaine c’était aussi ce moment de capitulation politique devant le président des USA à propos de la taxe sur les Gafa. Une erreur que le gouvernement anglais n’a pas commise alors qu’il est plus que Trumpoïde. Et comment oublier l’épisode burlesque de la réception à l’Élysée du putschiste vénézuélien Juan Guaido qui ne représente pourtant même plus l’opposition antichaviste qui le rejette ? Le gouvernement espagnol ne s’y est pas abaissé. Et Macron tweete pourtant qu’il le reçoit en tant que président de l’Assemblée nationale de ce pays alors même que Guaido ne l’est plus, battu qu’il a été par un autre candidat antichaviste ! Tout ça, c’est le bruit de fond entre ridicule et ridicule. Mais il y a eu pire.

Dans la semaine où le régime décide de passer en force et de présenter sa loi sur les retraites, le Conseil d’État essore le texte, dénonce la méthode et invalide la plupart des arguments de la propagande gouvernementale et des éditorialistes macronistes. Au même moment parait une étude d’impact de la loi qui, à peine disponible, est aussitôt taillée en pièce par ceux qui l’ont lue et qui ont détecté un vice de forme qui condamne toutes les évaluations que cette étude comporte. Le rôle de l’âge pivot/ d’équilibre n’y est pas pris en compte ! Une paille ! Enfin, le ministre en charge du projet reconnait qu’il s’agit d’une loi « à trous ». Et il annonce que les évaluations sur les cas particuliers ne seront pas prêtes avant le vote de la loi. Pour finir, Macron et ses proches déclenchent eux-mêmes un débat sur le caractère dictatorial ou non de sa présidence. Les pauvres robots qui lisent les éléments de langage écrit par les gorilles de l’Élysée s’en prennent aussitôt à moi parce que j’ai l’audace de souhaiter publiquement que Macron soit battu en 2022. Sans se rendre compte du fait qu’ils confirment mon propos où j’annonçais leur manipulation. Et sans se rendre compte qu’ils justifient ainsi leur refus de perdre une élection ce qui est étrange pour de soi-disant démocrates.

Ces bavardages et bruitages n’ont pas infléchis un seul instant le cours de l’extension du soulèvement social en cours. Une manifestation géante et une retraite aux flambeaux dans tout le pays ont réduit à néant le refrain sur « l’essoufflement » du mouvement. Conjointement, le nombre des professions qui entrent dans la lutte et les formes de l’action se diversifient dans une ambiance festive qui marque les observateurs les plus distants. L’obstination de Macron n’en est que plus étrange. Comment peut-il croire qu’il va gagner ? En toute hypothèse rien de sa loi ne s’appliquera avant qu’on ait eu le temps de l’abroger a la prochaine élection générale, celle que lui et les siens vont perdre.

Autour de moi, deux thèses sont présentes. Pour les uns tout est calculé et voulu par le régime, ses principaux organisateurs et son chef. Le signal autoritaire et l’organisation du choc frontal avec la société serait un choix délibéré. Pour les autres, la tête unique du régime est définitivement hors sol. Et la débandade au sommet aurait commencé avec l’accumulation des erreurs aussi grossières que l’épisode Conseil d’État ou le ridicule du sketch à Jérusalem. Il y a de l’importance à évaluer ce moment pour comprendre l’état du rapport de force. À cette heure, il nous est favorable dans la durée. Combien de temps faudra-t-il pour que toutes les données observées fusionnent en un processus unique de prise de conscience politique ? Il est certain que le régime s’est coupé des classes moyennes dont les enseignants et les avocats sont les représentants les plus significatifs. Par le mouvement à la RATP et chez les traminots dans le pays, il a provoqué une agrégation entre la population des banlieues et les secteurs syndiqués, par et dans la lutte, comme il n’y en avait jamais eu dans le passé.

Le pire pour lui est que Macron soit tenu pour responsable des violences de rue alors même qu’il avait tout misé sur le fait qu’elles seraient imputées aux grévistes comme hier aux gilets jaunes. C’est une défaite majeure. L’entrée de Ségolène Royal dans la dénonciation de la « dérive autoritaire » du régime rompt l’isolement où nous étions jusque-là dans cette appréciation. Macron a aussi réussi à provoquer une convergence des luttes et des secteurs politiques dans la solidarité avec le mouvement que rien n’a pu rompre, même le dépôt maladroit par la gauche traditionnelle d’un texte commun sans précision de date de départ en retraite ni nombre d’année de cotisations.

Globalement, en adoptant des modes d’action nouveaux et festifs, le mouvement entre dans une phase où il peut se donner des moyens nouveaux pour une durée et une contagion politique solides. Il se construirait alors sur le modèle de ce qui s’observe dans les autres processus de révolution citoyenne dans le monde. En fait, les conditions sont en train de se réunir pour fédérer dans un même rejet tous ceux qui ont des raisons de ne pas vouloir permettre à Macron de réaliser le projet de société que son texte projette. Notre stratégie d’action doit le prendre en compte. Nous devons tacher d’entrainer dans l’action quelle qu’en soit la forme tous les secteurs concernés.

J’ai mis en application ce conseil en appelant le patronat des secteurs productifs de l’économie. Je l’ai fait a trois reprises et j’ai noté que cela n’a pas été relevé. Ni par les commentateurs ni par les répondeurs automatiques de LREM. Je vais donc devoir recommencer. Le fait est que la réforme des retraites est faite au service des secteurs financiers de la banque et des assurances. De plus, ils ne perdent pas un euro dans le choc actuel : les traites et les agios continuent de courir et les salariés empruntent pour faire face aux couts de la grève. Tous les autres cotisent pour eux en quelque sorte avec les marchandises qui ne se vendent pas, qui ne sont pas produites ou qui sont bloquées dans les ports. Ils ne disent rien sinon contre les grévistes. Donc cela nous prouve qu’ils ont de la réserve. Il faudra s’en souvenir. Ou qu’ils sont trop lâches pour dire son fait à Macron qui les enfoncent dans les difficultés. Cette âme de mouton nous intéresse aussi. En ce moment chacun va au bout de lui-même. Et montre ce qu’il est. On apprend donc pour la suite. Identifier les tigres de papier est utile.

En attendant, devant le coup de force législatif que le pouvoir entreprend, une nouvelle ligne de résistance doit être organisée. Celle-ci doit être construite dans l’assemblée. Dès lors le groupe parlementaire Insoumis a proposé de nouveau le dépôt d’une motion de censure. Mais cette fois ci la proposition est faite à tous les groupes d’opposition. Pourquoi ? C’est pour tenir compte de ce qui est mis en cause avec la méthode que Macron a utilisé. En effet c’est tout le système de la représentation parlementaire dont le travail est mis cul par-dessus tête. L’avis du Conseil d’État est clair à ce sujet compte tenu de l’insécurité constitutionnelle du texte de loi et des lacunes, qu’il affiche.

Mais c’est aussi le cas avec le rapport d’étude d’impact biaisée de mille pages qui a été déposée. On ne peut ignorer quelle violence cela porte. C’est une présentation insincère et manipulatoire du projet de loi. Mais aussi du fait des délais d’amendements intenables qui ont été fixés. L’Assemblée doit rappeler par la censure la prééminence des droits du Parlement dans l’ordre constitutionnel démocratique. Il ne s’agit donc pas de proposer une appréciation commune du texte de loi et de ce qu’il faudrait faire à sa place. Nous ne serions d’accord ni avec la droite ni avec le PS. Il s’agit d’organiser un sursaut commun de la démocratie parlementaire face aux abus de pouvoir de l’exécutif. L’Assemblée ne doit pas laisser passer sans dire mot une dérive autoritaire où son rôle est bafoué dans la production de la loi. Il faut ouvrir la séquence parlementaire par un acte clair de refus du coup de force qu’est toute cette entreprise. Et par là-même faire la démonstration de la place d’un Parlement dans une situation de crise sociale et nationale comme celle que nous vivons à cette occasion.

En toute hypothèse, la nouvelle séquence va nous voir tenir les deux barricades (le mot barricade devrait faire baver les chiens de garde) : la rue et l’Assemblée. Pour les Insoumis c’est un signal de combat ardent.

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