Outre les numéros verts qui ont transformé ce gouvernement en plateforme téléphonique, le macronisme réel est très fertile en création de comités en tous genre. Ils devraient se substituer aux institutions dès qu’un problème surgit. Après la convention citoyenne et le comité pour réécrire l’article 24 de la loi sécurité globale, voici le comité de liaison parlement-gouvernement pour parler du vaccin et le comité de concertation de la police et des journalistes pour mettre au point les restrictions de la liberté de la presse sur le terrain.
Inconvénient : toutes ces inventions n’ayant aucune place dans les institutions, elles conduisent de fait à une mise hors de contrôle de l’action de l’exécutif. Avantage : le pouvoir crée un doute public sur la valeur des institutions. Il crée donc là une culture de leur contournement. Elle nous sera très utile le moment venu pour faire comprendre la nécessité de changer la règle du jeu. Les démolisseurs de la Cinquième République nous rendent service en créant une demande pour la Sixième.
En attendant, pas question de se laisser enfermer dans les comités Théodule du régime. C’est le sens de la lettre adressé par le groupe parlementaire Insoumis au Premier ministre à l’occasion de son invitation à deux passionnantes réunions numériques d’un tout nouveau comité de liaison entre parlementaires et gouvernement.
« Monsieur le Premier Ministre,
Vous nous avez convié à une visioconférence de la première réunion du Comité de liaison parlementaire de l’Assemblée nationale concernant l’évolution de la gestion sanitaire ce lundi 7 décembre 2020.
Nous n’y participerons pas.
Qu’est-ce que ce comité de liaison parlementaire ? Une nouvelle fois vous contournez le Parlement. Vous affaiblissez la démocratie représentative. Il existe déjà dans notre Assemblée, une commission des affaires sociales. Elle pourrait tout à fait être saisie et se prononcer sur les enjeux sanitaires auxquels nous devons faire face. Tout député sans discrimination peut s’y rendre. C’est à cette commission d’en débattre sous les regards des citoyens et non pas à une réunion fermée dont les seuls éléments publics sont les fuites organisées dans la presse ou les déclarations à son issue. Surtout quand il s’agit de discuter de stratégie vaccinale, la transparence doit être plus que jamais de rigueur.
Nous ne participerons pas à ce comité de liaison car nous avons l’expérience des multiples réunions sous ce format. Nous vous avons fait de nombreuses propositions. Nous avons alerté sur la faim et l’explosion de la pauvreté dans le pays, demandant le RSA pour les jeunes, la gratuité des masques, une suspension des loyers, la création d’emplois jeune ou encore des aides pour aider les nombreuses victimes de la précarité énergétiques. Nous avons insisté sur la nécessité de tirer les leçons de cette pandémie : nationaliser Luxfer et Famar, créer un pôle public du médicament. Nous avons réalisé un plan de déconfinement, un plan d’alternatives au confinement, une résolution d’annulation de la dette. Toutes nos propositions ont été balayées. Pas une seule fois, vous n’avez voulu écouter ni même répondre.
Pire, vous utilisez ces réunions de « consultation » des forces politiques et groupes parlementaires pour nous impliquer dans vos décisions. Votre prédécesseur avait par le même procédé affirmé que ses décisions concernant les dates des élections municipales avaient été prises en accord avec tous les groupes politiques. Il n’en était rien, et vous le savez bien.
Monsieur le Premier Ministre, vous nous trouverez toujours présents à l’Assemblée Nationale pour nous acquitter de notre rôle de parlementaires. Mais nous refusons cette énième boîte noire que vous voulez créer.
Veuillez agreer nos salutations républicaines,
Le groupe parlementaire Insoumis »