Le moment LR aura-t-il lieu ?

Nous entrons dans le cycle du débat de la droite. Quatre débats à la télé pour choisir leur candidat. En fait, la droite traditionnelle, réfugiée dans le fortin LR joue son va-tout. Si un personnage se détache, le parti LR peut espérer perdurer. Sinon il subira le sort du PS en voie de dissolution électorale entre Macron, EELV et LFI. Pour LR ce sera la dissolution électorale dans les eaux du Zemourisme ou du macronisme.

Il y a une logique de situation. LR et le PS ont dominé la scène politique pendant cinquante ans. Les deux chacun leur tour ont installé le néolibéralisme en France. La bourgeoisie traditionnelle qui portait la droite y a laissé sa peau, le monde salarié sous statut stable la sienne. Ces deux-là ont détruit leur écosystème. La conclusion politique s’est jouée en 2017. Le système politique français s’est effondré. Depuis lors, ni l’un ni l’autre des géants d’hier n’a reconstitué quoi que ce soit de ses forces ou de son programme ou de ses structures. L’un et l’autre se sont contentés de croire possible leur retour mécanique dans les faveurs des électeurs. Pour autant, ils n’ont rien changé de leur pires habitudes en matière de lutte interne pour prendre le contrôle du label. De la sorte aucun renouvellement réel n’a eu lieu dans leurs dirigeants ni cadres intermédiaire qui ne savent toujours rien faire d’autre que de gérer un héritage. D’aucuns ont cru possible l’alignement du PS derrière EELV. De fait, le centre gauche ne peut fonctionner en deux pôles. Mais qui cède à l’autre est menacé de disparaître tout simplement tant ces deux formations et leur porte-paroles sont devenues interchangeables.

C’est moins vrai maintenant que Jadot rapproche ses positions de celles du programme insoumis. De ce côté du tableau, les choses bougent. Cela a un sens politique. Les catégories sociales que Jadot pense attirer rompent avec l’euro-béatitude. Mais aussi avec l’illusion d’un capitalisme indépassable. Notamment la jeune génération, née et grandie dans l’angoisse du changement climatique et de la sixième extinction. Un changement de cette nature est-il possible à droite ? La droite traditionnelle pourrait-elle récupérer un discours de recentrage sur une économie nationale relocalisée ? Elle pourrait alors s’arracher a l’attraction macroniste qui est entièrement construite sur la ligne libérale et eurolâtre qui est assez mal assimilée par les bases de la droite traditionnelle.

Cela paraît peu probable. Au bout du compte, la droite LR se contente de reprendre les refrains libéraux sur les retraites et ainsi de suite sans un mot sur le bien-être social de qui que ce soit. C’est la surenchère antisociale entre Bertrand, Pécresse, Barnier sur ce terrain avec des âges de départ en retraite proposés entre 64 et 67 ans. Pécresse propose de supprimer 200 000 postes de fonctionnaires, Ciotti 250 000 : moins de policiers, de profs ou d’infirmières ? On connaît la musique. Et pour le reste, elle court derrière Zemour. Au point de voir Éric Ciotti s’affirmer pour un vote Zemour au second tour. Ca ne donne pas la clef pour devenir identifiable.

Cependant ce serait une erreur de croire la droite diluée avant l’heure. Sa capacité de résistance du fait de ses ancrages profonds dans des intérêts matériels non moins profonds en fait un ensemble bien moins volatil que le PS et ses légions de travailleurs sous statuts disparus dans le néant de la précarité structurelle. On l’a bien vu avec un Fillon ressortant à Vingt pour cent de cinq semaines bashing personnel. C’est bien pourquoi la macronie est en état d’alerte. Car pour elle son objectif c’est d’être la droite et le centre à elle toute seule, selon une logique à l’œuvre depuis bien longtemps d’ailleurs dans la compétition entre UDF et RPR puis entre UMP et Modem ensuite. En ce sens, son futur se joue dans ce moment où LR pourrait penser reprendre la main.

C’est pourquoi on doit s’attendre à quelques beaux coups tordus. Déjà le service public gouvernemental a donné le « la » en diffusant la veille du premier débat de la primaire LR un documentaire sur « l’affaire Fillon ». Ainsi est injecté dès le départ un parfum qui est censé coller aux basques de LR. La méthode Macron est toute là-dedans : fractionner à fond tout ce qui est en face de lui : de la gauche à la droite, tout réduire en poussière électorale. Pendant ce temps le fond de l’air reste aux thèses de l’extrême droite : 230 articles de presse par jour pour Zemmour depuis septembre, sans compter les heures de télé. La droite s’y perd en répétition et double emploi. Et il faut bien dire que venant de la gauche traditionnelle cela ne vaut guère mieux.  Le tournant sur la sécurité et l’immigration de Roussel et Montebourg n’aide guère à desserrer l’étau.

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