On se souvient de l’impact des sondages niant des mois durant la progression de ma candidature aux élections présidentielles. En fin de parcours, cela provoqua des ajustements fulgurants. Ils restèrent cependant inférieurs de cinq points à ce que fut le résultat final donc bien au-delà de la marge d’erreur avouée par les instituts de sondage.
Nous avions expliqué de toutes les façons possibles auparavant que l’erreur était certaine puisque n’était compté que les seules personnes certaines d’aller voter et certaines de leur vote. Cela minorait l’opinion des secteurs plus abstentionnistes ou moins sûrs de leur choix ou qui n’osent pas le dire. Éliminé du deuxième tour par défaut de quatre cent vingt mille voix, tout le monde sait qu’en présentant une marche trop haute à franchir pour le second tour cela a lourdement pesé sur la crédibilité de ma candidature.
Ce type d’impact avait déjà été dénoncé à propos de l’abstention aux régionales. Là, au contraire, elle avait été terriblement sous-estimée et l’extrême droite lourdement surestimée. Partout étaient annoncés des deuxièmes tours avec l’extrême-droite, fortifiant à fond le « vote utile » anti extrêmes-droites. Pour finir, l’extrême-droite ne fut présente que dans un seul cas.
À la fin de la présidentielle, certaines entreprises de sondage ont de nouveau modifié leurs matrices d’évaluation pour tenir compte de ces deux terribles erreurs. Ce n’est pas le cas pour OpinionWay. C’est la plus ridicule des entreprises de sondage parce que c’est elle qui fut la plus éloignée de notre score final réel. Six points d’erreur. Le double de la marge d’erreur qu’avouent en petites lettres ces entreprises !
Autant dire que ses évaluations ont moins d’efficacité que l’étude des foies des volailles qui ont prévalu pendant toute l’antiquité pour prédire les évènements. Naturellement, nous nous fichons de ces erreurs. Elles ne devraient inquiéter que les particuliers qu’elles dupent et les entreprises du secteur privé qui paient pour des prédictions à propos de leur marché et des goûts du public consommateur.
En politique, les sondages sont utiles aux médias car ils remplacent un travail d’études qui coûterait trop cher et fournissent une matière première inépuisable pour des « débats » entre « experts » sur les plateaux de télé en continue. Leur influence est donc essentiellement sur les analystes, éditorialistes et gens de propagande. Plus ceux qui les voient de loin et y adhèrent sans trop réfléchir. C’est pourquoi il faut réagir au moins quand l’erreur est si manifeste qu’il est possible de deviner une mauvaise intention possible. En effet, on ne peut compter sur la commission nationale des sondages. Elle ne fait rien. Nous l’avons alerté sur le biais des sondages basés sur les seules personnes sûres d’aller voter. La commission a reçu nos experts et les a auditionnés. Puis elle s’est rendormie. Rien. Ni réponses écrites ni orales. Rien. Un gouvernement d’Union populaire devra traiter ce problème de fond en comble. Car la démocratie ainsi manipulée est-ce encore la démocratie ?
De même que la propriété par 9 personnes de 90 % des médias est un problème grave pour la liberté et le pluralisme de l’information, l’erreur permanente des entreprises de sondage l’est tout autant. Une loi déjà adoptée à l’unanimité par le Sénat est prête à être votée à l’Assemblée. Elle interdit la publication des sondages dans certains délais. Mais il me paraît moins discutable de pénaliser les erreurs que de vouloir empêcher leur commission. Une amende sévère pourrait être plus dissuasive que des barrages vite contournés. Nous verrons bien si cela reste d’actualité après cette nouvelle campagne électorale en constatant le niveau des d’erreurs publiées. De même que plusieurs erreurs de suite en politique pourraient disqualifier une entreprise d’intervenir dans ce champ spécifique.
Un bon candidat à ce titre de limitation est l’entreprise OpinonWay. Il vient de publier d’abord un résultat en siège. C’est à l’évidence une impossibilité. Reporter circonscription par circonscription un résultat national nécessite un temps d’étude et une méthodologie très spéciale. Rien de tel à OpinonWay. Ici un écart de trois points en faveur de LREM face à la NUPES donne une différence de plus de cent sièges. Cela mériterait explications, même minimes. Il n’y en a pas. La notice technique une fois de plus n’était pas disponible quoiqu’elle soit obligatoire. Naturellement, la commission des sondages ne dit rien et ne dira rien.
Puis Opinionway a publié en deuxième envoi un résultat en pourcentage de voix par bloc politique. Plus classique. C’est là qu’on découvrait le peu d’écart entre LREM et NUPES. En contradiction avec les tendances mises à jour par les autres instituts. On a donc regardé de plus près pour comprendre l’écart.
Première chose qui saute aux yeux : l’offre des candidatures testées. « Divers Ecolo », « Divers Gauche » ne sont pas des étiquettes nationales. Comment quelqu’un a-t-il pu répondre qu’il vote « divers gauche » ? Ou « divers écolo » quand il n’y a pas de dissident dans sa circonscription ? C’est donc un lourd biais volontaire de tester comme étiquettes nationales des choses qui n’en sont pas. Pour que cela soit possible, il faudrait qu’un parti (et le citer en tant que tel) soutienne un label dans la quasi-totalité des circonscriptions, sinon cela n’a pas de sens. Ce n’est pas tout. Opinionway a fait le choix d’ajouter « Parti Animaliste ». Pourquoi pas ? Le Parti annonce 400 candidatures. Y ajouter « Divers Ecolo » et « Divers Gauche » sont donc des subterfuges pour affaiblir la NUPES. Le choix d’Opinionway est d’autant plus étrange qu’ils ne proposent même pas « Divers Droite ». Même pour équilibrer un peu… Et pourquoi pas « Divers Centre » d’ailleurs. Il y a assez de dissidence pour ça au sein de la Macronie ?
De plus, un doute subsiste faute de notice détaillée auprès de la commission des sondages. L’intitulé présenté par le sondage est seulement « NUPES » ou bien les partis qui composent ce nouvel ensemble sont-ils cités. Evidemment, cela changerait tout.
Revenons aux candidatures « Autres » et « Divers ». Dans ce cas, il est d’usage de proposer une option « Autres » avec possibilité de préciser son choix lorsque la personne interviewée dit vouloir voter pour une « autre » candidature dissidente ou Divers Gauche, Divers Droite, Macroniste dissident car non investi etc… C’est ce que font les autres instituts de sondages. Pas OpinionWay. Evidemment en diversifiant l’offre d’un seul côté de l’échiquier, OpinionWay dilue artificiellement le résultat de la NUPES et renforce mécaniquement les autres blocs. Et on ne peut pas croire qu’ils n’en ont pas conscience. Autrement dit, si la méthode de travail n’est pas sérieuse, on peut craindre que ce soit voulu. Mais alors quelle confiance est possible ?
Allons plus loin puisque nous y sommes. Pour les projections en siège. C’est-à-dire pour la prévision du résultat du deuxième tour. Premier élément curieux : où sont les hypothèses de transfert de voix pour ces législatives ? Y a-t-il eu seulement un vrai sondage de 2nd tour réalisé avec les hypothèses de second tour les plus probables ? Nous n’en trouvons trace nulle part. Il n’est pas impossible qu’ils n’en aient pas réalisé. Et que tout soit fait par résultat « d’expérience ». C’est-à-dire au doigt mouillé. Pas sérieux.
Et quand bien même, ils auraient réalisé des tests de deuxième tour. Quel intérêt de projections et de sondages de second tour avant la fin du 1er tour ? Surtout dans 577 élections différentes. Déjà à la présidentielle, Le Pen n’était-elle pas donnée à 48 voire 49% avant le 1er tour en prévision du deuxième pour finir à 41% ? Des sondages de second tour avant le second tour n’ont aucun intérêt. De toute façon les projections en siège sont un exercice forcément hasardeux et très compliqué. Mieux vaudrait publier tous les éléments ayant permis leur réalisation. Ou… s’abstenir. En conclusion, ce sondage Opinonway nous semble être un parti-pris méthodologique évident. Et nul ne peut oublier que nous parlons de « l’institut » dernier du classement de la présidentielle pour ses « pronostics ». Ses commanditaires du marché sont prévenus. Ce qui ne vaut rien pour la politique peut-il valoir mieux pour le choix de couleurs d’emballage ou de tendance des goûts ?