Il a été sauvé par le refus de vote du RN et des socialistes d’une série de censure « à balles réelles », comme dit le Premier ministre. Mais il était encalminé jusqu’aux essieux dans le bourbier de Bétharram. François Bayrou s’en est dégagé le temps d’une harangue cicéronienne bien ajustée. Il doit rendre grâce à l’indigne amateurisme du PS qui prend la France pour un congrès de synthèse entre ses couranticules. Le PS ! Farcesque ! Il méprise tout ce qui n’est pas lui et ça se voit bien à la désinvolture de cette censure bidon. Le prétendu « parti de gouvernement » qui n’a ni programme, ni lideur, ni stratégie, ni tactique suivie s’est donc pris une spectaculaire série de vents depuis la tribune de l’Assemblée. Sublime effet oratoire, ce moment de déroute où les petits oiseaux affolés devant le miroir de leur insigne sottise quittent l’hémicycle, ne sachant plus que faire sous la douche de moqueries acérées comme des flèches. Jubilatoire. Un texte de censure sans queue ni tête, « un pistolet à bouchon, un sabre en bois » s’est moqué l’orateur insoumis Bastien Lachaud ! Rédigé pour ne pouvoir trouver de majorité, ce balbutiement décousu est parti directement à la poubelle de l’histoire. Bayrou maniait le balai comme un scalpel. Nos députés ont voté la censure comme on participe à une blague potache avant les vacances scolaires. D’ailleurs, la semaine de pause parlementaire est en vue.
Mais le soir même de cette comédie, sur RTL, révélation terrible du juge Mirande, voisin de Bayrou au village. Oui, ce dernier était bien venu le voir en 1998 et oui le juge lui avait confirmé les viols ! Donc Bayrou savait. La preuve en est donnée par le juge. Donc le Premier ministre a menti devant l’assemblée. La porte de sortie de François Bayrou, Premier ministre, ne tient plus fermée que par une main : celle du président qui l’a nommé. Désormais c’est à Emmanuel Macron d’assumer la responsabilité de la durée de la crise et de ses conséquences délétères. Car c’est une crise grave. Bayrou a si mal conduit sa défense qu’un doute s’est répandu : qu’a-t-il à cacher ? Et puis, qu’il y ait ou non anguille sous roche, les récits consécutifs aussi mal ficelés ont donné l’impression qu’il se sentait impunissable. Pourquoi ? Qu’elle soit fondée ou pas, cette impression a répandu un doute comme une brume sur toute la scène et ceux qui s’y trouvent. Le plus grave est en train de faire son œuvre dans l’opinion. Souvent les Insoumis ont paru seuls au combat clair, quand le RN restait muet et le PS aussi confus que sa motion de censure. En dépit de la charge quotidiennement documentée de « Mediapart » et même d’une page du « Monde », les plateaux de télé n’ont pas toujours été aussi exigeants et implacables qu’ils l’ont été dans d’autres cas. Alors une malsaine généralisation a pointé du nez sur le mode : « tous complices, tous pourris ». Un secteur de l’extrême droite des réseaux sociaux est à la manœuvre.
Même sans aucun rapport avec cette affaire, l’impression s’est aggravée avec l’accord du RN pour la nomination du président du Conseil constitutionnel. Les consignes de vote du RN sont tombées sur les messageries d’extrême droite dix minutes avant le vote. Je le mentionne comme une cote d’alerte pour notre société qui évolue déjà dans un dégagisme parfois assez vide de toute perspective de confiance en qui que ce soit. Le président peut se croire hors d’atteinte. Mais c’est une illusion dans un tel contexte. Et puis il y a eu la manœuvre de Bayrou lui-même pour essayer d’impliquer tout le monde et n’importe qui pris dans les gouvernements Jospin. Et notamment quelqu’un comme Ségolène Royal ! Violence infâme contre une personne qui s’est pourtant distinguée en étant la première ministre en exercice à avoir fait une circulaire pour se donner les moyens de pourchasser les violences sexuelles à l’école ! La bassesse du procédé est telle qu’elle doit mettre en alerte. Elle pourrait contaminer. La guerre des entourages dans la pétaudière du « socle commun » pourrait s’y nourrir. Car avant et après les gouvernements Jospin, il y a eu d’autres ministres, jusqu’à une date récente, impliqués compte tenu de la durée des crimes à « Notre-Dame de Bétharram »
Plus que jamais devant la comédie de la non-censure du RN puant la combine tordue, celle ubuesque des complicités du PS et de Fabien Roussel sombrant dans l’obscénité et la guerre contre les allocataires sociaux sans réaction du PC, il y a l’impérieuse nécessité d’une opposition alternative ferme et sérieuse, porteuse d’un programme et d’une équipe. Il y a LFI ! Sans elle et son travail appliqué, voyez à quoi en serait réduit l’idéal de la République sociale dont chacun·e de nous a hérité comme d’une identité pour le pays.