Trump les tient par les couettes

Ce texte est également disponible en allemand grâce à une traduction militante.

À quoi bon l’OTAN ? La question fait frémir ceux qui pensent y trouver un système d’alliance automatique à la disposition de chacune des nations signataires du traité. Sans doute alors faut-il commencer par démentir cette certitude. Le traité prévoit en effet un droit à solidarité militaire à l’article 5. Mais il n’impose aucune intervention automatique de chacun pour tous les autres. Chaque nation reste maîtresse de sa participation à une riposte. Personne n’est obligé. Et chaque nation signataire décide du niveau des moyens qu’elle engage dans chaque cas. Il n’y a donc pas d’engagement militaire uniforme ni prédéterminé. 

Mais le pire de l’OTAN est ailleurs. Tout matériel américain est soumis au contrôle du gouvernement et du commandement américain. En effet, sans son autorisation, ni décollage, ni ciblage possible. Autrement dit, l’OTAN et l’équipement US ne sont en aucun cas une garantie de pouvoir agir soi-même le moment venu. C’est le contraire. Ça ne fonctionne que comme les USA le décident et quand ils le veulent. Ce n’est pas tout. Tout le matériel interconnecté est rendu visible par toutes les parties prenantes. Chacun sait donc à tout moment « qui fait quoi et où » avec son matériel. Impossible donc de se soustraire au contrôle US sans être soi-même privé de renseignements. Seuls les USA disposent d’une clef de cryptage leur permettant de brouiller les signaux de leurs activités. Enfin tout matériel contenant un composant venu des USA ou d’une entreprise US est soumis à autorisation des USA pour pouvoir être vendu.

Être membre de l’OTAN est donc seulement une promesse. Elle n’engage réellement que ceux qui y croient. Les autres continueront, comme c’est le cas des insoumis, de ne pas se contenter de croire que les USA et autres seraient prêts à se faire vitrifier pour Dresde ou Châteauroux. Notre position est donc qu’il faut d’abord être nous-mêmes maîtres de nos propres moyens de défense. Que toute l’étendue du territoire français doit être garantie protégé militairement. Ainsi que ses nouvelles frontières maritimes, spatiales et numériques. Dans ces conditions, il faut se retirer de l’OTAN et d’abord de son commandement unifié. Par prudence. 

Parler de matériel, c’est d’abord se soucier du sien. La politique macroniste est souvent incohérente, car elle bute toujours sur ses principes néolibéraux. Ceux-ci limitent par principe le recours à l’État dans l’économie. Il laisse donc faire le pire plutôt que de voir l’État intervenir. On avait vu comment en pleine épidémie de COVID l’État avait renoncé à nationaliser même provisoirement Luxfer, une entreprise qui produisait des bonbonnes d’air médical alors que la très grande majorité des installations de terrain étaient équipées pour recevoir ces bonbonnes. Aujourd’hui c’est un peu le même cirque avec le cas de l’entreprise Vencorex. Elle produit toute sorte de matériel stratégiquement important pour les militaires ou des engins liés à l’activité militaire. (Mais pas seulement). Elle est la clef de voûte du réseau de l’activité chimique de la sous-région. Macron regarde passer les trains. Bayrou, ancien commissaire au plan, et Lombard, ancien président de la caisse des dépôts, n’ont rien vu, rien fait. Dorénavant, ils dirigent le gouvernement. C’est le moment où ils peuvent décider librement. Pour l’instant, ils ne font rien. Les salariés ont proposé une coopérative. Les élus ont proposé une nationalisation temporaire. Voilà la vraie distance entre les phrases creuses et les actes.

L’obligation d’acheter du matériel américain est inscrite dans les faits avec l’appartenance à l’OTAN. Cette question n’est donc pas de l’exhibition de savoir technocratique. La guerre se résume vite aux moyens de la faire surtout quand il s’agit de défendre ses frontières ou ses intérêts vitaux. D’abord parce que la plupart des nations ne savent pas produire ce genre de matériel, ou bien ont été dissuadées de le faire. La France reste seule dans l’Union européenne à savoir faire, seule, un avion de chasse polyvalent comme le Rafale. Ensuite parce que les USA ne cessent de dire que c’est la garantie d’une inter-opérationnalité des matériels et des actions militaires elles-mêmes. En achetant américain d’aucuns croient acheter aussi une garantie d’intervention des USA. Du coup, ceux-ci concentrent 59% des commandes d’armement. Et ils ont vendu 55% du matériel acquis par les Européens au cours des dernières années. C’était à peine 35% il y a dix ans. Depuis, Trump et Biden ont haussé le ton sur « le partage du fardeau de la paix ». Ils ont ordonné à leurs alliés européens de payer un montant de matériel égal à une valeur de 2% de leur PIB. À présent, la barre a été fixée à 5% et on vient de voir comment Ursula von der Leyen a pris les mesures pour rendre cet objectif compatible avec les règles budgétaires européennes.

L’OTAN dans sa version actuelle semble parfois mise en cause par des porte-paroles US. C’est bien ce que Trump lui-même a fait en se demandant publiquement qui était certain aux États-Unis « que la France, et d’autres pays que je ne nommerais pas, répondraient à l’appel si les USA disaient : on a un problème ». Mais l’OTAN est un moyen de contrôle trop précieux pour que les USA y renoncent sans avoir en réalité un plan de substitution. Des prémices existent déjà et se sont révélées déjà autour de l’affaire des sous-marins australiens d’abord commandé à la France puis annulés au profit des USA. Mesure vite suivie de la création d’une alliance militaire qui préfigure une « OTAN asiatique » dont les Français ont été exclus. Un noyau dur existe d’ailleurs avec la structure de renseignement surnommée « 5 yeux » (Five Eyes). C’est une « anglo-sphère » composée par les USA, le Royaume-Uni, le Canada, la Nouvelle-Zélande et l’Australie. Récemment la proposition d’une nouvelle alliance militaire dans la zone face à la Chine a été plusieurs fois évoquée, et sur place l’activité diplomatique sur le sujet bat son plein. Elle prend des formes de regroupement encore très « fluides » c’est-à-dire bien changeantes… et contradictoires. Mais incontestablement, une ligne de front semble clairement activée. Sauf contre-analyse, l’évacuation en mode accéléré de tous les autres foyers de guerre vise bien à pouvoir concentrer les moyens d’action des USA sur l’Asie. Car pour l’instant, la ligne de front est réduite à la mer de Chine pour la Chine tandis qu’elle inclut tout le reste du monde pour les USA…

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