Sur fond de jubilation après la victoire de Corbyn au parti travailliste anglais, je mets de l’ordre à la une de mon blog. Les visiteurs sont rentrés de vacances et ça se voit dans les statistiques de fréquentation. Depuis la retransmission en streaming de notre lancement de la conférence du plan B à la Fête de l’Huma, le passage s’est aussi beaucoup internationalisé. Plusieurs milliers d’Allemands, de Grecs et d’Italiens sont passés parmi nos rangs français bien garnis.
J’innove dans ma façon de faire en reprenant des minis posts que j’ai déjà donnés à lire sur ma page officielle publique de Facebook. Évidemment je les retravaille en partie, tantôt pour satisfaire au goût de l’écriture, tantôt pour y introduire des nuances ou des compléments qui me sont venus à l’esprit en me relisant. Je vais ainsi dans les pas de l’illustre Montaigne dont « les Essais » perpétuellement réécrits étaient devenus selon ses mots « consubstantiels à leur auteur ».
Dans ce post il est question de la Fête de l’Humanité et du plan B en Europe, de la vendange entre Maynal et Beaufort dans le Jura, des migrants et des régionales. Et des médias.
Le grand cœur de Merkel s’est refermé
Il aura fallu à peine huit jours pour que le côté intenable de la comédie du gouvernement allemand s’effondre. Tous les psalmistes qui l’encensaient et regrettaient même qu’elle ne soit pas française en sont pour leurs frais. Du jour au lendemain, la Chancelière a changé d’avis, ce qui est bien son droit, mais elle a fait de l’espace Schengen sans préavis une zone allemande, c’est-à-dire fonctionnant selon les désidératas de son gouvernement et lui seul. Je vais donc rappeler une fois de plus la position que j’ai défendue depuis le début de la crise : accueillir ceux qui sont arrivés parce qu’il n’existe aucune alternative à cette option. On ne peut rejeter à la mer ou au pays de départ ceux qui sont là. L’idée de les parquer dans des camps sympathiquement baptisés « hot-spots » va s’achever dans une horreur largement prévisible. Quant au reste, il faut d’urgence traiter les causes du départ de ces gens : la guerre et la ruine économique. Dans les deux cas, l’Europe est responsable directement par sa politique économique ou indirectement par ses alliances financières dans la région. De ces deux causes il n’est jamais dit un mot par les grands esprits qui gouvernent l’Union européenne. Quant à Louis le benêt, ci-devant François Hollande, il veut bombarder tantôt l’un tantôt l’autre selon les jours et la communication recommandée par les aigles qui lui conseillent toutes ses fautes. « Oui mais, qu’est-ce qu’on fait concrètement, maintenant, en quelques mots brefs » couinent les répondeurs automatiques de l’audio-visuel. « On bombarde » répondent les très intelligents qui ont tout réussi depuis la première guerre du Golfe ! Et si vous dites « c’est stupide » vous êtes immédiatement repeint aux couleurs de l’ennemi. « Alors on laisse faire ? », demandent-ils l’air outré. Cette comédie a de beaux jours devant elle !
Maintenant écoutez ceci : le Front national sera de la gnognote à côté de ce qui va se passer en Allemagne avec les trouvailles de madame Merkel pour compenser le déclin démographique de son pays. Et à côté de ce qui va se passer là-bas, ce qui se passe ailleurs mérite aussi attention si jamais les faits vous intéressent plutôt que les nunucheries médiatiques. Les migrants vers l’Europe sont une très petite quantité de personnes par rapport au nombre de gens qui émigrent d’Europe à cause des politiques austéritaires de l’Europe. Un million d’Espagnols ont quitté leur pays depuis le début des plans d’austérité. Cinq cent mille Grecs en ont fait autant, dont cent vingt mille en direction de l’Allemagne ! Voilà la racine commune de tout ce qui est mis en branle dans l’immense zone d’influence de cette maudite et malfaisante « Union Européenne » des traités budgétaires soumise aux intérêts de vieux rentiers allemands. Et cela non plus ne va pas tenir longtemps, comme de la poussière sous le tapis…
A propos du ban des vendanges
Pour peu je manquais la vendange. Car j’avais compté, à l’ancienne, qu’elle commencerait bien plus tard : en octobre, comme du temps de mes vingt ans. Car à vingt ans, à moins que ce soit avant, j’échangeais des bécots entre les pieds de vigne avec ma vendangeuse. Le petit matin était celui de l’automne et tout ce qui va avec au village. On sortait vers les parcelles à travailler, perchés sur le plateau de la remorque et le tracteur allait au petit pas d’un cheval dans les chemins, entre les haies rougissantes. J’en étais resté là où se bloquent les images du passé, surtout si elles sont agréables. Souvenir trompeur. Claude m’a rassuré : cette erreur est normale.
Depuis quarante ans, le ban des vendanges ne cesse d’avancer. Lui-même a eu à en connaître dans sa vie privée. En 1979, il avait fixé le jour de son mariage quinze jours avant la date prévue. Il en fut pour son compte car cette année-là déjà on dut commencer plus tôt la récolte. Depuis, il a été témoin permanent et direct des effets du réchauffement climatique. Le ban est passé d’octobre à août en quarante ans. D’après lui le phénomène s’est accéléré à partir de l’an 2000 où la bascule s’est faite avec le passage du ban de septembre à août. La pointe fut en 2003 où l’on vendangea le 13 août. Depuis, la date erre dans la dernière semaine avant la rentrée de septembre. D’ailleurs, ce jour de ma présence est le dernier de la vendange, jeudi 10 septembre. On travaillait sur une parcelle de Chardonnay. Avec le Savagnin, le Poulsar, le Pinot et le Trousseau, ce sont les cépages du Jura. Je les mentionne, car tandis qu’on allait et venait entre les rangs de la vigne, Claude me confia : « je ne suis pas certain de ce que je vais te dire, mais j’ai observé que le grain du savagnin a tendance à rétrécir. Je me demande si c’est lié à cette augmentation de la température. Tu sais, cette année on a eu plus de 47 degrés dans ma cour à Maynal ! Le savagnin, c’est un cépage de septentrion, pas sûr que cette grosse chaleur lui convienne longtemps. Je me demande si ça va durer ». En fait j’étais là, chez Buchot à Maynal pour compléter une enquête et un petit film vidéo sur le vin commencé depuis déjà quelques temps, je veux dire depuis 2009. Vous en aurez bientôt des nouvelles. Je compte repartir des images déjà présentées sur ce blog. On prépare ça pour ma « chaîne YouTube » où seront dorénavant présentées, en doublon de Dailymotion, toutes mes vidéos.
L’enquête que je voulais avancer concerne le potentiel réel de l’agriculture bio dans le secteur viticole. Mon engagement avance dans deux directions. D’un côté je défends le système de la viticulture de notre pays, son système des appellations contrôlées avec ses exigences et ses limites. Je m’oppose donc à la logique du commerce « libre et non faussé » de ce que l’Union Européenne appelle des « liquides alcoolisés aromatisés » ! Pour « l’Europe qui nous protège », il s’agit en effet démanteler le système des appellations contrôlées parce qu’il limite les droits de plantation de la vigne et réserve les appellations à certains vins produits dans des conditions précises et sur des parcelles précises. Mais d’un autre côté, je m’engage aux côtés des producteurs de vin bio ou de vin naturel. Ceux-là sont aussi dans un rapport critique aux méthodes de productions fixées pour lesdites appellations contrôlées, essentiellement pour ce qui concerne l’usage des produits chimiques. La chimie et l’agriculture, ce n’est pas un petit sujet. On commence seulement à s’en rendre compte dans le grand public avec le cas spectaculaire de la condamnation de la firme Monsanto reconnue coupable du cancer professionnel d’un agriculteur et d’autres cas similaires. La chimie dans l’agriculture impacte en effet le produit agricole, la terre des parcelles traitées, l’environnement large par les eaux, mais aussi ceux qui manient les produits.
Dans un pays record d’Europe de l’usage des pesticides, il faut savoir que si la vigne n’occupe qu’à peine 3% des terres agricoles exploitées, elle absorbe 35% des produits chimiques déversés. Peut-on produire autrement, avec beaucoup moins de produits chimiques, voire même sans eux ? Dans ce domaine, le test du concret est décisif. Claude Buchot a mis au point toute une série de produits à partir des plantes et d’autres intrants naturels avec lesquels il traite ses vignes, assumant seul la prise de risque de l’échec que toute innovation contient. Ici, s’il échoue, le vigneron ne peut faire comme le banquier et présenter son ardoise à l’État et aux contribuables. On a donc filmé ses explications. C’est assez passionnant. Il s’est débarrassé de l’oïdium, un champignon qui ruine la vigne partout ailleurs et contre lequel la lutte consiste à déverser des tonnes de produits chimiques. J’en reste là car je ne veux pas déflorer les nouveautés de notre vidéo en cours de montage. Pour moi, ce déplacement était une séance de formation. Je voulais m’assurer de ce que je veux intégrer dans mes discours à venir sur le thème de l’agriculture. Plus radical que moi, j’ai retrouvé, parmi les vendangeurs de Claude Buchot, Gabriel Amard, le secrétaire national du PG qui a déjà mené une lutte exemplaire sur l’eau et contre les grands projets inutiles. Le sécateur à la main, travaillant et bavardant, je l’ai vu faire un stage/enquête pratique en quelque sorte.
Mon parcours dans les questions agricoles a commencé dans le Jura déjà quand j’ai tenu la rubrique du « Jura rural » au journal Les Dépêches. Puis au Parti de Gauche où je fus vite pris en main par Laurent Levard, responsable national en charge de cette question et qui est le rédacteur du programme du parti sur ce thème. C’est à lui que je dois ce fait étrange pour un parti aussi urbain que le nôtre d’avoir eu pour premier programme mis en bonne et due forme, celui pour l’agriculture, nous plaçant dans le peloton de tête de ceux qui ont une vision globale et construite sur ce sujet. On connaît aussi les raisons d’actualité qui m’y conduisent. Cela ne suffit pas pour vous dire comment je me suis pris d’intérêt pour ce domaine d’activité. Je ne veux pas cacher qu’à mes yeux, c’est là un combat culturel. Parmi les productions agricoles, le vin occupe une place spéciale. La majorité des gens comprend qu’il s’agit d’un produit chargé de savoirs et d’éducation, qu’il s’agisse de ce qui sort des barriques le moment venu de tirer le vin ou de sa culture sur pied. Mais il y a aussi pour finir de la personne qui lèvera son verre pour examiner la robe du vin qu’il va boire. Je nomme culture dans ce cas l’ensemble de ce que je viens de citer, ce qui n’est pas tout à fait la description académique qu’on peut en donner, j’en conviens. Mais ici la classe moyenne urbaine instruite rejoint la paysannerie du vin dans une compréhension commune des enjeux. Ce qui en fait pour moi un terrain de lutte idéologique passionnant, sans bien sûr en dédaigner aucun autre, je m’empresse de le dire, pour essayer de m’épargner l’acrimonieux catéchisme de tous ceux pour qui, quoiqu’il en soit, ce n’est jamais le bon sujet, la bonne formule, le bon moment. Qu’ils se rassurent.
La lutte pour le bon vin est une lutte anticapitaliste dans sa dimension la plus anthropologique. Car pour le capital financier investi dans la viticulture, l’enjeu ce n’est pas le produit mais le consommateur qui doit avoir envie de l’acheter. Le capital financier n’est pas aussi limité qu’un Hollande déclarant que « l’offre créé la demande ». Il sait que c’est l’inverse. Il s’est donc employé à reformater son goût, c’est à dire ses papilles, son corps en définitive. Le goût mondial est en marche à travers l’être humain reconstruit que les multinationales de l’agroalimentaire fabriquent sans le dire. Dans la douceur du jour qui flamboyait sur ce coteau on parlait philosophie avec Claude Buchot. La veille, son jeune compère Valentin Morel, jeune vigneron bio à Poligny, m’expliquait comment le pari pascalien s’appliquait à ses techniques, quand bien même n’était pas faite la vérification scientifique de certaines méthodes pourtant efficaces. Je lui répliquais qu’il n’y avait pas besoin de métaphysique dans ce cas. Le critère de la science est l’expérimentation et du moment qu’à une cause A suit un effet B, et que l’expérience est renouvelable autant de fois qu’on la tente et que l’on en obtient le même résultat, alors tout est bien. On conclut en riant tous que la métaphysique et l’irrationnel sont du côté des politiques publiques austéritaires qui n’ont jamais redressé aucun pays aussi souvent qu’on en ait fait l’expérience. Les gourous libéraux et leurs sectes économiques ont donc marabouté les ministres et les fonctionnaires. Hypothèse aimable car on pourrait en formuler d’autres plus sonnantes et trébuchantes, plus pantouflantes, n’est-ce pas?
Du vin aux fondamentaux du moment politique, il n’y a qu’un bref chemin. Valentin étant jeune papa, je me demande s’il gardera des bouteilles de la cuvée de cette année 2015 pour en régaler la noce de l’enfant quand le moment sera venu. J’y pense parce que Claude m’a fait l’honneur d’une visite privée dans sa cave personnelle. Au mur sont alignés les casiers avec l’indication de l’année. Vous y voyez des bouteilles en rangs. J’y ai vu l’histoire d’une vie et de ses produits. Mes livres ne tiendront pas si longtemps je crois. D’où peut-être cette pensée de Pasteur, le grand homme des vaccins, qui déclara : « il y a plus de sagesse dans un litre de vin que dans mille livres ». Je ne partage pas cet extrémisme œnophile. Louis Pasteur était un gars d’Arbois Je mets cette saillie sur le compte d’un slogan publicitaire que j’ai vu sur les murs il y a bien des années : « le vin d’Arbois, plus ou en boit plus on va droit ». On voit l’égarement ! Quand à Louis Pasteur on lui sera reconnaissant pour toujours d’avoir mis en formules scientifiques tout le procédé de la vinification, ce qui fait de lui le digne descendant de Magon, le « Tunisien » de l’antiquité qui rédigea le premier manuel d’œnologie.
« Orang-outang mal baisée »
On s’épuiserait à recommencer sans cesse le procès des médias de notre pays. Je ne le fais plus qu’occasionnellement, lorsque je suis certain de leur nuire à mon tour d’une façon ou d’une autre dès qu’ils croient pouvoir me frapper sans qu’il leur en coûte. On se souvient de l’épisode du boycott de notre université d’été par la nouvelle direction socialiste de LCP (la chaine parlementaire) de Marie-Ève Malouines. Les explications confuses et contradictoires qu’elle en donna finirent de faire son portrait de porte serviette du PS. J’avais mis de côté à cette occasion le silence parallèle de la rédaction politique de « France 2 ». Erreur. Depuis, elle se sent sans doute des ailes pour patauger dans la fabrication du fond de scène médiatique propice à la stratégie des frères siamois de l’UMP et du PS. Dans nombre de ses branches, le « service public » est donc dorénavant tombé aussi bas que ses maîtres. Ce week-end, cependant, j’ai trouvé que beaucoup ce sont surpassés. Ceux qui rediffusèrent du matin au soir la fête de Frangy, les indépassables discours de la passionnante université de La Rochelle, ou encore les deux discours de Marine le Pen, n’eurent rien à dire ni à faire à propos de la Fête de l’Humanité. Pendant ce temps chaque journal télévisé fonctionnait comme un tract pour le Front national sur fond de panique migratoire. Comment comprendre une telle irresponsabilité ? Par-dessus le marché nous avons dû subir l’éternel refrain des « bisbilles », « déchirements », « divisions » qui, chaque année, sans imagination, forment le halo médiatique de la Fête. Cependant je n’ai pas entrepris ces lignes pour dire ce que nous savons tous déjà.
Pour en savoir davantage et plus précisément sur cet évènement en particulier, je vous renvoie à l’excellent post d’Antoine Léaument. Je résume ce que j’ai senti : ce n’est plus une attitude professionnelle que de se réserver à la critique sans même donner une indication sur ce qui se passe. Personne n’aura su en regardant TF1 ou France 2 ce que faisait Yannis Varoufakis à la Fête de l’Huma, ni qu’Oskar Lafontaine s’y trouvait avec Stefano Fassina. Pour ne rien dire du reste. Cela alors même qu’était parue notre tribune commune et qu’elle faisait l’objet de dépêches et de reprises dans toute l’Europe. Le système médiatique est la deuxième peau du système. Je veux seulement à présent souligner un fait qui passe souvent inaperçu. C’est la similitude des options tactiques des médias contre nous dans les divers pays. J’ai souvent relevé comment ici je suis attaqué au plan personnel et physique avec des notations de vocabulaire (il tonne, il éructe, il s’emporte etc.) et des visuels terribles destinés à mettre en scène la bestialité traditionnellement attribuée à l’homme de gauche depuis le 19ème siècle. J’ai déjà dit que dans le cas des femmes de notre gauche, c’est pire. Je m’appuyais pour cela sur l’exemple du traitement subis par les femmes dirigeantes de l’Amérique Latine. En Grèce on a bien vu comment ce « deuxième niveau de lecture », celui de la mise en scène, en image et dans les mots, a fonctionné à propos de Tsipras. Avant et après la signature ce n’est pas le même homme que l’on voit sur les photos. Les titres, les qualificatifs, les images, tout change du tout au tout. On passe de la contreplongée, vue par en dessous, toujours flétrissante, à celle du dessus, toujours édifiante. Et ainsi de suite. Tsipras « le chimpanzé » est devenu un « homme d’État ».
Mais le record d’infamie est bien battu à propos de Zoe Konstantinopoulou, présidente du Parlement hellénique. Le registre est celui qui fut appliqué à Ségolène Royal pour la tuer à petit feu. Maintes télévisions ont une rubrique quasi permanente sur « les délires de Zoe » destinée à extraire des phrases de ses discours pour la ridiculiser sur un plan très personnel et souvent physique. Plusieurs médias n’ont pas hésité à franchir le pas qui vaut à toute femme de gauche d’être bestialisée par son sexe comme l’homme l’est par sa violence. Mais on comprend facilement que le résultat n’est pas de même nature, exactement comme ce n’est pas la même chose de traiter un homme de « salaud » et une femme de « salope ». Zoe est donc traitée « d’Orang-outang mal baisée », et maintes fois les uns ou les autres adjurent son mari, marin au long cours, de « rentrer d’urgence pour la calmer ». Kristina Kirchner présidente de l’Argentine fut caricaturée se masturbant à la une de « Clarin » journal de masse de référence, de droite évidemment. J’en passe et des meilleures. Le dire et prévenir ne change pas vraiment la situation. Sur le moment sous le choc de l’image ou du verbe, la pulsion visée est le plus souvent atteinte. Le lecteur/spectateur est profondément atteint. C’est bien le but visé et obtenu car sinon pourquoi le feraient-ils ? Pourquoi le feraient-ils tous, de la même manière, avec les mêmes ficelles sur tous les continents ? Mais marteler cette dénonciation est indispensable pour entretenir les anticorps de ceux qui refusent de se laisser manipuler.
Je note que Jeremy Corbyn a subi la même trajectoire de construction de réputation dans les médias anglais. La presse liée au secteur de droite du Labour a évidemment battu le tambour pour clamer que la victoire de la gauche du labour serait un « cadeau pour les conservateurs ». Évidemment, elle a aussi vite sous-entendu que Corbyn serait en fait plutôt content de ça et même complice. Comment ne pas penser alors aux campagnes contre moi avec le « dîner secret de Guaino », la « légion d’honneur de Buisson » et ainsi de suite ? Quant à la presse dite « populaire », elle s’est déchainée avec les mots et les méthodes dorénavant universels de la « presse libre ». Corbyn a donc droit à son lot de contreplongées avec vue en profondeur de ses narines, à moins que ce soit les trois quarts inquiétants. Les journaux de la branchouille style « Libé », bien inséré dans la boucle des campagnes mondiales des agences d’influence, en donne une idée. Il a fait de Corbyn sa « une » pour l’assimiler à un tueur grâce à une astuce de mise en page. Son vélo, ses chaussettes, sa pétulance (ne note-t-on pas qu’il vient de se marier pour la troisième fois ?) Tout y passe. Exactement comme me l’avait annoncé Oskar Lafontaine quand moi-même j’ai pris le chemin de la dissidence du PS après lui. Corbyn a quand même gagné le vote pour diriger le Labour. Ses 59% sont spectaculaires. Mais plus encore peut-être l’est le 4,5 % recueilli par la blairiste traditionnelle qui s’opposait à lui ! Sans oublier la victoire non moins écrasante de la gauche du Labour à l’investiture pour la mairie de Londres. Le pire reste à venir de ce que les médias savent faire quand viendra le temps des élections.
De retour de la Fête de l’Huma
On a toujours tant de choses à raconter en revenant de la Fête de l’Huma. Mes camarades se sont totalement approprié cette Fête comme un moment décisif de leur programme de travail annuel. Cette année la Fête a été un formidable tremplin pour le lancement de la conférence pour le plan B. Cette idée va maintenant faire son chemin. Elle a eu un bon impact en France et dans toute l’Europe. Des forces politiques de toute l’Europe ont pris contact. D’ici quelques jours va commencer la collecte des signatures des intellectuels, des parlementaires et des leaders de mouvements sociaux.
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Un aspect de la fête c’est son message humain. Pour ce qui me concerne, le temps passant, j’y reçois un accueil toujours plus amical et parfois même tendre par les mots, les gestes, les sourires que l’on m’y adresse. Et cette année particulièrement. Je ne sais pourquoi. À moins que ce soit moi qui sois devenu plus disponible qu’à d’autres moments, du fait des trous qui se sont percés dans mon blindage. De cela je tire une leçon quant à mon devoir, dans la position singulière qui est la mienne depuis 2012. Je veux dire très solennellement à tous ceux qui attachent de l’importance à ce que j’écris ici et ailleurs : on ne fait rien de bon dans ce pays sans ce peuple des communistes, avec ou sans carte, de toutes générations, fraternel ou rugueux, cordial ou ronchon, fièrement autonome ou douillettement ensocialisé. Dès lors, à l’approche de la fin des négociations pour les élections régionales, j’adjure tous mes amis, quelle que soit leur carte de parti ou leur inclination de trouver le chemin du regroupement, du rassemblement, de la convergence, appelez la chose comme vous voulez. Je suis très inquiet et même sidéré par les décisions qui ont conduit les communistes du Nord et de Rhône-Alpes à vouloir présenter des listes seuls. Non seulement cela affaiblit tout le monde et fait courir un risque disproportionné de marginalisation mais cela va relancer inévitablement la bataille sur le sigle Front de Gauche qui a déjà dévasté les municipales.
Mon propos ici n’est pas de dire qui est responsable de cette situation. Seulement de répéter que je ne l’accepte pas et que je suis loin d’être seul à le penser. J’adjure que l’on se remette autour de la table pour reprendre la discussion. Et je dis non moins clairement à nos nouveaux amis écologistes qu’étant les derniers arrivés dans l’opposition de gauche après qu’on ait tant voulu les y trouver, si grande que soit la joie de faire équipe, l’enfant prodigue n’a pourtant pas tous les droits ! Il lui faut apprendre à vivre dans sa nouvelle famille en respectant les autres, tous les autres. Les mauvaises habitudes prises dans la relation nourricière et commensale avec le Parti socialiste ne sont pas viables dans notre troupe où tout est mis en commun dans les maigres pâtures. La nouvelle alliance populaire que nous construisons n’est attractive et viable qu’au prix de ce respect, cette diversité et le partage des tâches. Je m’oppose donc absolument aux politiques de mise à l’écart des communistes là où elles se pratiquent. Pour autant, je ne suis pas devenu un bisounours du Front de Gauche. J’ai la mémoire fraîche de tous les abus et divergences du passé, du présent et même du futur. Mais je ne veux me souvenir que de la force inouïe que nous nous sommes donnée en marchant groupés et autonomes chaque fois que nous l’avons fait.
Donc la bonne compréhension du moment historique doit commander. Nous devons être un pôle de rassemblement offert à la société pour qu’elle puisse sortir de l’alternative mortelle dans laquelle la caste veut enfermer le futur : le Front national ou les frères siamois du libéralisme PS et UMP. Message clair : toutes les composantes de l’opposition de gauche doivent cotiser et faire l’effort de l’union. Le problème est national et nous n’avons pas à nous soumettre à l’addition des décisions locales des pseudos « territoires régionaux » découpés il y a quelques semaines par le monarque en déroute du palais de l’Élysée et de sa bande de copains de promotion. Examinons lucidement les questions posées avec le souci de leur ouvrir une solution plutôt que d’envenimer les plaies ! Problème de récupération par les uns ou par les autres ? Déposons un label commun nouveau. Dès lors, le score n’appartiendra à aucune de nos organisations politiques mais à nos électeurs, délivrés de l’obligation de faire allégeance à un parti. Problème de tête de liste ? Faisons des binômes et des trinômes s’il le faut, partout. Problème pour la prise de décision ? Formons des assemblées représentatives des citoyens et des partis, partout. Problème de rapport au système des institutions et de la professionnalisation de la politique : signons partout la charte éthique lancée dans le Sud-Ouest. Rien, absolument rien n’est insurmontable. Et par-dessus tout : aucun préalable personnel, aucune violence faite à l’un ou l’autre.
J’en reste là puisque je ne veux pas me mêler des négociations sur la composition des listes, la répartition des candidatures et le reste. J’estime que j’ai parlé là assez clairement. Mes amis les plus proches ont partout cédé le pas ou proposé de le faire en ce qui concerne les têtes de listes régionales. Cette attitude honore leur identité et vocation unitaire. Mais elle n’est pas raisonnable si elle doit aboutir à permettre la mise à l’écart des communistes ou l’humiliation de leurs dirigeants parfois curieusement surexposés et parfois même très poussés à passer en force. Et encore moins si cela doit conduire à la surévaluation d’un parti aussi imprévisible que EELV dont la fidélité aux alliés n’est pas la marque la plus évidente.
J’achève. Rien ne m’oblige à écrire ces lignes. Je n’en attends aucun retour d’ascenseur car je suis bien placé pour connaître l’ingratitude structurelle de la vie des appareils politiques petits et grands. J’ai bien noté les perfidies sur l’obsession du « casting présidentiel » rabâchées par ceux qui sont pourtant loin d’en être exempt eux-mêmes. Mais rien ne me lassera. Je ne parle au profit d’aucune « boutique ». J’alerte pour assumer mon devoir. En particulier dans le Nord et le Midi, face au FN et à l’UMP, le PS est perdu d’avance. C’est à nous d’ouvrir la voie en nous unissant franchement et clairement. Le succès est à ce prix. Moins de témoignages, moins de bavardages, plus d’action, plus d’union.