Le 22 avril dernier, notre partenaire politique en Espagne, Podemos a été victime d’un incroyable acte de blocage de ses communications Sur simple décision d’une entreprise privée et sans sommation. Et cela une semaine avant des élections générales. En effet, le service de messagerie WhatsApp a bloqué le compte de Podemos.
Il faut savoir que de l’autre côté des Pyrénées, les messageries WhatsApp sont extrêmement populaires y compris en politique. En fait, nos amis avaient réussi à en faire un véritable média de masse puisque 50 000 sympathisants étaient abonnés au compte de Podemos sur cette application. Par là transitaient des centaines de messages organisant la vie commune politique de tous ces contacts. Du jour au lendemain, plus aucun contact possible. La décision s’est appliquée sans crier gare le soir du grand débat télévisé de l’élection législative. Pour se justifier de cet acte incroyable de la part d’une entreprise privée à quelques jours des élections, les dirigeants de WhatsApp ont affirmé que Podemos enfreignait les règles d’utilisation de l’application en pratiquant des envois de masse. Cette justification fut anéantie presque immédiatement par le responsable de la communication de Podemos. Il publia une capture d’écran montrant que le PS espagnol utilisait l’application exactement avec les mêmes méthodes. En fait, tous les partis politiques le font en Espagne. « L’explication » a donc de quoi surprendre.
C’est évidemment un prétexte. Aucune mesure de cette nature n’avait été prise contre l’équipe de campagne de Bolsonaro au Brésil qui avait utilisé WhatsApp pour diffuser massivement des calomnies sur le PT et son candidat pendant la campagne. C’est donc notre camp qui a été frappé et lui seul, et au moment le pire c’est-à-dire le plus nuisible ! WhatsApp n’a sans doute même pas conscience du mal qui est fait à la démocratie elle-même. Ce n’est pas son sujet. Ces grandes puissances d’argent sont tout simplement inciviques et amorales.
Cette attaque contre nos alliés espagnols de la part d’un des GAFA doit nous inquiéter. Elle doit nous tenir lieu d’alerte. Elle intervient alors que le climat de psychose sur les « fake news » et la prétendue « ingérence russe » dans les élections, jamais prouvée, ont finalement abouti au renforcement du pouvoir de ces multinationales sur nos démocraties. En effet, les élites libérales et atlantistes somment désormais Facebook, Google et Twitter de mettre en place des mesures de censure contre les contenus qu’elles considèrent comme faux. Dans la délirante loi sur les fakes news votée par la macronie il y avait ainsi des articles pour intimer aux plateformes de mettre en place des mécanismes de filtrage des informations.
La messagerie WhatsApp qui a censuré Podemos est la propriété de Facebook. Le 5 avril dernier, le journal « Le Monde » ouvrait ses colonnes au responsable de la cybersécurité de Facebook. Le titre de cette interview est évocateur : « comment Facebook compte empêcher toute ingérence et manipulation pendant les européennes ». Et en effet, on peut y lire comment une multinationale privée américaine est apparemment devenue le principal acteur chargé du bon déroulement des processus électoraux en Europe. Heureusement, en France, « Le Monde » collabore avec Facebook pour identifier les fakes news. On n’est pas rassuré.
Le premier réseau social du monde, comme son petit frère, Twitter, ont tous les deux annoncé des mesures spécifiques pour les élections européennes. Le 25 avril dernier, Twitter publiait un communiqué pour annoncer le bannissement de sa plateforme de toute publication dont le but est « de manipuler ou d’interférer dans les élections ». Qu’est-ce qu’une publication dont le but est de manipuler ou d’interférer dans des élections ? Qui se chargera d’en juger ? Les salariés de Twitter, bien sûr. En aucun cas la loi ne définit de tels concepts.
Quant à Facebook, il a mis en place un dispositif pour rétrograder dans son algorithme toutes les publications identifiées comme des fake news ou « qui cherchent à duper les gens » selon le chef de la cybersécurité. Pour classer les pages et les publications, l’entreprise s’appuie sur des partenaires. En France, il y a donc « Le Monde » et son « Décodex ». Il avait classé le journal Fakir comme « peu fiable ». De fait, ce genre de méthode s’avère souvent une façon de censurer notre famille. En avril 2017, Google avait modifié son algorithme aux États-Unis. Le motif inquiétait déjà. Il s’agissait de « mettre en avant des sites labellisés comme fiable ». Résultat pour les sites socialistes, progressistes ou anti-guerre : une baisse de fréquentation via Google de 45%. C’est le sort qui nous est promis sans doute.
Jusqu’à présent, les réseaux sociaux en ligne ont servi d’espace d’expression et de libre circulation des idées. Ils ont été appropriés par ceux dont l’accès équitable aux médias de l’officialité est interdit. On comprend que cela soit un problème pour les puissants et une faille dans la stabilité de leur pouvoir. Leur réaction est donc une tentative de privatisation de l’espace du débat démocratique. Vouloir réguler le débat démocratique en ligne est légitime. Mais, pour un républicain, il ne peut être question que les règles soient décidées par des actionnaires de quelques méga-entreprises. Si règles il doit y avoir, elles doivent être décidées démocratiquement, connues de tous et les mêmes pour tous. C’est-à-dire être établies par la loi.
D’ici là, nous allons organiser la migration de nos chaînes de liaisons et d’information interne vers « Telegram » qui a la réputation d’être liée aux systèmes sous contrôle de Russes. Donc loin des représailles des étatsuniens et de leur méthode de privation soudaine de liberté pour ceux qui leur ont fait confiance. Pour ma part, je le fais dès à présent. Je ferme mes chaines de liaisons WhatsApp et je me porte vers ma modeste chaine de messagerie Telegram que je considérai comme totalement secondaire jusque-là. Vous pouvez donc vous y abonner en suivant le lien.