La France est désormais menacée de manquer d’électricité cet hiver. Et pas à cause des énergies renouvelables ! Non, si nous connaissons de nouveaux pics de froid, les coupures ne seront pas dues aux caprices des éoliennes ou aux faiblesses des panneaux solaires. Ce sera la faute du nucléaire ! Le retour à la bougie, ce n’est pas si on sort du nucléaire, ce sera si on continue le nucléaire ! Car le nucléaire tourne au fiasco. Le 9 novembre, on a atteint le nombre record de 20 réacteurs nucléaires à l’arrêt en même temps sur les 58 que compte le pays. Rendez-vous compte : un réacteur sur trois ! À ce rythme, le nucléaire va finir par devenir une énergie aussi intermittente que l’éolien ! J’ai lu que l’Autorité de sûreté nucléaire venait d’autoriser le redémarrage de six d’entre eux. Divine surprise avant l’hiver, non ? Et sinon ? Sinon, le journal Les Échos se demandait déjà « Y’aura-t-il de l’électricité à Noël ? » craignant des coupures.
Ainsi fonctionne la 5e économie du monde ? Et l’entreprise chargée de l’approvisionnement dans tout le pays, Réseau Transport Électricité, a même prévu un plan d’urgence pour gérer la pénurie. Il prévoit des mesures drastiques : coupure de courant pour 21 grands sites industriels, baisse de la tension de 5% soit l’équivalent de la consommation de Paris et Marseille réunis etc. Et même, en cas extrême, des « délestages programmés, momentanés et tournants » c’est-à-dire des coupures pures et simples d’électricité pour toute une zone ! Décidément, il aurait mieux fallu investir dans les économies d’énergie et les énergies renouvelables que de maintenir le nucléaire sous respiration artificielle.
Voilà qui devrait faire taire tous les partisans du nucléaire, en tout cas ceux qui pensent de bonne foi que cela peut être une solution parmi d’autres. Il est temps de sortir du nucléaire et des énergies fossiles à la fois. Cela ne se fera pas en un jour ni même en un mandat. D’ici à la fermeture du dernier réacteur, il y en a pour au moins 15 ans, sans doute 20. Dans son scenario de 2011, l’Association Negawatt projetait de fermer le dernier réacteur en 2033. Raison de plus pour s’y mettre dès à présent. La bifurcation de notre système énergétique est une œuvre gigantesque. C’est un défi technique et intellectuel très stimulant. Ce sont 700 000 emplois qui peuvent être créés. Ce sont des investissements considérables qui relanceront toute l’activité économique. Tout cela se planifie. Je ne suis pas le seul à le dire. Nicolas Hulot a aussi repris ce mot de « planification » sur RTL le 29 novembre. Je m’en félicite et je l’en remercie. L’idée de la planification écologique avance. Tant mieux !
Mais que de temps perdu pendant ce quinquennat ! La prétendue loi de transition énergétique n’aura fait que confirmer le recours au nucléaire sans permettre un débat national sur la sortie. À la fin du quinquennat, aucune centrale n’est fermée, pas même celle de Fessenheim, et les projets se poursuivent qu’ils s’agissent du centre d’enfouissement des déchets radioactifs à Bure ou de l’EPR de Flamanville. Et l’aveuglement dans le nucléaire commence à coûter cher. Au lieu de s’entêter dans le nucléaire, il aurait fallu engager vigoureusement la transition énergétique et viser une France avec 100% d’énergies renouvelables. Il sera grand temps de s’y mettre en 2017. Déjà l’association Negawatt promet un nouveau scenario pour la période 2017-2050. Elle le présentera le 25 janvier prochain. Cours de rattrapage obligatoire pour les nucléocrates candidats à l’Élysée !