Nous tenions le 10 novembre une réunion de travail sur la sûreté / sécurité au siège de campagne. Une bonne couverture presse nous a été accordée. Sauf au Monde. Comme je croyais la guerre du bashing avec Le Monde terminée, j’en ai été bien ébahi. Et bien déçu. Donc le « bashing » reprend dans ces colonnes ? Certes, j’avais bien vu comment la rubricarde avait déjà battu en mousse « l’affaire » des travailleurs détachés qui m’incriminait dans le soupçon de xénophobie. Une invention de l’extrême gauche délicieusement reprise avec hâte et délectation. Je me suis interrogé sur les causes qui ont pu ramener madame Besse Desmoulières à la pratique du pourrissement des personnes. Sans méconnaître l’intention de nuire en général, j’en trouve plusieurs que je livre à votre réflexion. Car je juge la scénette instructive.
D’abord, notons le facteur personnel. On se plaint parfois de voir tout le temps les mêmes têtes en politique. Mais cette monotonie n’est-elle pas aussi le fait de ceux qui les observent et bégaient ce qu’ils décident de voir ? Je parle de ces journalistes qui officient à la même rubrique pendant des lustres. Inutile de dire que lorsqu’on se voit confier « Mélenchon, les verts, le PG et l’extrême gauche » ce n’est pas une faveur que vous fait la chefferie. Du coup, elle vous y oublie d’autant plus facilement qu’on ne se bouscule pas pour occuper la place.
Ainsi, les pauvres rubricards restent accrochés à leur sujet comme les moules à leur rocher, parfois de si longues années. On lit leur ennui. Leurs lignes sont souvent confites aux vieux pots des mêmes et invariables préjugés. Le manque d’intérêt (à la longue) pour le sujet s’ajoute à une paresse intellectuelle qui est au journalisme l’équivalent des libidos en berne. Les vieilles fiches mille fois resservies leur tombent des mains et les lignes qui s’en suivent nous tombent des yeux. En fait, le rubricard est souvent d’abord une victime de la relégation professionnelle. Ce sera donc la circonstance atténuante accordée à madame Besse-Desmoulières qui pourrit au même endroit depuis aussi longtemps que moi. Au cas présent, son compte rendu exprime le regard épuisé que l’intéressée porte sur le contenu de la réunion et sa lecture du livret programmatique est donc passée à côté de jolis morceaux. Oublions vite.
C’est la fin du papier qui gâte tout mais qui dit tout. « Comme le montrait la liste de ses invités, le candidat peine à s’entourer sur ces sujets-là. » déclare la journaliste sans qu’on sache pourquoi. Elle ne le dira pas. Je suis au contraire très entouré et à très haut niveau dans ce milieu depuis quelques temps. Suit une giclée que je trouve bien instructive. « Réunir ces personnalités n’a pas dû être facile et il aurait convenu de remettre à certains des étiquettes que l’équipe du candidat avait omis de préciser. Parmi les intervenants « extérieurs », Alexandre Langlois est bien « gardien de la paix au renseignement territorial », mais aussi secrétaire général du syndicat ultra-minoritaire de la CGT-Police. Il aurait sans doute été plus délicat de mentionner que Georges Knecht, secrétaire général du Syndicat national indépendant des personnels administratifs et techniques, est mis en examen pour subornation de témoin dans l’affaire des fuites d’informations et de corruption présumées qui a ébranlé la PJ parisienne en 2015. »
À ce flot, deux réponses. D’abord rappelons que les gens décident d’eux-mêmes comment ils entendent être présentés en public dans une réunion politique. Nous n’avons rien « omis ». Nous avons respecté leur volonté. D’ailleurs, ce n’est pas leur appartenance qui nous intéressait mais leur expertise. Ensuite, on apprend en lisant ce papier qu’une personne mise en examen est réputée infréquentable seulement quand elle vient à une de mes réunions. Sinon, quand la même personne est reçue par le président de la République à l’occasion des manifestations policières, Le Monde ne se sent pas obligé de la montrer du doigt. Mais le mot qui compte c’est à propos de la CGT « syndicat ultra-minoritaire ». Cela dit quelle est la main qui tenait la main qui courait sur le clavier. Une source interne, qui préfère rester anonyme, me l’a confirmé. Sûrement pour complaire à des informateurs du Monde émargeant à la rubrique « police » ou « affaires » par lesquels arrivent les « fuites » que déplore Le Monde, qui en vit pourtant.
Pour être plus clair : le décryptage de cette matinée vue du point de vue policier n’a pas été fait par l’auteur de l’article qui ne connait rien aux réseaux de la police et à ses luttes d’influence interne. Il a été fait par quelqu’un d’autre qui a ses propres engagements. La méthode policière du passage en revue de la biographie des gens présentée comme un casier judiciaire est tellement révélatrice ! Et cela se lit quelques lignes plus bas quand est cité l’un de mes plus proches amis. « Quant à l’“analyste géopolitique” Djordje Kuzmanovic, à aucun moment il n’a été fait mention de ses fonctions au Parti de gauche comme secrétaire national à l’international et à la défense.
“Un oubli”, explique celui qui a notamment été mis en cause en début d’année par le journaliste Nicolas Hénin dans son livre La France russe (éd. Fayard, 19 euros). Présenté comme la “muse de Mélenchon sur la question russe, ce dernier était situé sur ‘un axe rouge-brun’. Des “allégations complètement fausses” que l’intéressé dément formellement .» Il dément mais Besse Desmoulières répète quand même. Il s’agit pourtant de la reprise d’un ragot d’extrême droite sur fond de délit de sale nom. Monsieur Kuzmanovic est français, et l’origine serbe de ses parents ne donne pas le droit de le stigmatiser. Il n’est en rien ma « muse russe », expression dont les sous-entendus sont assez clairs pour me révulser de dégoût pour son auteure. Ce que les pécores qui pérorent ne peuvent savoir en lisant les vieilles fiches des collègues, c’est que Djordje a servi dans l’armée française sous drapeau ONU en Afghanistan. Suggérer qu’il soit un « rouge brun » est une infamie gratuitement énoncée sans le début d’un argument.
Mais puisque Besse Desmoulières a le nez si fin, ne trouverait-elle pas « plus délicat », comme elle le suggère, que sa rédaction nous dise qui sont les signataires des papiers quand la biographie du « journaliste » pose question ? Pourquoi cacher le lendemain dans le même journal qui est ce monsieur Paolo Paranagua qui signe son retour en bonne place sur une demi-page du journal. Pourquoi lui accorder l’habit neutre de « l’analyste » de la rubrique internationale du journal, sans un mot de précision sur son identité politique ? Je ne lui reproche pas d’officier aux basses besognes du dénigrement de l’Amérique latine progressiste. Il est payé pour ça au nom d’une ligne éditoriale amie des néo-conservateurs étatsuniens. Ce qui est choquant, c’est qu’il s’agit en réalité du fameux « commandant Saul » qui me poursuit en justice pour l’avoir traité « d’assassin repenti » il y a cinq ans de cela.
Dans les années 70/80 il était en effet chef de la « fraction rouge » de la prétendue « armée révolutionnaire du peuple » en Argentine. Il s’agit d’un groupe de provocateurs qui se targuait d’avoir mené plus de trente actions d’exécution dans la rue et divers enlèvements et séquestrations. Tout cela devrait sans doute rester sous le manteau de l’oubli. Mais comme l’intéressé a une activité publique intense dans les réseaux des putschistes et réactionnaires latinos et de leurs amis nord-américains, je m’y suis intéressé de près. D’assez près pour mieux comprendre les causes de la mort de toutes les personnes qui l’ont approché sur place et les raisons de son incroyable survie dans de tels évènements. Cette « muse de la CIA » influence-t-elle Besse Desmoulières ? Certes, Paolo Paranagua n’exerce pas ses fonctions dans cette rubrique. Mais il y serait à sa place dans ce rôle de petit copiste qui dénonce sans peine et n’aime pas la CGT. Sauf que là on tire seulement avec des stylos.