Des gens me demandent de me positionner par rapport aux évènements d’Iran. Je serai suspect. D’abord parce que je n’ai encore rien écrit à ce sujet. Ensuite à cause de Chavez. Chavez donne raison à Ahmadinedjab. Donc je suis censé être partisan de celui-là. Et ceux qui m’invectivent aiment mieux le mollah machin chose. La preuve que c’est mieux, c’est que Jack Lang, Bernard Henry Levy et Marek Alter et SOS racisme se sont prononcés pour lui et contre le trucage des élections. Et ainsi de suite. A vrai dire avec un comité de parrainage pareil on change de trottoir en deux secondes, non ? Foutaises. J’étais au bord de la Méditerranée. En vacances comme un petit bourgeois. Et d’une façon générale les théocrates me dégoutent. En général et en particulier. En Iran il n’y a pas d’élections. Il est temps de s’en souvenir. Et Chavez peut bien dire ce qu’il veut à ce sujet je ne suis pas d’accord avec lui. Il se trompe lourdement.
A BAS LA THEOCRATIE
Je vais passer le moins de temps possible sur cette histoire qui finit par me fâcher même avec mes meilleurs amis qui discutent à perte de vue sur ce que les iraniens sont censés exprimer à cette occasion dans l’un et l’autre camp. Selon moi, les iraniens n’expriment rien qui vaille. Pardon de vous choquer. Cette comédie n’est pas une élection au sens où nous l’entendons et où n’importe qui peut le comprendre. Quand il fait avoir été autorisé par un tribunal religieux pour être candidat, quand on doit choisir entre un ancien premier ministre calotin et ultra réac qui a déjà du sang sur les mains d’un côté et de l’autre un dangereux illuminé antisémite, ce n’est pas une élection, juste un rite, comme le vote du sacré collège pour élire le pape alors même que l’église ne prétend pas du tout être une démocratie. Naturellement il faut favoriser le désordre qui peut abattre le régime des mollah. Evidemment. On doit donc soutenir n’importe qui qui contribue a déstabiliser cette odieux système.. Mais il est inutile d’habiller cet objectif du prix de la validation d’un régime radicalement et intrinsèquement pervers et nuisible. L’Iran est gouverné par une théocratie. La théocratie ne peut arbitrer pacifiquement aucun conflit du type de ceux qui traverse une société complexe comme l’Iran l’est, nécessairement. La théocratie ne peut engendrer que la violence et l’intolérance. C’est ce que nous voyons. Nous ne réclamerions donc qu’au prix du ridicule et de la bêtise des élections « honnêtes » en Iran tant qu’il s’agira de départager des religieux.. Les élections sous contrôle des gardiens de la foi sont nécessairement malhonnêtes. Il ne faut rien attendre de ce régime et rien de plus de ses prétendus opposants enturbannés. Chavez raisonne donc d’une manière totalement primaire et erronée sur ce sujet. Les ennemis de nos ennemis ne sont pas nos amis. Pas davantage cette fois ci qu’en aucune circonstance de cette sorte. Les islamistes sont des fascistes. On ne discute pas avec leur régime. On le combat sans trêve et sans repos. Je n’ai jamais raisonné autrement. Quand un homme aussi respectable qu’Hocine Aït Ahmed composa avec le FIS par les accords de Rome, je rompis séance tenante avec lui. Je n’ai jamais été partisan dans les livres d’histoire du pacte Hitler-Staline, même si je sais très bien ce que Staline avait en tête. Ici c’est du pareil au même. Tous les théocrates doivent être combattus, en robe blanche, safran ou noire. « Même poil même bête », dit l’adage antillais. En Iran, on ne doit préfèrer personne. On demande le pluralisme inconditionnel pour les partis politique, la liberté de la presse, la laïcité de l’Etat. Et la fin des tueries de rue que produisent les conflits entre religieux au pouvoir.
LA SIESTE
J’ai fait une pause de quatre jours au soleil. Rien ne m’était davantage nécessaire. Pour la première fois depuis bien longtemps (en fait je ne me souviens pas d’une occasion semblable) je pense avoir atteint une limite physique. Etrange état où l’on se sent comme une batterie déchargée. La tête va, tourbillonnante, mais le reste ne suit plus. Les mots viennent plus lentement qu’à l’accoutumé, le rythme se ralentit en tout et pour tout. La pause est alors une promesse que l’on se fait pour atténuer la dureté du moment qui passe, un horizon sur un calendrier, une ligne d’arrivée vers laquelle on se traine dans les derniers mètres. La pause, enfin, est là ! On croit s’y glisser comme dans un bain. Rien de plus simple à première vue. Pourtant, en pratique, la pause est un art très sophistiqué. Mettre à distance, « débrancher », que sais je encore, ne se décrète pas. C’est une construction. Le résultat d’une sorte spéciale d’efforts. Il faut d’abord éteindre, un par un, les moteurs de cette étrange frénésie qui continuent de contaminer tous les compartiments intimes. Toute une rééducation est à l’ordre du jour. Ainsi de l’absurde habitude d’engloutir ses repas dans la crainte de les voir interrompus, de couper ses phrases pour jeter un coup d’oeil sur le téléphone, de passer en revue une fiche en tête pour la réviser où se la mettre en bouche, que sais-je encore, bref un corps et un esprit tout entiers dressés pour la répétition d’un exercice qui a pris fin et qu’il faut apprendre à oublier. Bien des trucs le permettent. Les artistes le savent mieux que moi. Tous ne se valent pas bien sur. On doit admettre que chacun en dispose selon sa manière d’être. Pour ma part, je connais bien mon remède souverain, la cure de désintoxication la plus appropriée à mon cas. C’est la sieste. Art subtil. La sieste. Comme je l’ai détestée étant petit ! Et comme je la vénère à présent que j’en comprends la somptueuse délicatesse. La sieste est suavité pure. Elle ne se consomme qu’en entrant avec tendresse dans ses plis veloutés. Pas la peine de faire du lacanisme à deux balles à propos de ce vocabulaire. La sieste est en réalité l’art le plus pur qui soit, une progression vers un état d’épanouissement que seul les chiots d’une semaine maitrisent correctement et certains chats adultes particulièrement doués pour combiner les étirements et l’anéantissement consentant. J’ai donc pratiqué pendant quatre jours aux heures chaudes, dans une ambiance de fraicheur tiède, légèrement ventilé par une brise très discrète, après avoir chaque fois observé un légèr intermède de décompression et de silence comme c’est de rigueur pour bien commencer son entrée en matière. Cependant le compte n’y est pas. Quatre jours, quatre siestes seulement pour six mois de cavalcade ! le boyau cérébral reste noué. J’en suis encore à réver de résultats électoraux et les personnages du livre de Mac Call dont je m’imprègne avant de sombrer s’emmèlent à ceux que j’ai croisé sur les routes du grand sud ouest. Je vois bien que je m’éveille sans plaisir tandis qu’une bonne sieste s’achève émerveillé ! Et déjà je dois reprendre le harnais. J’y vais à tâton. Entre Bruxelles, Paris et le grand sud ouest, je vais être un nomade à l’empreinte écologique déplorable. Mais surtout les rythmes d’aller et venues me sont encore inconnus. Un calendrier inconnu, voila la jungle incertaine qui s’avance. Et dans ce type de circonstance, le lointain tintamare des animaux qui la peuple ne me dit jamais rien qui vaille . En route, cependant.
BOYCOTT EST SERVI
Je ne suis pas allé à Versailles. Je ne dis pas que ce boycott m’enchante. Un reste de purisme doctrinal me fait penser qu’une institution dont on a accepté d’être membre doit être prise comme elle est. Sinon, si seul comptait ce que l’on en pense nous n’irions nulle part, nous, les partisans d’une sixième République. Je n’aurais pas siégé au Sénat, dont l’existence même m’est toujours parue discutable, je n’occuperai jamais dans mon siège au Parlement européen cette babel des bla bla impuissants, et ainsi de suite. Mon idée est que là où l’on va il faut tenir la tranché. Vision de poilu de la politique, en quelque sorte. Mais là ? Non. Là il fallait marquer le coup. Le boycott. C’est la seule façon d’exprimer personnellement et solennellement une opposition trop effacée du paysage par sa cacophonie ordinaire. Je veux rappeler combien nous étions opposés à la réforme constitutionnelle qui a permis notamment cette pantalonnade versaillaise. L’opposition avait sombré dans le ridicule des petits reniements qui permirent à la réforme de passer avec deux voix de majorité. Puis dans la pagaille des arguments contradictoires, tout argumentaire se fut perdu comme eau dans le sable. Passons sur ce déplorable épisode. A présent comment faire pour ré-affirmer notre analyse d’alors. C’est-à-dire affirmer que cette réforme accentue la plongée de notre démocratie dans le néant autocratique, à rebours de ce qu’il faudrait faire. Les votes de mise en œuvre de la réforme n’ont-ils pas confirmé ce que nous disions pour démentir l’argument selon lequel seraient étendus les pouvoirs du parlement ? Comment faire pour que la gauche ne sombre pas à son tour dans la molle gesticulation résignée que le PS a donné à voir. Résignée. Quel néant ! N’est-ce pas Jean Marc Ayrault, président du groupe socialiste à l’assemblée qui avait lancé dans la foulée des députés Verts l’idée du boycott ? On sait quelle a été la fin calamiteuse de cet épisode. Sarkozy s’est donc promené. Les commentateurs ont dans un premier temps noté que le président n’avait rien annoncé. Je ne suis pas de cet avis. Pas du tout. Voyons plutôt la scène dans sa réalité institutionnelle. Le monsieur est venu pour la première fois, superbe et dominant, parler sans réplique devant tous les parlementaires du pays. Et que leur dit-il ? Que le modèle social républicain va passer à la trappe !. Moins d’Etat, moins de fonctionnaires, moins d’élus locaux et un bon coup de massue sur le cœur du cœur du modèle, la retraite, qui a donné lieu aux plus violentes empoignades de rue de la dernière décennie ! Il a ricané en quelque sorte : « vous avez le bonjour de novembre décembre 2005 ». Et un emprunt par dessus le marché pour payer la politique de l’Etat. Parce que l’impôt ce ne serait pas la solution. Et parce que la rigueur non plus. Quelle blague ! L’impôt paiera l’emprunt. Et la rigueur ce sera la norme tant qu ‘un fonctionnaire sur deux ne sera pas remplacé. Et ainsi de suite. Il est fort Sarkozy pour le boniment ! Et ils sont nuls ses opposants en peau de lapin ! Lisez ces pitoyables. Cécile Duflot, secrétaire national des Verts : « sur le fond il y avait peu d’annonces précises et nouvelles (…) il ne suffit pas de proclamer le changement pour qu’il ait lieu ». On se pince ! Jean Marc Ayrault : « cela fait pschitt et pschitt. On attendait un discours plus fort et ambitieux, plus concret. Il n’était pas au rendez vous » Oh la ! La ! Par amitié pour les autres je ne cite plus rien. Mais Sarkozy peut se friser les moustaches. Avec de tels adversaires pas besoin de s’encombrer d’amis !