Révélation : qui contrôle les comptes de la Cour des comptes européenne ?

La semaine prochaine sort mon livre « Le Hareng de Bismarck » sous-titre : le poison allemand. Il s’agit d’un pamphlet contre la légende du prétendu « modèle allemand » dont toute une cohorte de déclinistes et de grands esprits libéraux nous rebattent les oreilles. Le modèle, en fait, ne marche pas et la situation allemande est non seulement effroyable aujourd’hui pour douze millions de pauvres et des millions de travailleurs, mais assez noire dans un futur assez immédiat. Je vais plus loin que la seule dénonciation de l’imposture sociale et humaine à ce sujet. Je montre la cohérence du projet que contient le « modèle » en lien avec la doctrine de l’ordolibéralisme. Cette version aboutie d’un libéralisme en acier chromé sépare l’économie, vécue comme un ensemble de lois naturelles, et le politique, domaine de la frivolité et des passions changeantes. Je montre que l’hégémonie allemande vise à imposer de gré ou de force ce système partout en Europe à son seul profit. C’est-à-dire au profit du capitalisme financier embusqué derrière la petite couche de retraités par capitalisation qui est le cœur de l’électorat CDU CSU. 

Cette mise en cohérence, je la prolonge en montrant comment tout a commencé avec ce qui s’apparente à une annexion : l’absorption de l’Allemagne de l’est suivant une méthode qui a dévasté tout le modèle du capitalisme rhénan. Et je montre aussi comment cela s’articule avec une « politique du choc » à l’est de l’Europe, les fourgons de l’OTAN et les faveurs aux églises chrétiennes. Un bon concours de circonstances créé un environnement pour que le thème entre en débat. Les propos haineux de Schaüble contre la France, la révélation de l’espionnage fait sous le contrôle de Merkel pour le compte des services allemands et des USA, les brutalités répétées contre la Grèce ont fini par faire dresser les oreilles. BHL a publié une vibrante défense de madame Merkel, mais L’Humanité a sorti un super dossier sous la houlette d’un des meilleurs spécialistes de la question, Bruno Odent, à qui j’ai beaucoup emprunté. « Le Point » du 30 avril consacre cinq pages au thème de mon livre, le Monde Diplo du mois de mai fait cinq pages sur le thème (je m’empresse de souligner que ce n’est pas sur mon livre et que c’est sans concertation, cela va de soi). Et je crois que cela ne s’arrêtera pas là.

C’est un sujet qui conduira à s’interroger sous un angle nouveau sur ce qu’est devenu le projet européen, la place des nations dans l’émergence du nouveau capitalisme et, pour finir, sur le sens que nous voulons donner à notre civilisation.

Dans ce post, je raconte une journée de pagaille ordinaire dans l’hémicycle du Parlement européen et les étranges choses qui s’y votent et se révèlent à cette occasion. Un mot sur le magot des Le Pen et un autre sur les préparatifs de guerre du gouvernement Ukrainien. Et des lignes sur le désastre du nouveau record historique du chômage en France !     

L’Europe des nazes

Cette séance de vote au Parlement européen était folle. Soixante-sept rapports examinés en deux heures, certains sans amendements, d’autres en comportant des dizaines. La veille, c’était l’inverse : une petite séance à sept rapports ! On ne peut imaginer débat plus mal organisé. Pourtant, le président vient de se faire pointer du doigt pour avoir un cabinet pléthorique fort de 35 personnes ! On se demande à quoi elles travaillent ! Dans la masse des textes de ce jour-là, des piles de « décharges » données pour la gestion de toutes sortes de directions, sous-directions, et agences de toute sorte. Une sorte de reconnaissance de bonne gestion honnête. Un quitus. Le pouvoir de décharge budgétaire du Parlement devrait donc lui permettre de faire respecter par l'ensemble des institutions et agences européennes les engagements budgétaires pris. Il n’en est rien. La Commission comme le Conseil ne tiennent quasiment aucun compte des votes du Parlement, y compris quand il refuse la décharge, ce qui est pourtant une décision très grave. C'est un symptôme de l'impuissance démocratique du Parlement dans l'UE. Le résultat ne se fait pas attendre. Faute de contrôle parlementaire, l’exécutif use et abuse de tout.

Ainsi, le budget 2013 a été exécuté de manière particulièrement chaotique. En effet, cette année-là, la Commission et le Conseil ont réussi à mettre en réserve et reporter 1 milliard d'excédents. Des excédents ! Un grand bravo peut-être ? Sûrement pas. Car dans le même temps, l'UE avait accumulé… 20 milliards d'impayés. N’importe où ailleurs, on dirait de cette situation qu’il y a une dette de 19 milliards sur le dos de ceux qui attendent qu’on les paye ! On examinait donc le rapport de la députée allemande désormais bien connue des Français depuis qu’elle nous a agressés sur l’antenne de France 2. Son rapport propose de donner quitus à la Commission et à six « agences exécutives ». Une farce. Car la Cour des comptes n'a pas été en mesure de délivrer une déclaration d'assurance positive quant à la légalité et à la régularité des paiements sous-jacents aux comptes ! Une paille ! Et ce n’est pas un fait nouveau. Lisez bien : c’est la vingtième fois consécutive que cette Cour n’est pas parvenue à exercer ce contrôle. N’est-il pas incroyable que de telles méthodes soient mises en œuvre par ceux-là mêmes qui font la leçon à toutes les nations ? J’ai considéré que la légalité comme la régularité de cette exécution budgétaire étaient en cause et j’ai voté contre. Mon vote a le sens suivant : « vous avez le bonjour des Grecs » ! 

Ici règne la pagaille, l’incurie, et tous les vices reprochés aux Grecs par les faces de pierre libérales qui lèvent pourtant la main en cadence pour approuver les pires gabegies. Voyez. Voici un rapport qui se félicite des 21 avis spéciaux que la Cour des comptes publie pour éclairer un peu l’opacité du budget confié à la Commission européenne. Mais il ne tire aucune conclusion de ce que le rapport dont il se félicite dénonce. Et ce n’est pas rien. En effet, pour 2013, la Cour des comptes a relevé d’innombrables irrégularités, tant dans la gestion de la Commission que par les États. On y apprend par exemple que le système d'information Schengen 2 a été développé sans même que « les principaux responsables du projet ne connaissaient ni les spécifications techniques ni les besoins des utilisateurs lorsque le projet a démarré ». Un tel amateurisme de la part de la Commission est consternant. Aucune suite ! Imaginez que cela se constate en Grèce ou en France, quels mots trouveraient les bons esprits ? Voilà qui ne dérange pas le député français du PS Gilles Pargneaux dont le rapport propose de donner quitus pour l’exécution du budget général du Parlement lui-même pour 2013. Pourtant, il relève de nombreuses irrégularités. Ainsi le secrétaire général a refusé de répondre à toute une série de questions sur l'exécution du budget, posées par les députés. Tel quel ! Quitus ! De plus, le nouveau logo du Parlement a été choisi dans une procédure opaque dont nous ne connaissons même pas le coût. Quitus ! Le rapport s'étonne aussi du déficit des buvettes et restaurant du Parlement qui ont pourtant augmenté leurs prix et dont la fréquentation a augmenté de 150%. Quitus ! Enfin, dans sa logique de chasse aveugle et bornée aux surcoûts, ce rapport relaie les arguments anglo-saxons contre le siège du Parlement à Strasbourg. Quitus !

On donne quitus à tout et n’importe quoi. Ainsi quand arrive le plus incroyable : le rapport de Ryszard Czarnecki donnant quitus à la cour de comptes sur sa propre gestion à elle ! Accrochez-vous, c’est savoureux. En effet la certification de ces comptes est confiée à un cabinet privé de la City, étroitement lié au monde de la finance et à ses intérêts. Ce cabinet est directement mis en cause dans l'affaire Luxleaks en tant que principal artisan du système de dissimulation fiscale à grande échelle du Luxembourg. Faut-il être rassuré quand après cela le groupe précise sur son site internet qu'il a « l'intégrité » pour valeur et participe « à la lutte contre la corruption et la délinquance financière » dans le cadre de sa « responsabilité sociétale ». Comment peut-on confier la certification des comptes à une entreprise qui a été liée aux pratiques que tout le monde a condamné comme une fraude ? Et cela pour certifier les comptes de l’organe de contrôle des comptes européens. Telle est « l’Europe qui protège » !

Le magot des Le Pen : têtes basses, mains sales

Les révélations de « Médiapart » sur la fortune cachée de la famille Le Pen donne un résultat remarquable. Elle montre que cette famille est complètement insérée dans la face la plus sale du système. Il ne reste rien du discours « tête haute mains propres » ! Mon ami Corbières dissèque bien l’affaire. C’est donc un formidable point d’appui pour notre travail de démystification, pour notre combat contre l’influence de cette famille et de son parti. Pour ma part, je me félicite d’avoir mérité une assignation à procès en diffamation par monsieur Le Pen parce que je lui avais reproché d’avoir fraudé le fisc dans un post de ce blog. Marine le Pen avait, elle, assigné mon ami François Delapierre parce qu’il avait repris l’information que l’homme qui avait organisé la fraude du ministre PS Cahuzac était un très proche d’elle. L’audience au tribunal sera passionnante à suivre dorénavant !

Mais nous devons nous aussi penser à ce que tout cela nous apprend sans le dire. Comment se fait-il que des mois « d’enquêtes » du journal « le Monde » fouillant pourtant tous les aspects du lepénisme n’ait jamais approché ni de près ni de loin le sujet ? Est-ce que cela à un rapport avec la complaisance remarquée de ce journal pour « la famille » ? La question mérite d’être posée. Car il y a des précédents. On se souvient que dans l’affaire Cahuzac, déjà soulevée par « Médiapart », alors très seul, les mêmes enquêteurs zélés avaient attendu les aveux de Cahuzac pour soudain « révéler » la participation de très proches de Marine le Pen dans l’organisation de la fraude fiscale du ministre PS. Or, à l’évidence, les rédacteurs ne pouvaient l’avoir découvert dans les 48 heures… Et là ?

Ajoutons ceci. Le moment venu, nous développerons considérablement Tracfin et les moyens qui lui sont nécessaires. Mais aujourd’hui, sans nier si peu que ce soit les talents prouvés de Tracfin à fouiller en profondeur, on ne peut ignorer comment ces choses cachées viennent à jour. Le processus doit souvent beaucoup aux informations venues de l’intérieur. C’est-à-dire du réseau le plus proche de ces maniements d’argent, de lingots et ainsi de suite. En tous cas, ceux qui ont donné ces infos à Médiapart ont choisi leur média. Ce choix est instructif. Ce fut Médiapart parce qu’une garantie éthique existait que l’affaire serait sortie et suivie. Les autres supports ne leur ont pas paru fiables. Cela donne à penser, non ? D’autant que de telles informations surgissant juste après le bras de fer entre fille et père peuvent laisser penser que ceci a un rapport avec cela. Ceux qui voulaient plomber Le Pen savaient-ils que ce type d’informations ne passerait pas la barre de l’auto-censure ailleurs, compte tenu des sympathies déjà existantes ? Enfin il reste à examiner dans quelle proportion tout ceci ne va pas aider les uns à blanchir moralement les autres. Autrement dit, démasquer Le Pen père va-t-il être une nouvelle occasion de souligner les qualités de Le Pen fille ? A suivre dans la presse « bienpensante ».  

De nombreuses autres questions sont soulevées plus largement par la découverte du magot des Le Pen. Comment tout cela a-t-il pu durer tant d’années sans que nul ne s’en rende compte ni n’en sache rien ? Pourtant, cette famille est au centre de toutes les polémiques depuis tant de temps ? Y a-t-il eu quelque part un intérêt à laisser faire les Le Pen, compte tenu des services politiques rendus par la famille. Le Pen n’est-il pas par essence « le diable de confort » pour capter la colère et fortifier le deuxième tour de scrutin au profit des partis du système ?  

En réfléchissant à ce que l’on nous dit de la nature du magot des Le Pen, on devine ce qu’il doit en être de tous les autres et de la participation active des banques à ce système maffieux de vol du bien public par dissimulation fiscale. Selon une étude du « Journal Of Economic Perspectives » rapportée par le quotidien « Les Échos », 8% de la richesse mondiale, soit 7.600 milliards de dollars, sont cachés dans les paradis fiscaux. Les européens sont les premiers voyous. Ils ont placé 2.600 milliards de dollars dans les paradis fiscaux. Après eux viennent les contribuables asiatiques avec 1.300 milliards, juste devant les nord-américains et leur 1.200 milliards dissimulés. Les « particuliers » des pays du Golfe arrivent ensuite avec, à eux seuls, 700 milliards. On estime à « 190 milliards » par an la perte de recettes fiscales par les États, au profit « quasi exclusif » des personnes contribuables les plus fortunés. Cela dure depuis des années. Personne ne peut l’ignorer. Pourquoi cela dure-t-il ? Le système de la dissimulation fiscale n’est-il pas en politique une arme de chantage massif ? Le silence sur les turpitudes des Le Pen en dit long sur le sujet.

Arrogance impériale des dirigeants allemands

Cette arrogance vient encore de se manifester à plusieurs reprises depuis une semaine. Une étrange accélération qui ressemble à de la surenchère. Un signe de la tutelle qu'ils considèrent exercer sur la Commission européenne. Ainsi quand plusieurs d'entre eux ont rappelé à l'ordre le Commissaire français Pierre Moscovici pour ses prises de position internes au congrès du PS français. Le président du groupe PPE au Parlement européen, Manfred Weber, par ailleurs membre de la CSU pro Merkel, a ainsi déclaré : « que le commissaire français européen aux affaires économiques et monétaires se joigne à cet appel idéologique est une provocation ». Et il a ajouté cette phrase énigmatique : « nous attendons de lui un engagement clair pour la stabilité politique de la Commission ». Comme si le fait d'être membre d'un parti politique dans son pays d'origine était un facteur d'instabilité ? Cette expression renvoie directement à l'ordolibéralisme dont l'Allemagne impose la doctrine partout en Europe par-delà les élections. Pour les dirigeants allemands, la Commission étant un des centres d'application de l'ordolibéralisme, elle doit être étrangère à toute influence politique autre que celle de la doctrine libérale. Quoi que disent les urnes. Un autre député européen allemand, Markus Ferber a d'ailleurs parlé à propos de Moscovici de « précédent choquant ». Comme si un dogme avait été ébranlé. Bien sûr l'acte politique de Moscovici n'ébranle en rien l'édifice libéral européen. Les Allemands le savent bien, mais ils ont saisi ce prétexte pour donner à voir la laisse par laquelle ils tiennent Moscovici. Loin de leur tenir tête ou de les ignorer, Moscovici a d'ailleurs fait acte de contrition en regrettant d'avoir signé un texte dans le congrès du PS. Puis il prétendit n’avoir pas lu le texte. Enfin il alla même jusqu'à rappeler servilement que sa candidature au poste de Commissaire avait été soutenue par l'Allemagne.

La Grèce a aussi subi une nouvelle salve d'arrogance allemande. La charge était destinée à préparer le nouveau chantage fait au gouvernement Tsipras lors de la réunion de l'euro-groupe tenue vendredi 24 avril. Le commissaire européen Günther Oettinger, membre de la CDU d'Angela Merkel a ainsi accusé la Grèce de retarder les négociations. Et il a dénoncé « L'attitude peu coopérative du gouvernement grec vis-à-vis des représentants de la Troïka, qui sont actifs à Athènes ». C'est appuyer une fois de plus sur un point dont tous les dirigeants allemands savent qu'il est en tête des engagements de Syriza : ne plus subir à domicile les injonctions de la Troïka. Le rappeler est une manière de continuer à nier le résultat des élections grecques et des précédentes discussions. Et le Commissaire allemand de conclure en forme d'ultimatum : « le temps pour la Grèce arrive à expiration », « en mai Athènes sera financièrement de manière définitive au pied du mur ». La tactique allemande est toujours la même depuis que Tsipras a été élu le 25 janvier : intimider et faire pression jusqu'à la capitulation.

Cette arrogance est d'autant plus insupportable que chaque jour amène son lot de révélations sur le rôle de l'Allemagne dans la descente aux enfers de la Grèce depuis 2010. La chaîne Arte a diffusé dimanche 26 avril une enquête qui montre comment la Troïka européenne est intervenue en Grèce au profit des entreprises allemandes. 

Ceux qui avaient encore des illusions sur l'indépendance de la Commission européenne et de la Banque centrale verront à quel point elles sont enchaînées aux intérêts allemands jusque dans les détails de leur action. A ainsi été révélé qu'en l'échange d'un des premiers plans d'aide de mai 2010, la Grèce avait été forcée d'acheter des armements allemands. Et en particulier deux sous-marins pour la somme de 175 millions d'euros. Un comble pour un État au bord de la faillite. Et une preuve absolue de cynisme de l'aide européenne, dont les versements ont donc servi à acheter du matériel allemand. Les mémorandums accompagnant les plans « d'aide » ont aussi été orientés pour profiter à l'Allemagne. Ainsi la privatisation des aéroports régionaux grecs a-t-elle bénéficié pour un prix dérisoire à la société allemande Fraport dont l’État allemand est actionnaire à plus de 50 %. On mesure ici à quel point l'intérêt financier allemand est contradictoire avec l'objectif d'aider la Grèce à rembourser sa dette ! On avait déjà observé le même circuit cynique avec l'argent injecté par la Banque Centrale Européenne pour racheter des titres de dette grecque et ainsi permettre le remboursement des banques allemandes qui les détenaient !

A ces manipulations cyniques de l'aide européenne se sont ajoutées d'énormes malversations de grandes entreprises allemandes en Grèce. Mercedes et BMW ont bénéficié de fraudes massives à la TVA sur les grosses cylindrées. Cela a facilité leurs ventes en faisant perdre une somme estimée à 600 millions d’euros à l'Etat grec. Des pots de vin versés pour l'obtention d'un contrat de télécommunication pour la firme Siemens ont aussi alimenté un vaste système d'évasion fiscale et de blanchiment. Les responsables de ces fraudes sont aujourd'hui protégés par le gouvernement allemand qui refuse de les extrader ou même juste de transmettre les listes de fraudeurs au gouvernement grec. Que savons-nous de tout cela dans la grande presse française ? Rien. Rien sinon le cynisme consternant de « Libération », presse vautour, qui titre sur « les cent jours qui n’ont pas changé la Grèce ».

L'Ukraine prépare la guerre

Le président ukrainien a été reçu par François Hollande. Le président français aurait pu profiter de cette rencontre pour évoquer avec Porochenko les crimes d'Odessa, toujours impunis, ou encore la nomination de Dimitri Yarosh leader de « Secteur Droite », milice paramilitaire néo-nazie, comme conseiller spécial du chef d’état-major de l’armée ukrainienne. Il n'en a rien été. Et dans la conférence de presse commune à l'issue de l'entrevue, Porochenko déclare même avoir reçu un accueil « chaleureux et amical ».

On apprit au cours de cette conférence que la coopération bilatérale entre la France et l'Ukraine serait « bien engagée ». Porochenko demande ainsi l'aide de la France pour mener à bien les privatisations entamées dans les principaux secteurs de l'économie ukrainienne, citant l'expertise de notre pays dans les domaines du transport et de l'industrie. Bref il propose à la nomenklatura française de prendre sa part au pillage et d’entrer dans le système de l’oligarchie locale.

Et les livraisons d’armes ? Rien à craindre, titre Le Monde hâtivement : « La France ne livrera ni Mistral à la Russie ni armes à l'Ukraine ». Faux. Certes, la livraison du Mistral à la Russie n'est pas à l'ordre du jour. Mais le domaine militaire fait bien partie des secteurs de coopération avec l'Ukraine ! Porochenko l'a rappelé le soir même sur « I Télé ». Il n’y a peut-être pas de stagiaires au « Monde » pour compléter, en regardant la télé, les articles écrits d’avance sur la base des éléments de langage officiels. En fait il y aura donc bien une livraison d'armes. Mais des armes « non létales », prétend François Hollande. Des armes qui ne tuent pas… Pourquoi pas ? Quoi qu'il soit, via la coopération militaire Hollande engage la France dans une nouvelle aventure guerrière

Car dans le même temps 300 parachutistes états-unien viennent d'arriver en Ukraine, pour entraîner, tenez-vous bien, la « garde nationale ukrainienne » formée des milices néo-nazies auto-constituées lors des évènements de Maiden. J’avais annoncé cette arrivée dans ce blog. Quelques belles consciences m’avaient reproché « d’affirmer sans preuve ». Une façon de me démentir. Ce n’est pas la première fois. Mais cette fois-ci encore on peut vérifier que mes informations sont bonnes. Les milices en question comprennent les bataillons Donbass, Azov, Aidar, Dniepr-1, Dniepr-2,… qui sont désormais célèbres pour leurs exactions. Azov a pour emblème le fanion de la division SS « Das Reich » qui martyrisa la population sans défense d’Oradour sur Glane avant d’être exterminée par l’Armée rouge. Sont-ils instruits pour apprendre à ne plus violer le cessez-le-feu comme c'est le cas depuis les dernières semaines ? Je ne crois pas. D’ailleurs Porochenko annonce s'attendre à « une dégradation du processus de paix à partir du 9 mai ». Imaginez que Poutine ait fait une déclaration pareille… En fait Porochenko annonce qu’il va reprendre ses provocations à partir du 9 mai, jour de l’anniversaire de la capitulation des nazis devant l’armée rouge. Ces gens-là fonctionnent avec un mythe de la revanche qui nous perdra tous ! 

Marée noire sociale

Les chiffres du chômage en mars dessinent une nouvelle étape du désastre social en cours. Un nouveau record historique est battu. Terrifiant. Davantage de chômeurs sans aucune activité : 3,5 millions, davantage de chômeurs de toutes catégories : 5,6 millions. Bref davantage de tout : chômeurs de moins de 25 ans, seniors, chômeurs longue durée… Tous les signaux sont négatifs. Pitoyable, le ministre du travail, François Rebsamen, voit pourtant une « phase d’amélioration de la tendance ». Misérable langage technocratique ! Un million deux cent mille personnes n’ont pas eu de salaires depuis deux ans, plus de sept cent mille n’en ont plus depuis trois ans. Ces délais allongent ceux du retour au travail dans les conditions actuelles.

De notre côté, n’oublions pas ce que les chiffres veulent dire. Ce ne sont pas seulement des quantités qui sont indiquées. C’est un état du quotidien, un état de la vie de la société. La masse de travail perdue veut dire des millions de choses utiles qui ne sont pas faites. Des millions de gens détruits à petit feu par l’angoisse du lendemain, les soins reportés, les privations de toutes sortes. La moitié des chômeurs n’ont aucune indemnité. La politique d’asphyxie déclenchée par l’application des traités européens et la surveillance allemande sur tous les Etats de l’Union n’ouvre aucune perspective d’une quelconque amélioration.

Un rapport sur l’évolution de cette situation du fait du vieillissement de la population active en place souligne l’impasse. En effet cela devrait libérer huit cent mille postes de travail par an. Une aubaine. Mais cela ne permet d’envisager qu’un retour à 8% de chômeurs dans le cas le plus favorable ! Et cela en 2022 ! Mais dans le scénario où demeurerait un taux de croissance aussi faible que celui d’aujourd’hui, il y aura encore 10 % de chômeurs ! Tout cela non seulement parce que l’activité ne se développera pas, mais parce que la masse des seniors candidats au travail va augmenter du fait de la mise en application du report de l’âge de la retraite ! Ce point va conduire à une augmentation de plus d’un million de personnes. De la sorte, « la population active », ou susceptible de l’être, battra alors un record avec 29 millions de personnes dont une quasi moitié de femmes. Mais le désemploi sera à son zénith numérique ! Bonjour le modèle de société !    

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