nicole belloubet

06.06.2018

Vous n’auriez pas dû, madame Belloubet

Je vous connais. Vous étiez rectrice. J’étais ministre. Nous étions membre du PS tous les deux à l’époque. J’ai choisi mon camp et vous aussi. Mais vous voilà préposée aux besognes judiciaires équivoques contre les opposants au régime. Vous avez donc gardé pour vous depuis le 18 mars qu’un signalement contre mes comptes de campagne avait été fait. Un parlementaire président de groupe ne méritait pas la courtoisie d’être informé. La monarchie présidentielle repose aussi sur ces mesquines aiguillades. Bien sûr, vous n’avez rien signalé à propos des faveurs dont a bénéficié votre candidat. Depuis, le monarque règne. L’audace n’est pas dans votre rôle. Puis vous êtes restée dans ce silence complice des grands qui regardent s’agiter le petit personnel des coupe-jarretst. Les services concernés qui sont placés sous votre autorité ont donc alerté la presse quand vous avez jugé cela opportun pour créer par surprise un évènement à charge contre moi. Passons. C’est si banal de voir abuser du pouvoir. Vous devez justifier votre nomination et cotiser à la ratatouille macroniste. Je dis ce que j’ai à dire ailleurs sur ce post.

Mais une autre affaire est sur la table qui engage votre responsabilité et autorité personnelles. Et peut-être aussi ce qui reste de votre conscience de femme de gauche si vous en avez conservé des souvenirs. Curieusement, cette affaire a connu un rebondissement dont j’ai été informé au moment même où démarraient les dénonciations médiatiques contre moi. Peut-être avez-vous espéré que je sois distrait de l’une par l’autre ?

Mes lecteurs savent que je me suis porté partie civile dans l’affaire des gens d’extrême droite qui avait organisé un complot pour nous tuer monsieur Castaner, votre collègue, et moi. J’ai déjà été reçu par la procureure en charge du dossier. Mon avocat dans cette affaire, maître Juan Branco, a déjà déposé des demandes d’actes à faire pour éclairer la cause. Vous avez alors décidé de demander mon expulsion de la partie civile. Sans nous en informer. Le magistrat du parquet l’a fait en votre nom. C’est extraordinaire. Votre demande a été rejetée. C’est extraordinaire. Vous faites appel. C’est encore plus extraordinaire.

Que voulez-vous m’empêcher de savoir ? Je ne dois pas savoir pourquoi monsieur Colomb a affirmé que j’avais été « surveillé » par la DGSI comme il l’a imprudemment dit à la radio ? Vous voulez m’empêcher de savoir si c’est vrai ? Et dans ce cas, si on peut surveiller – de quelle manière – le président d’un groupe d’opposition sans le prévenir ? Et si c’est faux, pourquoi ne m’avoir informé ni du complot ni de l’arrestation de son chef ? Ni de l’enquête qui a duré quatre mois avant l’interpellation de neuf autres complices de cet homme ? Vous voulez m’empêcher de savoir pourquoi votre gouvernement a refusé ma protection à la même période où il arrêtait une personne qui comptait me tuer ? Et pendant une période où il téléphonait depuis sa prison pour demander à ses complices de continuer le plan prévu pour qu’il « ne soit pas en prison pour rien ». N’avais-je pas déposé une plainte pour menaces de mort à Marseille dès le mois de mai 2017 ? Pourquoi n’est-elle pas dans le dossier ? Pendant quatre mois ses complices dans le complot étaient en liberté et je n’en ai rien su. Je n’ai donc pu organiser aucune protection particulière.

À une époque où un journaliste de L’Express peut donner votre adresse sur Twitter comme cela vient de m’être fait, vous pensez que mes précautions ne valaient pas la peine ? Qui êtes-vous pour le décider ? On me dit à propos des dix membres du commando qui comptaient nous tuer : « ils ont déclaré avoir renoncé au projet ». Vous pensez sérieusement qu’ils allaient vous avouer avoir prémédité deux meurtres et les avoir préparés pendant des mois ? S’ils y avaient renoncé, pourquoi alors avaient-ils organisé des exercices de tirs dans les bois ? Pourquoi ont-ils recherché sur internet comment fabriquer un lance flamme et des grenades ? Pourquoi ont-ils surveillé des jours durant Castaner dans le projet de l’égorger ? Des gens capables d’un tel projet ne doivent-ils être pris au sérieux ?

Peu importe ce que vous croyez, vous et la bande pieds nickelés qui vous entoure sur ce dossier. Je ne vous reconnais pas le droit d’estimer que je ne valais pas la peine d’être protégé. Ou bien de l’avoir été sans en être informé. Par la DGSI ! Vraiment madame Belloubet ? Quel magistrat a décidé cela ? Vous faites surveiller d’autres personnalités politiques actuellement par la DGSI ? Que voulez-vous me cacher ? J’ai demandé d’accéder aux notes de la DGSI sur ma protection et celles sur les informations recueillies qui ont conduit à décider d’interpeller le chef du commando. Sa détention depuis maintenant un an fait penser que ce sont des motifs sérieux. Lesquels ? Pourquoi ne voulez-vous pas que je le sache ? Pourquoi n’avez-vous tenu aucun compte du fait que le commando comptait aussi s’attaquer à des mosquées. Lesquelles ? Pourquoi ne pas les avoir prévenues ? La DGSI les a-t-elle aussi « surveillées » ?

Madame Belloubet, pourquoi tout cela ? Pourquoi ce refus de me protéger alors que vous enquêtiez sur une menace contre laquelle j’avais porté plainte ? Pourquoi ce refus de m’informer de cette menace alors même que neuf complices courraient encore ? Le refus de me voir partie civile jusqu’au point de faire appel après un refus ? Juste pour bloquer la procédure sur les actes d’enquête que j’ai demandé ? Parce que les groupes d’extrême droite ne font pas partie des préoccupations de votre gouvernement ? Pourquoi cette inertie en dépit des alertes à la violence que nombre de personnes et d’associations ont déposé à leur propos comme à l’occasion des évènements à l’université de Montpellier ou de l’occupation d’une frontière en montagne ? Que se passe-t-il ? Pourquoi ce zèle unilatéral à propos de signalements sans objet et cette indifférence à propos de commandos violents ?

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