12 millions de Français ont froid chez eux ou peinent à payer leurs factures. C’est-à-dire près d’un Français sur 5. Les insoumis ont donc décidé de faire quelque chose pour aider les associations et la Fondation Abbé Pierre à faire venir ce fléau sur le devant de la scène. Car tout s’aggrave à présent. Cela est directement lié à la flambée des prix de l’énergie et à l’appauvrissement général du pays provoqué par Emmanuel Macron. Nous avons donc déposé une proposition de loi reprenant l’essentiel de ce que demandent les associations à l’occasion de la première journée nationale de lutte contre la précarité énergétique. Elle vise à « abolir les coupures et garantir un droit d’accès inconditionnel à l’énergie. » Elle comprend l’abolition des coupures d’électricité comme de gaz et la limitation des réductions de puissance. À cela s’ajoute la gratuité totale des quantités d’énergie indispensables à une vie digne.
Proposition de loi présentée par Jean-Luc Mélenchon et le groupe parlementaire La France insoumise
Exposé des motifs
La première journée nationale contre la précarité énergétique a été fixée au 10 novembre 2021. Elle est coordonnée au niveau national par la Fondation Abbé Pierre et co-organisée par 20 organismes impliqués dans la prévention de la précarité énergétique. Les associations mobilisées proposent un service minimum de l’électricité. Concrètement, une puissance minimale serait fournie tout au long de l’année à toutes les résidences principales, quelle que soit la situation financière des ménages. Le coordinateur de cette action explique : « Cela permettrait aux ménages
d’avoir accès à la lumière, à un frigo ou un congélateur pour conserver des aliments, de charger un téléphone ou utiliser un ordinateur. Des choses basiques ». Concrètement, cela signifie abolir les coupures toute l’année. Nous nous faisons le relai de cette proposition d’intérêt général et nous en étendons l’esprit dans diverses directions sur le sujet.
En effet, en France, la précarité énergétique est un fléau majeur. Elle est d’autant plus impactante qu’une résidence principale sur six est une passoire thermique. L’augmentation des prix de l’énergie produit alors d’importantes répercussions sur la vie quotidienne de millions de Français. Récemment, une étude montrait comment 60 % des Français réduisent le chauffage en dessous du niveau de confort pour tenter d’alléger leurs factures. Au total, 12 millions de Français ont froid chez eux ou peinent à payer leurs factures.
Dans ce contexte, en 2019, près de 300 000 foyers ont subi une coupure d’électricité ou une réduction de puissance en raison de factures impayées. En comptant les coupures de gaz, il y a eu au total plus de 670 000 interventions en 2019. Le directeur des études de la fondation Abbé Pierre, Manuel Domergue, décrit bien les conséquences de coupures d’électricité sur la vie quotidienne : « vous n’avez plus les moyens de vous chauffer si vous avez un chauffage électrique. Vous ne pouvez plus vous éclairer. On ne peut même pas faire des démarches pour chercher du boulot, pour essayer de contacter les travailleurs sociaux. Pour les ménages qui les subissent, c’est une humiliation et une source d’angoisse. Pour ceux qui les craignent, c’est une épée de Damoclès ». Sachons-le : bien que les coupures soient interdites durant la trêve hivernale, les réductions de puissance conduisent tout de même les personnes concernées à faire des choix cruels : la lumière, le chauffage ou la machine à laver.
Ainsi, on voit combien l’électricité est plus que jamais un bien de première nécessité. Or la situation menace aujourd’hui d’empirer sous l’effet de la crise économique et de la déflagration sociale qu’elle entraîne. Les impayés risquent de s’accumuler et le nombre de coupures vont se multiplier en conséquence.
La question de l’accès à l’Énergie montre comment la pauvreté n’est pas un phénomène purement « monétaire ». Au contraire, cette dernière englobe tous les aspects de la vie.
Pour éradiquer la pauvreté, il faut rendre effectifs les droits universels. L’accès à l’énergie en fait partie. Allonger temporairement la trêve hivernale n’est pas une solution à la hauteur des enjeux. Le chèque énergie s’avère désormais un outil insuffisant. Il faut donc aller plus loin. Les coupures d’électricité comme de gaz doivent être abolies et les réductions de puissance limitées. La gratuité totale des premiers kilowattheures indispensables à une vie digne, tout comme les m3 vitaux de gaz ou encore d’eau, est aussi une priorité.
Ce droit inconditionnel d’accès à l’énergie peut être financé par les fournisseurs d’énergie comme Engie ou Total. Ces dernières ont versé cette année respectivement 1,3 et 7,6 milliards d’euros à leurs actionnaires. Du fait de l’envolée des prix de l’énergie, Total a même multiplié ses bénéfices par 23 en un an. À terme, la création d’un pôle public de l’énergie permettra d’économiser de telles sommes afin de garantir le droit fondamental d’accès à l’énergie.
L’article 1er instaure une première tranche gratuite de consommation d’électricité, de chaleur et de gaz.
L’article 2 abolit les coupures d’électricité et limite les réductions de puissance.
L’article 3 compense la perte de recettes pour l’État résultant des articles 1 et 2 par un relèvement de l’impôt sur les sociétés.
PROPOSITION DE LOI
Article 1er
Après le premier alinéa de l’article L. 115-3 du code de l’action sociale et des familles, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Il est instauré une première tranche gratuite de consommation d’électricité, de chaleur, de gaz appelée : “tranche de consommation de première nécessité”. Le niveau de cette tranche est fixé par décret en Conseil d’État, en tenant compte notamment de la composition familiale. »
Article 2
Le troisième alinéa de l’article L. 115-3 du code de l’action sociale et des familles est ainsi rédigé :
« Les fournisseurs d’électricité, de chaleur, de gaz ne peuvent procéder, dans une résidence principale, à l’interruption, y compris par résiliation de contrat, pour non-paiement des factures, de la fourniture d’électricité, de chaleur ou de gaz aux personnes ou familles. Les fournisseurs d’électricité ne peuvent procéder à une réduction de puissance ne garantissant pas des conditions convenables d’existence. Un décret définit les modalités d’application du présent alinéa. Ces dispositions s’appliquent tout au long de l’année aux distributeurs d’eau ainsi que, pour les consommateurs mentionnés à l’article L. 124-1 du code de l’énergie, aux fournisseurs d’électricité, de chaleur et de gaz. »
Article 3
La charge pour l’État est compensée, à due concurrence, par le relèvement du taux de l’impôt sur les sociétés.